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L'ILE D'OUESSANT

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OUESSANT, BASTION DU ROYAUME DE FRANCE.

Perdue dans l'immensité de l'Océan, gît « sous les 48 degrez 27 minutes de latitude et 13 degrez 20 minutes de longitude » (Archives du Service historique de l'Armée, Mémoires et reconnaissances, 1085-5) une petite île. Cette terre se nomme Heusaff, Eusa ou Ouessant. Pour les uns, ce rectangle d'une grande lieue et demie de longueur sur une demie de largeur est le pays de l'épouvante. Pour d'autres, les landes dorées, le vent hurlant, le ciel gris, semblent le paradis de la solitude.

Plan de l'île d'Ouessant (1771-1785)

Quoi qu'il en soit, l'île d'Ouessant garde l'entrée de la Manche et veille sur la rade de Brest. « Tous les bâtimens qui naviguent dans cette partie viennent la reconnaitre. La nuit ils sont dirigés par un feu entretenu dans l'isle. Un des avantages qu'on retire de sa position est d'avertir Brest, au moyen des signaux qui sont répétés à Molène et à Saint-Mathieu de tous les bâtimens qui entrent et sortent de la Manche » (Ibid., Mémoires et reconnaissances, 1092-54).

Il était donc important de conserver la maîtrise de cette terre. C'est pourquoi, au cours des siècles, elle fut toujours plus ou moins occupée militairement. Au XVIIIème siècle, tandis que les Anglais multipliaient leurs expéditions, il devint nécessaire de tenir fortement Ouessant, afin qu'elle ne soit pas conquise au passage. La nature favorisait aussi beaucoup sa défense. « Il faut être pratique du pays ou hazarder beaucoup pour y tenter un débarquement on a souvent vu les Anglais faire des descentes à l'île de Molene, qui leur offrait de légères ressources et n'oser approcher d'Ouessant qui eut été pour eux un objet très conséquant. Les courants sont violents, la côte fort escarpée et bordée de rochers » (Ibid., Mémoires et reconnaissances, 1092-54).

Mais si les approches de l'île étaient particulièrement périlleuses, en revanche la baie de Porspaul à l'Ouest et celle de Beninou au Nord, possédaient des mouillages où les vaisseaux pouvaient être à flot. Le meilleur mouillage, celui du port du Stif, à l'Est, au fond uni, de sable blanc et fin, fut rapidement repéré. Le chevalier de Tourville, dans une lettre au marquis de Seignelay, datée du 1er septembre 1681, a vu cette baie où il trouve « qu'il seroit asses facile de faire un port ». Delavoye y avait pratiqué des sondages avant la venue de Tourville et, dans un mémoire du 8 septembre 1681, il précise, qu'étant donné la position d'Ouessant « ... si sa maïesté y pouvait tenir une escadre de vaisseaux en tout temps rien presque ne passeroit qu'il ne fut veü et recogneü ; mais de mauvais temps cela est impossible à moins que sa maïesté ne voulut tenter de faire un mole dans le port du Stif qui est le lieu le plus propre pour ce sujet, lequel prendroit depuis la pointe de pierre meur, iusques le travers de la pointe de Benilis et pourroit contenir une escadre de dix huict ou vingt vaisseaux » (Archives du Génie, art. 8, n° 2). L'idée de la construction de cette immense jetée ne fut pas poursuivie.

On se préoccupait cependant d'Ouessant. Le 20 août 1685, une description de l'île fut rédigée : « ... Le païs est haut et eslevé, mais assez uny et d'un aspect agréable, il y croist du seigle de lorge et de l'avoine et des légumes en abondance et elle a de l'eau douce partout, mais il ny a ny froment ny foing ny vignes ny bois ny aucun arbres fruitiers de quelque nature, qu'ils puissent estre ce qui n'empesche pas qu'elle ne soit bien cultivée et qu'il ne s'y trouve quantité de bestail comme chevaux vaches porcs moutons et quantité de volailles, on ny voit ny mullets ny bourriques et pour tout gibier il y a quantité de cailles dans la saison et quelques lapins, le surplus consiste en oyseaux demer dont les environs de l'isle foisonnent » (Archives du Service historique, Mémoires et reconnaissances, 1085-5). 1285 personnes réparties en 296 feux peuplaient Ouessant à cette époque. On comptait 250 hommes environ en état de porter les armes « assez bons, grands et bien faits, tous bonnes gens de mer ». Une grande pauvreté régnait parmi cette population. On n'aurait pas trouvé alors une demi-douzaine de lits dans l'île : « Tous couchent sur la paille ou sur la terre à peine ont ils une méchante couverture et fort peu ou point du tout de meubles, pas même de la vaisselle de terre ». Les de Rieux, marquis de Sourdéac, en faveur de qui Henri IV avait érigé Ouessant en marquisat en 1595, n'en tiraient même pas 800 livres de rente. Trois maréchaux, un cabaretier, un serrurier, neuf ou dix maçons et quelques tisserands composaient les corps de métiers indispensables aux insulaires.

Tout le reste du peuple s'adonnait à la culture, à la nourriture des bestiaux et à la pêche, laquelle fournissait peu. « Quelques uns vont chercher leurs journées à la terre ferme, fort peu vont au loing à la mer ny ayant aucun commerce dans l'isle ny pas un habitant qui soit en estat d'en .... (Mot illisible) pas même de fretter une barque ». Par contre, les impôts pleuvaient, « tous les foüages ordinaires et extraordinaires et les garnisons et l'impost des cabarets, tout ainsy qu'on le paye dans les autres parroisses de la Bretagne ». De plus, les hommes étaient soumis aux classes de la Marine « et à faire reglément guet et garde à la coste ce qui achève de les ruiner d'une part et les expose extrêmement de lautre, car il y a des temps qu'il ny a pas soixante hommes dans l'isle, qui de cette façon n'est guerre deffendue que par la difficulté de ses accès et par l'extrême pauvreté de ses habitans » (Archives du Service historique, Mémoires et reconnaissances, 1085-5).

Triste sort que celui de ces gens qui, sans médecin, sans apothicaire, sans autre soutien spirituel que celui de deux prêtres desservant l'église et les six chapelles de l'île, faisaient eux-mêmes leur farine (car les trois moulins à vent ne suffisaient pas) en écrasant le seigle avec une pierre granuleuse ce qui le rendait désagréable à manger, et se chauffaient, assis par terre, en brûlant des mottes de terre séchées et des chaumes ou esteules !

Mais l'extrême pauvreté ne suffit pas toujours pour se défendre. L'ennemi pouvait être tenté de ravager l'île comme en 1388. Il fallait songer à la fortifier. Toujours dans le courant de l'été 1685, Vauban, après avoir remarqué que tous les sondages et projets de 1681 étaient fort justes, après avoir lui-même établi les plans et profils d'une jetée au Stiff se prononça contre la construction d'un grand port dans cette baie, à cause de son peu d'utilité et de la grandeur de la dépense. Il proposait l'établissement d'une tour et d'une batterie de cinq à six pièces sur la pointe de Loslogot, (baie du Stiff), une autre sur celle du Calgrach (baie de Beninou), une troisième sur la pointe de Peniglou, un fanal avec une batterie fermée à la pointe du Porsclas à cause des deux petits mouillages situés de part et d'autre, un fort ou batterie de huit pièces de canon sur le rocher de Corset qui défend la rade de Porspaul et une autre de trois pièces, avec corps de garde, petit magasin à poudre, citerne, parapets de maçonnerie avec créneaux pour la mousqueterie, hangars pour l'armement. « Cette dépense iroit a peu de chose, et trente hommes de garde dans les temps dangereux tiendroient les vaisseaux dans la rade et l'Isle en sureté. Des fregattes de moyenne grandeur pourroient louvier dans l'entrée de la rade de Corse ou il y a six ou sept eschoüages grands et spacieux et ou il seroit difficile à ceux de l'Isle de pouvoir s'opposer autrement que par ce fort qui estant inaccessible de luy même empescheroit facilement et d'une manière avantageuse l'entrée de la rade et toutes ses descentes » (Archives du Génie, art. 8, n° 3). Comme, la plupart du temps, on ne trouvait dans l'île que des femmes et des pêcheurs, les hommes valides étant sur les bâtiments du Roi ou sur le continent, il importait de fortifier un peu mais point trop, de façon à ne pas provoquer l'ennemi.

Quels travaux furent donc exécutés parmi ceux qui avaient été proposés ? Un grand fanal s'éleva en 1695 à la pointe de Béol dominant la baie du Stiff. Le très beau plan de 1736 nous donne l'élévation de la « tour ou est estably le rechau » (Ibid., n° 5, art. 8). 

Tour ou Phare d'Ouessant

Les différentes batteries furent construites de même qu'un petit bassin à Porspaul mais non le petit fort de la baie de Corse dans l'îlot. On y suppléa en truffant la côte de canons. Cependant comme on craignait plus que jamais vers 1756 les descentes des Anglais guidés par les matelots ouessantins prisonniers en Angleterre, comme les habitants, accablés d'impôts, n'auraient pas été malheureux de passer sous une domination étrangère laquelle leur faisait lancer des billets dans des bouteilles pour les rassurer, le duc d'Aiguillon, après une visite dans l'île, demanda la présence permanente de 200 hommes de troupe, la construction de nouveaux ouvrages, et l'approvisionnement des batteries (Ibid., art. 8, nos 7-6). Les soldats ne pouvant loger dans les cabanes des habitants ni sous la tente (elles auraient été déchirées en un instant par la violence du vent), il convenait de pourvoir à leur établissement.

Le 1er août 1756, Le Beuf, dans un mémoire détaillé, projetait d'installer cent hommes dans une église abandonnée et de construire une baraque pour les cent autres. Le commandant devait loger chez le gouverneur, quatre officiers dans des chambres louées, quatre autres dans une maison servant de magasin pour l'artillerie (Ibid., art. 8, n° 8).

Enfin, lits, bois, et tout ce qui était nécessaire à la subsistance de la troupe devaient être apportés de Brest. A ce sujet, il existe une correspondance entre l'intendant de Bretagne, Capet, le commissaire des guerres, et Hocquard, l'intendant de la Marine. En fait, en 1759 les détachements du régiment de Berry ou du Royal des Vaisseaux (240 hommes en tout), qui gardaient l'île, logeaient dans l'église Saint-Paul, abandonnée, située en face du Gouvernement (41 lits), dans la chapelle de Saint-Nicolas (5 lits), dans celle de Saint-Pierre (14 lits), de Saint-Hilarion (6 lits), à la maison de Doulon (14 lits) : soit 80 pour 240 soldats. Deux officiers cantonnaient au Gouvernement, un chez M. Keralin, trois à Poulbrac, deux ou trois au grand magasin, un au petit pavillon. « Le four pour la troupe est a Kgadou (Knigou) et la boucherie qui est par entreprise est dans le bourg ; le boulanger et le boucher sont obligés de fournir le pain et la viande à l'officier il faut faire venir du continent les bœuf ou vaches pour la troupe jusqu'au mois de juillet, les bestiaux de lisle étant d'une maigreur étonante jusqu'à ce tems. L'hôpital est établi à la chapelle Saint-Michel ou il y a 15 lits pour les malades, le chirurgien y est logé et y a touttes les petites commoditées qui lui sont nécessaires. Le corps de garde de police est acoté de la grande église qui sert de caserne, la prison est dans la sacristie. Il y a 5 autres corps de garde placé dans lisle, un a rochesclet, a penarmindu, a la pointe de beol, au port darlan et à Saint Guenolet » (Archives du Génie, art. 8, n° 12). Autrement dit, les trois mouillages possibles, baie de Corset ou de Porspaul, baie de Beninou, baie du Stiff, étaient constamment surveillés.

Faisant le tour de l'île en cette année 1759, voici ce que l'on pouvait rencontrer en matière de défense : tout autour de la baie de Corset ou de Porspaul s'échelonnaient : la petite redoute de la pointe de Penenvillers qui couvrait les canonniers servant une pièce de 6l., deux pièces (36l. et 24l.) entre cette pointe et Pongoret, deux de 12l. dans le fond de l'anse de Porsgoret avec un retranchement en terre pour couvrir le chemin de Saint-Guegnolet en cas de descente, quatre batteries (dont Porsguen et Porsarfeunten), deux batteries de deux pièces à Saint-Nicolas. L'anse de Porspaul et celle de Porsnouan étaient défendues par un retranchement et deux pièces de 8l.. Le Nord de la baie, quasiment inaccessible, comprenait de petits retranchements, construits par les gens du pays, et quelques canons de 12l. ou de 6l. à Rochesclet, Rocrum, Porskers, et Pern. Un débarquement aurait été difficile devant le déploiement d'une telle artillerie, mais certains regrettaient tout de même l'absence de mortiers sur le petit îlot du centre de la rade. La plus grande partie de la côte sud étant hérissée de rochers et d'un abord très difficile, aucune batterie n'y avait été installée jusqu'à l'anse de Porscoen. Seul, Porsalesun avait un bon fond, « mais il n'y a qu'un petit chemin ... ou un homme ne peut monter ny descendre sans beaucoup de précaution ; 8 ho. qui se promenerait sur cette côte la deffendraient contre touttes les forces d'angleterre » (Ibid., art. 8, n° 12). Néanmoins, l'anse de Porscoen, un peu plus loin, qui possédait un bon mouillage était défendue par une pièce de 6l.

En continuant de se diriger vers l'Est, après avoir dépassé une côte très escarpée, on rencontrait, l'anse du Porsarland, protégée par quatre pièces de 8l, servant aussi pour les signaux. De cette petite rade jusqu'au port du Stiff, c'est-à-dire tout autour de la lande de Penarland, la mer est mauvaise, bourrée d'écueils, la côte est impraticable, sauf en arrière des rochers de Bramin où les Ouessantins amarraient leurs bateaux quand rentrant de la grande terre, le port du Stiff leur semblait trop agité. Mais les deux petits sentiers qui montaient de cette anse étaient surveillés depuis Porsarland, comme de la pointe de Becrum Arveoch (une pièce de 8l.) ou de celle de Beneulic (une pièce de 6l.). Plus loin, surgissait la baie du Stiff où les étrangers venaient « pour faire de l'eau » : mer calme sauf par vents d'E. N. E. mais on ne pouvait aborder qu'une chaloupe après l'autre. Une pièce de 6l. et une de 12l. à la pointe de Loslogot suffisaient pour assurer sa protection. Le fond du port était fermé par une muraille et une banquette avec barrière. Porslegoudou, juste à côté, où les gens du pays mettaient quelques petits bateaux à sec pendant l'hiver est terriblement escarpé et on ne pouvait, à l'époque, gravir le rocher qu'avec beaucoup de difficultés et de précautions. Un coup de pioche aurait rendu le passage impraticable.

Passant sous le fanal de la pointe de Béol, on longe une côte inabordable « jusqu'à la pointe de Penarmindu » où se trouvait une batterie de 6l. défendant les approches de la baie de Beninou et l'île de Keller. Une pièce de 8l. protégeait le fond de cette baie aux eaux souvent calmes, tandis qu'une autre, à Porspillier, et une troisième, à la pointe du Calgrach, balayaient complètement ce mouillage. En admettant que l'île de Keller ait été occupée par l'ennemi, on jugeait impossible, à cause des courants violents et des rochers, que celui-ci puisse prendre pied à Ouessant le long de la côte nord, à moins que de petites barques abordent l'une après l'autre dans de petits recoins entre des rochers dont l'aspect seul épouvantait. On ne pouvait vraiment songer à une attaque au milieu de conditions naturelles aussi hostiles. C'est pourquoi, deux batteries seulement défendaient l'anse Dousin, dont le fond était sableux. Jusqu'à la pointe de Pern, la côte semblait déserte, hormis de minuscules retranchements.

Au total, 36 canons servis par 169 hommes défendaient Ouessant pendant la guerre de Sept Ans ; c'était peu. « Si les Anglais ont une grande volonté de prendre cette isle, écrivait l'auteur d'un mémoire, qu'ils y envoie de 4 à 5 mils hommes qu'ils soient favorisé par le vent et la maré, ils s'en empareront ny ayant pas asses de monde pour si deffendre ; s'ils n'ont pas un dessein formé, qu'ils agissent molement ou qu'ils soient contrarié par le vent ou la maré, ils ny réussiront pas et le peu de monde qui y est actuellement suffit » (Archives du Génie, art. 8, n° 12). Comment était organisée la défense ? « Chaque pièce a son chef canonier qui a le nom de ceux qui lui sont subordonné et qui sont habitans des maisons les plus voisines des batteries ; ces mesmes canoniers doivent aussi estre armée de fusil, dont ils pourront se servir si leurs canons n'est pas nécessaire ... indépendamment de cella il y a trois chefs canoniers entretenus dans lisle qui se porteront aux différents points d'attaque ..., en attendant ils exerce tous les dimanches et fêtes les canoniers par brigade a l'exercice du canon. Il y a dans lisle plusieurs vieillard intelligent qui n'ayant pas la force dagir comme les autres sont destiné a observer les environs des différents endroits qui leur sont assigné, et ont avec eux 4 garçons, filles ou femmes qu'ils doivent menvoier porter la nouvelle de ce quils voient et envoieront en meme tems a la petite troupe la plus apporté du lieu où il sera si le cas est urgent ; ces petites troupes seront composé de 30 soldats et 30 paisans qui ne sont pas armés sur les batteries ils seront commandé par un capitaine un lieutenant et deux sergent qui seront séparé dans les 4 parties de lisle et qui se rassembleront suivant lordre que je leur donnerai (c'est probablement le commandant qui a rédigé le mémoire) dans un même point avec le reste des troupes pour attaquer celles qui seront débarqué en quel nombre quelles soient. Des 210 hommes des troupes qui restent, 120 se porteront quand je leur dirai derrière Saint-Guenolet et les 90 h. au moulin de Colin au dessus du bourg. Tout le monde doit se trouver au poste qui lui est indiqué lorsqu'on tirera un coup de la coulevrine qui est à Saint-Michel » (Id.).

En état d'alerte constante, guettant l'ennemi nuit et jour, les Ouessantins n'en continuaient pas moins à pêcher, à faire du commerce avec la grande terre, le continent, à bord de leurs 4 bateaux et de leurs 14 canots (Archives du Service historique, Mémoires et reconnaissances, 1088-5). A l'ombre des ailes de leurs moulins (4 grands, 32 petits), ils cultivaient leurs champs, battus perpétuellement par le grand vent du large. La population était stable : 315 ménages pouvant fournir 260 hommes en état de porter les armes habitaient dans l'île en 1759. Leurs petites cabanes basses se rencontraient presque à chaque détour des chemins : habitat dispersé car l'eau douce abonde partout. Seules, les côtes hostiles étaient désertes. Les champs, toujours petits, créaient un paysage varié par leur alternance, tantôt orge ou seigle, tantôt pois, fèves et navets. Parfois des pâturages très maigres nourrissaient des vaches et des chevaux de la plus petite espèce ; dans les landes brûlées par le vent marin, paissaient les cinq ou six cents moutons de l'île. De loin en loin, les costumes sombres des Ouessantines trouaient la lumière des coteaux et des prairies ; les femmes, seules, allaient aux champs puisque les hommes étaient occupés à la mer ou à la défense du pays.

Lorsqu'en 1772, Carlet de la Rozière fit une reconnaissance à Ouessant, il y dénombra 1.950 habitants environ, 200 hommes de troupes réglées, indépendamment des garde-côtes et d' « un commandant intelligent et ferme ». 36 canons, alimentés par 17 poudrières gardaient toujours les abords de l'île (Archives du Service historique, Mémoires et reconnaissances, 1091-4). Depuis 1764, cette dernière appartenait au roi, représenté par un gouverneur. Les guerres passèrent. Ouessant ne fut jamais prise. Toujours gardienne de la rade de Brest, cette île a rempli victorieusement son rôle de bastion avancé du royaume de France (M. Michaux).

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