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CAHIER DE DOLÉANCES DE MONTAUBAN-DE-BRETAGNE EN 1789

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SEIGNEURIES DE MONTAUBAN ET DE LA CHASSE.
(Montauban, Iffendic, Saint-Gonlay, La Chappelle-du-Lou).

Le cahier de la paroisse de Montauban a été adopté dans une assemblée (1er avril) présidée par le sénéchal du comté de Montauban, Jan de la Hamelinaye, et où assistait le sénéchal de la juridiction de la Châsse, Tiengou de Tréfériou. Celui-ci a présidé le 2 avril, l'assemblée électorale d'Iffendic, de concert avec le procureur fiscal de la Châsse, Joseph Maudet, lequel a lui-même présidé, le 3 avril, l'assemblée de Saint-Gonlay. Or le cahier de Saint-Gonlay reproduit en grande partie celui d'Iffendic, et le cahier d'Iffendic présente de grandes analogies avec celui de Montauban. — Quant au cahier de La Chapelle-du-Lou (4 avril), adopté dans une assemblée présidée par un procureur du comté de Montauban, il a subi l'influence des Charges d'un bon citoyen de campagne, mais son texte n'a aucune parenté avec celui des trois cahiers précédents.

MONTAUBAN (aujourd'hui MONTAUBAN-DE-BRETAGNE).

Subdélégation de Montauban. — Dép. d'Ille-et-Vilaine, arr. de Montfort, chef-lieu de canton.
POPULATION. — En 1793, 2.860 hab. (Arch. Nat., D IVbis 51) ou 2.750 hab. (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série L).
CAPITATION. — Total en 1770, 2.240 l. 19 s. 7 d., se décomposant ainsi : capitation, 1.476 l. ; 21 d. p. l. de la capitation, 129 l. 3 s. ; milice, 196 l. 17 s. 9 d. ; casernement, 360 l. 18 s. 10 d. ; frais de milice, 78 l. (Ibid., C 3981). — En 1778, 598 articles (Ibid., C 3982).
VINGTIÈMES. — En 1787, 5.448 l. 6 s.
FOUAGES. — 80 feux 1/8. — Fouages extraordinaires, 1.559 l. 12 s. 10 d.

OGÉE. — Petite ville sur la route de Rennes à Saint-Brieuc pour Brest ; à 10 lieues de Saint-Malo ; à 6 lieues de Rennes. — 2.600 habitants. — On y trouve une subdélégation, deux postes, l'une aux lettres et l’autre aux chevaux, et un marché tous les mercredis.

PROCÈS-VERBAL. — Assemblée électorale, le 1er avril, au lieu ordinaire des délibérations, sous la présidence de Jacques-Joseph-François Jan de la Hamelinaye (voir la note 1 qui suit), avocat au Parlement, subdélégué, sénéchal et premier juge du comté de Montauban (voir la note 2 qui suit). — Comparants : Escolan de Grandpré, procureur fiscal ; Dreuslin de la Villesgoudeaux, avocat au Parlement ; Tiengou de Tréfériou (voir la note 3 qui suit) ; avocat au Parlement ; Desbois, procureur au comté (voir la note 4 qui suit) ; Chantrel (voir la note 5 qui suit), procureur au comté, ancien délibérant ; Trouessart (voir la note 6 qui suit), procureur au comté ; Roussau, greffier du comté ; Rochery, receveur ambulant des devoirs ; Piédevache, receveur ambulant des devoirs ; Le Sénéchal, chirurgien juré, commis aux rapports ; Louis Regnault ; Pierre Codet ; Jean, Marie Joublet, syndic du grand chemin ; Jean Macé ; Joseph Lelut ; François Bedel ; Mathurin Colliaux ; Gilles Houil ; Julien Fauchoux ; Joseph Cadier ; François Fouril; Olivier Fouril ; Clément Hamelin ; René Daniel ; Jan Tiengou ; Jan Peroux ; Jan Ferré ; Julien Lemoine trésorier en charge ; Joseph Tirel ; Pierre Massart ; Pierre Geherot : Pierre Leclerc. — Députés : J.-J.-F. Jan de la Hamelinaye ; Guillaume-Jean-Marie Dreuslin.

Note 1 : Jan de la Hamelinaye a été, à l’assamblée de la sénéchausée, l’un des membres de la Commission chargé de rédiger le cahier général.

Note 2 : Sur le comté de Montauban, voy. GUILLOTIN DE CORSON, Grandes seigneuries de Haute-Bretagne, 2ème série, pp. 270-275 ; A. DE LA BORDERIE et L. DE VILLERS, La seigneurie de Montauban et ses premiers seigneurs, dans les Mémoires de la sociète archéologique d’Ille-et-Vilaine, t. XXIV. 1895, pp. 267-297 ; Marquis X. DE BELLEVÜE, Maison de Montauban ; Origines de la seigneurie de Montauban et de ses seigneurs dans les mêmes Mémoires, t. XXVII, 1898, pp. 129-177 ; A. DE LA BORDERIE, Origines de la seigneurie de Montauban et de ses seigneurs ; réponse à M. de Bellevüe, dans les mêmes Mémoires, même tome, pp. 255-279.

Note 3 : Tiengou de Tréfériou était sénéchal des juridictions de la Chasse et de Saint-M’Hervon, et, à ce titre, il a présidé le 2 avril l'assemblée d'Iffendic, et, le 5 avril, celle de Saint-M’Hervon, qui l’a choisi pour l’un de ses députés à l'assemblée de la sénéchaussée.

Note 4 : Desbois, alors âgé de 30 ans, avait été nommé, en 1759, contrôleur des actes au bureau des Domaines de Montauban, sa ville natale ; il exerça en même temps les fonctions de notaire et de procureur ; en 1767, il était noté comme très bon sujet, méritant l'avancement qu'il sollicitait (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 5074, n° 6).

Note 5 : Chantrel était procureur fiscal de Saint-M'Hervon, et il a été député de cette paroisse à l'assemblée de la sénéchaussée.

Note 6 : Ce personnage ne doit pas être confondu avec son homonyme, qui a présidé le 3 avril l'assemblée d’Irodouer qui l'a élu pour son député, et qui, le 5 avril, a participé à l'assemblée de Lundujan ; la comparaison des signatures montre qu'il s'agit de deux personnages différents.

 

Cahier des doléances, plaintes et remontrances des habitants composant le Tiers Etat de la ville et paroisse de Montauban, évêché de Saint-Malo, province de Bretagne, tous domiciliés, nés Français, âgés de vingt-cinq ans, de toutes professions, assemblés ce jour premier avril 1789, en vertu de convocation publiée et affichée le dimanche vingt-neuf mars dernier, en présence de M. de la Hamelinaye Jan, sénéchal du comté de Montauban, pour être par lui chiffré ne varietur et présenté par leurs députés en l'assemblée qui se tiendra en la ville de Rennes, le sept de ce mois, devant M. le Sénéchal de Rennes.

SIRE,
Vos soins paternels font renaître dans le cœur de vos sujets l'espérance d'un bonheur qu'ils semblaient ne pouvoir plus se promettre ; ils bénissent et la postérité bénira après eux le régne d’un Monarque juste et bienfaisant, qui, ne voulant que par les lois, a mis son intérêt le plus cher dans le bonheur de ses sujets et veut bien les consulter eux-mêmes sur les moyens de les rendre heureux.

Vous avez entendu, Sire, les réclamations que le Tiers Etat vous a fait parvenir de toutes les parties de votre Royaume ; vous y avez été sensible, et vous voulez que nous vous adressions nos doléances et nos griefs. Nous allons les déduire avec toute la franchise et la confiance qu'inspirent à vos fidèles sujets l'invitation et la parole sacrée de leur bon Roi.

ARTICLE PREMIER. — Le Tiers Etat de la province de Bretagne a détaillé ses griefs et demandes dans ses différents arrêtés pris à Rennes depuis le 22 décembre 1788 jusqu'au 20 février de la présente année ; nous déclarons tous unanimement approuver les dites demandes sans aucune exception ; nous adhérons pareillement aux dits griefs, qui nous sont communs, et nous supplions très instamment Sa Majesté de vouloir bien donner sur tous ces objets une décision prompte qui puisse enfin rétablir le calme et la tranquillité dans la province, agitée depuis longtemps par ses dissensions.

Nous déclarons tous ici que nous ne reconnaissons d'autre juge que le Roi, notre souverain seigneur, pour decider les contestations que se sont élevées entre les différents ordres de la province de Bretagne ; si les Etats généraux sont consultés par Sa Majesté, leur avis ne saurauit faire loi ni porter atteinte aux droits, privilèges, franchises et libertés des habitants de la Bretagne, dans lesquels nous demandons expressément à être maintenus, et nous protestons d’avance contre tout ce qui pourrait être dit et délibéré de contraire aux dits droits, privilèges, franchises et libertés, et au contrat d’union de la Bretagne à la couronne de France.

ART. 2. — Nous sommes, comme tous les autre sujets de Sa Majesté, disposés à faire des sacrifices pour l’extinction de la nationale, que nous savons être immense ; mais nous supplions notre auguste Monarque de ne pas souffrir que les seuls propriétaires des bien fonds de son Royaume soient chargés de l’acquitter ; tous les Francais indistinctement y doivent contribuer en proportion de leurs facultés, et, pour que l'Etat ne soit pas replongé une seconde fois dans les embarras où il se trouve actuellement, le Roi et les Etat: généraux seront suppliés de prendre les mesures les plus efficaces et les plus propres à maintenir la prospérité de l'empire français.

ART. 3. — Il y a trop de petites justices seigneuriales en Bretagne ; il s'en trouve 4 et 5 et quelquefois plus dans une seule paroisse ; sous le ressort de Montauban l'on en compte près de 40 ; il serait injuste de supprimer toutes les hautes justices qui relèvent du Roi et qui ont au moins 4 ou 5 clochers dans leur mouvance ; mais toutes les autres, et principalement les justices moyennes et basses, doivent être réunies aux hautes justices dont elles dépendent, et qui ont l'étendue et les qualités dont on vient de faire mention, sauf l'indemnité des greffes par les seigneurs qui profiteraient de la réunion (voir la note qui suit). Nous demandons que les pouvoirs de tous les présidiaux du Royaume soient augmentés et que le dernier ressort leur soit attribué dans tous les cas jusqu'à dix mille livres au moins.

Note : En répondant, le 6 janvier 1766, à l'Intendant, qui lui avait demandé la liste des juridictions existant dans sa subdélégation, Jan de la Hamelinaye écrivait ; « Je n'ai pas cru devoir faire mention dans cet état des justices moyennes et basses qui ressortissent à celles que l'y ai comprises, par la raison qu'on n'y instruit point les crimes dignes de mort ou de peines afflictives ; d'ailleurs, ces sortes de justices sont si multipliées dans cette province que je pourrais à peine vous rendre un compte exact de toutes celles qui s'exercent dans mon département. J'observerai seulement que, sous le ressort de Montauban, il y a trente-deux justices, tant moyennes que basses, qui y viennent en appel, et que cette multiplication de degrés dans les tribunaux fait un grand tort à l'administration de la justice, en épuisant le citoyen avant qu'il parvienne à faire décider ses droits par un jugement souverain ». Sur les instances de l'Intendant, le subdélégué dut approfondir son enquête et travailler à l'établissement d'une liste complète de toutes les juridictions, mais, en la transmettant, le 22 avril, il s'excuse par avalas des lacunes qui doivent s'y trouver, car « il était difficile... qu'au milieu de ce tas étonnant de juridictions qui fourmillent dans différentes paroisses, il n'en échappât quelques-unes ». Dans le seul auditoire de Montauban s'exerçaient, en dehors de la haute justice du comté, qui appartenait au prince de Rohan-Guémené, les juridictions suivantes : la Ribaudière (h. j.), à Mlle de la Caunelay Thomas ; le Bois-Durand (m. j.), à M. de Cervaude de la Villescerfs ; Pelineuc (m. j.), à Mme de la Riolais ; Launay Jullienne (b. j.), à M de Montaudry ; le prieuré de Montreuil (b. j.) ; Lessart (b. j.), à Mme de la Riolais ; le prieuré de Thelonet (m. j.) dépendant de l'abbaye de Saint-Sulpice ; le Lou-du-Lac (h. et m. j.), à M. Maubert du Lou (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 1818).

ART. 4. — Le franc-fief est un impôt accablant pour le Tiers qui possède des biens nobles ; on le paye tous les vingt ans et même à chaque mutation ; de cette manière, il peut se renouveler souvent dans l’espace de vingt ans ; il consiste dans une année du revenue et, en y ajoutant les 8 sous pour livre, c’est presque une demi-année de plus ; cet exposé suffit pour le proscrire comme le plus terrible fléau qu'ait jamais inventé le génie fiscal pour la ruine des sujets. Les nobles ne le payent point ; ils ne payent point le fouage, parce qu’insensiblement leurs terres sont devenus toutes nobles. Nous demandons que ces deux impôts soient abolis et remplacés par une imposition générale, à laquelle tous les biens nobles et roturiers sans distinction soient assujettis en proportion de ce que le fouage et le franc-fief produisent de droit au Trésor royal. Le contrôle ne fourmille-t-il pas d'abus oppressifs ? Les perceptions n'y sont-elles pas à peu près arbitraires et toujours étendues au gré de l'avidité financière ? Pauvre peuple, elle interprète vos actes à sa guise, elle exige des demi-centièmes deniers pour des donations que la loi rejette et dont les donataires ne profitent pas ; elle argue de fausses déclarations l'opération de vos priseurs qui estiment vos biens à leur vraie valeur, parce que le prisage ne s'accorde pas avec la vente précédente ou succession des mêmes biens ; on multe d'amendes vos juges, vos avocats, vos prêtres, vos officiers publics qui, pour vous obliger, écrivent de leur main sur papier libre vos quittances et vos transactions que vous ne pouvez que signer, et tant d'autres vexations dont il serait trop long de faire ici l'énumération. Nous supplions le Roi et les Etats généraux de réformer tous ces abus criants.

ART. 5. — Le gouvernement ne saurait trop protéger et encourager le cultivateur et veiller à ce que les grains, confiés à la terre et qui font l’espoir du laboureur, ne soient pas pillés et mangés ; il ne lui sert de rien de semer s’il n’a pas la liberté d’empêcher par tous les moyens possibles les pigeons, les lapins et autres animaux destructeurs de venir ravager ses champs ; ce sont des voleurs d’autant plus formidables qu’ils sont privilégiés et sous la sauvegarde des lois ; voyez l’art. 390 de la Coutume de Bretagne (voir la note 1 qui suit) et l’ordonnance des eaux, bois et forêts (voir la note 2 qui suit). Cependant les garennes et surtout les colombiers sont multipliés en Bretagne à un excès déplorable pour les terres ensemencées ; la plus petite maison de noblesse et jusqu'à de simples métairies ont leurs fuies, dont les habitants sont nourris aux dépens du public. Nous demandons qu’on abolisse tous ces colombiers, ou du moins qu'ils soient réduits à un seul par paroisse pour le seigneur du clocher.

Note 1 : Voici le texte de cet article : « On ne doit tirer ne tendre aux pigeons de colombier avec filets, gluz, cordes, laçons ne autrement, ne pareillement tendre ne tirer aux garennes ne pêcher étang, quelque longue que soit la possession, si on n’a droit de ce faire, sur peine de punition corporelle ».

Note 2 : Ordonnance du mois d'août 1669. Voy. surtout le titre XXX, Des chasses, et son art. 28, qui interdit la chasse à tous « marchands, artisans, bourgeois et habitants des villes, bourgs, paroisses, villages et hameaux, paysans et roturiers, de quelque état et qualité qu'ils soient » (ISAMBERT, Anciennes lois françaises, t. XVIII, p. 299).

ART. 6. — Suivant la Coutume de Bretagne, les seigneurs hauts et moyens justiciers recueillent la succession du bâtard qui décède sans hoirs, et ils sont parvenus à se faire décharger de la nourriture du bâtard nouvellement né et en bas âge, ce qui est entièrement injuste. N'est-il pas naturel que celui qui retire les profits d'une chose en supporte les charges ? C'est encore un des abus de notre province de Bretagne et dont nous ressentons actuellement les funestes effets.

ART. 7. — Il serait du bien public, même honorable à la Nation, que les biens fussent libres comme les personnes et qu'on fût autorisé à franchir foutes les rentes féodales sur le pied de leur valeur fixée par notre Coutume [Note : Les mots imprimés en italique sont empruntés aux Charges d’un bon citoyen de campagne]. Sa Majesté est suppliée de nous accorder, une loi positive et formelle à cet égard, et, dans le cas qu'elle ne se porterait pas à réaliser dès à présent ce vœu dans toute son intégrité, comme il existe parmi nous plusieurs autres rentes telles que le rachat (voir la note qui suit), qui ruine souvent les enfants du vassal, un droit plus funeste encore, connu sous la dénomination de droit chéant et levant et dont la nature est de se multiplier autant de fois que le vassal laisse d'enfants, ce qui est d'une excessive dureté, nous demandons à être autorisés à en faire le franchissement sur le pied du denier 30, ou telle autre fixation qui sera vue appartenir conformément à la raison et à l'équité.

Note : Le prieuré de Montreuil, en Montauban, percevait sur ses vassaux le droit de rachat, et la perception de ce droit était comprise dans la ferme générale du prieuré (L. DE VILLERS, Le prieuré de Notre-Dame de Montreuil, dans les Mémoires de la Soc. archéol. d’Ille-et-Vilaine, t. XXIX, 1900, p. 274).

ART. 8. — Que, dans le même cas de non franchissement des rentes féodales, le seigneur qui ne fait pas ses diligences pour les recueillir dans les cinq ou dix ans de leurs échéances soit assujetti à la prescription de cinq ans pour les arrérages des rentes constituées ou à celle de dix ans établie pour les deshérences par l'arrêt du Parlement de Bretagne rendu chambres assemblées le 3 juillet 1756.

ART. 9. — Que toutes les avenues qui ont bout à chemin soient ouvertes pour le passage et la commodité du public, nonobstant la longue possession de les enclore.

ART. 10. — Que les servitudes féodales, les sergentises (dénominations odieuses), les cueillettes des rentes féodales ne soient plus à la charge des vassaux (voir la note 1 qui suit) ou qu'ils soient payés par les seigneurs, comme cela se pratique dans les domaines de notre bon Roi ; qu'il soit permis aux vassaux d'avoir des meules à bras chez eux pour moudre leurs grains (voir la note 2 qui suit) ; qu'ils ne soient plus contraints de voiturer par corvées les meules et autres matériaux pour la réparation des moulins, et que les règlements rendus au Parlement de Bretagne à cet égard soient abrogés.

Note 1 : Dans la seule paroisse de Montauban, il y avait, en 1681, 453 tenanciers astreints à payer des rentes féodales à la seigneurie de Montauban ; ils étaient répartis en cinq bailliages : la Verge noble (127 tenanciers), Lesvran (177), Treguenot (63), les Ferrières et la Guiguenaie (68), le Pas des Haies (18) ; toutes ces rentes, payables en argent, étaient perçues par sergents bailliagers. Le bailliage de la Grèneterie, dont les 240 tenanciers devaient des rentes en grains, s’étendait dans les paroisses de Montauban, Irodouër, Landujan et Quédillac (A. DE LA BORDERIE. La seigneurie de Montauban……, dans les Mémoires de la Soc. archéol. d’Ille-et-Vilaine, t XXIV, 1895, p. 276).

Note 2 : Sur la convention amiable passée entre le prince de Rohan-Guémené et les meuniers des moulins banaux de Montauban après la suppression de la suite de moulin (loi du 28 mars 1790), voy. Cahier de doléances d'Iffendic.

ART. 11. — Que la vénalité des charges de judicature soit abolie ; que les places de magistrats, d'officiers dans les troupes de terre et de mer ne soient accordées qu'au seul mérite et aux services rendus à l'Etat et non à la naissance, et qu'il soit pourvu au remboursement de ceux qui ont acheté ces places à prix d’argent.

ART. 12. — Que chaque paroisse nourrisse ses pauvres comme étant la seule qui puisse bien connaître les vrais nécesiteux qui y demeurent (voir la note qui suit) ; que la mendicité des moines et des religieuses soit défendue dans les campagnes, sauf à être pourvu à leur subsistance par les villes, les abbés commendataires, les prieurs et les religieux rentés.

Note : Il y avait à Montauban, en 1774, un établissement de charité pour « les pauvres honteux et qui ne mendient pas » ; son revenu annuel, montant à 120 l., se payait « par différents particuliers, qui ont créé des rentes constituées... et ont emprunté les capitaux du général, auquel les fondateurs ont légué pour fournir la subsistance aux pauvres honteux de la paroisse. Cette somme se distribue sur les attestations de pauvreté reconnue par le recteur et les juges de Montauban » (Rapport du subdélégué Jan de la Hamelinaye, Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 1293).

ART. 13. — Qu'il soit accordé aux prisonniers renvoyés hors d'accusation et déclarés innocents, et qui ont subi une longue détention, une indemnité proportionnée aux torts qu'ils ont soufferts, et qu'il leur soit donné, ainsi qu'aux forçats dont le temps est fini, une somme suffisante pour se rendre chez eux.

ART. 14. — Que les droits de coutume sur les grains et autres marchandises et denrées qui se vendent dans les foires et les marchés soient abolis comme contraires à la liberté du commerce (voir la note qui suit).

Note : En 1681, le seigneur de Montauban possédait, dans cette localité, le marché, qui se tenait tous les mercredis, la foire du jour de la Saint-Martin (11 novembre), la « petite foirette », qui se tenait quinze jours plus tard, la foire de la Sainte-Michel (29 septembre) et une autre foire qui se tenait le mardi après la Sainte-Catherine (25 novembre) ; elle y percevait des droits de coutumes (A. DE LA BORDERIE, op. cit., p. 273). Appelé à dresser l'état des droits perçus sur la vente des grains, le subdélégué Jan de la Hamelinaye déclarait, le 25 novembre 1775, qu'à Montauban le prince de Rohan-Guémené levait 2 d. par boisseau les jours de marché et 4 d. les jours de foire et pendant les quatre-temps (Arch. d'Ille-et-Vilaine C 1689). En 1786, les titres produits par le prince devant le Bureau des minages pour la justification de cette perception furent contestés par le Contrôleur général des finances, et des investigations durent être faites dans les archives le la seigneurie. Le rapport envoyé au Ministre par l'intendant de Bretagne, le 14 décembre 1787, donne sur ce sujet les détails les plus circonstanciés : « Tous les renseignements qui m'avaient été demandés sont contenus dans une déclaration que le procureur fiscal, archiviste de la juridiction du prince de Rohan Guémené, a remise à mon subdélégué et que j'ai l'honneur de vous envoyer avec une copie collationnée d'un aveu du 19 mars 1575 qui n'avait point été produite au bureau des minages. Cet aveu constate, comme celui de 1619, l'existence d'un droit de coutume, mais sans donner aucune notion précise sur la quotité ou la perception du même droit, mais la déclaration de l'homme d'affaires de la seigneurie ne laisse rien à désirer à cet égard. On y voit : 1° que le droit de coutume dont il s'agit consiste en trois deniers par boisseau de toute espèce de grains vendus au marché de Montauban, et en un second droit de six deniers [ne se superposant pas au premier] quand on exige le mesurage avec le boisseau de la seigneurie, qui est dûment étalonné ; 2° qu’il n’est dû aucune espèce de droit d’étalage et de trépas, d'où il résulte que les droits de cette nature, dont les anciens titres semblent annoncer l'existence, sont tombés en désuétude ; 3° que le droit de coutume n'a pas lieu sur les farines et qu'il n'est pas même dû sur les grains qui sont vendus en grenier, mais seulement sur ceux qu'on apporte et qu'on vend au marché, car ceux qui ne sont pas vendus en sont exempts. On me marque au surplus et le Conseil peut tenir pour certain : 1° que cette déclaration de M. le prince de Rohan-Guémené est conforme à la perception immémoriale ; 2° que les vassaux n'ont jamais rendu aucun aveu de ce droit, mais que la perception n'en a jamais été contestée ; 3° que le droit de péage qu’on percevait anciennement sur les grains arrivant à Montauban n’existe plus depuis la suppression qui en a été ordonnée en 1763, et que, si les derniers baux à terme en font mention, c'est par pure inadvertence des rédacteurs et que cette erreur a même obligé M. le prince de Rohan à payer une indemnité pour le défaut de perception d’un droit aboli par l’autorité royale ; 4° qu’il y a à Montauban des halles en assez bon état, mais qu’il n’y a jamais eu de magasin pour serrer les draps qui restent invendus. On m’assure enfin et la modicité du droit de 3 d. par boisseau fait assez connaître que le produit en est des plus modiques, de sorte qu’il suffit à peine pour l’entretien des halles et qu’il n’est point onéreux » (Ibid., C 2451).

ART. 15. — Que le droit de chasse soit absolument interdit à tous les gentilshommes, fors sur les terres de leurs domaines (voir la note qui suit).

Note : La déclaration de 1681 déjà citée, mentionnait le droit, pour le seigneur de Montauban, « de contraindre ses sujets et autres habitants de la forêt de les faire assister aux chasses pour tendre raíz, les charroyer, mener et ramener à son château et faire les huées, lorsqu’il lui vient à plaisir » (A. DE LA BORDERIE, loc. cit., p. 273).

ART. 16. — Un grand abus, et qui peut-être n'a eu que trop d'influence sur les mœurs des peuples, c'est d'avoir cessé de les consulter comme on le faisait dans les beaux siècles du christianisme, lorsqu'il était question de leur donner des recteurs et même des évêques, et d'avoir confié la présentation des bénéfices à charge d'âme à des abbés, abbesses et autres personnes étrangères au gouvernement spirituel des paroisses. Nous demandons que tous les bénéfices-cures ou à charge d'âmes soient à l'avenir pourvus par les seuls ordinaires et au concours parmi les anciens curés-vicaires, qui seront présentés par les généraux et habitants des paroisses vacantes, et que, dans le cas de résignation ou permutation, le permuté ou résignataire ne puisse être admis que sur le suffrage des peuples (voir la note qui suit).

Note : Le droit de patronage de l’église et de présentation du recteur aurait autrefois appartenu au seigneur, si nous en croyons une tradition rapportée par la déclaration de 1681 (A. DE LA BORDERIE, loc. cit.), mais au XVIIIème siècle la présentation appartenait à l’abbé de Saint-Méen (Arch. d’Ille-et-Vilaine, série G, Pouillé de l'évêché de Saint-Malo.

ART. 17. — Un autre abus, qui est extrêmement gênant pour la liberté des mariages et qui fait sortir beaucoup d'argent du Royaume, est le refus que font quelques évêques d'accorder des dispenses d'alliance et de parenté ; nous demandons qu'il y soit incessamment pourvu.

ART. 18. — Que, pour conserver l'argent dans le Royaume, il ne soit plus payé à la Cour de Romme le droit d’annates pour les bulles des évêchés et des abbayes, et que les sommes qui y étaient destinées soient employées au soulagement des pauvres du diocèse dans chaque paroisse.

ART. 19. — Que la déclaration du Roi François premier, du mois de septembre 1539, soit retirée, et que les dispositions de l'ordonnance du mois d'août précédent soient rétablies dans leur force et vigueur (voir la note qui suit) ; en conséquence, qu'il soit défendu à toutes personnes de prétendre dans les églises paroissiales aucuns droits de bancs, enfeu et autres prééminences, s'il n'a la qualité de fondateur ou de patron.

Note : Il s'agit du mandement adressé par François Ier au Parlement de Bretagne, le 24 septembre 1539, lui prescrivant de faire publier et observer l'ordonnance du mois d'août précédent (Catalogue des actes de François 1er, n° 11173), qui apportait diverses modifications à l'ordonnance du 30 août 1536 (Ibid., n° 8620) sur le style et la manière de procéder en Bretagne (Ibid., n° 11214). Ce mandement suspendait l'exécution des art. 13-15 du chapitre II de l'ordonnance du mois d'août 1539, articles ainsi conçus :
« 13. Item, et pour ce que par cy-devant se sont trouvez innumérables contentions, débats et différens pour raison des prééminences et prérogatives de nos subjects dudict pays qui ont indifférentement prétendu droict ou dedans des églises parrochiales et autres églises dudit pays, dont sont advenues plusieurs forces et violences, au grand scandale desdites églises et perturbation du divin service.
14. Nous, pour faire cesser lesd. différents, avons ordonné, déclaré et statué qu'aucun, de quelque qualité ou condition qu'il soit, ne pourra prétendre droict, possession, authorité, prérogative ou prééminence au dedans desdictes églises, soit pour y avoir bancs, sièges, oratoires, escabeaux, accoudouers, sépultures, enfeuz, lites, armoiries, escussons et autres enseignes de leurs maisons, sinon qu'ils soient fondateurs ou patrons d'icelles églises et qu'ils en puissent promptement informer par lettres ou tiltres de fondations et par sentences et jugemens deuement donnez avec cognoissance de cause et avec partie légitime.
15. Item et outre le cas dessusdit, ne seront receus nos subjets dudict pays à faire intenter aucun procès ou instance pour raison desdicts prétendus droicts, et déclarons nulles toutes les procédures qui auraient esté faictes ou seroient sur ce faictes, et voulons néantmoins les parties contrevenans au contenu de ces présentes estre estroictement condamnées en bonnes et grosses amendes envers nous pour leur calomnie ou témérité procédant à cause de ladite contravention »
. (GIRARD et JOLY, Trois livres des offices de France, Paris, 1647, in–f°,t. I, pp. 583-584).

ART. 20. — Que, dans le cas où l'imposition du fouage subsisterait ou serait remplacée par une autre de pareille nature, toutes les terres situées dans une paroisse y soient comprises, sans considérer si la gerbe reste dans la paroisse ou est portée dans la paroisse voisine.

ART. 21. — Que non seulement les terres et domaines des seigneurs et gentilshommes contribuent à toutes les taxes des paroisses dans lesquelles ils sont situés, mais qu'on y comprenne encore leurs châteaux, maisons, jardins, pourpris, avenues, landes et autres terrains vagues ou incultes qui leur appartiennent, le tout en proportion de ce qu'ils peuvent valoir et produire annuellement, et même leurs étangs.

ART. 22. — Nous demandons qu'après la répartition justement faite des impôts, que chaque paroisse de la province doit supporter pour sa part dans les charges de l'Etat, il lui soit permis de s'imposer elle-même, de taxer ses habitants et de faire ses rôles de contribution sur papier libre, comme bon lui semblera, sans qu'il soit besoin du concours d'un commissaire ou étranger chargé de la rédaction de ces rôles, sauf, en cas de plaintes fondées de la part des contribuables, à se pourvoir à la Commission intermédiaire des Etats pour se faire décharger du trop imposé d'après l'avis du général de la dite paroisse, consulté préalablement à cet effet.

CONCLUSION.

Nous savons, Sire, que la destruction de tous ces abus et de tant d'autres, dont nous ne parlons point ici, n'est pas l'ouvrage d'un moment ; ils sont trop enracinés, trop d'intérêts s’opposent à leur réforme ; le temps seul et la réflexion peuvent changer les esprits et amener la révolution si désirée par vos peuples. Daignez, Sire, permettre la liberté de la presse dans votre royaume ; vous y verrez bientôt éclore un nouvel ordre de choses ; ceux de vos sujets qui tiennent le plus aux préjugés rougiront d’avoir tardé si longtemps à écouter la voix de la raison et de l’humanité qui leur crie d’abandonner des prétencions injustes qu’une longue suite de siècles n'a pu légitimer.

Votre administration, Sire, acquerra le degré de perfection dont elle est susceptible ; les droits de l'homme et de citoyen cesseront enfin d'être méconnus en France, et vos sujets toujours fidèles, toujours reconnaissants, béniront la main bienfaisante qui aura brisé les chaînes de l'oppression où ils gémissaient.

Arrêté en l'auditoire de Montauban le premier avril mil sept cent quatre-vingt-neuf.

[30 signatures, dont celle du président Jan de la Hamelinaye].

 

DÉLIBÉRATION DU GÉNÉRAL du 2 février 1789.
(Arch. commun. de Rennes, Cart. des Aff. de Bretagne, L).

Le général, tout en protestant de ne vouloir point contrevenir à l'arrêt du Conseil du 20 janvier, réitère sa délibération du 14 décembre précédent, adhère à l'arrêté des dix paroisses de Rennes du 19 janvier, et donne pouvoir à Fleuriais, son procureur au Présidial, de déposer la présente délibération au greffe de la municipalité de Rennes.

[21 signatures, dont celles du sénéchal Jan de la Hamelinaye, de Dreuslin de la Villesgoudeaux, des prêtres P. Mauny, P.-L. Chantrel et Daniel, du curé Lebreton].

(H. E. Sée).

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