Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

Guillaume DUVAL, prêtre mis à mort en 1799 par les colonnes mobiles
dans le territoire de l'Archidiocèse de Rennes.

  Retour page d'accueil       Retour page "Ville de Montours"  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

328. — Né au village de Brezel en la paroisse de Montours, le 22 août 1747, d’une famille originaire de Saint-Germain-en-Coglès, Guillaume Duval était fils de Julien Duval et de Gillette Delourme, qui donnèrent encore le jour à deux autres fils ainsi qu’à trois filles. Son titre clérical est du 18 juin 1770. Il reçut le sous-diaconat le 22 septembre 1770 et le diaconat le 19 septembre 1771. Mgr des Laurents, évêque de Saint-Malo, lui conféra le sacerdoce à Saint-Méen, par dimissoire, le 19 septembre 1772.

Nommé d’abord vicaire à Coësmes cette même année, il fut en la même qualité transféré en 1779 au Châtellier et en 1781 à Notre-Dame de Vitré. C’est là qu’il fut pourvu, sur la présentation de l’abbé d’Evron, de la cure de Laignelet, laquelle lui valait 3.057 livres de revenu net. Il en prit possession le 20 mars 1787. Il signa comme tel en 1790 l’adresse du clergé fidèle à l’évêque de Rennes et refusa après de se souiller du serment à la Constitution. Par suite, remplacé comme insermenté dans sa paroisse, il dut s’éloigner de son presbytère aux environs du 27 mai 1791, date de sa dernière signature sur les registres de catholicité de Laignelet. Il vécut alors momentanément à Montours, mais l’abbé Duval « qui, de bonne heure, avait prévu les dangers du schisme, en avait tellement prévenu son peuple, que pas un de ses paroissiens n’y participa ». Aussi l’intrus (M. Desrues) arrivé pour le remplacer, le 29 mai 1791, ne put trouver personne pour lui servir la messe et dut quitter sa paroisse au bout de quelques mois. Les habitants de Laignelet réclamèrent en vain au district de Fougères un pasteur de leur choix. Le 28 novembre 1791, on leur répondit en mettant comme condition sine qua non la prestation du serment de l’abbé Duval. Une conduite si chrétienne de la part de son troupeau le lui rendit encore plus cher, et il résolut dès lors de ne pas s’en séparer. Il laissa donc partir pour l’exil, en septembre 1792, son vicaire et son ami, M. Brette, mort depuis chanoine de Rennes, et sut se soustraire à la loi de déportation. Ce digne pasteur resta ainsi pendant plus de cinq ans caché dans sa paroisse ou dans les environs, affermissant ses ouailles dans la Foi par l’exercice du saint ministère, et les édifiant par ses exemples.

« C’était, écrit de lui Mgr Bruté dans ses Souvenirs, op. cit., t. IX, page 249, un homme d’une contenance pleine de sérénité et dont le fond du caractère était la douceur. Il était cependant d’une audace extrême et ne craignait rien quand il s’agissait de remplir ce qu’il jugeait son devoir. Aussi son courage, poussé souvent jusqu’à l’héroïsme, lui avait-il mérité le surnom glorieux de Guillaume-sans-Peur ».

On raconte que, revenant un jour de baptiser un enfant à Montours, il aperçut de loin une patrouille de révolutionnaires sur la route : loin de songer à fuir, il mit à son chapeau une belle cocarde tricolore qu’il avait en poche et, entonnant la Marseillaise, il passa, sans broncher et sans être reconnu, devant les soldats. Il se cacha souvent, durant les mauvais jours, chez un de ses paroissiens nommé Jean Le Bossé, que nous voyons signer la déclaration de son décès. Il se réfugiait aussi parfois à la Tertraie, où habitait sa famille, alors revenue se fixer à Saint-Germain-en-Coglès.

329. — Au printemps de 1795, la tranquillité sembla vouloir renaître ; quelques églises furent même rendues au culte et le clergé fidèle put momentanément y exercer son ministère. Les premiers mois de 1797 furent aussi marqués par un ralentissement de la persécution religieuse. On possède encore à Laignelet le registre des baptêmes et mariages que fit dans cette paroisse M. Duval en 1797, du commencement de janvier à la fin de septembre. A cette dernière date, il lui fallut de nouveau se cacher, et cela d’autant plus que Loysel, commissaire du Directoire exécutif près de l’administration cantonale de Fougères, avec l'approbation de l'administration départementale d'IIle-et-Vilaine, avait organisé des bandes d’individus, qui, déguisés sous le costume des paysans du pays fougerais, avaient mission, à raison d'une prime de 100 francs par tête, d'exterminer le clergé catholique. Et, si horrible que ce fait paraisse, les documents officiels et les Mémoires du temps ne permettent pas de révoquer en doute cette assertion.

« Des jeunes gens de Fougères, écrit le colonel de Pontbriand, un contemporain, à la page 399 de ses Mémoires, publiés en 1897 à Paris, chez Plon, ne rougirent pas de s’associer à ces expéditions (sanguinaires). Deux d’entre eux assassinèrent eux-mêmes, près de l’ancien couvent de Saint-François, le respectable M. Duval, curé de Laignelet et frère d’un célèbre chirurgien de Rennes. Voici du reste la relation traditionnelle de la mort du recteur de Laignelet :

Le 22 pluviôse an VII (11 février 1799), Guillaume Duval, en compagnie de la domestique de son presbytère, Jeanne Letellier, était venu passer la journée au village du Pressoir en Laignelet, chez un bon paysan, appelé Pierre Godard. On y vint lui demander de se rendre au village de la Fieffe, pour y baptiser l’enfant d’un nommé Perrin. Il voulut partir aussitôt, mais la famille Godard le retint, parce que des Jacobins de Fougères avaient été vus dans la forêt de ce nom.

Quand vint le soir, l’abbé Duval refusa d’attendre plus longtemps et partit à la tombée de la nuit, suivi de Jeanne Letellier, sa fidèle domestique. Arrivés près du ruisseau de la Grande-Rivière, là où il coupe l’ancien chemin de La Bazouges, ils aperçurent les patriotes qui s’en revenaient du lieu dit Saint-François ; aussitôt ils se jetèrent dans les taillis, le recteur d’un côté, sa domestique de l’autre. Malheureusement M. Duval avait été vu, sinon reconnu. Tuer un curé était une bonne affaire pour de tels individus ; l’un d’eux tira sur le fuyard, et ses deux coups de fusil atteignirent le vénérable prêtre ; M. Duval put encore faire quelques pas, mais il ne tarda pas à tomber pour ne plus se relever, au lieu dit le « Saudre Emoussé ».

Lorsque les misérables assassins se furent éloignés, non sans avoir fouillé le cadavre encore chaud, la pauvre domestique toute tremblante retourna à la maison du Pressoir et y dit en arrivant : « Venez vite, on a tiré sur Monsieur le Recteur, bien sûr qu’il est tué ! » Le père Godard et ses deux fils, Pierre et Jean, prirent immédiatement une lanterne, et, guidés par Jeanne Letellier, se mirent à la recherche de l’abbé Duval, mais ils ne parvinrent pas à le trouver. Le lendemain seulement, étant retournés dans la forêt, ils rencontrèrent son cadavre, tombé à une centaine de mètres du lieu où il avait été tiré. Le corps du martyr demeura deux jours dans la forêt, comme le prouve l’acte de décès que l'on a donné ailleurs.

L’abbé Tresvaux assure tenir de la famille de la victime que « le chirurgien qu’on avait chargé de faire l’ouverture du cadavre, éprouva un grand étonnement, ainsi que ceux qui assistaient à l’opération, en voyant que le corps de M. Duval avait conservé les couleurs d'un homme vivant, et qu’au premier coup de bistouri, il en sortit un sang vermeil et limpide. Il fut inhumé dans le cimetière de sa paroisse et près de la porte principale de l’église de Laignelet ». On conserve toujours pieusement sa sépulture.

330. — L’assassinat de M. Duval fit verser bien des larmes aux bons chrétiens du pays de Fougères ; son véritable meurtrier n’était autre que Gabriel Deshayes, garde général de la forêt de Fougères, lequel, ainsi que l’établissent sans réplique des documents qui ont été publiés ailleurs, poussé par sa prétrophobie et sa cupidité, avait, selon son dire, « terrassé M. Duval d’un coup de feu à une distance de vingt à trente pas ». Ce misérable réclama et reçut ensuite pour sa récompense une somme de 100 francs des mains du représentant à Fougères du gouvernement révolutionnaire. Les objets dérobés sur le cadavre à peine refroidi de M. Duval par son meurtrier, sont tout à l’honneur de ce prêtre si dévoué et si actif ; en voici l’énumération, telle qu’elle figure à la date du 19 février 1799 aux Arch. d'I.-et-V., série L, 446 : d’après ce document. Deshaies s’empara sur sa victime d’une espèce de petite bourse de carton, couverte en soie, contenant un petit purificatoire dans lequel se trouvait renfermée une hostie ; d’un petit coco en forme d’œuf, contenant une petite boîte d’étain, renfermant des saintes huiles ; enfin, d’un chapelet de cou, auquel était attachée une petite médaille, représentant d’un côté une figure et, de l’autre, un soleil. Il s’y trouvait pareillement attaché un petit Christ en bois étranger.

On ne peut mieux terminer cet article qu’en inscrivant ici l’acte de décès de l’abbé Duval, rédigé par un de ses confrères martyrisé comme lui pour le nom de Jésus-Christ. Lorsque le pieux abbé Gavard, vicaire à Parcé, — duquel on parlera par ailleurs, — apprit l’assassinat du recteur de Laignelet, il écrivit ce qui suit sur le touchant registre de Parcé, qu’il eut le courage de tenir aux plus mauvais jours de la Révolution : « Vénérable et discret Messire Guillaume Duval, recteur orthodoxe de la paroisse de Laignelet près Fougères, a été assassiné et massacré dans la forêt de Fougères, près le couvent de Saint-François, dans le temps que par un saint zèle et animé par la charité, qui ont toujours fait son caractère propre et particulier, il se transportait dans un lieu où son ministère exigeait sa présence. Il avait longtemps affronté les plus grands dangers pour porter les secours de la religion, et prodigué sa vie pour le salut des âmes : il avait plusieurs fois passé au milieu des cantonnements de soldats furieux contre les catholiques et surtout contre les ministres de la Religion romaine. Dieu l'appela à lui par une mort qui lui fut donnée en haine de la Religion et qu'il avait pardonnée par avance ». Qui pouvait mieux faire l’éloge de ce bon serviteur de Dieu que le prêtre destiné à périr du même genre de mort quelques mois plus lard ?

331. — Le souvenir de M. l’abbé Duval, d’après M. le recteur actuel de Laignelet, s’est, après plus d’un siècle, conservé vivant dans le pays où sa mémoire est toujours vénérée. On aime à y rappeler les circonstances de sa vie et de sa mort héroïques. On y croit à son martyre.

En 1913, à l’occasion d’une mission, M. l’abbé Nogues a fait ériger une croix en granit sur le bord de la route, tout près du village du Pressoir, à la mémoire de l’héroïque abbé Duval. A l’occasion de cette cérémonie, il engagea ses paroissiens, lorsqu’ils passeraient devant ce calvaire, à réciter un Pater et un Ave pour obtenir la conservation de la Foi parmi eux. Ainsi donc, mise à prix de la tête de M. Duval, prime payée à son meurtrier, assassinat exécuté à l’occasion d’un acte de ministère, renommée de martyr s’attachant aussitôt après son trépas à sa mémoire, et se perpétuant jusqu’à nos jours, rien ne semble manquer à ce serviteur de Dieu pour permettre de présenter sa cause à la S. C. des Rites.

BIBLIOGRAPHIE. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne, op. cit., t. II, p. 315. — Bruté de Rémur, in Revue de Bretagne et de Vendée, t. IX, p. 224-225. — Lemas, Un District breton, op. cit., p. 286-289. — Le Journal de Fougères, répondant à la Chronique de Fougères en juin 1893. — Guillotin de Corson, Les Confesseurs de la Foi, etc., op. cit., p. 141-144. — Abbé Jean Macé, Quatre siècles d'Histoire ou Saint-Germain-en-Coglès, etc., op. cit., t. II, p. 79-86. — Pautrel, Notions d'Histoire et d'Archéologie pour la région de Fougères, Rennes, in-8°, 1927, p. 261. — Lemasson, Les Actes des prêtres insermentés de l'archidiocèse de Rennes, etc., op. cit., p. 229-240. On y trouve toutes les pièces officielles concernant M. Duval.

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

© Copyright - Tous droits réservés.