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LEPROSERIE DE SAINT-LAZARE OU DE SAINT-LADRE

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La Bretagne, comme toutes les provinces, a eu ses lépreux. On sait que ce mal affreux s'est répandu avec une rapidité effroyable dans tout l'Occident, à la suite des Croisades. Dans le seul diocèse de Nantes, on ne comptait pas moins de seize léproseries établies à Oudon, à Ancenis, à la Chapelle-Glain, à la Roche-Bernard, à Guérande, au Pellerin, à Savenay, à Chémeré, à Machecoul, à Coulais, à Touvois, à Château-Thébaud, à Clisson [Note : M. de Courson, dans la préface de son Cartulaire de Redon, a omis plusieurs léproseries dont j'ai retrouvé les noms], au Loroux, à Nantes et dans diverses autres localités [Note : Maladreries omises : Sion, Vigneux et Vertou].

Au XIIème siècle, la lèpre devint si commune qu'on fut obligé d'avoir des prêtres, des églises et des cimetières particuliers pour les lépreux. Cette classe de malheureux était partout rejetée au dehors des villes, et vivait dans un exil perpétuel, séparée de la société des fidèles. Assez d'auteurs nous ont retracé les tortures physiques et morales auxquelles elle fut condamnée, pour qu'il soit utile de m'étendre sur ce sujet trop facile à développer. Je préfère renvoyer le lecteur avide de détails au Lépreux de la ville d'Aoste, de Xavier de Maistre.

Il me suffira de rappeler, avec Ogée (Dictionnaire de Bretagne d'Ogée, t. I, p. 163) en main, que toute autre société que celle de ses semblables était interdite aux lépreux. La cérémonie qui se pratiquait le jour où il était proscrit à jamais de la compagnie de ses parents et amis ressemblait à celle des funérailles. Un prêtre revêtu d'un surplis et d'une étole, allait avec la croix le chercher dans sa demeure, le conduisait à l'église en chantant les versets des enterrements et lui jetait une pelle de terre sur les pieds comme aux défunts. Son costume se composait d'une robe et d'une tunique à capuchon qu'il ne devait jamais quitter quand il paraissait en public.

La léproserie de Nantes était située dans la paroisse saint-Similien, à l'endroit nommé les Hauts-Pavés, sur le bord de la route de Vannes.

L'immeuble se composait d'une chapelle, d'un corps de logis avec chambre haute et basse, d'un cellier, d'une écurie, de deux jardins, d'un pré et d'une pièce de terre de deux quartiers. En qualité de seigneur du fief de Saint-Similien, l'évêque du diocèse percevait les rentes de la maison quand elle ne renfermait aucun ladre. C'est ce que nous apprend un compte des reguaires de l'évêché de l'an 1398 :

« D'autres rentes dues ès-malades de Saint-Ladre, quelles rentes sont et appartiennent à l'évêque de Nantes par défaut de malades » (Trésor des chartes des ducs de Bretagne, cassette 24).

Les comptes de cette maladrerie ayant tous disparu, il n'est pas possible de savoir quelle était l'importance de ses revenus ; cependant j'ai trouvé une transaction du XVème siècle qui fait connaître le principal de son casuel. Pour subvenir à l'entretien des lépreux, le duc de Bretagne, l'évêque de Nantes et le Chapitre avaient autorisé leur aumônier à percevoir certains droits d'octroi sur les bois de chauffage amenés à Nantes, sur quelques poissons destinés à l'alimentation du carême et sur les bouchers qui vendaient de la viande le dimanche [Note : Les levées d'impôt à Nantes au XIIIème siècle se faisaient en vertu d'une ordonnance concertée entre ces trois autorités qui se partageaient l'étendue de la ville. Voir au fonds de l'évêché une ordonnance de 1267 relative aux ponts]. Une contestation s'éleva à l’occasion de ces redevances entre le recteur d'Orvault, titulaire de l'une des chapelles desservies dans la chapelle de Saint-Ladre et le procureur des lépreux, les deux parties prétendant chacune qu'elles en avaient la propriété exclusive. Après plusieurs enquêtes instruites par le prévôt de Nantes il fut convenu, par accord de 1437, 14 décembre, que les lépreux prélèveraient une bûche sur toutes les charretées ou sommes de bois qui passeraient devant leur maison ou qui entreraient en ville par le Gué-Moreau, les portes de Sauvetour et de Saint-Nicolas, par le port de la Poissonnerie de la Fosse et par la rivière d'Erdre. Il fut également accordé que les mêmes auraient droit de lever 10 p. 100 des sèches et des morgadons qui seraient apportés pendant le carême à Nantes, soit par bateau, soit à cheval, et de prendre sur chaque étal de boucherie, ouvert le dimanche, un morceau de la longe de chaque bœuf vendu en détail à la cohue [Note : Ce droit appelé nomblage appartenait les autres jours à l'évêque de Nantes et au seigneur de Procé en Sucé. (Travers, Histoire de Nantes, t. I, p. 232)].

L'accord portait que le chapelain, partie adverse, n'aurait le droit de bûchage que sur les charretées de bois qui entreraient à Nantes par la porte Saint-Pierre, par le port Brient-Maillard et le port Communeau, mais qu'il pourrait jouir de la totalité des droits attribués à la léproserie quand elle ne contiendrait pas de malades, à la condition qu'il entretiendrait les édifices en bon état.

Pendant longtemps l'official de la cathédrale fut seul chargé de la constatation de la lèpre ; mais à la fin du XVème siècle, il fut arrêté qu'il se ferait assister d'un médecin et de deux maîtres chirurgiens. Quand la séquestration avait été prononcée contre un lépreux indigent, on faisait une collecte en sa faveur, dans la paroisse de son domicile habituel. L'abbé Travers, qui a compulsé les comptes de la fabrique de l'église Saint-Nicolas (Histoire de Nantes, t. II, p. 256.), raconte qu'une quête semblable se fit encore dans cette paroisse en l'année 1523.

Dans le cours du XVIème siècle, les cas de lèpre devinrent de plus en plus rares et disparurent enfin complètement. En 1569, le doyen Des Couroux, ayant constaté avec l'assistance de deux commissaires que l'hôpital était inoccupé, la suppression fut prononcée. L'Hôtel-Dieu ne recueillit immédiatement de cet héritage que la partie mobilière ; il ne fut mis en possession du patrimoine des lépreux qu'au mois de décembre 1695, par un arrél du Conseil. Malgré cette annexion, la chapelle fut conservée pour le service des fondations, et chaque chapelain resta pourvu du temporel dont il jouissait.

(Léon Maître).

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