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Les Cordeliers - Les Dames du Refuge - Les Dames de la Retraite

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Nos historiens sont loin d'être d'accord sur la date de fondation du couvent des Cordeliers. Les uns la reculent en 1232, les autres la rapprochent en 1296. D'autres adoptent des dates intermédiaires, parfois sans d'autre raison qu'une erreur de typographie qui s'est glissée dans l'auteur qu'ils ont consulté.

La dernière de ces dates est de beaucoup trop moderne : la première pourrait être exacte, mais ne nous paraît pas s'appuyer sur des documents d'une authenticité incontestable.

D'après Albert Le Grand, l'évêque Henri aurait consacré à Nantes l'église de Saint-Michel, le 22 septembre 1232. Notre auteur ne nous fait pas connaître la source de ce renseignement : mais, depuis, on a suppléé à cette lacune. Mellinet, en plaçant en 1232 la consécration de la chapelle Saint-Michel ajoute, à titre de pièce justificative, cette inscription : « Reverendissimus pater noster Henricus episc. nann. hoc templum const. die viges. secund. mens. sept. ».

Si cette inscription était authentique, la moitié de la question serait tranchée : il ne resterait plus qu'à prouver que les Cordeliers étaient établis à la chapelle de Saint-Michel dès l'époque de sa consécration.

Mais Mellinet a emprunté si souvent à Fournier ses inscriptions lapidaires, qu'on a lieu de se demander si celle que nous venons de citer n'est pas du nombre de ces emprunts. Or Fournier a tant composé de ces inscriptions avec des bouts de phrases coupées dans nos divers historiens et adaptées, au plus grand mépris de la critique la plus élémentaire, que la simple rencontre d'une inscription dans son recueil fait, dès l'abord, éprouver un doute contre son authenticité.

S'il fallait maintenir que la consécration de la chapelle Saint-Michel et l'établissement des Cordeliers à cette chapelle, eurent lieu en 1232, il s'ensuivrait de là que le couvent de Nantes serait le plus ancien de tous les couvents fondés en Bretagne par les Frères Mineurs. Celui de Quimper est, il est vrai, de la même année ; mais en supposant que les Cordeliers assistèrent à la construction de leur chapelle, on arriverait à reconnaître que la fondation de Nantes doit avoir sur celle de Quimper une priorité de quelques mois.

En dehors de ces allégations et de ces documents sujets à discussion, voici ce qui est incontestable. En 1246, les Cordeliers étaient en constructions sur le terrain qu'ils ont occupé jusqu'à la Révolution. Ce fait est constaté par une charte de l'abbaye du Roncerai (Ronceray) [Note : Item deux autres titres en latin dattez de l'an 1246, portant que Jean, duc de Bretagne, a donné par eschange audit prieuré (de Saint-Cyr) « quasdam plateas, ortos et murum saracenicum ad aedificia facienda vel fulcienda, cum assensu et voluntate eorum ad quos proprietas et dominium pertinebat, videlicet abbatissae et conventus monasterii Sancti Sulpicii, Prœceptoris militiae Templi in Aquitania et aliorum quibus pro dictis rebus satisfecimus competenter ». Lesdites choses en eschange du lieu auquel « Fratres Minoris Ordinis inaedificant et aedificaturi sunt », sis « prope Saltu Canum, versus cellarium in quo ecclesia S . Cirici noviter est constructa » (Archives départementales, H. 351 p. 2.)]. Nous n'avons pas le texte complet de cette charte ; mais l'analyse qui en a été conservée dans un inventaire des titres de l'abbaye, en dit assez pour éclaircir ce point de l'histoire des Cordeliers.

D'après cette charte, le duc de Bretagne fait une donation an prieuré de Saint-Cyr, en échange du lieu ou les Frères-Mineurs construisent ou feront construire. Si le duc donnait une indemnité au prieuré pour ce lieu dont il disposait en faveur des Cordeliers, c'est que la prieure de Saint-Cyr en prétendait autrefois la mouvance. Les religieux avaient donc alors quitté la maison où ils s'étaient établis dès leur arrivée à Nantes. C'était cette maison « dans laquelle ils avaient coutume d'habiter et située dans le fief de l'Evêque, dans la rue appelée rue Perdue » [Note : D. Morice, Pr. T. I, 953], que l'Evêque de Nantes échangeait en 1252, après leur départ, avec l'abbé de Saint-Gildas-des-Bois. D'où l'on peut conclure que, en 1246, ils en étaient déjà à quitter leur installation provisoire et à s'établir dans leur couvent définitif. Ceux qui ont fixé l'établissement des Cordeliers à Nantes en 1296, se sont donc trompés au moins d'un demi-siècle ; ceux qui l'ont fixé à 1232, six ans seulement après la mort de saint François d'Assise, ont été beaucoup plus près de la vérité.

Le couvent reconnaissait pour fondateurs les seigneurs de Rieux. On peut croire que le duc de Bretagne s'était contenté de concéder seulement le terrain, et que la famille de Rieux fit les frais des constructions. Les titres des Cordeliers donnent souvent la qualité de fondateur à cette illustre maison qui avait son enfeu dans le choeur de la chapelle : ils rappellent que la fondation fut faite par Guillaume de Rieux et Jeanne de Machecoul, son épouse [Note : Comme ainsi soit que, de toute antienneté, l'église, maison et convent des Cordeliers de Nantes soit de fondation de la maison de Rieux, faicte bastir et construire par feuz de bonne mémoire Messire Guillaume de Rieux et Dame Jeanne de Machecoul, son épouse, en laquelle église est l'enfeu général des ancestres de ladite maison, au choeur et chapelle à costé du grand autel (Archives départementales, H. 286)].

Guillaume de Rieux mourut en 1310, dans un voyage en Espagne. Son corps ramené à Nantes fut inhumé dans la chapelle des Cordeliers [Note : D. Morice, Histoire de Bretagne, T. I, 228. En rapportant ce fait dans ses Antiquités et anecdotes de la ville de Nantes, 1768, P. Brun ajoute que ce seigneur « avait fondé les Cordeliers, avec sa femme Louise de Machecoul, l'an 1307 ». Ce qu'on a vu plus haut ne permet pas d'admettre une date si tardive pour la fondation des Cordeliers]. Au XVIIIème siècle, on y voyait encore son tombeau. Ce seigneur a dû être un des grands bienfaiteurs de la maison. Si elle n'avait été fondée qu'en 1296, il aurait pu en être le fondateur ; mais il est difficile de lui reconnaître ce titre pour un établissement qui existait dès 1246.

Sans entrer plus avant dans l'histoire des Cordeliers, une simple visite à leur chapelle, dont il existe encore de belles ruines, ne serait pas sans intérêt. Des personnages célèbres y eurent leur tombe, d'illustres familles du pays nantais, leur enfeu. Mais dresser simplement le catalogue de tous ceux qui y furent inhumés depuis le prince Robert fils de Jean, duc de Bretagne, mort le 10 février 1259, serait encore trop long.

Relevons cependant, en passant, une double erreur au sujet de ces sépultures. A la date de 1313, Mellinet place dans cette chapelle « une tombe, en marbre noir, d'Arthur second du nom, duc de Bretagne ». D. Morice a donné la reproduction de cette tombe [Note : Ibidem., p. 229]. Elle se trouvait, en effet aux Cordeliers ; mais aux Cordeliers de Vannes, et non à ceux de Nantes.

L'autre erreur regarde la sépulture du malheureux Chalais, exécuté en 1626, sur la place du Bouffay. Dans la Description de Nantes en 1766, par Greslan, nous lisons « Dans la même église des Carmes, et dans la chapelle de la Contractation ou des Espagnols, on voit le tombeau du trop fameux Talleyrand, comte de Chalais » [Note : Publié dans Nantes ancien, par Dugast-Matifeux, p. 399].

Il y a là, évidemment, une distraction de notre auteur. La chapelle de la Contractation ou de la Nation d'Espagne était la chapelle la plus célèbre de l'église des Cordeliers. C'était aux Cordeliers, et non aux Carmes, que l'on voyait le tombeau de Chalais.

L'enclos des Cordeliers s'étendait autrefois jusqu'à la rue Maurice Duval. Cependant, dès le XVème siècle, à la suite de cessions à des particuliers, il avait cessé d'être limité par la rue.

Un aveu du 5 mai 1682 déborne ainsi le couvent.

« La maison conventuelle, composée d'église, chapelles, sacristie, clouaistre, cours, dortoirs, infirmerie, salles, escuries, caves, celliers et autres logemans et jardins, le tout enclos et circuit de murailles, contenant par fondz sur la rue qui conduit du carefour Saint-Jean au Port-Communeau, 405 pieds, et de profondeur 296 pieds, y compris une place vague au devant de l'entrée de l'église, au devant de la maison qui autrefois appartenoit, au sieur du Plessis-Bauchet, cy devant enfermée de murailles et portes pour servir de cour audit couvent, et depuis délaissée vague par lesdits religieux pour servir d'issue et remise de carosse et chères à ceux qui vont en leur église ; borné du costé vers orient, les murailles et clostures de cette ville ; vers midy, jardin et logement dépendant de la chanterie et chefcerie de N.-D. et à Mons. du Tertre Poulain, chanoine, et aux cause ayans dud. sieur du Plessis-Bauchet ; vers occident, lad. rue qui conduit dudit carefour Saint-Jean au Port-Communeau ; et vers septentrion, par endroit la cour de la Chambre des Comptes, et par autres, maisons qui appartiennent à messieurs de Moucheron, de Cornulier et du Verger Macé » (Archives départementales, Déclaration des domaines, B. 2, 419).

Cet enclos fut diminué à la fin du XVIIème siècle par la formation de la rue Royale, de la rue d'Aguesseau et de la place de la Préfecture.

La maison conventuelle des Cordeliers fut vendue le 5 frimaire an II, pour la somme de 65.000 francs. La Révolution n'avait pas attendu cette vente pour y installer des clubs. Dès le 3 janvier 1791, le club du Port-Communeau avait transporté ses séances aux Cordeliers. Il y était encore en mai 1792, et demanda alors à les tenir dans l'église Saint-Denis (Verger, Archives curieuses, T. V, 108 et 427). Un peu plus tard, le 15 mars 1793, on autorisa, dans le même couvent une fonderie de canons. Dans la suite, on y logea des troupes, ainsi que dans la maison des Pénitentes, de l'autre côté de la rue.

Après la Révolution, on y établit un collège. Les Etrennes Nantaises de l'an XII placent « le Collège des Amis réunis dans la maison des ci-devant Cordeliers, sur la place du Département ». « Cet établissement, dit le prospectus qu'elles insèrent, avantageusement connu à Nantes et dans les départements voisins, a succédé immédiatement à l'Institut qui avait remplacé le ci-devant collège de l'Oratoire : il soutient sa réputation depuis le mois de floréal an IV, époque où il fut mis en activité. Il a été nommé école secondaire par arrêté du gouvernement du 5 frimaire an XI ». On y faisait, entre autres cours, des cours de langue latine et de langue anglaise. Les élèves payaient d'avance 30 francs par trimestre. Le collège des Amis réunis resta aux Cordeliers jusqu'en 1811. Son directeur alla ensuite s'établir sur le Cours Saint-André.

Avant d'occuper la maison des Cordeliers, ce collège existait déjà dans la rue de la Commune, à la maison de la Gâcherie.

La maison des Cordeliers devait ensuite abriter une des grandes oeuvres de la charité chrétienne.

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Avant la Révolution, la ville de Nantes avait deux maisons de refuge pour les malheureuses tombées dans le désordre : la maison du Bon-Pasteur, située, place de ce nom, et celle des Pénitentes qui se trouvait aussi dans la rue de ce nom, à deux pas des Cordeliers. La tourmente révolutionnaire en avait chassé les religieuses : on avait vendu leurs biens à l'encan. Mais leur oeuvre devait être reprise : le germe de la charité catholique est indestructible, il faut que, malgré tous les obstacles, il se fasse jour tôt ou tard.

La résurrection de l'oeuvre des Pénitentes fut l'ouvrage de M. le Pourceau de Tréméac, curé de Saint-Pierre. Un jour, pendant le carême de 1802, une pauvre jeune fille vint d'elle-même lui demander un asile qui mit désormais sa vertu à l'abri. Le bon pasteur ne pouvait rester insensible à cet effort spontané fait pour sortir d'une si grande misère. Il recueillit la malheureuse, puis d'autres qui, après l'avoir imitée dans sa faute, l'imitaient aussi dans son repentir. Pour les abriter, il acheta, à ses frais, l'hôtel de Portric, situé place Saint-Vincent.

Il ne tarda pas à sentir qu'il fallait autre chose que des murs pour préserver du mal ces volontés qui l'avaient malheureusement connu. Pour donner à l'établissement qu'il méditait une organisation régulière, il appela, en 1807, des religieuses de Notre-Dame de Charité-du-Refuge, autrement dites Dames-Blanches, dont l'ordre avait été fondé en 1644 par le P. Eudes, fondateur des Eudistes.

Ces religieuses, chassées de leur monastère par la Révolution, avaient cependant réussi à ne pas se séparer. Après des péripéties de tout genre, elles venaient de s'établir en 1806, dans l'ancien couvent de la Visitation [Note : En avançant ce fait, sur une lettre qui nous a été gracieusement communiquée à la communauté des Dames-Blanches, nous croyons cependant devoir faire remarquer que la Visitation était peut-être, dès cette époque occupée, par l'administration militaire. En 1808, Mgr. Duvoisin jugeant que la maison de Saint-Charles n'était pas assez grande pour l'établissement du Grand-Séminaire, demanda au Conseil général la maison de la Visitation, occupée dès lors par cette administration (Archives départementales, Rapport du Conseil général de 1808)].

S'étant assuré leur concours, M. de Tréméac demanda à la Préfecture l'autorisation du nouvel établissement destiné à « remplacer celui qui existait autrefois à Nantes, sous la dénomination du Bon Pasteur, et qui servait de refuge aux femmes de repentir ». Le 25 juillet 1807, le ministre de l'Intérieur renvoya la demande au Préfet qui s'intéressa à cette oeuvre. Voici, en effet ce qu'il écrivait dans une lettre du 3 juin 1808, en demandant une copie des statuts des dames du Bon Pasteur et de leur règlement : « Convaincu de l'utilité de cet établissement, sous le rapport des moeurs et de la religion, je ne négligerai rien de ce que je croirai propre à la consolider en la faisant approuver par le gouvernement ».

M. de Tréméac s'étant mis en règle avec le Préfet et le Maire, Mgr. Duvoisin donna son agrément, et la fondation du monastère de Notre-Dame-de-Charité de Nantes fut décidée en octobre 1809.

La communauté de Paris envoya, en qualité de supérieure, madame Riou, en religion Mère Marie de Saint-Jean l'Evangéliste, avec une autre religieuse de chœur et une novice. Les trois religieuses arrivèrent à Nantes le 11 décembre 1809 (Archives départementales, Conseil général de 1819, Lettre de la Supèrieure), et furent reçues par M. de Tréméac qui leur confia l'établissement dirigé jusque-là par une ancienne religieuse de la Visitation, puis par des gouvernantes. D'après une note de M. Gély, « le 15 novembre 1810, se fait la première profession chez les dames de Saint-Michel près l'ancienne église de Saint-Vincent ».

Cependant un décret impérial avait placé toutes les maisons dites du Refuge sous la protection de « Madame Mère ». Un autre daté du palais de Saint-Cloud, le 6 juin 1811, approuva, ainsi le Refuge de Nantes :

« Art. I. L'institution de la maison du Refuge, établie à Nantes, département de la Loire-Inférieure, est approuvée. - Art. II. La maison acquise par ladite institution sera sa propriété et non celle d'aucun individu ».

La première maison du Refuge devenait trop étroite. Il fallut bientôt acquérir un local plus grand.

Pour avoir les ressources qui leur manquaient, les religieuses s'adressèrent une première fois au Conseil général. « Un établissement certainement utile, lisons-nous dans le rapport du Conseil général de 1811, vient d'être organisé à Nantes, sous le nom de Saint-Michel ou du Refuge... nous applaudissons de tout notre coeur au zèle, aux efforts de ceux qui ont voulu faire revivre l'établissement connu précédemment sous le nom de Filles du Bon-Pasteur, ou filles repenties ». Mais comme cet établissement paraissait au Conseil présenter un caractère particulier, il ne crut pas devoir lui allouer de secours. Dans sa pensée, c'était à la ville de Nantes de le faire : pour lui, il représentait surtout les communes rurales « où, grâce à la Providence les moeurs sont encore respectées. Cependant disait-il au ministre, il est de notre devoir de vous recommander un établissement de bienfaisance, un établissement utile, de vous demander pour lui la concession gratuite d'un édifice national, la faculté de recevoir des pensionnaires et des secours, pour les frais qu'entraîne un premier établissement ».

Malgré cette recommandation, les religieuses ne purent obtenir gratuitement cet « édifice national », qu'il eût été facile de trouver à Nantes, parmi les anciens biens enlevés aux Communautés par la Révolution.

Après des difficultés sans nombre, elles trouvèrent enfin, dans l'intérêt qu'inspirait leur oeuvre de dévouement, une partie des ressources nécessaires pour l'acquisition de l'ancien couvent des Cordeliers. Elles l'achetèrent en 1811 et s'y trans­portèrent le 12 février 1812. Elles durent faire des dépenses considérables, pour approprier à leur nouvelle destination ces édifices qui tombaient en ruine. En 1825, une lettre de la supérieure estimait ces dépenses à 175.000 francs.

Pendant plusieurs années, la supérieure revint à la charge pour obtenir du Conseil général un secours dont son oeuvre avait si grand besoin. Elle rappelait, dans ses différentes requêtes, que les autres Refuges de Paris, de Lyon et d'ailleurs recevaient partout des secours de ce genre, et que celui de Nantes était le seul à être ainsi abandonné, que sa maison avait renfermé jusqu'à 100 pénitentes, mais que maintenant, faute de ressources, elle n'en contenait plus que 60, dont sept seulement payaient en tout 700 à 800 francs ; que cependant elle avait établi une classe de préservation pour les enfants au-dessous de 15 ans « qui, sans être coupables d'inconduite de moeurs, seraient exposées d'y tomber, soit par des deffauts de caractère, ou par l'abandon des parents, ou par extrême pauvreté. Ces enfants, ajoutait-elle, font l'affliction de bien des familles désolées et l'objet des sollicitudes des dames de la Charité, ne pouvant trouver des places en aucun endroit convenable ».

Enfin le Conseil général, touché de l'utilité d'une oeuvre si méritoire, commença par lui témoigner sa bienveillance non seulement par ses paroles, mais encore par ses actions. En 1819, il lui alloua une première somme de 600 francs ; en 1820 et 1821 la somme alla jusqu'à 1.500, et en 1822, elle monta jusqu'à 5.000.

Les religieuses durent cette allocation élevée à la chaude recommandation que fit de leur oeuvre le Préfet, M. de Vérigny. Voici un extrait de son rapport : « Ce pieux établissement est l'un des plus utiles qui existent à Nantes, et en même temps le plus pauvre. Sa création n'a rien coûté au département auquel il fait tant de bien. Vous savez comment il recueille toutes les filles qui consentent à s'arracher au désordre, disposition qui serait presque inexécutable pour ces malheureuses, si cette porte ne leur restait ouverte quand toutes les autres leur seraient fermées. Le gouvernement intérieur de cette partie de la maison est aussi économique que sage, et propice aux plus difficiles amendements. Dans une autre partie, entièrement distincte, on reçoit les orphelines au-dessous de 15 ans, sans azyle ».

Puis, rappelant combien cet établissement est pauvre, il en fait connaître aussi les charges. « En 1821 le nombre des Pénitentes et des Orphelines était d'environ 100. En 1822 ce nombre est monté à 130. Enfin, Messieurs, ajoutait-il, cette maison est dans ce moment dans un tel état de détresse qu'elle ne peut subsister sans votre bienveillante intervention. En la visitant dans toutes ses parties j'ai admiré l'ordre qui y règne, le bien qu'elle fait, celui qu'elle pourrait faire avec un peu plus de ressources. Je vous prie, Messieurs, de vouloir bien prendre cet établissement sous une salutaire protection, et d'allouer les 3,000 livres comme secours et les 2,000 qui sont indispensables à l'assainissement et à l'extension du local. Je croirais assurer le succès de cette instante demande, si le Conseil voulait bien, à ma prière, nommer une Commission chargée d'examiner en détail ce remarquable établissement et vous offrir des vues tant sur son utilité morale que sur les améliorations dont il peut être susceptible ».

Jusqu'en 1824, que M. de Vérigny fut préfet de la Loire-Inférieure, il demanda au Conseil général et en obtint 3.000 fr. pour une oeuvre auquel il s'intéressait grandement.

La municipalité n'avait pas attendu le Conseil général pour donner des marques de sa bienveillance à une institution dont la ville était la première à profiter. Dès 1817, elle alloua au Refuge un secours de 1.000 francs. Les années suivantes, elle se montra plus généreuse encore. De 1.200 francs qu'elle donna en 1819, elle monta, en 1822, jusqu'à 4.000 francs. Elle descendit, depuis à 3.000, ce qui était encore une somme honnête : mais elle ne s'y est pas maintenue, tomba à 1.500, puis à 500 et enfin à 300.

Pour un établissement qui compte près de 100 religieuses et près de 500 pénitentes et enfants, c'est bien peu par tête. Ce n'est pas avec cela qu'elle pourront mettre la poule au pot tous les dimanches. Retirer une âme du vice, la ramener à l'amour et à la pratique du bien, est pourtant une oeuvre de bienfaisance qui mérite d'être encouragée par les plus généreuses subventions. Il serait regrettable que l'on diminuât des allocations sans lesquelles des institutions de ce genre ont peine à se maintenir, pour subventionner plus largement des sociétés formées exclusivement dans un but de distractions et de plaisirs.

L'oeuvre du Refuge prenait toujours de l'accroissement. Dès 1822, on chercha un local plus vaste que l'enclos des Cordeliers. Les religieuses le trouvèrent dans le quartier de Gigant, où elles acquirent en 1824, la tenue qu'elles occupent aujourd'hui. Le 22 août 1825 eut lieu l'exode de la communauté composée de 30 religieuses, 20 pensionnaires et 110 pénitentes. Mgr de Guérines bénit le 27 août leur chapelle provisoire, et le 18 octobre 1826, il accorda, à la chapelle définitive les honneurs de la consécration (Archives du Chapitre. Registre des actes de Mgr. de Guérines - Mellinet, La Commune, etc., T. 1, p. 315).

Mellinet place en 1840, et, par conséquent, trop tard, la construction de cette chapelle. Il n'a pas été plus heureux en attribuant à l'année 1807 « des travaux à la maison du Refuge aujourd'hui la Retraite », et, en 1808, « l'établissement de Notre-Dame du Refuge ». Par ce que nous venons de dire, on voit que ces travaux, dirigés par M. Nau, père, architecte, se firent non pas à la maison actuelle de la Retraite, mais à l'hôtel de Portric, place Saint-Vincent. C'est dans cet hôtel que fut ouvert, le 1 avril 1815, le Mont-de-piété de Nantes, créé par décret impérial du 3 décembre 1813.

Les religieuses de Notre-Dame de la Charité ont laissé un souvenir de leur passage dans le quartier qu'elles n'ont habité que de 1812 à 1825. La rue du Refuge et la Petite-rue du Refuge doivent leur nom à leur établissement.

Ont-elles pris aux Cordeliers leur nom de Saint-Michel du Refuge, sous lequel lequel maison a été parfois désignée ? Il est certain que la chapelle des Cordeliers était sous le patronage de saint Michel mais l'illustre archange a pu être aussi choisi pour patron du Refuge dès son établissement à l'hôtel de Portric. Quoi qu'il en soit, en portant le culte de saint Michel dans le quartier qu'elles habitent, elles n'ont pas été les premières à l'y honorer. Il y avait autrefois un clos nommé clos de Saint-Michel dans le quartier de Gigant.

En quittant le couvent des Cordeliers, les religieuses de N.-D. de Charité le vendirent à l'Evêché.

Mgr. de Guérines voyait les vocations ecclésiastiques affluer en grand nombre, et son Grand séminaire devenait de jour en jour trop étroit. Comme il lui était impossible d'acquérir les immeubles voisins pour l'agrandir, il se préoccupa de lui créer une sorte de succursale pour les jeunes gens qui commencent leurs études de théologie.

L'enclos des Cordeliers se trouvant alors libre, Mgr. de Guérines songea d'abord à y fixer cette maison de Philosophie qu'il voulait créer. Dès 1825, il était en correspondance soit avec soeur Marie de la Conception, supérieure des religieuses, soit avec les administrations de Paris, pour l'acquisition de cet enclos dont la valeur était estimée de 72.000 à 80.000 francs.

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Mais d'heureuses circonstances vinrent favoriser une combinaison plus avantageuse pour les Séminaires. Vers 1900, il y avait à la maison de Philosophie, n° 104, 106 et 108 de la rue Saint-Clément, une Maison de retraite fondée en 1820 par des dames qui en avaient la direction. La maison était trop étroite pour l'oeuvre qui y était fixée ; d'un autre côté, on la trouvait un peu trop éloignée des centres de la ville. Ce dernier point qui était un défaut pour une oeuvre, était une qualité pour une autre. L'ancienne Maison de retraite était si près du Grand séminaire, que la pensée d'y établir la maison de Philosophie se présenta naturellement à l'esprit de l'administration diocésaine. Elle acquit les deux immeubles, fixa le Séminaire de Philosophie et transporta l'oeuvre des Retraites dans les endroits que chacune de ces institutions occupe actuellement. Deux monuments érigés au souvenir de Mgr de Guérines, dans les chapelles de la Philosophie et de la Retraite, rappellent qu'il a été le fondateur des deux maisons.

L'ancienne maison de Retraite avait été précédemment dirigée par de pieuses dames. Une d'elles, madame de Kerlero, fut sollicitée de prendre la direction de la nouvelle, en qualité de supérieure ; elle refusa d'abord, et Mgr. de Guérines écrivit à Mgr l'Evêque de Saint-Brieuc, pour lui demander des religieuses de Quimperlé, dites du Père Eternel.

Cette première démarche ne semble pas avoir réussi. Après la réponse faite, le 28 septembre 1826, par l'Evêque de Saint-Brieuc, Mgr. de Guérines conservait encore le 15 octobre « l'espérance de voir Madame de Kerlero prendre la direction de la maison ». Finit-elle par accepter ? nous ne saurions le dire. Une chose certaine, c'est que l'oeuvre fonctionnait dès l'année suivante. L'ouverture de la première retraite dans la nouvelle maison eut lieu le 30 mai 1827 (Note : D'après un autre document, la première retraite aurait eu lieu le 26 octobre 1826).

Dans les desseins de Mgr. de Guérines, les retraites devaient être données par des missionnaires demeurant à la maison. L'ordonnance royale du 17 mai 1826, autorise l'Evêque à acquérir la maison des Dames de la Charité, « pour l'oeuvre des retraites, le logement des prêtres auxiliaires et autres besoins analogues ». Mgr. de Guérines avait aussi l'intention de faire donner par ces prêtres des conférences sur la religion dans la chapelle des Cordeliers qui pouvait contenir de 1.000 à 1.200 personnes. C'étaient des accessoires à l'oeuvre principale ; seule cette oeuvre fonctionne vers 1900 en cet endroit.

Les religieuses de Quimperlé, auxquelles Mgr. de Guérines avait songé dès 1826, répondirent, soit à cette époque, soit un peu plus tard, à son invitation. Cette congrégation doit sa fondation au P. Huby, Jésuite, et à mademoiselle de Francheville qui ouvrirent, en 1664, une maison destinée à recevoir toutes les personnes qui désirent passer quelques jours en retraite. Les religieuses de Quimperlé conservèrent la direction de leur maison de Nantes jusqu'en 1869. Elles ne purent alors accepter les conditions faites par l'Evêché, propriétaire de la maison, et furent remplacées par la congrégation de la Retraite de Vannes. Mgr. Jaquemet fit à ces dames une promesse de vente qui fut réalisée par son successeur ; et par acte du 23 juin 1872, Mgr. Fournier vendit l'établissement à madame Séraphine de Kertanguy, supérieure générale de la Congrégation.

Les nouvelles propriétaires purent, dès la promesse de vente, reconstruire les bâtiments qui tombaient en ruines. En 1869, elles commencèrent à élever, sur les plans de M. Gilée, la chapelle et les bâtiments qui la touchent.

La chapelle, placée sous le vocable du Sacré-Cœur, fut bénite le jeudi 17 août 1871, par Mgr. Fournier. Dans son allocution, le prélat « bénit avec effusion de coeur ces Dames de la Retraite qui, par leur exemple et leurs leçons, feraient un bien infini aux âmes qui viendraient chercher autour d'elles un asile et une bonne solitude. Je me réjouis, ajouta-t-il en terminant, de voir ces saints établissements se multiplier. Ils sont pour les villes chrétiennes, ce que sont les tours pour les citadelles : ils les protègent et les défendent contre les attaques du mal et aident à en repousser les assauts » (Semaine religieuse du 19 août 1871).

L'oeuvre fondée par Mgr. de Guérines est devenue de plus en plus florissante. Les personnes pieuses du diocèse ont cru que, en matière de spiritualité, leurs évêques avaient plus d'autorité que les membres de la municipalité de Nantes (G. Durville - 1900).  

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