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HISTOIRE POLITIQUE DE MORLAIX (1561-1790)

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L'histoire politique, proprement dite, de Morlaix est terminée avec le moyen âge, et la réunion du duché à la France, en substituant la municipalité à la ville ducale, a réduit la vieille cité guerrière et murée, au rôle pacifique et à l'existence toute inférieure des municipalités françaises du XVème siècle. Encore quelques éclaboussures des troubles civils du pays, les secousses de la ligue, quelques combats, des tenues d'états provinciaux ; l'histoire extérieure de la ville est achevée, et nous arrivons avec une désolante rapidité à cette époque de 1789, tracée en caractères ineffaçables dans les annales de nos moindres localités comme dans l'histoire du monde.

La réunion, tant préconisée par nos historiens bretons, n'avait guère assuré la tranquillité intérieure du pays : en 1546, le commerce morlaisien se plaignait du peu de sûreté de nos routes et du grand nombre de larrons et méchantes gens qui infestaient le pays : nous verrons les mêmes faits se renouveler plus tard, et notamment sous Louis XIV.

En 1568, Marie Stuart, reine d'Ecosse, débarquée à Roscoff pour aller épouser le roi François II, passa à Morlaix où elle reçut tous les honneurs dus à son rang. Comme le cortège passait sur le pont Notre-Dame, le pont surchargé s'affaissa dans la rivière : un grand tumulte s'éleva, et le cri de trahison ! partit du milieu de l'escorte : — « Jamais Breton ne fit trahison, » — reprit avec sang-froid le sire de Rohan, présent à la fête, et ce mot heureux mit fin au tumulte. La jeune reine passa deux jours à Morlaix, et y logea au haut de la rue de Ploujean, disent les uns, aux Dominicains, selon d'autres : elle fonda la chapelle de Saint-Treignou et posa la première pierre de la tour Saint-Mathieu (Notice historique Morlaix, par M. F. Gouin).

Les années suivantes se passèrent exclusivement en débats tout intérieurs contre des juges royaux, le gouverneur du Taureau , etc. Cependant la ligue approchait : le duc de Mercœur, qui allait bientôt en devenir l'âme, était venu en 1583, recevoir l'hommage des bourgeois morlaisiens, et six ans plus tard les cités commerçantes de la Bretagne formaient cette république fédérative connue sous le nom de la Sainte-Union, ligueuse par politique, neutre par inclination. De Roscoff à St. Malo, tout le littoral bretor y entra : Morlaix organisa un gouvernement provisoire sous la présidence de son gouverneur, et fit partie de l'union jusqu'à la reprise de la ville au nom du roi Henri IV.

Il ne nous est resté de cette époque curieuse qu'un registre de délibérations intitulé : « Cayer pour les affaires de la ville », et débutant par « les noms de ceulx qui sont deputtés par le corps de la ville pour de meshuy pour délibérer et ordonner sur les affaires de la ville » et « s'assembler trois jours la sepmaine sçav. le lundy, mercredy et vendredy a 9 heures du mattin à la salle des Jacopins (sic) de ceste ville. Comanczé ce jour vingt septième de 7bre 1589 an laquelle année pt Jan Pinart procureur et Pinart Keranguen myseur de lad. ville de Morlaix.

Monsieur de Kerquariou gouverneur de la ville
Mesrs les seneschal, bailly et lieutenant.
Mr l'archidiacre de Plougastel.
Mr le provost du Mur.
Mr Guillme Quintin prieur de St. Mathieu.
Mr François le Levyer recteur de Ploujan.
Mr Yves Tanguy vicquaire de St Melaine.
Mr Kerloaguen.
Mr Bourgerel.
Mr Du Vieulx Chatel Kerourfil.
Mr La Boexière Plourin.
Mr Kernegues Coatquiz.
Mr Kerguaradec.
Mr du Restigou.
Yves Le Gac sieur de Keranprovost consul.
Yves Parthevaulx consul.
Jacques Gueguen consul.
Jean Le Levyer sieur de Kerrochiou.
Mr Yves de Kernechriou sieur de la Vileneuffe.
Mr François Noblet sieur du Morlen.
Mr Jacques de Kergus sieur des Ysles.
Mr Guillme Le Grand sieur de Kerscau.
Lesd. Pinart et Keranguen procureur et myseur.
Mr Guille Le Bihan jurat.
Morice Balavaine sieur du Mesily jurat.
Francoys Le Borgne jurat.
Jan Coroller sieur de Keruescontou jurat.
Mr Thomas Jagu sieur de Kernegues jurat.
Guille Du Plessix sieur de Kerango jurat.
Nycolas Nuz sieur de Kerhunan jurat.
Yvon Lebailly jurat.
Vincent Kermerchou sieur de Trelanic controleur.
Francoys Allin sieur de Poulraz comissaire du fort du Toreau.
Jan Floch sieur de Kerbasquiou jurat.
Jacques de May Kersieur de morvan jurat.
Yves Jegou sieur de Tourbrunault jurat.
Rolland Salaun jurat.
Jan Calloet jurat.
N. Fouquet jurat.
Francoys Noblet sieur de Roudour.
Jan Kerautem sieur de Kerguern.
Yves de Botmeur sieur de Rosmeur.
Francoys Kererault recevr des fouages.
Jan du Plessix sieur de Coatserhon.
Yvon Kerret.
Pierre Guillousou.
Yvon Perthevaux.
Guille Clech.
Thomas Prediry.
Jan Auffret.
Jan le Mynor.
Yvon Coadic »
.

La majeure partie de ce précieux document est d'une écriture et d'une rédaction extrêmement hâtée, rempli d'abréviations et de corrections : en un mot, c'est plutôt un brouillon qu'un registre proprement dit. Nous ne pouvons mieux donner une idée des opérations de cette république bourgeoise du XVème siècle, qu'en citant au hasard des extraits de la pièce en question.

Le 28 septembre. Distributions de « bled aux pauvres ».

Le 28 octobre. « Le seigneur de Goesbriant a promys par serman pas luy presté entre les mains de Mr l'archidiacre de Plougastel qu'il ne portera les armes et ne fera la guerre aux habitants et ville de Morlaix ny aux paroisses alliées par exprès à ceulx de Plestin sauff à lui a se pourvoir contre les gens de Plestin ».

Le 30 octobre. « Advisé que le guet et santinelles comanceront a six heures du matin — et que le corporal ne bougera de la santinelle ». — « Guillaume Taugui a juré la Sainet Union entre les mains de monsieur l'archidiacre de Plougastel ».

Même jour, on travaille avec activité aux fortifications extérieures. « Pour avoir leuil sur la baryere de la rue des Vignes sont députes Jean Guillemot et Jean Duboz. — Sur la baryere de la rue de Ploujan Gme Bigot et Vincent Moal. — Pour la baryere de la Fontaine Maurice Noblet (la rue de Saint Melaine) N. Moal. — Advisé que les deux pièces d'artillerye qui sont soubz les halles seront rendues au Palut Maran. ».

Le 22 novembre. « Messieurs de Kermabon, de Kerbournot et Kerguelen ont juré l'unyon entre les mains de monsieur l'archidiacre et signeront sur ce cayer. — (signé) Pierre de Kermabon. »« Passeport accordé por Mr Jacques Quaïnec ».

Le 27 novembre. « Lecture faicte de l'acte de serment faict par les paroyssiens de Guymaich le 26e 9bre pnt (acte d'adhésion à l'union). » —Idem de « Plouygneau, faict au prosne de leur grande maisse du 26 présent. »« Le sieur de Kerlaz est d'advis que soient abatu les arbres de la rabine du lieu de Kerlaz. »« Lecture faicte de l'acte des gentilshommes de Plouegasnou par lequel ils jurent la Sainct Union ».

Le 13 décembre. Les sieurs de Meshily et Kerochiou sont chargés du transport des munitions, poudres, balles « achetées par le procureur de ville pour la deffance d'icelle » plus d'un « baril de pouldres de Flandres » acheté par le même. — Est avisé qu'il sera delibéré sur la requeste de Jan Jagu : sur celle de Pierre Oriot, néant : sur celle de « Jan Jeffroy, prisonnier, de Plouegaznou, » remis la délibération a vendredi. La séance de ce jour a été tenue à l'hôtel de ville.

Le 25 décembre. On nomme trois députés pour conclure un marché de poudre. « Ordonné que les paroissiens de Plouegonuen payront les fraicts et la depansse qui fut faict à Plouegonuen lors du démoli » du château de Bourouguel (Bourouguel, sur les limites de Plouigneau et de Plougonven, probablement démoli par la Sainte Union comme appartenant à un seigneur royaliste).

Le 8 janvier 1590. « Advisé que le procureur de ville baillera un rolle des hostelliers et cabaretyers — pour loger les soldatz dudit sieur de Carné. »« Assignation pour le compte de Yvon Le Baillif a demain une heure apprès midy et sera led. Le Baillif adverty par le procureur de la ville. — Et pour le compte de Jean Du Plessix a vendredy une heure apprès midy. — Et la chambre a nommé — le sieur de Kererscau et le sieur de Kerochiou pour contraindre les procureurs et miseur contables de la ville a conter. — Pour les comptes de Jean Keraultem à lundy une heure apprès midy. — Lesdits comptes a randre et examiner par messieurs de la chambre. — Le Mognec de Lannion eslargy poiant sa despance ».

Le 5 janvier. « Sur la requeste du sieur de la Villeneuffe est avisé que pour sa cotisation lui sera rabatu la somme de 9 escus. » — « Pour le faict du sieur de Kersetan est advisé que les député ci devant feront pris et acorderont avecque luy pour les artilleries et bouletz, et sera suivant les pris et acord remboursé par le procureur de la paroisse de St Melaine ou par les deniers de la ville et ce pandant poira les cotisations. »« Advisé que le sieur de Coatsiochan mettra ce jour l'original de son compte au greffe d'office à painede vingt escus. » — Même injonction a Yvon Le Baillif et au sieur de Bodon.

Le 8 janvier. « Lecture faicte de la lettre de ceux de Roscoff presantée par Allain Kermelec : — sera escript à ceux de Roscoff comme (quoi) les habitantz se contantent de ladite response. »« Yvon Le Bailliff sera corporal pour la compaignie de Kernegues. Jagu a presté le sermant entre les mains de Monseigneur le gouverneur. » — Pour obvier au différant et difficulté qui se trouve pour le colligement d'un nouveau debvoyr aposé sur les vins, est advisé que les vendeurs de vin poiront ledit debvoyr aux fermiers sauff a eux de se faire rembourser ou accorder... avecque les achepteurs, et sera la presante ordonnance banye et aposée au bas de la panquarte a ce que autre n'en pretande cause dignorance.

Le 14 janvier. « Avisé que lon envoira des sergentz au lieu de Kerlan pour exécuter en ses biens jusques a cent escus, scavoir cinquante escus pour sa taxe et ensuite cinquante escus pour clore les ysues de sa maison à Morlaix pour la fortification de la ville ; et se feront lesdits sergentz poier, délivrer fraicts et salaires par ladicte dame de Kerlan.... Et avant que lesdits sergentz partent pour aller à Kerlan sera sa maison en ceste ville visité par le sieur de la Villeneuffe, Rosmeur, Kerven et Pier Guillou pour scavoir sy l'on trouvera des meubles pour poier la somme. »« Advisé que lon comancera à batir la muraille de la ville devers la muraille de Kerviniou » les deniers seront fournis par Jean Caloet « Jusques a quarante escus ».

Le 17 janvier. «Advisé qu'il sera escript aux paroisses de sonner leurs cloches et s'amacer pour prandre et se saisir de ceux qui ravagent et enlevent les personnes et sy se metent en deffance. » — Bourdidel et Kerbourdon sont chargés de pendre le prêtre Le Gac et autres ennemis « qui ont faict lesdits ravage et emprisonnements. » — Avisé que chaque corporal prendra cinquante livres de poudre a vingt et un sols la livre, « et chacun corporaî poura contraindre les particuliers de son escoade de prendre tel nombre de pouldre qu'il advisera ». — « Advisé que Francoys Guingamp randera tous les vesselles et meubles qu'il a de la paroisse de St. Martin, entre les mains de Jean Floch et Tombrunault et Jacques de May, lesquels baileront cinquante escus sur le gaige, lesquels seront employés à la fortification de la paroisse... Et a ce faire sera ledit Guingamp contrainct par corps et détention de sa personne dans troys heures apprès midy de ce jour ». Pareille expédition pour les paroisses de St. Melaine et St. Martin.

Le 19 janvier. « Le sieur de Kergurunet deschargé de la charge de corporal en la paroisse de St. Mathieu ».

Le 24 janvier. Les bois saisis au Val-Querret par les paroissiens de St. Martin, sont employés aux fortifications de la ville et répartis « tiers à tiers entre les troys paroisses. »« Auparavant de demolir la maisoun des religieux de Saint Dominique estant en la rue des Vignes, sera faict estat. — Pour ce que lon a entendu que Nicolas Salaun, prisonnier, est espion, est dict qu'il sera retenu jusques a autres informations. —Advisé que sera bailé atestation au sieur de Coatlesper qu'il a tousiours favory le parti de l'Union et les habitantz de ceste ville leur ayant asisté de ses moiens et le tiennent pour bon amy ».

Le 26 janvier. « Advisé que le sieur de Bodou et Pierre Guillou... feront et baileront le diner de la Chandeleur à la mode acoustumée le dimanche quatriesme février prochain faulte de quoy faire sont des a présent comme deslors condampnés chacun en quarante escus pour estre employés aux fortifications de la ville, et néant moingtz comparaîtront lesdits habitantz au soun de la cloche à la mode accoustumée en ceste salle pour délibérer des affaires de la ville. ».

Le 1er février. « Ollivier Le Roudault sieur de Poulbras jure l'Union des catholiques soubz l'autoritté de monseigneur le duc de Mercœur ». Cette nouvelle formule, comparée aux précédentes, est un curieux document de la situation politique de la Sainte-Union bretonne à l'époque citée.

Le 9 février. — Les quatre écus de rente dus à St. Melaine, seront vendus au denier vingt, et le produit affecté aux fortifications de la paroisse.

Le 12 février. — Poulquinan, prêtre, est fait prisonnier par le sieur de Kerrochiou ; il est condamné à payer quatre-vingt-douze écus pour sa rançon, dont un tiers, frais rabattos, est remis à la ville. A la suite de cet événement, « est advisé que toutes autres qui ont faict prinses soict des deniers au personnes rendus en ville seront contrainctz au poiement d'un tiers de ce qui est prins hors ville et les deux partz de ce qui est prins en ville ». — Depuis, la chambre en considération des services du sieur de Kerochiou, de sa « bonne volonté » pour la ville, et du malheur arrivé à son fils pris par les ennemis, lui a rendu le tiers qu'elle s'était d'abord arrogé.

Le 16 février. « Ordonné que touttes les nuictz les portes de la ville close seront fermées passé les dix heures du soyr et seront ouvertes à cinq heures du matin, et sera aussi l'ordonnance banye, » et les corporaux sont avertis de régler leurs heures de guet sur le présent règlement.

Le 19 février. — Pour estimer les pierres tirées de la perrière de Jeanne Jagu pour les travaux des fortifications, sont nommés les sieurs de Kerbasquiou et Tourbrunault. — « Permys aux paroissiens de St Mathieu de lever sur eux pour former des cotisations la somme de quatre cents escus pour estrè employés aux fortifications de la paroisse, — EN ENTENDANT (attendant) COMISSION DU ROY ou DE MONSEIGNEUR LE DUC DE MERCOEUR » sont commis pour la perception monseigneur l'archidiacre, etc.

Le 19 février. — Décidé d’envoyer « secours et munitions au siège de Tonquedec (assiégé par la ligue). — Monsieurde Cleuzon sera prié de y aller... et cent harquebouziers de ceux de la ville. — Monsieur de Kergaradec nommé pour ordonner lesdits harquebouziers les commander avecque le sieur de Rosmeur et Yves de l'Eau. — Sera envoyé deux cents livres de pouldre à canon, cent livres de pouldre fine d'harquebouzes, et trente livres de mesches et cinquante livres de boulletz. — Est ordonné a Yves Le Bailly de bailler entre les mains du sieur de Kergaradec cent escus. — Sera faict diligence pour promptement faire monter la pièce d'artillerie qui est soubz les halles. — Sera le sieur de Kerochiou prié d'aller avec la compagnie des gentz de pied. — Sera aussy escript aux paroisses pour se mettre en armes pour aller pareillement audit secours. — Seront aussy advertys les corporaux de St Mathieu St Melaine de nommer et advenir sept de leur compagnie et de St Martin les corporaux seront advertys » de nommer et avertir cinq hommes de la leur.

Le 21 février. — Règlement pour les séances de la chambre. « Les membres qui feront défaut seront condamnés à une amende d'un écu par séance, de deux en certains cas ; ceux qui auront fait des avances subiront des retenues lors des remboursements, les autres seront contraincts et le produit de ces dernières amendes sera employé à la discrétion de la chambre ». — Il est décidé qu'au retour du sieur de Kerven « il sera faict estat de ceux qui ont fourny armes, deniers ou chevaux pour aller à Tonnquedec et de ceux qui pouvaient fournir et ne l'ont faict. »« Yvon Le Baillif bailera houit escus oultre les cent douze escus quil a fournis, dont cent au sieur de Kerven pour les soldats qui sont à Tonquedec, et les douze autres au procureur de la ville pour dépenses publiques ».

Le 22 février. — Les sous-dénommés paieront « pour la solde des cinquante arquebouziers que l'on envoict à Plestin :
Jean Floch : 5 escus.
Yvon Jegou : 5 id.
Jacques Demay 5 id.
Guillaume Keragnen : 5 id.
Jean Du Plessix : 5 id.
Vincent Kermerchou : 5 id.
Kerangoff : 5 id.
Jean Coroller : 5 id.
Jean Pinart : 5 id.
Jean Caloet : 5 id.

Monseigneur l'archidiacre offre dix escus a être remboursés sur les tailles. ». — Le sieur de Kerochiou est nommé pour commander les cinquante arquebusiers. — Le sieur de Bourgerel refuse nettement le paiement de sa cotisation, qui est de cinquante écus.

Le 23 février. — Résolu d'envoyer aux habitants de Plouaret l'acte d'Union à signer. Les habitants de Plouézoch, qui ont fait apporter leur adhésion par leurs députés François Chapelain, Yves Gueguen, Jacques Henry, Guiomarch Quemeneur, sont gracieusement reçus dans l'Union et dans « l'amitié des habitants de la ville ». — Sur la requête des paroissiens de Plouigneau, le sieur de Kerloaguen est prié d'accepter le grade de capitaine des paroisses de Plouigneau et de Plougonven, et autorisé à « prandre tel lieutenant qu'il vaudra ».

Bornons ici nos citations, déjà bien longues, et qui suffisent pour donner une idée de ce document isolé de l'époque. Les autres articles ne sont guère que la repétion journalière de ceux que nous avons cités, des gentilshommes ou des bourgeois venant jurer l'union, des règlements pour la garde ou la fortification de la place, des cotisations volontaires ou des impositions extraordinaires, des correspondances avec les villes ou les paroisses coalisées des évêchés environnants. Parfois quelques notes curieuses perdues dans ce long fatras : des suspects dénoncés, un homme du peuple condamné au gibet pour avoir dit : « Que les gens du roy de Navarre n'étaient pas moins bons catholiques que les autres, » etc.

Cette année 1590, la sainte union ayant demandé des gens de pied aux diverses paroisses fédérées du pays de Tréguier, on fit une levée d'arquebusiers assez inégalement répartie sur les diverses paroisses. Ainsi Plougasnou, sur une population approximative de 4,500 âmes, fut taxé au maximum de trente hommes, un sur cent cinquante : Plouézoch, sur 1,500 âmes, vingt soldats, ou un sur soixante-quinze, différence du double : Lanmeur, pour 3,200 habitants, vingt hommes, ou un sur cent soixante : Plouégat-Guerrand, même rapport, dix soldats sur 1,600 hommes : Garlan, autant sur 1,000, un pour cent : Plourin et Ploujean, chacune douze, la première ayant près de 4,000 âmes de population, la seconde ayant au plus 2,300 habitants.

Les députés de l'union faisant les fonctions de jurats, furent, en 1592, le gouverneur, les trois juges et le procureur du Roy, l'archidiacre, La Boexière, Kermadeza, Coatanfrotter, Restigou, Villeneuve, Morlen, Kerscau, Caloet greffier, Jagu sieur de Kerneguès, Kerbasquiou, Gme Le Bihan, Mesily, Kermorvan, Kervern, Kerangoff, Tourbrunault, Coatglas, Kerhamon, Pierre Noblet, G. Salaun , les juges et consuls, Rosmeur, Kerman, Nicolas Le Blonsart, le commissaire, Keranguen controleur, Kergadan, Bodon, Coatserhou, Yvon Le Baillif, Kerello receveur, François et Maurice Noblet, Kereuzen, Guillaume de l'Eau. Les membres de l'union demeurent inconnus en 1593 et 1594, dernière année de son pouvoir : en 1593, elle autorise le procureur de ville Kerangoff à faire acquitter les billets qu'il donnera au-dessous de dix écus. Elle tint quelque temps ses séances dans la chapelle St. Jacques, puis dans le couvent des Dominicains : les moines avaient loué la salle moyennant cent cinquante livres par an, et le marché avait coûté neuf pots de vin (1593) (Mss Dauménil, p. 18).

Morlaix est peu cité dans les premières années de l'histoire de la ligue. En 1590, les insurgés s'emparaient de Kerouzéré, pendant que 3,000 royalistes s'assemblaient au pays de Tréguier pour venir sauver la place. Comptant surprendre les assiégeants en évitant Morlaix, les royaux avaient pris plus au midi sur le territoire de Plourin, pour retomber sur le chemin de St. Pol, entre Ste. Sève et St. Martin. Or, vers le même moment, les vainqueurs revenaient en très petit nombre avec leurs prisonniers par la route ordinaire : les deux troupes se trouvèrent par hasard à deux traits d'arquebuse l'une de l'autre, et avant que les royalistes eussent pu se remettre de leur surprise, les portes de Morlaix se refermaient sur les ligueurs à la barbe de l'ennemi décontenancé. Les prisonniers (Coetnizan, Goezbriant et autres) furent détenus au Château, puis transférés à Nantes sous l'escorte de Rosanpoul, Goulaine et Le Faouët : Coetnizan paya 20,000 écus de rançon, Goesbriant environ 10,000, et les autres suivant leur fortune [Note : Histoire de ce qui s'est passé en Bretagne durant les guerres de la ligue, par Morcau, ch. VII et VIII].

Peu de temps après, Morlaix reçut dans ses murs les débris de l'arrière-ban de Cornouaille, battu à Plestin par la garnison de Tonquédec. Les jeunes seigneurs de Kerrom, du Rusquec et de Cremeur, frère de Rosanpoul, périrent dans cet engagement et furent ensevelis en grande pompe aux Jacobins de Morlaix (Id. ch. IX).

Cependant la ligue se mourait, et comme s'il n'eût pas suffi pour l'abattre des nombreuses et journalières défections qui éclaircissaient ses rangs, une imprudence inouïe lui enlevait une de ses places les plus importantes. Le duc de Mercœur avait envoyé à Morlaix un de ses affidés, homme obscur et peu estimé dans la province, pour surveiller et contenir les dispositions déjà douteuses des bourgeois : l'agent de la police secrète du duc, une fois installé, semble avoir pris à tâche de s'aliéner tous les esprits par ses manières insultantes, et un jour dans une discussion qu'il eut avec le sénéchal Le Bihan, vénérable vieillard et l'un des plus anciens juges de la province, il s'oublia jusqu'à menacer de le faire pendre. Le sénéchal lui répondit que sans les égards qu'il avait pour son maître le duc de Mercœur, il l'eût lui-même, sans autre forme de procès, fait attacher à un gibet. Les bourgeois, indignés de la conduite de l'agent ducal, n'étaient que trop disposés par ailleurs à se détacher de la ligue. L'armée royale, qui était déjà à Lanmeur, à trois lieues de la ville, les sollicitait de se rendre, et une assemblée tenue à l'hôtel de ville pour répondre à ce message avait, sous les yeux même de Rosanpoul, gouverneur de la ville pour Mercœur, annoncé des dispositions assez défavorables au parti provincial (1594).

A la suite de cette séance, il s'en tint une autre secrète, d'une douzaine de notables, laquelle députa quatre de ses membres vers le maréchal d'Aumont, commandant pour le roi en Bretagne. Une troisième assemblée, publiquement tenue à l'hôtel de ville, délibéra sur la proposition du sénéchal, que l'on proposerait dix mille écus au maréchal pour ne point entrer dans Morlaix : et par un hasard trop singulier sans doute pour ne point avoir été prémédité, le choix tomba sur quatre membres de la séance secrète. Jean de Kerloaguen Rosanpoul n'avnit point assistée la séance. Soupçonnant avec raison quelque machination, il fit courir après les envoyés. Mais ceux-ci avaient par précaution pris des chemins détournés, et arrivés auprès du maréchal ils lui remirent, au lieu de la proposition de dix mille écus, un projet de capitulation probablement rédigée dans la seconde assemblée, mais du moins dont la troisième n'avait eu aucune connaissance.

Le maréchal n'avait garde de négliger pareille occasion : il arriva à Morlaix, descendit par la rue des Vignes, et se présenta aux portes, dont les ponts-levis lui furent abattus par un orfèvre. L'entrée des royalistes se fit avec calme et discipline : Rosanpoul faillit même être surpris avant de s'apercevoir de leur arrivée, et n'eut que le temps de s'enfermer au Château avec soixante gentilshommes et cinq cents soldats : il voulut y faire entrer des provisions et y monter quelques pièces de vins, mais une arquebusade vigoureuse assaillit les ligueurs chargés de cette opération, troua les tonneaux et fit écouler sur place tout le contenu. Le Château était presque sans vivres, par la négligence du gouverneur, qui avait peu auparavant reçu deux mille écus spécialement affectés à ce service, et qu'on lui reprocha d'avoir détournés pour son propre usage : la famine se mit parmi les assiégés, renforcés d'ailleurs par l'arrivée d'Anne de Sanzay de la Maignane, commandant ligueur qui s'y était jeté avec quatre cents hommes.

Les forces du maréchal montaient à un total de 3,000 hommes, dont 2,000 fantassins, 300 cavaliers et 700 anglais qui débarquèrent à Morlaix durant le siège. La reine Elisabeth aidait ostensiblement le parti royaliste, dans l'espoir d'obtenir une place forte et maritime comme pied à terre sur les côtes de France, elle demanda d'abord Brest, puis Morlaix, le tout sans aucun succès. Vers le même temps arrivèrent au camp royaliste, d'un côté Lezonnet, gouverneur royal de Concarneau, de l'autre les députés de Quimper qui, un certain Oliiver Endroit à leur tête, venaient offrir au maréchal d'Aumont l'entrée de leur ville. Lezonnet insistait fortement sur l'avantage de ces propositions, et le maréchal, tout en les remerciant de leurs bonnes dispositions à son égard, remit cette entreprise au premier moment dont il pourrait disposer après la prise du Château de Morlaix : puis il les congédia sur cette promesse.

Cependant le siège continuait, et des batteries établies sur les clochers de la ville battaient le Château sans interruption, pendant que les travaux des mines et des tranchées avançaient avec une rapidité remarquable. Les assiégés avaient élevé de leur côté des barricades et des fortifications dont la trace, bien conservée du temps du chanoine Moreau, a depuis longtemps disparu : leur courage était soutenu par l'espoir d'un secours prochain, espoir que leur avait apporté Lavallée, gentilhomme du duc, entré de nuit dans le Château. Aussi luttaient-ils avec ardeur contre l'ennemi et contre la famine qui les contraignait de manger jusqu'à leurs chevaux. La dame de Rosanpoul, enfermée dans le Château avec son mari, était sur le point d'accoucher : le maréchal d'Aumont l'ayant su, lui fit courtoisement passer de la volaille, des perdrix et trois ou quatre moutons qu'elle lui renvoya en le remerciant et lui disant qu'elle ne voulait d'autre nourriture que de celle de son mari. « Et non seulement en cela se montra-t-elle courageuse, mais tant que continua le siège elle se montra si résolue à encourager le soldat, sans aucune apparence ni signe d'étonnement, qu'elle plantait le cœur au ventre du plus lâche, ainsi que j'ai ouï le capitaine Rostin, qui était dedans la place durant le siège, homme fort vaillant, en faire le récit au seigneur duc de Mercœur, peu après, en cette ville de Quimper, disant merveille de résolution de cette jeune dame » [Id. ch. XXV (Ed. Mesmeur)].

Cependant le duc de Mercœur, informé du pressant besoin que l'on avait de sa présence sous les murs de Morlaix, se hâtait d'accourir à la tête de ses forces franco-espagnoles. Entre Huelgoat et Le Cloître, dans la montagne d'Aré, ses chevau-légers attaquèrent un poste de trois cents cavaliers, l'élite de l'armée royale, et l'emportèrent sans grande résistance : cinquante hommes y périrent du côté des vaincus, et le sieur de Lesmais du nombre : soixante furent faits prisonniers : le reste se sauva, abandonnant morts, blessés et bagages. Les vainqueurs n'eurent aucune perte, et les royalistes du siège furent tellement abattus du succès de cette première affaire, que le maréchal fut conseillé de lever le siège, ce qu'il refusa : il se contenta de se fortifier davantage, et attendit l'ennemi, tandis que plusieurs des siens, découragés, faisaient filer leurs bagages sur Guingamp. Un événement inattendu sauva cette petite armée.

Mercœur avait descendu les montagnes d'Aré, et se trouvait dans les environs de Plonrin, quand il fit ses dispositions pour le combat. Après avoir harangué ses troupes françaises, il s'adressa à Don Juan d'Aquila, chef des Espagnols, et lui demanda s'il n'était pas d'avis de donner sur l'ennemi. —Non, monseigneur, dit l'espagnol, comment voudriez-vous donner ? — J'irai à pied, répliqua le duc, et donnerai tête baissée sur l'ennemi avec trois cents de mes gentilshommes, et vous n'aurez qu'à nous suivre. — Mes gens ne donnent pas tête baissée, pero piano, piano, objecta l'espagnol, et il refusa d'aller autrement. La défiance du flegmatique Aquila avait été perfidement exploitée par d'Aumont, qui lui avait fait croire à une trahison invraisemblable du duc de Mercœur. « La guerre est presque terminée, lui avait-il dit : le duc n'a presque plus de ressource que dans la clémence du roi, et il l'a secrètement achetée au prix du sacrifice de ses alliés les Espagnols. Or, comment le ferait-il mieux qu'en les engageant dans un combat et en les abandonnant à eux-mêmes au fort de la mêlée ? ». Don Juan se retira à Quimperlé, et Mercœur retourna à Quimper en brûlant sur sa route le château du Granec, repaire du trop fameux Fontenelle.

Alors les assiégés demandèrent à capituler après cinq semaines d'une vigoureuse résistance : aussi les conditions furent-elles assez dures. Rosanpoul, le capitaine Rostin et Anne Sanzay de la Magnane demeurèrent prisonniers de guerre et furent dirigés sur Quimper, où ils restèrent prisonniers sur parole : les autres sortirent en n'emportant que leur épée, et on publia à son de trompe que tous seraient impitoyablement fouillés, même les femmes. Au dire de l'historien contemporain, « il demeura dans le chasteau un grand butin tant en or qu'en argent, joyaux, que autres richesses qui se pouvoient porter en cachette : » aussi la tradition populaire conservée à Morlaix ne met point en doute l’existence de riches cachettes dans les ruines du château ducal. L'héroïque châtelaine de Rosanpoul et ses demoiselles emportèrent toutefois sur elles une grande quantité de joyaux et un peu d'or, et la courtoisie de l'ennemi les dispensa heureusement d'être fouillées, ainsi que les capitaines auxquels la capitulation fut étendue. Rosanpoul y perdit toute sa caisse, ce qui lui fut très sensible : « et disoit-on que cestoit un juste jugement de Dieu... Dieu permit quil perdist et la place et argent et équipage, avec une grande rançon qui fut sa totale ruine, de laquelle il n'a jamais pu se relever. » (Moreau, ch. XXVIII) — 21 septembre.

Ainsi finit le dernier siège de Morlaix. Le parti de l'union y était de fait, complètement abattu : cependant l'assemblée démocratique qui la représentait était assez fermement consolidée pour qu'il y eût quelque péril à la supprimer, et elle put compter encore huit ans d'existence. L'année suivante, le maréchal d'Aumont leva une contribution de 321,500 écus sur la province : le pays de Tréguier, dont Morlaix faisait partie, y entra pour 37,300 écus, « sans qu'aucun se puisse prétendre exempt de ladite imposition fors les gens d'église residans en leurs cures et prieurez et les nobles extraictz de noble lignée vivants noblement ». Taxés à 10,000 écus, les bourgeois de Morlaix pouvaient se réclamer du service qu'ils avaient rendu l’année précédente à la cause royale : ce moyen, malheureusement, ne leur parut guère avoir de chances de succès, et ils préférèrent alléguer que l'expression de paroisses contribuables a fouaiges employée dans la proclamation du 25 février, ne concernait point leur ville, qui était une communauté, non une paroisse, et que du moment qu'ils n'étaient point compris dans la taxe générale, ils devaient jouir du bénéfice d'un arrêt du roi même, portant qu'il ne serait fait aucune imposition sur le peuple sans expresse commission de sa majesté.

Cette pitoyable distinction disparut devant une lettre patente de l'année suivante, qui se plaignait en termes dignes, calmes mais sévères, du refroidissement des habitants, parla de la pauvreté et nécessité des simples paroisses du plat païs, du besoin extrême que les compaignies des gens de guerre avaient de paiement, du danger qu'il y eût eu si les autres villes eussent fait le semblable et pris ce mauvais exemple, et finalement confirmait la taxe de 10,000 écus assignés à la communauté dans la répartition totale (28 décembre 1596).

A la suite de toutes ces commotions, on sent que les affaires publiques durent rester longtemps en souffrance. Une apathie générale s'était emparée des esprits : en 1602, dernière année de l'administration de l'union, le sénéchal faisait sommer par sergents et condamner à l'amende les jurats récalcitrants. Les revenus publics étaient dilapidés : la dette de la ville était énorme (Notice, etc. par M. Gouin, p. 196).

En 1614 Louis XIII écrit aux bourgeois pour les prévenir de l'évasion du duc de Vendôme, et pour les avertir de lui défendre l'entrée de leur ville : en 1625, pour les prévenir que les Anglais et le calviniste prince de Soubise bloquaient et menaçaient les côtes de la Manche. Une nuit, un homme vient crier que l'ennemi est débarqué à Callot, et s'avance en forces : la milice se met en marche vers Taulé sans attendre M. de Brissac, commandant de la province. L'alarme était pourtant sans fondement (1627).

La guerre des trente ans qui venait de s'allumer, avait porté à son comble la misère populaire. En 1639, par suite de la perception des impôts, le peuple morlaisien se souleva, pilla, brûla, maltraita même des juges, et ne rentra dans l'ordre qu'à l'arrivée du commandant de la basse province avec ses maréchaussées et les compagnies irlandaises. Quelques hommes furent pendus, comme d'habitude, et tout fut dit. — Pendant ce temps, des armateurs morlaisiens équipaient des corsaires pour défendre le littoral infesté par des pirates (1646-1648). — Cinq ans plus tard, durant l'anarchie de la fronde, les désordres recommençaient : on maltraitait, on tuait sans répression, on se barricadait chez soi ou l'on fuyait la cite inhospitalière (Notice, etc. par M. Gouin, p. 201).

La guerre avec la Hollande éclata sur ces entrefaites : Ruyter menaça le Léonais ; la milice morlaisienne marcha : le roi, pour faire face aux frais de la guerre, établit la gabelle et le timbre, qui soulevèrent la Bretagne entière. Les Bas-Bretons s'insurgèrent en masse par des motifs plus politiques que de circonstance : ils ignoraient même ce que c'était que cette gabelle dont leur noblesse leur faisait un épouvantail. Un jour un étranger paraît sur une de nos routes, à peu de distance de quelques Bas-Bretons, qui s'écrient que cet homme vient sans doute apporter la gabelle : on s'ameute, on le poursuit. Monté sur un cheval vigoureux, il s'échappe, mais sa montre reste au pouvoir des paysans, qui se la passent de main en main, la tournent en tous sens, l'appliquent à leur oreille, sans pouvoir s'expliquer le mouvement de ce qu'ils prennent pour un animal extraordinaire. Un des patriarches au pen-baz, oracle du pays, l'examine avec un peu plus de soin, puis relevant la tête d'un air inspiré : « C'est la gabelle ! » s'écrie-t-il, et le malheureux chronomètre est en un instant brisé sous le bâton des paysans.

Voilà pour le burlesque : cependant les insurgés couraient la campagne, saisissant les nobles du parti français et les pendant à leurs clochers. Des bandes se montraient aux portes de Morlaix, du côté de Plourin : le peuple pillait les magasius du timbre, et le bruit se répandait que la noblesse, à la faveur de l'anarchie, voulait piller la cité. On releva les remparts, on fit venir, pour la milice, des armes de St. Malo, on la paya a quinze sols par jour, et le calme se rétablit.

En 1734, une fête fut donnée à l'occasion de la prise de Philisbourg ; une question de préséance amena une collision entre la milice et les gens de justice. Ceux-ci eurent le dessous, leurs vêtements furent mis en lambeaux, leurs perruques brûlées, et quand l'ordre fut rétabli, le greffier et un huissier furent incarcérés. Les battus payaient l'amende.

En 1772, les états de la province se tinrent à Morlaix : ils furent l'occasion de vives discussions entre les épées de fer (nom qu'on donnait à cette époque à la petite noblesse du pays) et la bourgeoisie morlaisienne. Lors des fêtes que donna cette dernière, on voulut en exclure les dames nobles dont les maris avaient violemment mécontenté les bourgeois : du reste, on fournit de forts beaux logements au duc de Fitz-James, à l'intendant et à leurs dames, et on les combla de soins et de civilités. Cette tenue coûta 4,727 livres à la ville.

Les années suivantes sont remplies par les faits les plus insignifiants : c'était le calme qui précède la tempête. On pressentait vaguement qu'on allait entrer dans une révolution : la nouvelle des événements du 14 juillet 1789 ne laissa plus de doute.

(Guillaume Marie Lejean).

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