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MEILARS APRES LA REVOLUTION

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M. Alain Pennanec'h revient à Meilars dès Janvier 1802 reprendre son ministère interrompu par la Révolution. En 1804, il déclare avoir à sa charge 849 âmes dont 609 communiants.

C’est trop pour lui. Il est frappé de paralysie partielle en 1806, et, dès lors, doit souvent appeler à son secours son voisin, M. Charles, recteur de Mahalon.

Il travaille à réparer les ruines accumulées par la Révolution. Pourtant, Notre-Dame de Confort, « chapelle de beaucoup de dévotion », est bien réparée déjà, et la chapelle de Saint-Jean est aussi en bonne voie de restauration.

Dès qu’a paru l’arrêté de l’an XI qui autorise les communes à fournir un logement aux desservants, les paroissiens ont racheté le presbytère à l’acquéreur Pierre Salou, moyennant une créance de 1.024 livres.

Le Recteur, pauvre, malade, brisé de privations et de fatigues, ne se plaint pas. L'Evêque le prend en pitié et lui envoie une aumône de 100 livres.

« J’ai reçu, répond M. Pennanec'h, les cent livres que vous avez eu la bonté de me faire passer. J’en serai reconnaissant toute la vie. Puisque vous connaissez si bien ma triste situation et quelle en a été la cause, il n’est pas nécessaire de vous dire que votre aumône a été bien placée. Si je ne me suis pas plains jusqu’ici, ce n’a pas été par défaut de confiance, mais par considération des fatigues que vous vous donnez et des sacrifices que vous faites pour rétablir la religion presque abolie dans votre diocèse. Continuez, la main de Dieu vous guide.

Je vous prie, Monseigneur, de n’être pas étonné que je ne sois pas plus importun à l’avenir que je n’ai été jusqu’ici. J’ai appris à me priver des choses, même les plus nécessaires, non pas pour mortifier mon corps que la main de Dieu a puni selon son mérite, mais pour tâcher d’expier toutes les fautes de ma vie passée. Inspiré par Dieu comme cette dernière fois, vous connaîtrez toujours mes besoins. Que vous les soulagiez ou non, ma confiance en vous ne sera jamais moindre. Est-il un sujet assez ingrat pour la refuser à un prélat si bon ?

En reconnaissance de tous vos bienfaits, Monseigneur, je vous prie d’agréer une part en mes faibles prières. Si elles sont écoutées, vous jouirez d’une bonne santé et votre vie sera longue pour le bien de la Religion et la prospérité de ce diocèse.

Comme je ne suis presque plus maître de mes membres, il est fort tard avant que je puisse me dis­poser à dire la messe. Jusqu’ici j’ai eu du scrupule à la dire avant d’avoir dit mon office, quoique plusieurs théologiens respectables l’autorisent. La nuit je ne puis plus lire. Ajoutez donc à toutes vos faveurs celle de me permettre de dire la messe avant d’avoir dit mes matines » (Archives de l'Evêché).

M. Pennanec'h continue de s’affaiblir. En 1809 il est devenu tout à fait incapable de donner la Pâque à ses ouailles. Obligé par cette longue maladie de son voisin de se charger de Meilars, le Recteur de Mahalon se plaint d’avoir trop de travail.

M. Alain Pennanec'h « moins plein de jours que de bonnes oeuvres » meurt le 27 Mai 1809, à l’âge de 63 ans. En annonçant cette nouvelle à l'évêché, M. Charlès dit qu’il craint d’être obligé de desservir tout ensemble Mahalon, Guiler et Meilars, à cause de la pénurie de prêtres. Il consent d’avance à s’occuper de Meilars bien qu’il ne nourrisse pas de sentiments très tendres pour ce peuple qu’il qualifie de « dur et ignorant », mais à la condition qu’on le décharge de Guiler.

Quatre jours après la mort du Recteur, la municipalité écrit à « Monseigneur l’évêque du Finistère » : « La commune de Meilars vient de perdre M. Pennanec'h, son curé, après avoir annoncé que ce digne Monsieur a emporté avec lui les regrets de la plus seine partie de la commune, nous nous permettons de vous demander Monsieur Leroux pour le remplacer.

Pendant le temps que ce Monsieur a été à Pont-Croix, occupé aux écoles chez M. Rochedreux, il s’est acquit l’estime de la plus grande partie de la commune qui ne peut rester sans ministre tant par sa position que par les avantages qu’elle présente à ses desservants. Il est vrai que la commune n’est pas d’une grande étendue, mais, Monseigneur, l’amitié et l’estime que la commune porte à ses ministres lui donne un avantage sur bien des communes de plus grande étendue. Celui que nous venons de perdre n’aurait pas voulu avoir d’autre, et si nous avons le bonheur de posséder celui que nous osons, Monseigneur, vous réclamer, il ne pourra qu’être bien content. Même d’après quelques paroles de la part de Monsieur Leroux du tems qu’il était à Pont-Croix nous sommes portés à croire qu’il n’en serait pas fâché... » (Archives de l'Evêché).

On voit en quelle estime les conseillers tiennent leur paroisse. C’est un cadeau qu’ils daignent offrir, et c’est tout juste s’ils ne le disent pas.

L’évêché répond le 2 Juin, promettant de donner au plus tôt un desservant à Meilars, mais tout en faisant des réserves sur le candidat de la municipalité.

Le 8, les conseillers écrivent encore à l'Evêque pour dire leur joie et déclarer qu’ils ne tiennent pas plus à M. Leroux qu’à un autre : « Si nous avons eu l’honneur de vous demander M. Leroux comme agréable à la commune, c’est qu’ayant vu quelquefois ce Monsieur dans la commune sans cependant le connaître à fond, nous avons jugé qu’il méritait notre confiance et quelques personnes de Pont-Croix en ayant dit du bien, mais nous n’avons prétendu porter aucun jugement à son égard, parce qu’il ne nous appartient pas de scruter la conduite privée des hommes du caractère... ».

Ce ton, cette souplesse devaient réussir nécessairement et réussirent en effet. René Rochedreux fut nommé recteur de Meilars.

RENÉ ROCHEDREUX. C’est une curieuse figure que celle de ce prêtre énergique que la Révolution exila. Originaire de Concarneau, il devint d’abord vicaire d'Ergué-Gabéric, de Saint-Goazec, puis de Mahalon, avec résidence dans la trêve de Guiler.

Il refusa de prêter serment à la Constitution civile du clergé qu’il commenta défavorablement en chaire. Cette conduite lui valut d’être arrêté le 15 Avril 1791. Il fut jugé, condamné et relâché.

Arrêté une seconde fois le 1er Décembre 1791 « pour avoir malgré le jugement qui l’avait flétri d’une admonition publique continué ses prédications incendiaires contre les lois, ses outrages contre différents curés constitutionnels.... s’être immiscé sans aucune autorisation dans les fonctions curiales à Pouldergat, Landudec, Plozévet ; s’être différentes fois on ne peut plus insolemment comporté envers l’administration et y avoir mis le comble en exigeant une restitution des taxes allouées aux témoins entendus contre lui... s’être, après une conduite aussi scandaleuse, mis à la solde d’une maison connue par les grands bienfaits qu’elle a obtenus de l'Etat et de son ingratitude envers lui... » (PILVEN, Correspondance de M. Tréhot de Clermont), l'abbé Rochedreux est conduit d’abord à Quimper, ensuite au château de Brest d’où il fut déporté en Espagne. Il avait alors 35 ans.

Il ne rentra en France qu’après le 5 Avril 1802, jour où les clauses du Concordat furent rendues publiques. Mais au lieu de revenir dans son diocèse, il se fixa à la Rochelle. Il y devint l’homme de confiance de l'évêque, Mgr. de Mendolf, qui l’envoya deux fois en mission à l'Ile de Ré. Il eut le courage d’en faire sortir deux desservants, l’un pour cause d’ignorance, le second pour raison d’inconduite. Mais les patriotes de l'Ile se fâchèrent et, pour échapper à leurs poignards, l'abbé Rochedreux dut se réfugier en Bretagne.

Juste à ce moment, M. Le Bescond de Coapont, recteur de Poullan, venait d’être nommé à la curé d'Elliant et désirait que M. Rochedreux le remplaçât à Poullan. Celui-ci accepta en principe, mais quand il alla annoncer cette nouvelle à l'évêque de La Rochelle, il fut si touché des marques d’affection et de confiance que lui témoigna ce prélat, qu’il n’eut pas le courage de s’en séparer et consentit à ce qu’il demandât son incorporation au diocèse de La Rochelle, ce qui fut accordé après trois mois de correspondance.

Six mois plus tard, Mgr. de Mendolf fut nommé au siège d’Amiens. Son successeur à La Rochelle, Mgr. Paillou, demanda à l'abbé Rochedreux, de ne point quitter son diocèse et lui accorda les mêmes pouvoirs. Mais voici qu’il est question de réhabiliter le desservant de l'Ile de Ré interdit pour cause d’ignorance. Cette intention et l’absence de l'évêque déterminèrent M. Rochedreux à retourner en Bretagne, espérant qu’on lui offrirait encore la cure de Poullan. Il n’en fut rien. Il sentit alors « qu’on attachait peu d’intérêt à son retour dans le diocèse » et en fut très peiné.

S’il n’eut pas la cure de Poullan, on l’accepta pourtant dans le diocèse et on le chargea, en 1806, de prêcher le Carême à Pont-l’Abbé et de suppléer à l’insuffisance du clergé de la ville et des environs. « Le peuple de cette commune, écrit-il peu après, vit dans une ignorance crasse de la morale et de ses obligations... ». Le Carême passé, il voudrait continuer à prêcher, son curé ne le permet pas. Entre les deux prêtres les relations se tendent, et M. Rochedreux s’écrie tristement : « Je me sens accablé de douleur ; le sommeil se retire de mes yeux, les inquiétudes me décharnent entièrement ». Il demande, avec le prophète Jonas, qu’on le jette à la mer...

Cependant son ardeur me se refroidit pas. Il fonde une petite école bientôt, prospère. En Janvier 1807, elle compte quatorze élèves dont trois promettent d’être de brillants sujets.

L’école ne suffit pas à son activité débordante. Il est élu conseiller municipal et fait des projets grandioses. Il se propose de détruire, dans sa source, l’oisiveté qui règne dans la ville en engageant les personnes qui font l’aumône à mettre, en masse, le montant de leurs dons pour acheter du chanvre, le faire filer, en salariant les pauvres à qui on le confiera, et en faire de la toile dont on habillera les mêmes pauvres et leurs enfants. Il désire que la municipalité s’occupe des moyens d’arrêter les suites incalculables et déplorables de l'ivrognerie, qu’elle condamne à une amende les aubergistes qui foulent aux pieds les lois divines et humaines !

L’administration diocésaine ne lui laissa pas le temps de réaliser ces beaux projets. Elle songeait à le pourvoir d’une succursale quand quelqu’un émit le voeu qu’on établît une école à Pont-Croix, promettant de doter le pensionnat d’une rente de six boisseaux de froment et ne doutant pas que la municipalité de cette ville ne fit un sort honnête à l’instituteur.

M. Rochedreux s’installe donc à Pont-Croix avec sa hâte coutumière, sans attendre la fin des démarches. Les débuts sont difficiles. L’argent manque. On parle de faire une collecte pour couvrir les frais du nouvel établissement. Les conseillers municipaux y sont opposés : connaissant leurs compatriotes, ils savent que la collecte ne produira rien. En attendant une solution administrative, le 5 Mai 1807, six habitants se cotisent pour servir à l’instituteur un traitement provisoire de 900 livres par an, pour le loger et le nourrir ainsi que ses élèves.

Les enfants affluent, si bien qu’en 1808 le directeur demande un aide. Mais la maison est devenue trop petite pour loger tout le monde, et d’ailleurs le propriétaire somme M. Rochedreux de déloger. Il songe à occuper la capucinière d'Audierne qu’on lui refuse. Il jette un regard d’envie sur la communauté des Ursulines de Pont-Croix, mais la maison n’est pas libre. De plus, la municipalité veut diminuer ses modestes émoluments. La situation est critique. Pour obvier à toutes ces difficultés et être débarrassé des enfants de Pont-Croix qui sont « d’indomptables lutins », il voudrait s’établir au presbytère de Plouhinec. Le recteur, M. Kérisit, ne veut pas lui céder la place et affirme qu’à Plouhinec « ni le maire, ni l’adjoint, ni les autres particuliers de la paroisse ne veulent de ce Monsieur » ! Rejeté de partout, le pauvre instituteur jette alors les yeux sur Meilars qui vient de perdre son recteur, M. Pennanec'h. Les pourparlers réussissent. L’évêque le nomme recteur de cette paroisse. Cette heureuse nouvelle le remplit de joie. Avec quel soulagement il écrit de Pont-Croix. le 30 Décembre 1809 : « Je touche enfin au moment si désiré de quitter cette commune pour aller à Meilars. Dans cette agréable solitude, mon coeur ne forme que deux vœux : le premier, d’y fonder, sous de plus heureux auspices, un établissement propre à former des sujets pour le diocèse ; le second, de marcher sur les traces de mon prédécesseur et de mériter, comme lui, la confiance et les regrets du meilleur des prélats ».

Quelques jours plus tard, il dit ce qu’il pense de Pont-Croix : « Je quitte enfin cette ville dés lundi prochain pour me retirer dans la solitude de Meilars avec ma bande joyeuse. La cabale et la malice de quelques hommes de cette petite ville sont bien propres à rendre inutile la charité la plus ingénieuse et la plus condescendante. Quoique l’on ne doive pas se rebuter et que la charité ne soit jamais perdue, je crois cependant qu’il n’est pas hors de propos d’abandonner pendant quelque temps un peuple ingrat, pour lui faire sentir son injustice et son ingratitude... » (Archives de l'Evêché). Et, ayant dit, il secoua la poussière de ses souliers sur cette ville où il n’avait eu que des déboires, et monta gaiement à Meilars avec sa « bande joyeuse » (Archives de l'Evêché).

(abbé M. Parcheminou).

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