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Aspect extérieur de la Cathédrale de Nantes en 1933

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Extérieur de l'édifice - Construction

L'ordonnance extérieure de la cathédrale de Nantes est caractérisée par l'harmonie calme et majestueuse de ses lignes et de ses proportions. De quelque point de vue qu'on l'examine, elle offre toujours un aspect de robustesse et de simplicité grandiose. Et, si l'on excepte les deux tours, qu'un tardif changement introduit dans les plans a laissé s'enfoncer dans le toit de la nef, tout satisfait le regard dans cet édifice, où la sobre élégance de la décoration fait ressortir la puissance et l'équilibre de l'ossature.

L'abside avec sa ceinture de chapelles rayonnantes, d'arcs-boutants et de galeries ajourées, les hautes nefs aux larges verrières, les contreforts puissants couronnés d'une forêt de pinacles, la façade imposante surmontée de ses deux tours massives, tout cela forme un ensemble d'une beauté mâle et donne une impression de force et de stabilité.

Façade. — La façade ne manque pas de grandeur avec ses cinq portes monumentales. Trois de ces portes s'ouvrent sur les nefs : elles sont séparées par des contreforts, dont l'éperon saillant apparaît seulement au-dessus des pieds-droits. Les deux autres, par une disposition originale et gracieuse, se présentent, en retour d'équerre, à la base des tours du côté nord et du côté sud. Les galeries et les fenêtres constituent comme une deuxième zone. Un troisième étage est formé par le pignon des combles et les deux tours. Cette façade, malheureusement construite en matériaux peu résistants, a beaucoup souffert des intempéries et des hommes.

La série des cinq portails forme, de beaucoup, la partie la plus belle et la plus intéressante du monument.

Ces portails, en effet, présentent des ébrasements profonds, garnis de moulures prismatiques, qui se poursuivent dans l'archivolte. Entre ces moulures, soulignées par des guirlandes d'une grande délicatesse, se creusent de larges canaux qui, dans les voussures, abritent de longues files de figurines. 

Autrefois, les piédroits étaient garnis de statues surmontées de dais sculptés. Leurs piédestaux qui subsistent encore sont ornés de charmants hauts-reliefs. Les voussures n'ont jamais été couronnées des frontons aigus projetés : c'est à tort, qu'au XIXème siècle, on a « restauré » l'un d'eux au bas de la tour nord. Les entrées sont partagées en deux baies par un trumeau qui supporte un linteau en arc déprimé. Les tympans des deux portails latéraux sont ajourés. Le tympan du portail central dut l'être aussi primitivement ; on se vit sans doute obligé de changer cette disposition pour l'établissement de la tribune de l'orgue (Note : On a prétendu à tort, qu'à l'origine, ce tympan était décoré d'un bas relief représentant le Jugement dernier. Il faut se rappeler que le premier architecte de la cathédrale, Guil. de Dommartin était tourangeau. Comme à Saint-Gatien de Tours, dont l'influence est indéniable dans la façade de Saint-Pierre de Nantes, il est hors de doute que le tympan central devait être ajouré ainsi que ceux des portes latérales. Peut-être, lorsqu'il fut aveuglé, ce tympan fut-il décoré d'une peinture ou d'un relief représentant le Jugement dernier? Un tableau de Guesdon, (XIXème siècle), conservé chez M. Chevalier-La Barthe, représente le Jugement dernier de Michel-Ange mis en relief sur ce tympan de la cathédrale de Nantes ; cela paraît être pure fantaisie d'artiste). 

Le portail central était dédié à la Vierge, dont l'image se dressait devant le trumeau, entourée des statues des apôtres (Note : C'est ce que nous montre le tableau de Loysel, de 1775, conservé dans la sacristie de la cathédrale). Cette image est remplacée aujourd'hui, avons-nous dit, par une statue de saint Pierre, sculptée par Grootaërs, et abritée sous un dais moderne, au pinacle disproportionné. Le portail de gauche est consacré à saint Pierre, celui de droite à saint Paul et leur statue ornait primitivement le trumeau (Note : Nous parlons ici de la droite et de la gauche du spectateur tourné vers la façade). Le portail latéral de la tour du côté nord est désigné sous le nom de portail des saints Donatien et Rogatien ; celui de la tour du côté sud, sous le nom de portail de saint Yves. 

Ces cinq portiques dans l'éclat de leur prime jeunesse devaient former un ensemble d'une merveilleuse beauté. Anne de Bretagne parlait avec admiration, « du somptueux édifice du portail et église de Nantes », et le duc François II, dans ses lettres patentes, affirmait que ce monument « tant bel et magnifique » devait contribuer « non seulement à l'honneur et louange de Dieu, mais aussi de tout le peys et duché ». Entre les deux contreforts de droite, à la base de la tour sud, on aperçoit une chaire extérieure couronnée d'un dais très orné, grossièrement obstruée depuis deux siècles. Au-dessus des trois portails, se profilent deux galeries superposées garnies de balustrades. 

Entre les deux galeries des tours, se dessinent des arcatures aveugles en arc brisé, couronnées par une accolade à deux contre-courbes ; entre celles de la façade, placées à un niveau plus élevé, apparaissent des arcatures plus petites, en anse de panier, surmontées de deux baies rectangulaires séparées par des niches. 

Au-dessus de la deuxième galerie de la façade, une grande fenêtre au remplage flamboyant d'un motif élégant et simple remplit toute la largeur du mur entre les contreforts. Le pignon, de construction légère, se couvrait d'une décoration capricieuse de réseaux ondulés en relief (Note : Ces reliefs ont disparu). La base est marquée par une troisième galerie en encorbellement qui se poursuit sous les baies ajourées des beffrois.

Nefs. — Des arcs-boutants à double volée, contrebutent la grande nef. Ceux du côté nord remontent au XVIIème siècle. Leurs arcs supérieurs sont consolidés par des arcatures sans élégance qui reposent sur les reins des arcs inférieurs. Ceux du côté sud, de construction plus légère, remontent au XVIème siècle. Quelques-uns malheureusement ont été reconstitués en ciment armé au grand dommage de l'esthétique. Des gargouilles grimaçantes et de fines arcatures forment l'ornementation des contreforts courts et massifs. Un dallage incliné recouvre les bas-côtés. On l'a naguère rendu imperméable au moyen d'un enduit bitumé.

Une étroite balustrade borde les combles de la nef (Note : Du côté du midi, cette balustrade a été remplacée au début du XXème siècle par un vulgaire appui-main en ciment). Les bas-côtés en sont dépourvus.

Façades des transepts. — La façade du côté sud fut élevée entre 1632 et 1637 par les architectes associés qui posèrent les voûtes de la nef. La porte est conçue dans un style classique sans caractère. Au-dessus, la muraille entière est ajourée par l'immense fenestrage que nous avons mentionné plus haut et dont les longs meneaux ne semblent tenir que par miracle. Les rampants du pignon sont couronnés de curieux crochets à têtes humaines, personnifiant tous les âges de la vie, de l'enfance à la vieillesse.

La façade nord est moderne. Le portail est inachevé ; la fenêtre, avec son triforium, est d'une belle venue. Pour éviter de nuire à la solidité de cette façade en la surchargeant d'un pignon de pierre, on s'est contenté de fermer le comble d'un hideux pignon de bois peint en noir.

Chevet. — Ce chevet se raccorde avec élégance aux constructions anciennes et achève noblement l'édifice. Ses proportions harmonieuses, l'équilibre de ses parties, la charmante simplicité du décor, en font une oeuvre de logique et de bon goût. Les arcs-boutants, mieux conçus que ceux de la nef, reprennent le tracé en quart de cercle. Ils sont à double volée au-dessus des chapelles latérales, mais simples au-dessus du déambulatoire. Des groupes de clochetons légers couronnent les piles médianes et les contreforts, qui s'ornent eux-mêmes, dans leur partie supérieure, de pinacles et d'arcatures décoratives.

Les chapelles rayonnantes, avec leurs larges baies aux meneaux délicats, leur corniche ornée d'un double cordon de guirlandes, leur toit conique égayé de gracieuses fenêtres de comble, leur balustrade ajourée, forment autour du choeur la plus riche et la plus séante des parures.

Tours. — Les tours jusqu'à la hauteur du pignon font partie de l'ordonnance générale de la façade. Elles sont flanquées de puissants contreforts qui montent par retraits successifs et se terminent au sommet des tours par de maigres clochetons. Leur base dans laquelle s'ouvrent les portails des bas-côtés, se couvre de niches, de dais et de pinacles finement sculptés jusqu'à la hauteur de la première balustrade du portail central. Jusqu'aux beffrois, ils se creusent de larges cannelures. Le deuxième étage est éclairé d'une étroite fenêtre. Seules deux longues arcatures géminées décorent la nudité de la muraille. Les beffrois, au-dessus des combles, sont ajourés de larges fenêtres à meneaux et sont couronnés d'une balustrade. La séparation des trois étages est également marquée par des balustrades supportées par des corniches saillantes, décorées de plusieurs bandeaux de feuillage.

Les tours s'élèvent à 63 mètres de hauteur. On accède au sommet par un escalier en colimaçon de 286 degrés. Ces degrés sont très usagés dans la tour sud qui contient le beffroi et qui, pendant la Révolution, et, au début du XIXème siècle, était surmonté d'un observatoire. Du haut de ces tours, on découvre l'horizon jusqu'à dix lieues à la ronde.

Avant la Révolution la sonnerie de la cathédrale était très réputée. Elle se composait de douze cloches ; la plus grosse pesait 18.000 livres. Il fallait 32 hommes pour les mettre toutes en branle. En 1802, lors du rétablissement du culte, il n'en restait qu'une seule. En 1933, la sonnerie avec ses huit cloches est une des plus puissantes et des plus harmonieuses de France. Ces cloches portent les armoiries de Mgr de Hercé. La plus grosse d'entre elles pèse 5650 kilos, et la seconde 4010 kilos. La plus faible est de 690 kilos. On a vu comment cette sonnerie, montée dans la tour nord, fut transportée dans la tour sud en 1842 (Cf. Félix Libaudière : Annales de la Société Académique Nantes, 1899, p. 13).

 

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Extérieur de l'édifice - Décoration
Sculptures des portails

Les sculptures des voussures et des piédestaux nous présentent, en une magnifique synthèse, les plus beaux traits de la Bible, de l'histoire de saint Pierre et de saint Paul, patrons de la cathédrale et de quelques saints de Bretagne. Malheureusement, ces charmantes miniatures sont très endommagées et il est assez difficile parfois de reconnaître les sujets traités et de restituer les inscriptions gothiques qui les accompagnent. Cette oeuvre porte la marque de la fin du XVème siècle. Elle a été exécutée par les artistes bretons Robin et Louis Hochard, dans le style délicat de l'école de Touraine et des bords de la Loire. On y retrouve aussi nettement l'influence des Mystères dans les costumes et l'attitude des personnages. Toutes les scènes sont traitées avec un réalisme touchant de naïveté, de bonhomie et de grâce.

Sculptures des piédestaux. — Les histoires des piédestaux sont mises en valeur par un délicat encadrement d'architecture réduite et de feuillages d'une finesse extrême. Elles commencent sur la partie la plus saillante du contrefort qui sépare le portail central de la porte saint Pierre. Elles se déroulent dans leur suite logique, de gauche à droite, le long des piédroits des portails de la Vierge et de saint Paul.

Les premiers sujets ont complètement disparu. On relève seulement des inscriptions savoureuses comme celles-ci : « Comme les diables trébuchent de Paradis en enfer. — Comme Dieu fait les bêtes et les serpents. — Comme Dieu présente les bêtes à Adam en Paradis terrestre. Comme Dieu défend le fruit de vie à Adam et Eve dans le Paradis terrestre. — Comme Dieu met des robes de peaux de bêtes sur Adam et Eve ».

Apparaissent ensuite, mais dans un état de déprédation lamentable, des scènes diverses représentant : « Comme Adam et sa femme labourent » ; l'histoire de Caïn et d'Abel, celle de Noë. A droite du portail de la Vierge et sur les piédestaux de la porte saint Paul nous lisons l'histoire d'Abraham, de Sara et de la servante Agar, celle d'Isaac et de Rebecca. Nous reconnaissons la mort d'Abel, la construction de l'arche, Noé y faisant entrer sa famille et les animaux, offrant à Dieu un sacrifice après le déluge, plantant la vigne et faisant la triste expérience du vin. Plus loin nous voyons Dieu bénissant Abraham et Sara, Agar prenant avec son fils le chemin du désert, Agar découragée et pleurant, Agar guidée par un Ange et découvrant un puits, Dieu demandant à Abraham le sacrifice d'Isaac, la mission d'Eliézer.

Puis l'histoire d'Isaac et de Rebecca se continue, à l'intérieur sous la tribune de l'orgue, le long des piliers. Ici les « images » ont moins souffert ; elles ont été restaurées, d'ailleurs, avec un goût parfait par l'artiste nantais Thomas Louis, au milieu du XIXème siècle. Les inscriptions gothiques sont restées parfaitement lisibles.

Au pilier de gauche, on voit : « Comme Hélizer donne vessiaux d'or et d'argent et riches vêtemens à Rebecca et plusieurs dons à sa mère et à ses frères. — Comme assemblement font convi et font la grande feste du mariage qui doilt estre de Isaac et de Rebecca. — Comme le lendemain du geu, Hélizer demande congié de s'en retourner à son maître Abraham. — Comme les parens de Rébecca luy demandent si ce est son vouloir de s'en aler à Isaac et elle répons qu'ouil »...

Suivent le départ de Rebecca et son arrivée dans la terre de Canaan : « Comme Rebecca s'en va avec Hélizer et on luy baille en sa compagnie Delbora, sa nourisse et aultres chamberières. — Comme, sur la vesprée, Isaac s'en va par ung champ qui est en Bersabée, pour Dieu prier et pour les estoilles contempler. — Comme Rebecca, de loing voyant Isaac, descend de son chamois et demande à Hélizer : qui est cest homme qui vient au devant de nous ? Il dit que c'est son seigneur ». Ici, quelques scènes ont été détruites malheureusement lors de la construction de la tribune de l'orgue. Le récit reprend et nous montre : « Comme Isaac culture la terre et elle luy apporte cent fois plus, dont plusieurs de Gerares eurent grant envie contre luy, — Comme Dieu apparaissant à Isaac luy donne sa bénédiction et luy promet multiplier sa génération. — Comme Isaac après la vision construit un autier (autel) en Bersabée et prie le Seigneur ». Viennent ensuite la bénédiction dérobée par Jacob à Esaü et, sur l'autre pilier, le commencement de l'histoire du mariage de Jacob. Des inscriptions nous racontent naïvement : « Comme Esaü s'en va chassier pour donner à mangier à son père à fin d'avoir sa bénédiccion. — Comme Rebecca dit à son fils Jacob qu'il donne à mangier à son père Isaac pour avoir sa bénédiccion, tant qu'Esaü est dehors pour chassier. — Comme Rébecca vestit son fils Jacob de la robe d'Esaü et luy enveloppe les mains et le col de peaux de chevreaux pour donner entendre à Isaac que c'était Esaü. — Comme Jacob donne à mangier à son père Isaac, et Isaac le touche et cuide (pense) que c'était son fils Esaü et en le baisant luy donne sa bénédiction. — Comme Esaü vient de la chasse cuidant donner à mangier à son père ; mais il connait par la réponse de son père que Jacob, son frère, l'a supplanté. — Comme Esaü médite contre son frère Jacob et (parle) de le tuer. — Comme Rebecca conseille son fils Jacob et l'envoie demeurer chez son oncle Laban de peur que son frère Esaü ne le tue. — Comme Isaac envoye son fils Jacob en Mésopotamie prendre femme une des filles de Laban son oncle. — Comme Jacob, en pleurant, baise Rachel en lui disant qu'il est son cousin germain. Et aussitôt la pucelle Rachel le va dire à son père Laban. — Comme Laban vient au devant de Jacob, son neveu, et commence à l'embrasser et baisier... — Comme Jacob montre à son oncle Laban la cause de sa venue et luy dit que volontiers le servirait sept ans pour avoir Rachel, sa fille, en mariage. — Comme Jacob demande à Laban sa fille Rachel pour son service de sept ans. Et Laban assemble ses amis et fait joyeux conj (union) et solennelles nopces. — Comme Laban ... baille à Jacob son aultre fille Lye et cuide Jacob que c'étoit Rachel... — Comme Jacob aperçut au matin que c'était Lye ... et non Rachel. — Comme Jacob se plaint de ce que Laban luy a baillé Lye pour Rachel. Et respondit Laban que c'est la coutume (l'aînée) fille doibt première estre mariée. 

Le cycle se termine, à l'extérieur, sur les piédestaux de la porte saint Pierre. Là étaient représentés, le départ de Jacob et de Rachel pour le pays de Canaan, la réconciliation de Jacob et d'Esaü. Tout avait disparu en 1933. On reconnaîssait pourtant encore à cette époque quelques scènes mutilées de la touchante histoire de Joseph.

Sur les piédestaux de la porte latérale nord, on peut relever quelques vestiges de sculptures, mais tellement dégradées qu'il est impossible d'en deviner le sujet. Les bas-reliefs des soubassements de la porte sud, près du Calvaire, sont également mutilés, mais trois inscriptions qui subsistent encore nous permettent de supposer qu'elles retraçaient la légende de saint Christophe. Elles nous disent : « Comme le roi Dagnus cuide le faire martyriser de saïètes (sajettes, flèches), lesquelles saïetes ne vinrent à toucher Christophe. — Comme le roi cuidast que saint Christophe fut plein de saïètes ; et comme il se moquait de lui, une saïète descendit de l'air et lui creva ung oil. — Comme le roi après... (plusieurs mots manquent) et fut par Christophe son oil guari ».

La Légende dorée nous éclaire sur le sens précis de ces inscriptions, dans ce passage touchant le martyre de saint Christophe : « Alors le roi (Dagnus) ordonna que ce Christophe fut lié à un poteau et il commanda à quatre cents soldats de le percer de leurs flèches. Mais les flèches restaient en l'air et aucune ne put le toucher, et le roi croyant qu'il était percé se mit à le railler et aussitôt une des flèches vint et lui creva un oeil. Et Christophe dit : Ma carrière est presque finie ; demain, tyran, délaye de la boue avec mon sang, et mets-le sur ton oeil et tu en recouvreras l'usage. Le roi ordonna de lui trancher la tête ; ce qui fut fait. Et prenant du sang de Christophe, il le délaya avec de la terre, le mit sur son œil, et il fut sur le champ guéri ».

 

Sculptures des voussures. — Ces sculptures, qui étaient hors de portée pour les marteaux des iconoclastes, sont dans un meilleur état de conservation. Les scènes  sont formées par des groupes de figurines en haut-relief reposant sur des consoles et abritées sous de petits dais délicatement sculptés. Elles se succèdent à intervalles réguliers dans les gorges des voussures.

Celles du portail central représentent, à la base et à gauche, la résurrection des morts ; à droite les tourments de l'enfer ; au-dessus la présentation des âmes, et, dans la partie supérieure, le bonheur des élus couronnés dans le ciel. Ces figurines sont traitées avec un art achevé et quelques-unes, surtout celles qui reproduisent des scènes infernales sont animées d'une vie intense. Dans l'archivolte de la porte saint Pierre se déroulent divers épisodes de la vie de l'Apôtre (Note : Nous étudions les voussures des portes Saint-Pierre et Saint-Paul de bas en haut, celles qui sont à gauche, puis celles qui sont à droite du spectateur). Sa vocation ; sa première prédication ; sa délivrance de prison par un ange ; sa flagellation ; sa rencontre avec Simon le magicien ; sa comparution avec saint Jean devant les prêtres, les scribes et les pharisiens ; leur prédication nouvelle ; la résurrection de Dorcas, la bienfaitrice des pauvres ; l'entretien avec le centurion Corneille ; l'apôtre devant le tribunal d'Agrippa ; la punition d'Agrippa, la chute de Simon ; saint Pierre traduit devant Néron ; son emprisonnement avec saint Paul dans la prison Mamertine. La dernière scène, probablement celle du martyre, n'existe plus. 

Au-dessus du trumeau au milieu du tympan ajouré, se détache un petit édifice finement ouvragé, accosté de deux personnages assis fort mutilés.

Les voussures de la porte de droite racontent la vie de saint Paul. Elles nous représentent, à gauche, Paul assistant au martyre de saint Etienne ; demandant au grand-prêtre des lettres pour persécuter les chrétiens ; entrant dans les maisons et maltraitant les fidèles ; renversé sur le chemin de Damas et transporté à Damas. Les sujets de la voussure voisine manquent de clarté. On pourrait y voir, une prédication de saint Paul ; la prophétie d'Agabus concernant les mauvais traitements qu'il doit subir à Jérusalem ; saint Paul devant l'Aréopage ; saint Paul descendu des murailles de Damas dans un panier et traversant la mer pour aller à Rome.

Les sujets des voussures, à droite, s'inspirent de la Légende dorée autant que des Actes des Apôtres. Ils nous montrent saint Paul prêchant devant les chrétiens de Rome ; Patroclès, le jeune favori de Néron tombant d'une fenêtre pendant son discours et se tuant sur le pavé ; sa résurrection ; la comparution de Patroclès devant Néron et son emprisonnement ; saint Paul traduit à son tour devant Néron et condamné à mort, marchant au supplice et recevant le voile de Platille pour se bander les yeux ; saint Paul, décapité par ses bourreaux, apparaissant ensuite à Néron qui relâche Barnabé et Patroclès ; saint Paul conversant avec Luc et Titus, auprès de son tombeau, devant des soldats ; un homme tenté de suicide et délivré par le saint.

Au-dessus du trumeau, un groupe plus important représente le miracle qui suivit le martyre : la tête de l'apôtre rejoignant son corps, retrouvé au milieu des champs où il avait été jeté.

Les sculptures de la porte saint Yves ont beaucoup souffert. Voici les sujets de la légende les plus faciles à reconnaître. Saint Yves retiré dans sa grotte il donne l'hospitalité à un pauvre qui avait passé la nuit auprès de sa porte et le revêt de ses habits ; il couche à la place de ce pauvre, la nuit suivante, à la belle étoile ; il demande au seigneur de Rostrenen la permission de couper du bois dans ses forêts pour construire la cathédrale de Tréguier ; à la place des pieds d'arbres coupés poussent trois arbres nouveaux ; les poutres s'allongent miraculeusement ; saint Yves achète du drap pour vêtir les pauvres ; il soigne un malade ; ensevelit un mort ; donne un vêtement qu'on lui apportait à un mendiant ; il prêche ; fait le catéchisme à des enfants ; fait transporter un pauvre chez lui ; soigne ce pauvre de ses mains ; passe à pied sec une rivière dont il a écarté les eaux d'un signe de croix ; il essaie de réconcilier un fils avec sa mère ; célèbre la messe à cette intention et la réconciliation s'opère ; il meurt entouré de ses disciples. 

Les sujets traités dans l'archivolte du portail saints Donatien et Rogatien ont trait évidemment à la vie des deux saints, mais restent d'une interprétation très difficile. L'artiste s'est probablement inspiré de sources étrangères à la légende traditionnelle, dont nous avons perdu la trace. Au témoignage d'Albert le Grand, un mystère de saint Donatien et saint Rogatien, fut représenté à Nantes en 1492, à peu près à l'époque où s'exécutaient les travaux. Il paraît vraisemblable que beaucoup de scènes du portail aient été tirées du drame sacré.

Nous reconnaissons, à gauche, la réception d'un évêque, saint Similien peut-être, qui baptisa Donatien ; des scènes de prédications ; un prince et une princesse sur un trône (peut-être le père et la mère des saints martyrs, qui auraient occupé un rang distingué à Nantes et en Bretagne). Plus loin, on voit un personnage assis, un lit somptueux près duquel veille un démon ; le prince et la princesse, à nouveau, sur un trône ; une tour environnée de personnages qui s'agitent autour des portes. A droite, saint Donatien et saint Rogatien, vêtus de longues tuniques, apparaissent garottés entre des soldats ; ils refusent de sacrifier aux idoles ; ils sont traduits devant le juge ; conduits en prison sous escorte les mains liées ; deux amis à genoux tentant de les fléchir. Nous les retrouvons devant le juge, en prison, où ils sont soumis à la torture et environnés d'anges consolateurs. Le prince et la princesse, que nous avons rencontrés plus haut, semblent essayer une dernière fois d'ébranler leur courage. Le juge prononce leur condamnation. Enfin les deux saints couchés sur le chevalet consomment leur martyre au milieu des supplices.

Sur le tympan, est traité un sujet plus étendu. Au sommet de deux collines, des personnages en groupes prient à genoux. Toute une foule dominée par un personnage à cheval les considère avec attention dans la vallée. C'est une allusion à un fait miraculeux raconté par tous les hagiographes : la ville de Nantes délivrée des barbares par l'intercession des deux martyrs. Nantes, assiégée par Marcile Chillon était réduite à sa dernière extrémité. Deux processions, venant l'une de Saint-Donatien, l'autre de Saint-Similien, se rencontrèrent pour prier : il était minuit : les "processionnants", vêtus de blanc, portaient des cierges allumés. A cette vue, une terreur subite s'empara de l'armée ennemie qui s'enfuit. Ainsi fut sauvée la ville assiégée depuis deux mois (Saint Grégoire de Tours : De gloria martyrum : cap. LX).

(J.B. Russon et D. Duret - 1933) 

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