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LES MOUTIERS-EN-RETZ

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L'ÉGLISE DE PRIGNY ET LE PRIEURÉ DE SAINT-NICOLAS

 

LA BAIE DE BRETAGNE

Le voyageur qui arrive au village de Prigny, dans le territoire de la commune actuelle des Moutiers, se doit de gravir tout d’abord la pente du promontoire qu’on nomme la Tour ou le Château. Il se trouve placé, là, sur un bloc de rochers schisteux, donc très ancien, qui domine le marais voisin d’une hauteur de quelque vingt-cinq mètres. Du haut de cette éminence, sa vue s’étend sur une immense étendue de terre et de mer, champ de bataille où, pendant des milliers d’années, ont lutté l’un contre l’autre le continent solide et l’élément liquide.

Du haut du Belvédère

De la colline de Prigny, l’homme aperçoit, sur la droite, la pointe de Saint-Gildas en Préfailles, qui continue vigoureusement, jusque dans l’océan, les hauteurs de Pornic et de la Bernerie. Devant lui, c’est l’indéfinie mouvance des flots gris ; mais, à sa gauche, la ligne de l’horizon cesse d’être l’imprécise rencontre de l’air et de l’eau : elle est constituée par un rivage lointain et monotone, celui de l’île de Noirmoutiers, qui s’est couchée sur les flots à quelque douze kilomètres de Prigny. Continuant de tourner sur sa gauche, le spectateur ne devine même pas la dépression qui laisse passer la marée entre l’île et la pointe de Fromentine en Vendée : Noirmoutiers touche la terre ferme, dirait-on.

Le continent, que l'oeil vient d’atteindre, n’est d’abord que marais bas et vaseux. Mais il se relève ensuite pour former les modestes hauteurs où se sont assises les cités maraîchines de Beauvoir, Bouin, Machecoul et Bourgneuf. Le marais lui-même rompt partout sa monotonie en se parant, à la belle saison, de mulons de sel qui sont piqués çà et là, comme de blanches tentes de nomades, sur les « bossis », dans le réseau serré des étiers.

La Baie de Bourgneuf

Que le touriste attende seulement que le jusant ait emporté les eaux de la marée vers la haute mer, et il sera stupéfait de constater que la terre se continue, grise et grasse, entre Beauvoir et Les Moutiers, sur une longueur qui peut atteindre huit kilomètres : ce n’est plus de l’eau, c’est de la vase qui s’étale sous ses regards.

Et il a peine, alors, à s’imaginer qu’il a devant lui, pourtant, la Baie de Bourgneuf, la « Baie en Bretagne », comme disait Froissart en 1380, « l’un des plus beaux hâvres de notre païs ». Il lui faut faire un effort pour se rappeler que, dans cette baie, naguère encore, flottaient hardiment des goélettes par centaines, et même des trois-mâts au long cours. Des ports, pleins d’activité, les accueillaient à Machecoul, puis à Prigny, puis à Bourgneuf, et cela jusqu’à la fin du XVIème siècle : marchands et marchandises y abondent, déclarait le duc François II.

C’est que l’immense baie s’envase depuis des siècles : la mer boueuse y apporte les terres que lui charrient la Loire et même la Garonne ; elle y ajoute les sables qu’elle arrache aux dunes de Pornic et de La Bernerie. Quand elle atteint son plein — le mort d’eau — elle dépose sur le fond une imperceptible couche d’alluvions ; le jusant emporte le reste, non sans en laisser accroché aux multiples rochers qui jalonnent la baie. Et c’est ainsi que, lentement, implacablement, s’est envasé la profonde baie qui attira jadis Anglais et Hollandais, Espagnols et Norvégiens. Des sondages ont permis de constater que la couche d’alluvions marins dépasse souvent vingt mètres d’épaisseur.

Le Collet

Avant de quitter son belvédère, le voyageur regarde en face de lui, vers le midi, un bouquet d’arbres étrangement planté sur la nudité du marais. Qu’est-ce ? C’est le Collet, un ancien îlot schisteux qui rétrécissait jadis la passe des bateaux cinglant vers le Port La Roche, en Machecoul. L’accumulation des vases l’a rattaché au continent. Jadis, il porta château-fort et fut doté d’artillerie : il commandait le chenal du côté du Nord. Au surplus, placé à l’entrée de l’étier du Millac, pendant plusieurs siècles, il fut l’un des ports de la Baie. Pendant la guerre de Succession de Bretagne, Espagnols et Anglais l’occupèrent tour à tour, en 1342 ; il continua d’être un enjeu convoité pendant la Guerre de Cent ans, et, plus tard, au temps des Guerres de Religion, Henri IV fut tout aise de s’en emparer. C’était donc une position stratégique de premier ordre.

L'Ile de Bouin

De l’autre côté du chenal, au Sud, s’éleva longtemps l’île de Bouin ; les navires en faisaient le tour complet, passant par le Collet pour gagner l’estuaire de la Loire, et par le Dain pour cingler vers le Sud et la Gascogne. Le Dain n’est plus qu’un étier qu’il faut curer pour y faire écouler les eaux du continent. L’île de Bouin n’est plus une île ; elle est un vaste polder rattaché aux terres de la Vendée. Son bourg, qui fut jadis un prieuré bénédictin perdu en mer, est maintenant séparé de l’océan par trois, quatre et même cinq kilomètres de prairies. Aussi bien, entre l’extrémité septentrionale du territoire de Bouin et la pointe du Collet, l’on ne compte aujourd’hui que quatre cents mètres de sables vaseux, que recouvre chaque haute marée en toute saison.

Note : Coutume de l'isle de Bouing (texte tiré d'un manuscrit de 1229) : « C'est icy la vraye, très ancienne et depuis plusieurs siècles, coustume de l'isle de Bouing, copiée et tirée mot à mot sur un vieil livre manuscript, lequel contient la coustume générale de toutes les Marches Communes d'entre Poictou et Bretaigne ».

1° le terroir appelé l'isle de Bouing est commun pour non-divis entre les Sires de Rays, par devers Bretaigne et M. de la Garnache et de Thouars, devers Poictou d'autre... Chacun a plainière juridiction sur tous les habitants de la dicte isle.

2° Les prises de mer (terrain conquis). Si pour une cause quelconque l'un des seigneurs y a droit, l'autre seigneur en peut prendre et avoir autant.

3° Les fiefs : la paroisse tient au baron de Rays et le baron de Rays tient du duc de Bretagne à cause du seigneur de Nantes, et le Poictou est le sire de Pouzauges, et le sire de Pouzauges tient à la Garnache, et la Garnache de Thouars, et Thouars tient du comte de Poictyers.

4° Y a deux juridictions, l'une de Bretaigne et l'autre juridictio de Poictou, chacune comprenant : séneschal, aloué, lieutenant, procureurs et greffiers, receveurs et controlleurs et quatre sergents.

5° Les Assises : « Deux fois l'an les d. procureurs pourront si faire le veulent, scavoir celuy dudit Bouing pour la juridiction du Poictou faire assigner à toutes les grandes assises en la cohue et halle de Beauvoir sur Mer et ledit seigneur dudit Bouing pour la Bretaigne pareillement pourra faire assigner les grands plaids généraux au bourg de Prigny-en Rayz.

6° Celui qui citera un Bouinais en territoire breton ou poictevin paiera une amende pour avoir contrevenu aux privilèges des Marches.

7° Les Procureurs. Les non-residents qui possèdent des domaines à Bouin seront tenus d'y faire choix d'un procureur chargé de réparer les chaussées, levées et terriers de mer.

8° Conservation des Digues ; les habitants doivent se conformer aux réglements pour icelle isle préserver et garder d'être submergée et ruinée par l'eau de mer et pour la conserver et maintenir en suffisant estat et en valeur à perpétuité.

9° Il faut autorisation de la justice pour mettre coueffs et bondes de bois ès chaussées et chemins publics. [les coefs sont des canalisations ou genres de buses en bois, permettant d'admettre l'eau dans les marais salants ou d'un étier à l'autre. Coef viendrait du breton Boat qui signifie bois].

9° Brèches : Quand une brèche s'ouvre dans une chaussée, la réparation doit être faicte au lieu ancien désigné par les papiers des chaussées de la dicte isle.

Il y a ainsi plusieurs dizaines d'articles concernant la juridiction et la vie économique de l'île de Bouin. (Cf. Yves Cheneau, Les Marches communes du Poitou et de Bretagne).

 

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LE CHATEAU-FORT

Le Château de Prigny

Regardant maintenant sous ses pieds, le touriste peut constater que les terres, qui couvrent le promontoire de Prigny, ont été terriblement bouleversées. C’est que là les hommes ont tour à tour bâti et démoli. Une telle éminence touchant la mer océane se devait d’être utilisée. Pour nous en tenir aux temps historiques, les Romains eurent là des établissements : poste de vigie, garnison temporaire, accompagnés de fonderie et d’ateliers de construction. Le port les intéressait au premier chef, et une voie romaine, venant de Nantes par Port-Saint-Père, y aboutissait.

Le Haut Moyen-Age y bâtit à son tour une forteresse qu’occupèrent d’abord les seigneurs de Prigny, puis les sires de Retz, forteresse qui défendait le pays contre les agressions venues de la mer, et qui servait de refuge en cas d’agression venue par terre. Le château fort étendit sa tutelle sur Le Clion, Saint-Cyr, Saint-Hilaire-de-Chaléons, et sur toute la côte nord de la Baie.

L’enceinte

L’enceinte du château se devine encore facilement. Elle est limitée, au Sud, par la mer qui bat les rochers à vingt mètres plus bas. A l'Est, un ruisseau — le Millac — occupe le fond du ravin très profond lui aussi. Longtemps ce ruisseau fut un bras de mer, une sorte de fjord, qui permettait à l’eau marine et aux bateaux de gagner, plus au Nord, le port de Prigny. Ce port, on le voit encore, peut-on dire : il occupait l’emplacement de la vaste prairie du Harouteil.

Sur le côté nord, pour protéger le château, il a fallu fouiller profondément le roc qui rattache le promontoire aux terres voisines : la douve existe toujours, à demi comblée de détritus et couvertes de ronces et d’épines. Enjambant cette douve, un pont permettait d’accéder à l’abbaye de Saint-Nicolas, toute proche. A l’Ouest, enfin, une dépression de terrain fournissait une défense naturelle qui entourait la « ville » de ce côté et rejoignait la mer entre Prigny et le village de la Croix : celle vallée se voit encore, bien qu’elle aussi ait été à demi comblée çà et là.

Telle qu’elle, l’enceinte de Prigny, ville et château compris, atteignait ses mille mètres de longueur ; Guérande n’a que mille mètres de muraille. Par la superficie, Prigny peut donc lui être comparé.

Le Donjon

Perché sur sa butte, le château proprement dit devait avoir grande allure. Son donjon — la Tour, comme on dit encore — avait des murs épais de trois mètres ; il était, dit-on, chaussé d’un terre-plein qui formait terrasse et parapet à la fois. De tout ceci, l’on put se rendre compte quand, en 1832, un monsieur Bruëre, de Bourgneuf, acheva de démolir ce qui subsistait du château.

Près du donjon, mais séparée de lui par un fossé et un pont-levis, s’élevait la demeure seigneuriale qui formait un vaste quadrilatère : c’est là que se rencontrèrent Jean IV de Montfort, duc de Bretagne, et Jeanne la Folle, baronne de Retz, pour traiter de leurs intérêts communs au XIVème siècle. Tout semble avoir été démoli, peu à peu, à partir du XVIIème siècle, car c’est en 1690 que fut transférée à Bourgneuf la juridiction de Prigny. Désormais, c’était Machecoul qui régnait et c’était Bourgneuf qui bénéficiait de la Baie.

La Butte Saint-Jacques

Avant de quitter la motte du château de Prigny, il faut jeter un coup d’oeil sur la butte voisine, du côté de l'Est, par dessus le ravin du Millac. Sur cette butte se dressa longtemps une chapelle dédiée à saint Jacques, le patron des pèlerins. M. Bruëre affirme en avoir trouvé les fondements. En tout cas, cette chapelle, souvent nommée dans les aveux, était dans un état de délabrement complet en 1768, selon une charte de Louis XV, signée par de Maupéou, où il est question d’attribuer aux Moutiers une parcelle du Clion.

 

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L’ÉGLISE SAINT-JEAN-BAPTISTE

De l’ancien Prigny, il reste, grâce à Dieu, l’église dédiée à saint Jean-Baptiste. Celle-ci se blottit dans l’ombre de deux vieux ormeaux qui ont vu plusieurs siècles. Elle tient le centre d’un étroit cimetière, comme toutes les églises d’autrefois. Un modeste calvaire de granit s’élevait en avant de la façade du monument : il en reste la base carrée qui pouvait servir d’autel en certaines occasions. Auprès de cette croix, le pied foule de vieilles pierres tombales : c’est ce qui reste des tombeaux des curés de Prigny dont les registres nous situent la sépulture en cet endroit.

L'Église Saint-Jean

L’église elle-même semble un édifice très ancien : plusieurs en font remonter la construction au XIème siècle. Elle serait donc l’église du prêtre Heslye qui fit venir à Prigny, pour lui succéder, les moines bénédictins de Saint-Jouin-de-Marnes en Poitou ; ce prêtre vivait au temps de l’évêque de Nantes Quiriac, lequel régna de 1052 à 1076. Rien ne s’oppose, d’ailleurs, à cette haute antiquité dans le bâtiment lui-même ; tout y conduit, au contraire, et les frustes contreforts placés de biais aux coins de la façade, et les autres contreforts qui soutiennent les murs latéraux, à l'Ouest, et qui sont incontestablement du roman primitif : ceux-ci s’amortissent par le glacis usité dans le haut Moyen âge ; à mi-hauteur, un ressaut qui les double s’amortit de même. Les ouvertures accusent la même époque : elles sont de plein-cintre, rares et d’apparence trapue. Une fenêtre, cependant, du côté est, près du chevet, présente un arc légèrement brisé : elle aura été reprise à une époque postérieure. La base du clocher, enfin, massive et lourde, forme un énorme cube de maçonnerie, sans aucune ouverture extérieure. Cette masse carrée mesure quelque sept mètres de côté et s’élève à dix mètres environ. Elle est coiffée d’un toit à quatre rampants, percés d’ouïes minuscules à l’emplacement du campanile ; les rampants s’étirent, en effet, pour devenir une chambre carrée où se balancera la cloche ; ils se terminent enfin par une fléchette aiguë, carapaçonnée d’ardoises, surmontée de la croix et du coq traditionnel.

Il est remarquable que cette vieille église n’est pas orientée : quelque nécessité, sans doute, aura obligé de la construire sur une ligne Nord-Sud. Au Sud, c’est la façade, percée d’une large porte en anse de panier, puis d’une fenêtre qui semble avoir été retouchée, et enfin, dans le haut du pignon, d’un oculus qui donne de l’air à la charpente, comme on en voit un dans la façade de Saint-Jean-de-Béré. Au-dessus de la porte, des armoiries, horriblement martelées, demeurent désormais illisibles : ne seraient-elles pas celles des sires de Retz qui possédèrent longtemps Prigny ?

Au Nord se trouve donc le pignon de chevet : on y a adossé la sacristie, à laquelle on accède par deux portes intérieures. Le mur de ce pignon se trouve avoir un mètre cinquante-cinq d’épaisseur. Une fenêtre, à l'Ouest, éclaire le local. Le toit qui le recouvre est actuellement à deux rampants ; à l’origine, semble-t-il, il n’était qu’un appentis.

Intérieur de l'Église

L’église de Prigny forme un quadrilatère qui mesure, à l’intérieur, dix-sept mètres soixante sur six mètres quatre-vingt-dix. Elle peut donc contenir plus de trois cents personnes assises. En outre du portail de la façade, une porte secondaire y donne accès du côté est. Quatre fenêtres l’éclairent, une au-dessus de chacune des portes, et une de chaque côté du sanctuaire. Partout les murs sont nus et blanchis à la chaux. Dans le bas de la nef, une porte basse donne accès au clocher.

Le vaisseau n’est couvert que d’une voûte en bois qui serre de près la toiture d’ardoises, et qui laisse apparentes les grosses pièces de la charpente. Celle-ci a dû être refaite au XVIIème siècle, car, sur l’un des entraits, on peut lire la date de 1641.

Le pavé, fait de briques cassées, se relève à deux reprises, devant la sainte table et dans le sanctuaire.

Jusque là, donc, tout est pauvre dans cette église. Mais ce qui fait son incomparable richesse, ce sont ses trois autels, oeuvre fastueuse du XVIIème siècle.

Le Maître-Autel

L’autel majeur, dédié à saint Jean-Baptiste, élève jusqu’à la voûte son magnifique rétable composé de colonnes, de guirlandes, de niches et de tableaux. Dans la niche supérieure, on a placé la statue traditionnelle de saint Jean qui tient en main son agneau. A droite, se tient, jeune et svelte, l’évangéliste saint Luc ; à gauche, c’est saint Marcoul, abbé de Nanteuil, qui se dresse, crosse en main. Le tableau central a malheureusement disparu ; lors d’une restauration, en 1876, on plaça, devant le cadre vide, le crucifix de Bouchardon, avec les statues de la Vierge douloureuse et de l’apôtre saint Jean [Note : La droite et la gauche, sur un autel et dans une église, est déterminée par la droite, et la gauche du crucifix qui domine le maître-autel].

Le tabernacle est en bois ; il est orné abondamment, comme le rétable, et surmonté d’une exposition avec palmes et miroir, selon le goût du XVIIIème siècle. Il semble bien, en effet, que tabernacle et rétable, ici, soient, du temps de Louis XV. Une planchette de bois, d’ailleurs, fixée à l’intérieur du tabernacle, porte l’inscription suivante : « Fait par moi, A. Leblanc, maître menuisier, à Nantes, ce 28 août 1752 ».

En bas, le tombeau de l’autel, en bois, porte simplement la croix de Jérusalem.

L’ensemble, peint de couleurs vives, est imposant de grâce et de majesté, avec ses six colonnes aux chapiteaux corinthiens enjolivés de volutes, avec ses têtes d’angelots joufflus, avec ses vases d’où s’échappent des flammes ardentes ... C’est la noble et agréable ordonnance du grand siècle.

L'Autel de la Vierge

Il faut parler de même des deux autels latéraux, puisqu’ils sont de même style et du même temps.

L’autel de la Vierge a donc aussi son rétable classique au-dessus de son tombeau de pierre. Lui aussi, se trouve peint dans chacun de ses ornements ; mais la couleur jaune, qu’on y a prodiguée, n’arrive point à donner l’apparence de l’or. Les quatre colonnes corinthiennes ont leur base ornées à l’excès : des anges y tiennent, de leur bouche, des guirlandes de fleurs et de fruits. Le tableau central a disparu, mais les statues sont demeurées : à droite de la croix, l’on voit celle de saint Joseph, accompagné de la statuette de l'Enfant-Jésus complètement détachée de lui ; à gauche, saint Germain tient en main sa crosse et bénit son peuple.

Ce qui constitue la richesse de cet autel, c’est surtout la statue de la Vierge, évidemment plus ancienne que le rétable : cette statue, en bois, remarquable de tout point, paraît bien être une œuvre de la fin du XIVème siècle.

L'Autel Saint-Augustin

L’autel d’en face est dédié à saint Augustin. Il ressemble tout à fait au précédent, mais il n’est pas, ou il n’est plus colorié. La statue de l’évêque Augustin, qui le domine, est magnifique avec son geste éloquent et sa chappe envolée. Une statue de saint Guénolé, le célèbre saint breton, occupe la niche de la gauche du crucifix ; des épingles la trouent abominablement : c’est que les jeunes filles lui demandent ainsi le prince charmant qu’elles souhaitent. L’autre statue n’est que celle de saint Antoine : elle remplace la savoureuse statue de saint Sébastien, semble-t-il, que fit venir à Prigny, en 1689, le prieur messire Hubin de la Faverie, ou de la Rairie. Quand on fermera, en 1730, la chapelle priorale de Saint-Nicolas, le service religieux sera transféré à l’autel de Saint-Sébastien en l’église de Prigny. — Notons qu’en la même année 1689, le recteur de Prigny faisait aussi venir de Nantes la statue de saint Eutrope ; ces deux oeuvres lui coûtaient soixante et quinze livres. Que sont devenues ces statues ? L’année de leur achat ne serait-elle pas l’année approximative de la confection des beaux autels de l’église de Prigny ?

L’autel de saint Augustin, lui aussi, a perdu son tableau central : la toile peinte ne saurait résister à l’humidité et au temps.

Quelques curiosités

Il reste à noter, dans l’église, la crédence, avec piscine, aménagée dans le mur latéral, près de l’autel majeur : c’est une oeuvre du XIVème siècle, bien dessinée et bien conservée ; un fruste banc de pierre se trouve sur le côté, destiné au choriste ou aux burettes. C’est peut-être au temps où fut créée cette piscine que fut modifié le galbe de la fenêtre qui la surmonte et qui se termine inopinément en arc brisé.

Aux murs sont suspendus, d’une part, un crucifix en bois, avec Christ mort d’une excellente facture, et, d’autre part, un tableau représentant la Vierge-Mère qui montre son Poupon : celui-ci ouvre ses bras en un geste très accueillant ; ce tableau mériterait d’être restauré et conservé.

Au fond de l’église, enfin, se voit une ancre marine puissante qui a son histoire. En 1871, nous conte l’abbé Baconnais, tandis qu’on traçait la route des Moutiers à Arthon par Prigny, « on trouva, au coin de la sacristie, dans le cimetière, trois ancres de belle grandeur (2 mètres), enfoncées dans un vieux soubassement. La plus grande a été envoyée au Musée archéologique de Nantes. Une autre, de même grandeur, a été conservée à la mairie des Moutiers. La troisième a été abandonnée à celui qui a fait cette découverte ». C’est donc l’une de ces ancres qu’on voit à Prigny. Elle n’a jamais été utilisée ; elle prouverait l’existence d’un établissement métallurgique à Prigny, probablement au hameau des Forges tout proche de la « ville ». Elle rappelle surtout que Prigny eut son port et fut longtemps battue par les flots du large dans la Baie de Bretagne.

 

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LE CIMETIÈRE ET LE PRESBYTÈRE

Le Champ des Morts

Entourant complètement l’église, le cimetière se devine encore à quelques tombes demeurées. Depuis mille ans, peut-être, on y enterra pasteurs et paroissiens. La terre s’est élevée peu à peu et l’on descend désormais du cimetière dans l’église. Le 9 mai de l’an 1761, y fut inhumé, près de la croix, le vénéré recteur André Poitier, curé depuis 1729. Il n’avait que soixante-sept ans, et il était originaire de Bouin. En 1702, ce cimetière fut bénit solennellement, sur autorisation de Mgr. Gilles de Beauvau, par le recteur d’alors, messire Jean Tourson. Pourquoi cette bénédiction ? Peut-être parce qu’il avait été « pollué ». Peut-être, aussi, l’avait-on abandonné depuis la création d’un autre cimetière dans le prieuré voisin, au XIème siècle ; on y revenait, en ce cas, dans ce début du XVIIIème siècle.

Le Presbytère

Une église appelle un presbytère. Le presbytère ancien, d’après l’abbé Baconnais, se trouvait tout proche de l’église. En 1655, messire Pierre Chevaleau, recteur depuis 1633, fit bâtir une cure nouvelle en dehors de la « ville », sur les alluvions laissés par la mer, près du hameau de La Boutique. Ce bâtiment existe encore ; un raidillon conduit de là à l’église : tout ceci se voit de la butte du château.

Un pourpris, composé surtout de trois prairies, aidait le recteur à vivre dans sa minuscule paroisse. La vie paroissiale, d’ailleurs, n’était pas monotone ; le mouvement de la Baie devait y amener des étrangers. C’est ainsi qu’en 1686 on vit un calviniste abjurer l’hérésie et revenir au catholicisme. En 1756, ce fut un juif qui embrassa la foi chrétienne : son parrain fut un lieutenant-colonel d’infanterie, et sa marraine la femme d’un pilote au long-cours.

 

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LA FIN D'UNE PAROISSE

Un essai de croissance

Une mission donnée en 1759, par le recteur de Bouin, nous prouve que Prigny demeurait paroisse fervente. Pendant toute une semaine, en effet, les fidèles s’empressèrent aux exercices qui commençaient le matin au son de l'Angélus, et celui-ci était sonné dès quatre heures. Après le chant des cantiques, on faisait oraison. Puis c’était le sermon, la messe, les confessions. Et la journée se continuait ainsi jusqu’au soir dans la nuit.

Fervente, la paroisse de Prigny demeurait pourtant très petite. En 1768, elle avait tenté de grandir : vers la fin du rectorat de M. Poitier, exactement en 1761, une pétition fut faite pour que fussent rattachés à la paroisse de Prigny quelques villages des Moutiers ou du Clion. L’affaire fut poussée très loin, puisqu’une ordonnance existe, dûment signée et contrôlée, de Mgr. Pierre Mauclerc de la Muzanchère, qui donne à Saint-Jean-de-Prigny les villages du Méray, de la Fradouillère, des Forges et de la Croix, qui appartiennent à Saint-Pierre-des-Moutiers, mais qui sont tout voisins de Prigny et fréquentent régulièrement cette paroisse. Pour la même raison, sont donnés à Prigny les villages suivants, qui appartiennent à Saint-Pierre-du-Clion : La Carrouère, Le Champion, La Morandière, Les Breffes, La Bouette, La Doucevie, Le Chesne, La Rabellière, Le Plessis-Bel-Air, La Salmondière, La Perrinière. Et c’est signé : « 24 octobre 1768, Pierre, évêque de Nantes, Douaud, Chan. secr. ».

Un décret royal, de la même année, mais du mois de décembre, ordonne les mêmes mutations et en règle les conséquences civiles. Il est signé de Versailles, « de notre règne l’an cinquante-quatrième, déclare le roi Louis XV ». Le décret fut enregistré, au greffe civil de la Cour, le 1er février 1769.

Rien ne manquait donc au rattachement des dites parties du Clion et des Moutiers ; et cependant rien ne fut réalisé. La paroisse de Prigny demeura minuscule, non viable : elle était destinée à disparaître. Elle fut, en effet, supprimée en 1811 et rattachée à Saint-Pierre-des-Moutiers.

 

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LE PRIEURÉ SAINT-NICOLAS

Le Prieuré

Il a été question, à diverses reprises, de l’abbaye de Saint-Nicolas, touchant l’église de Prigny. Le mot « abbaye » est bien gros : il s’agit ici d’un simple prieuré ; mais, dans le langage populaire, on lui donna constamment le premier de ces vocables, et la ferme actuelle qui remplace le prieuré porte encore, par contraction, le nom de la Bouye.

Ce prieuré remonte au XIème siècle. A cette époque, en effet, le recteur de Saint-Jean-de-Prigny, le prêtre Heslye, avait associé à son rectorat les moines bénédictins de Saint-Jouin-de-Marnes, en Poitou. Il leur laissait les deux tiers de ses revenus, à condition qu’il serait lui-même reçu et soigné chez eux, s’il devenait un jour impotent. L’abbé de Saint-Jouin, Symon, était l’un de ses parents. Cette « fraternité » était approuvée, pour le moins, par les seigneurs du château de Prigny, puisque le contrat en fut passé dans le château même et signé du seigneur Barbotin et de tous ses frères.

Les Bénédictins

Peu de temps après, l’on revint sur cet accord ; mais ce fut pour le renforcer : le recteur Heslye, devenu malade, donna tous ses droits et tous ses revenus aux bénédictins. Or, ce nouveau contrat fut passé dans « la mayson des dicts moynes », à Prigny. C’est donc que, déjà, l’on avait construit le prieuré. Le prieur portait le nom de Rivallan ; le seigneur était encore Barbotin, fils de Judicaël. On pria l’évêque de Nantes de ratifier ce don : celui-ci n’était autre que l’illustre Quiriac, qui régna de 1052 à 1076. L’évêque permettait, entre autres choses, de continuer la construction de la chapelle Saint-Nicolas. Il vint même en personne, quelques mois plus tard, consacrer cette chapelle et bénir le cimetière qui l’entourait.

Nous avons donc ainsi la date approximative de la fondation du prieuré de Saint-Nicolas : fin du XIème siècle. Les moines de Saint-Jouin n’étaient pas inconnus jusqu’alors à Prigny, puisque le seigneur Judicaël leur avait lui-même donné des terres dans l’île de Bouin pour creuser des salines et y bâtir un moulin. A Prigny, les mêmes religieux avaient reçu de lui un jardin et un autre moulin. Son fils, Barbotin, s’empressa, de son côté, de donner au prieuré de Prigny une maison, des prairies, le droit de pêcher dans son étang, le droit de taille dans son taillis ; il leur permit de se constituer un parc à huîtres, de planter une vigne, etc.

L'emplacement

Quel était l’emplacement de ce prieuré ? Il s’élevait à moins de trois cents mètres de l’église Saint-Jean-de-Prigny : les religieux étaient destinés, en effet, à desservir l’église paroissiale. Quelques vestiges de la chapelle, détruite vers 1730, ont permis de constater qu’elle avait environ vingt mètres de longueur, que son chevet était en cul-de-four et possédait un enfeu. L’enclos lui-même mesurait quelque trois cents mètres sur chacune de ses quatre faces ; il était resserré entre la route actuelle qui va vers Arthon et la dépression du Harouteil ; il touchait la douve protectrice du château sur le côté nord.

La Commande

Le prieuré de Prigny fut gouverné jusqu’au XVIème siècle par des prieurs proprement dits. A partir de 1540, ce sont des prieurs commandataires qui s’y succèdent ; l’un, Ducalédo, est chanoine de la Collégiale Notre-Dame de Nantes ; un autre, Jean-Baptiste Framery, habite Paris, dans la paroisse Saint-Méry. Ceci ne pouvait amener que la décadence.

Aussi bien arriva-t-il que le prieuré de Saint-Nicolas fut appelé à disparaître.

Le Séminaire

En 1649, le Séminaire de Nantes avait été fondé par Mgr. Gabriel de Beauvau. Il fallait aussi le doter de ressources, et chaque supérieur eut à coeur de créer ces ressources. En 1692, le supérieur du Séminaire, M. Coupperie, sollicita du prieur de Prigny, M. Framery, la cession de son prieuré : les deux hommes se connaissaient de longtemps. Pareille cession se légitimait par le fait que le prieuré « ne contenait plus aucun religieux ». Il rapportait de huit à neuf cents livres à son prieur commandataire, et c’était tout. Ces revenus, donnés au Séminaire, eussent été, du moins, utiles au diocèse de Nantes. M. Framery accepta de voir passer son prieuré dans Mense épiscopale, pourvu qu’il en gardât la jouissance sa vie durant. Il ne faisait donc aucun don personnel ; mais il préparait la charité de l’avenir.

C’est en 1703-1704 qu’eut lieu le transfert réel de la propriété. Les Bénédictins de Saint-Jouin renoncèrent à leur droit de patronage sur le prieuré. La cour royale, après enquête, permit l’annexion projetée. L’évêque de Nantes, Mgr. Gilles de Beauvau, décréta donc, le 13 février 1704, le prieuré supprimé et ses biens donnés au Séminaire. Le supérieur de celui-ci, M. Coupperie, put en prendre possession. Il devait connaître, dès lors, ainsi que ses successeurs, les difficultés inhérentes à la gestion des biens-fonds loués et des immeubles affermés. Du moins, à ce prix, pouvait-il en percevoir les bénéfices.

La ruine

La chapelle de Saint-Nicolas, cependant, se trouva bientôt abandonnée ; elle tombait en loques. En 1729, Mgr. Christophe-Louis Turpin de Crissé de Sansay, ayant fait faire enquête sur ce sujet, en décréta la condamnation le 30 mars 1730 : la chapelle serait démolie. Mais un certain nombre de fondations devait y être exécutées. L’évêque ordonna que le service religieux obligatoire serait transférée à l’église paroissiale de Saint-Jean-Baptiste, à l’autel Saint-Sébastien, comme il a été dit ; les ornements sacerdotaux et les vases sacrés y seraient aussi transportés. Et tout ceci fut encore confirmé par le roi et enregistré par le Parlement. L'Eglise et l'Etat s’accordaient pour achever cette ruine.

Vint la Révolution : le prieuré devenait bien national au premier chef. Il fut vendu dès le début de 1792, pour seize mille livres, au sieur Pierre Mourain, avocat, par devant maître Boulay-Paty, au district de Paimbœuf. Du coup, « l’abbaye » de Saint-Nicolas de Prigny était bien morte ; sur son emplacement, rien, ou presque rien, ne paraît plus désormais : les ruines elles-mêmes, ici, ont péri.

La cure de Saint-Jean, elle aussi, fut vendue, en 1794, à un sieur Joubert, de Bouin ; l’église seule fut respectée.

Comme le pays était « patau », que des intrus s’étaient installés à Prigny, à Bourgneuf, aux Moutiers, les Chouans les y vinrent visiter : l’intrus de Bourgneuf fut tué ; celui de Prigny, un Joubert aussi, dut s’enfuir ; les cloches des Moutiers furent brisées. Et, dans ce qui restait du prieuré de Saint-Nicolas, le fermier, Jean Lucas, fut assassiné.

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L'ÉGLISE DE PRIGNY AU XIXème SIÈCLE

Le geste sauveur

L’église Saint-Jean, seul vestige demeuré des splendeurs de Prigny, faillit disparaître au XIXème siècle : la municipalité des Moutiers, en 1838, projeta, en effet, de vendre et de faire disparaître l’église inutilisée de Prigny. Heureusement, le recteur d’alors, M. Julien Coupry, devina quelle perte artistique et historique allait subir sa paroisse en cette occasion. Au surplus, c’était la paroisse et non la commune qui, dans ce temps, possédait l’église en question : un décret impérial du 3 mai 1806 déclarait formellement que les églises supprimées par l’organisation ecclésiastique reviendraient aux Fabriques des cures ou succursales dans le ressort desquelles elles se trouveraient.

M. Coupry s’assura de son bon droit près de son évêque, Mgr. Micolon de Guérines, qui le soutint fermement. Le 22 juin 1838, il assembla son Conseil de Fabrique et fit une protestation officielle contre le projet municipal et contre l’enquête du sous-préfet qui avait approuvé ce projet. Il rappela que l’église, de fait, n’avait jamais cessé totalement de servir au culte : la procession des Rogations y faisait station. Sur quoi, maire et sous-préfet n’osèrent aller plus loin : le monument fut sauvé.

M. Coupry n’hésita pas à prendre sur les faibles ressources de sa paroisse pour faire restaurer sommairement l'édifice, et, dès 1841, il obtint de M. le vicaire général Dandé l’autorisation d’y célébrer la messe à certaines occasions.

Restauration

Mais c’est en 1876 que la vénérable église Saint-Jean-Baptiste fut enfin restaurée complètement. M. l’abbé Baconnais, enfant de la paroisse, et alors aumônier des Petites-Soeurs des Pauvres à Chantenay, consacra ses biens paternels à cette restauration qui lui tenait à coeur. Il fournit une somme importante au recteur de ce temps, M. l’abbé François Maillard ; celui-ci fit refaire la toiture et blanchir les murs : désormais l’édifice était à l’abri ; il était digne, au surplus, du culte qu’on allait y exercer.

Le même abbé Baconnais fit ériger, l’année suivante, une belle croix de granit, avec Christ en pierre aussi, tout près de Prigny, au village de La Croix, sur la route des Moutiers. Mgr. Fournier, évêque de Nantes, vint en personne bénir ce calvaire et l’indulgencier. C’était le 18 avril. Il visita, dans cette occasion, l’église Saint-Jean et en félicita les restaurateurs.

Et maintenant le touriste s’attarde volontiers sur la butte de Prigny, et le pèlerin vient y prier les saints qui protègent ce Haut-Lieu : tant de souvenirs glorieux y flottent dans les airs, et de si beaux vestiges de l’art sacré y demeurent accrochés ! Sous l’ombre des ormeaux « classés », l’artiste et le croyant se plaisent à rêver des splendeurs du passé « qui ne peut revenir » ; ils souhaitent que, du moins, la barbarie de notre temps ne s’acharne pas trop sur ces témoins de notre histoire locale et nationale.

J. - B. RUSSON (1946)

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