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Eglise Saint-Cyr et Sainte-Julitte

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C'est dans la rue d'Argentré que nous croyons devoir placer l'ancienne église de Saint-Cyr et Sainte-Julitte, démolie par Pierre de Dreux, pour l'agrandissement de Nantes. 

Les titres qui nous apprennent cette destruction disent expressément que, pour faire ces fossés nouveaux, Pierre fit détruire complètement l'église paroissiale. Dans cette église, il y avait des religieuses dont il détruisit complètement les maisons [Note : « Fecit insuper idem comes fieri fossata et barbacanas citra civitatem, in terra Ecclesiae Nannet, et pro fossatis faciendis diruit domos hominum Ecclesiae, et fecit omnino destrui ecclesiam S. Cyrici parrochialem, exhumatis corporibus de cimiterio, in qua ecclesia erant moniales, et destruxit omnino domos earum, ita quod parrochiani ex tunc non habeant ecclesiam, nec moniales sunt ibi ». D. Morice, Pr. I, 936].

Nous devons donc chercher l'emplacement de l'église du monastère et du cimetière détruits sur le parcours de l'enceinte qui fut élevée alors.

Or cette enceinte, qui partait de la tour du Trépied, atteignait l'angle formé actuellement par la place de la Préfecture et par la rue d'Argentré. Elle faisait de là un détour dans la direction de cette rue, laissait dans son axe une tour énorme appelée dans les titres les plus anciens, la Grosse Tour, et plus connue sous le nom de tour du Papegaut ; puis, de ce point extrême, se repliait vers l'Erdre qu'elle suivait jusqu'au Port-Communeau.

Grâce à cette première donnée, nous ne chercherons l'église de Saint-Cyr ni à gauche ni à droite de cette enceinte, mais dans sa seule direction. Une seconde donnée va nous indiquer sur quel point de ce parcours nous devons en fixer l'emplacement.

On admettra tout d'abord que l'église devait se trouver sur un passage. Dans une étude précédente nous avons rappelé l'existence d'une porte de l'enceinte romaine, près de la tour du Trépied. Cette porte nous indique la direction suivie par le chemin qui venait de Saint-André.

Si l'on fait attention que le rempart construit par Pierre de Dreux se trouve dans l'axe de la rue Saint-Denis, on sera porté à croire qu'il a suivi la direction d'une voie qui portait de la rue d'Argentré, passait sous la porte du Trépied, et aboutissait, en suivant la rue Saint-Denis et celle des Carmélites, à la place des Jacobins, si mal nommée place du Port-Maillard.

Si ce rempart n'eût suivi que le chemin, il n'eût pas rencontré d'église ni de monastère à démolir. Mais, arrivé dans la rue d'Argentré, nous le voyons faire un détour, pousser une pointe et aussi une tour dans la direction de la Motte Saint-André. Ne serait-ce pas en poussant cette pointe, en s'écartant du passage, qu'il aurait rencontré les édifices gênants pour sa direction ?

Les modifications survenues dans ce quartier ne laissent guère de chances de retrouver les fondations d'une ancienne église. Mais l'église était entourée d'un cimetière. L'histoire trouve au fond de la terre des documents qui échappent plus facilement à la destruction des hommes et des temps.

Dans son entreprise, Pierre de Dreux exhuma un grand nombre de corps. Il dut les rencontrer dans les excavations nécessaires pour les fondements du rempart et pour la formation des douves. Mais le cimetière s'étendait en dehors du terrain qu'il prenait, et la partie de ce terrain, qui ne fut pas alors utilisée, garda les vieilles tombes qu'on ne découvrit que plus tard.

La partie de ce cimetière qui se trouvait hors les murs de la ville servit encore pendant quelque temps à la paroisse, comme nous l'avons vu dans une requête des paroissiens de Saint-Léonard. Puis le nouveau cimetière qui se trouvait autour de la nouvelle église fit négliger et oublier l'ancien. On connaissait encore sa situation exacte en 1601. D'après cette requête, il était « situé près de la Grosse-Tour, et il en avait été pris une partie pour bastir un espron au pied de la dite tour ».

A la fin du XVIIème siècle, on a encore le souvenir de ce cimetière. Dans une production de titres à l'appui des droits de la prieure de Saint-Cyr, on allègue que son fief s'étendait autrefois « en dehors de l'enclos de la ville de Nantes. Quand l'on fit les fossés et murailles de la Grosse Tour, l'on prit les terres du fief et juridiction de Saint-Cyr pour faire ledit fossé, dont il demeura encore partie de ladite terre qui est au fauxbourg de Saint-André, et auquel lieu, et proche iceluy, estoit le cimetière de ladite église de Saint-Léonard, comme est encore recognu puis peu de temps, ayant ouvert ledit endroit pour tirer de la pierre, où l'on a trouvé des ossements de personnes » (Archives départementales, H. p. 354).

Les travaux entrepris pour la formation du Cours Saint-André vinrent encore mettre à jour quelques tombes de cet ancien cimetière. Le procès-verbal du 6 février 1764 lui assigne en d'autres termes, une place correspondante à celle que nous lui connaissons déjà au bas de la Motte, près de la Grosse Tour. Il est « à l'endroit où l'on élargit maintenant une allée, vis-à-vis la rue de la Motte qui conduit à la Chambre des Comptes et au chemin de la Grosse Tour ». C'est là que l'on trouve « plusieurs pierres d'ardoise, en forme de tombe, et une grande tombe de la même pierre tendre que celles trouvées dans le cavalier de la porte Saint-Pierre, avec plusieurs ossements ».

Or cette allée qu'on élargissait était la rue Tournefort, et le cimetière se trouvait dans cette rue, vis-à-vis de la rue qui conduit de la Motte à la Chambre des Comptes, c'est-à-dire vis-à-vis de la rue d'Argentré, qui était alors représentée par le chemin qui entrait sous la porte de la tour du Papegaut.

La tour du Papegaut occupait donc l'emplacement d'un ancien cimetière. On en avait pris une partie au XIIIème siècle pour creuser les fossés de l'enceinte de Nantes ; on en prit une autre partie au XVIème, pour faire l'éperon de la tour, mais comme le cimetière avait une certaine étendue, il en resta toujours une partie pour en conserver la trace.

Cet endroit étant le seul de ce quartier où les remparts de Pierre de Dreux rencontrent un cimetière, il nous semble qu'il n'est pas téméraire d'y fixer, avec précision, l'ancien cimetière de Saint-Cyr dont nous avons parlé plus haut, et par conséquent la première église de la paroisse de Saint-Léonard, ainsi que le premier monastère des religieuses du Roncerai (Ronceray).

L'église de Saint-Cyr avait été construite en 1038, par Budic, comte de Nantes, et par son épouse Adois. Le texte de la fondation a été publié par D. Lobineau et D. Morice, et dernièrement par M. Marchegay. En voici la traduction ; « L'an de l'Incarnation MXXXVIII, moi Budic, comte de la cité de Nantes, et Adois mon épouse, voyant que l'église construite anciennement près les murs de notre ville de Nantes, en l'honneur des saints martyrs Cyr et Julitte, sa mère, était complètement abandonnée, par suite de la dévastation des païens ou des Normands, et aussi par suite de la vétusté et d'une très longue continuation de dommages, nous avons déploré son sort avec clémence, et touchés de ses misères lamentables, nous avons commencé à la rétablir, à partir de ses fondements, à nos frais, pour notre salut et celui de nos parents ; et afin que nos successeurs puissent se rappeler, grâce à ces lettres, ce que nous avons donné de notre patrimoine à ce lieu saint en l'honneur desdits martyrs, et pour les religieuses que nous y établirons pour y servir Dieu sous la règle de saint Benoît, tant pour le présent que pour l'avenir, nous avons ordonné qu'on fît une charte qui rappelle à tous ceux qui la liront ce que nous avons donné, à savoir : Bois Gundran, situé entre Orvaut et Vigneux, sur le cours de l'Ausans [Note : Le Bois-Gundran est devenu Bois-Gorhan, d'où l'on a fait Bon-Garant. L'Ausans est devenu le Cens. Texte dans D. Mor. Pr. I, 375], avec ses terres cultivées et non cultivées, ses bois et ses prés, que nous avons donnés pour la restauration de l'église de Saint-Cyr et pour l'entretien des religieuses qui y serviront Dieu, afin qu'elles le possèdent en tout temps, tranquillement, sans réclamations, ni redevances ».

Budic et son épouse moururent avant de terminer leur oeuvre. Leur fils, Mathias, s'inspira de leurs intentions et établit à Saint-Cyr les religieuses du Ronceray, appelées aussi de la Charité d'Angers.

« Toute chose digne de mémoire, dit-il dans l'acte de donation, doit être consignée au moyen des lettres, afin de ne pas tomber plus tard en oubli. C'est pourquoi, moi, Mathias, comte de la cité de Nantes, j'ai voulu, pour nos successeurs, confier à la mémoire des lettres que l'humble et vénérable abbesse du monastère de Sainte-Marie d'Angers, nommée Letburgis, est venue à notre cour, nous a priés, nous et les nôtres, avec une grande douceur de langage, de lui donner dans la ville de Nantes un lieu où elle pourrait établir la règle de ses religieuses. Que nous l'ayons fait volontiers, c'est ce que montre le témoignage de cette charte : car nous avons donné le monastère de Saint-Cyr, situé hors des murs de Nantes, avec toutes ses dépendances, audit monastère de Sainte-Marie et à dame Letburgis abbesse, pour notre conservation et pour la délivrance des âmes de mon père Budic et de ma mère Adois, la comtesse, qui, de leur vivant, ont édifié ce monastère et l'ont destiné à une règle de religieuses, afin qu'elle les possède, ainsi que toutes les choses qui y seront attachées par notre don fait d'après les lois, aussi longtemps que le siècle durera, sans aucune réclamation, pour en disposer et en ordonner à son gré ».

D'après Travers, cet acte serait « très suspect de supposition : le Roncerai n'a jamais possédé les églises de Notre-Dame et de Saint-Vincent », que la continuation du texte donne à l'abbesse.

Nous ferons cependant remarquer que la prieure de Saint-Cyr recevait une rente du recteur de Saint-Vincent. En 1390, Rolland Gendron, recteur de cette paroisse, reconnaissait devoir à religieuse dame, la prieure des prieurés du Bourg-des-Moutiers et de Saint-Cyr unis ensemble, une rente de 10 sous, payée depuis très longtemps par ses prédécesseurs. Il est assez croyable que l'origine de cette rente remontait à un arrangement intervenu au sujet de l'église de Saint-Vincent, à la suite de la donation du comte Mathias.

Malgré la solennité de ces actes, les religieuses du Roncerai (Ronceray) se virent enlever peu à peu, par suite du malheur des temps, les droits qu'elles avaient sur l'église de Saint-Cyr. Ils leur furent restitués en 1129, par Conan, comte de Bretagne, fils du comte Alain et d'Ermengarde. L'acte de cette restitution fut passé à Nantes aux ides de mars 1128 (Voir Travers, I, 191. Texte dans D. Morice, Preuves I. 382). Il y avait alors à Nantes un grand nombre d'évêques de la province, réunis pour un concile ; la restitution eut pour témoins l'archevêque de Tours, les évêques d'Angers, de Rennes, de Léon et du Mans, ainsi que Pierre Abélard, abbé de Saint-Gildas de Rhuys.

L'église construite vers 1038 par le comte Budic en remplaçait une plus ancienne et dédiée également à Saint-Cyr. Le comte nous apprend lui-même qu'il avait trouvé cette église « complètement abandonnée, par suite de la dévastation des païens et des Normands ».

A la suite des invasions, Alain Barbe-Torte l'avait déjà donnée, en 952, à l'abbaye de Landevenec (« Ecclesiam sancti Cyrici extra civitatem ». D. Morice, Pr. I. p. 345) ; mais pour des motifs inconnus, cette donation était restée sans effet, et les injures du temps venant s'ajouter aux outrages des hommes, l'église présentait, quatre-vingts ans plus tard, l'état de désolation qui avait touché Budic et son épouse Adois.

A quelle époque pouvait remonter cette église primitive ?. Nos différents historiens n'ont pas hésité à en fixer la date. Si l'on en croit Albert le Grand, elle aurait été construite par Eusèbe, évêque de Nantes, qui y aurait été inhumé en 464.

D'après la Chronique de Saint-Brieuc, elle serait aussi du Vème siècle, mais reconnaîtrait un autre fondateur. Chose assez singulière ! ceux qui auraient construit l'église de Saint-Cyr au Vème siècle, portent les mêmes noms que ceux qui la reconstruisirent au XIème siècle : ils se nommaient Budic et Hazevise. « Après la mort d'Anne, épouse de Budic, dit cette chronique, il épousa une autre noble dame du nom d'Hadevise. Ils voulurent tous les deux reconstruire l'église de Saint-Cyr de Nantes, mais la mort les en empêcha ». (Defuncta Anna uxore Budici, ipse fuit uxoratus cum alia nobilissima domina nomine Hazevisia. Ecclesiam S. Cyrici namnetensis voluerunt ambo reœdificare sed non potuerunt morte prœventi, D. Morice, Pr. I, p. 12).

Retrouver au Vème et au XIème siècles un même fait attribuable à des personnages de même nom, serait une palingénésie curieuse ; mais il est bien à craindre que le compilateur de la Chronique de Saint-Brieuc ne nous ait donné ici un échantillon de la façon dont il composait son histoire.

Nous avons vu, en effet, comment un comte Budic et son épouse Adois, tous deux d'une existence incontestable, ont reconstruit l'église de Saint-Cyr et furent empêchés par la mort de compléter l'oeuvre qu'ils avaient projetée. C'est ce fait du XIème siècle, fait connu par des actes authentiques, que notre chroniqueur reporte au Vème. Embarrassé par le nom de l'épouse de son comte Budic, il la fait mourir, pour lui en donner une autre dont le nom concorde mieux avec les faits qu'il veut concilier. C'est ainsi que, grâce à la mort d'Anne, Budic se retrouve l'époux d'Hazevis ou d'Advis, qu'il appelle Hazenisia pour Hazevisia.

Le témoignage de la Chronique de Saint-Brieuc ne serait donc pas d'un grand poids en faveur de la haute antiquité de l'église de Saint-Cyr. Nous n'avons aucun moyen de contrôler la valeur de celui d'Albert le Grand sur ce point. Bien que son histoire ne soit pas un chef-d'oeuvre de critique, il a pu connaître avec certitude certains faits dont les preuves ont disparu. Sa réputation de crédulité empêche de croire en général tout ce qu'il avance ; mais quand on descend dans le détail des faits dont il n'indique pas les preuves, on constate, parfois avec surprise, que les traditions qu'il rapporte sont confirmées par des documents ou des faits qu'il n'a certainement pas connus.

En ce qui concerne l'église de Saint-Cyr, il n'est nullement invraisemblable qu'elle ait été construite au Vème siècle. La nature des tombes qu'on trouva en 1764, prouve que le cimetière qui l'entourait remonte à une très haute antiquité. La « grande tombe, de la même pierre tendre que celles trouvées sous le cavalier de la porte Saint-Pierre », eût été très curieuse à examiner : on eût pu peut-être en fixer la date, en la comparant aux pierres tombales trouvées à Saint-Similien et à Saint-Donatien (abbé G. Durville). 

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