Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

LA COLLEGIALE NOTRE-DAME DE MATIGNON

  Retour page d'accueil        Retour Ville de Matignon  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

« La collégiale de Matignon, écrit le président Habasque à la p. 21 de l'Annuaire des Côtes-du-Nord pour l'année 1845, datait de 1414. Elle était dédiée à la T. S. Vierge et elle avait six chanoines qui étaient à la nomination du duc de Valentinois ; mais à qui était due la fondation de la collégiale ? — Sans doute à la maison de Matignon... Quoi qu'il en soit de (son) fondateur, toujours est-il qu'à l'époque de la Révolution, il n'existait plus à Matignon qu'un doyen et qu'un chanoine et qu'on vient tout récemment de démolir la collégiale qui était ancienne, peu vaste et de mauvais goût ».

M. le chanoine Emile Tréguy dans son volume « La paroisse de N.-D. de Matignon », édité à Saint-Servan en 1910, répète p. 22 et 26 les mêmes affirmations dans les mêmes termes. Il est cependant dangereux de se fier sans aucun contrôle aux dires des auteurs de la première moitié du XIXème siècle, alors que ceux-ci n'ont pu consulter les dépôts d'archives, à cette époque très difficilement accessibles aux travailleurs. Nous croyons donc rendre service aux futurs historiens du comté de Matignon dont les Archives comptent parmi les mieux conservées et les plus nombreuses des Côtes-du-Nord, en faisant connaître ce que nos recherches nous ont permis de réunir sur la collégiale qui exista naguère dans la paroisse actuelle qui perpétue toujours son nom.

L'importance de cette collégiale dépassait certainement en effet lors de la Révolution celle de N.-D. de Lamballe et son antiquité était supérieure de plus d'un demi-siècle à celle de Quintin dont les débuts ne remontent qu'à 1405.

Les pièces dont nous nous sommes servi pour écrire ce travail sont extraites en majorité d'un inventaire des titres de la collégiale de Matignon rédigé vers 1770 par l'archiviste du comté de ce nom. On le conserve aux Archives des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), série E, fonds de la seigneurie de Matignon, non coté.

Avant 1789, la « ville » de Matignon, chef-lieu de l'importante châtellenie, puis plus tard du comté de ce nom, faisait partie de la paroisse de Saint-Germain-de-la-Mer. Elle s'est substituée d'autant plus facilement aux prérogatives de celle-ci lors du bouleversement révolutionnaire, que l'église de cette dernière était d'accès peu commode, fixée qu'elle se trouvait à l'extrémité de la localité, à presque trois kilomètres du bourg de Matignon, sur les bords de la mélancolique baie de la Fresnaye, aux teintes indécises et brumeuses.

L'agglomération de Matignon doit du reste son existence et son importance à l'illustre famille de ce nom [Note : Le chef de nom et d'armes est, vers 1935, M. le capitaine de frégate de Gouyon de Pontouraude, de l'école supérieure de la marine de guerre, commandant en second le croiseur Georges-Leygues], laquelle, selon Courcy, se fondit, en 1140, dans celle des Gouyon (Goyon). Les Gouyon-Matignon y possédèrent jusqu'à la fin de l'ancien régime, haute, basse et moyenne justice, quatre foires annuelles, halle et marché hebdomadaire, lequel demeure encore chaque mercredi, en 1936, un des plus animés de cette région [Note : Dans l'aveu rendu par Charles de Gouyon-Matignon à la fin du XVIème siècle, on mentionne le manoir, emplacement de château et forteresse et la seigneurie de Matignon, avec haute justice en Saint-Germain, Saint-Postan, Saint-Cast et Pléboulle, le château et la forteresse de la Roche-Goyon en Plévenon, le bois de Coron avec emplacement de château en Hénansal (Archives Côtes-d'Armor, E. 147)]. Aujourd'hui, en 1936, une seule des mottes du vieux château féodal de Matignon subsiste encore non loin de la cure actuelle, mais Gaultier du Mottay, dans son Répertoire Archéologique des Côtes-du-Nord, assure que les autres ont élé détruites seulement au cours de la première moitié du XIXème siècle.

Tout comme au Plessis-Balisson, les premières habitations de Matignon se groupèrent donc aux environs et sous la protection de son château féodal, dont quatre grosses mottes mentionnées en 1504 par Joachim Gouyon, sire de Matignon, attestaient encore alors l'importance passée. Tout autour un vaste étang, existant dès 1323, défendait l'approche de la forteresse et, près de cette pièce d'eau s'élevait à la même époque une chapelle dédiée à Notre-Dame, laquelle, à notre sentiment, n'était autre que l'église du château, la future collégiale.

Se conformant aux usages des âges de foi qui voulaient que les grandes races féodales consacrassent une part de leurs revenus à des fondations pieuses où la prière se continuait pour ainsi dire sans interruption tant pour les vivants que pour les trépassés de leurs familles [Note Ainsi les Dinan-Montafilan avaient fondé en 1370 la collégiale du Guildo et les Beaumanoir quatre chapellenies au Bois de la Motte en Trigavou. Les Gouyon-Matignon revendiquaient de leur côté le titre de fondateur de l'abbaye de Saint-Aubin-des-Bois (Cf. Anciens Evêchés de Bretagne, t. III, p. 2) et toute une littérature apocryphe fut mise au jour au XVIIème siècle pour appuyer leurs prétentions. En tout cas, il est certain qu'ils avaient largement contribué à doter Saint-Aubin, entre autres de la ferme dite « abbaye de Saint-Valery » en Saint-Germain-de-la-Mer, qui fut acquise le 22 février 1791 comme bien national par R. des V.A., le héros du Guildo (Archives des Côtes-d'Armor, série 9)], les Gouyon-Matignon avaient de bonne heure assuré, la subsistance d'un certain nombre de prêtres chargés d'assurer chaque jour dans la chapelle de leur château le service divin.

Aussi dès le mois de septembre 1323, c'est-à-dire dès avant la guerre de Cent Ans, du temps de Charles le Bel, roi de France, Jean III étant duc de Bretagne, nous retrouvons relatée la fondation de la plus ancienne des chapellenies de Matignon. A cette époque, mentionne le document que nous utilisons, qui fait partie de l'inventaire précité, Bertrand Gouyon, seigneur de Matignon, premier banneret de Bretagne, fils puîné d'Alain II et époux de Jeanne de la Roche-Derrien, « créa et fonda de nouveau (donc restaura une fondation déjà existante) dans l'église de Notre-Dame de Matignon, UNE CHAPELLENIE DÉDIÉE A LA TRÈS SAINTE VIERGE et donna au desservant 25 mines de blé de rente annuelle, à prendre savoir : 7 mines, mesure de Pléboulle, sur les dîmes de la Ville-Nizan et 6 mines, mesure de Plévenon, plus 2 mines sur les dîmes qui furent à Jean Revart à Saint-Cast, 12 autres boisseaux acquis de Jean Revart, 3 mines sur les dîmes qui sont à l'abbaye de Saint-Jacut en Saint-Pôtan, enfin 5 mines et demie qui restent sur les dîmes de Plévenon ».

En retour, Bertrand Gouyon se réserva la présentation de la dite chapellenie, dite « de NOTRE-DAME et chargea le chapelain de célébrer tous les lundis une messe de Requiem, tous les vendredis une messe de la Sainte-Croix, tous les samedis une messe de la Vierge, tous les jeudis une messe du Saint-Esprit, et les autres jours ce qu'il lui plaira. — Il lui donna en outre pour logement un certain hébergement, maison et dépendance, à réserve de l'étang, joignant le dit château, les fosses et murailles de Matignon, à charge de lui payer chaque année, à titre de rente féodale, 2 deniers de rente, à l'époque de foire de Dinan ».

En 1728, le titulaire de cette prébende, se déclarait obligé pour remplir les intentions du fondateur « de dire ou faire dire deux messes par semaine, l'une basse, l'autre chantée ; d'assister ou de faire assister aux petites heures que l'on est obligé de chanter, de répondre la grand'messe du jour que l'on célèbre chacun à son jour et d'assister ou de faire assister aux vêpres aux jours de fête et dimanches ».

Quelques années plus tard, toujours selon le même inventaire et Moreri, T. VII, p. 336, édition de 1759, « le mardi après la Trinité de l'an 1339), Etienne Gouyon, IIIème du nom, chevalier banneret, fils de Bertrand précité et les oncles d'Etienne, Pierre et Philippe Goeon (sic), fondent de nouveau en l'église de N.-D. de Matignon, une chapellenie en l'honneur DE SAINT ETIENNE, dont Etienne se réserva la présentation et donna pour rémunération au chapelain vingt mines de blé annuelles, à charge de célébrer le lundi une messe de Requiem, une autre chaque mercredi et une autre en l'honneur de la Passion chaque vendredi ».

Le même seigneur et Pierre, son frère, qui s'était fait d'Eglise, confirmèrent et augmentèrent cette fondation le jeudi avant la Saint-André 1342. « En plus des vingt mines déjà attribuées à cette prébende, Etienne ajouta quinze boisseaux de froment, et Pierre donna sa dîme de Languenan valant 9 mines, plus 6 boisseaux de froment assis sur une maison en la ville de Matignon et 6 boisseaux de froment assignés en Saint-Cast ».

Le 16 mars 1381, Bertrand Gouyon, deuxième du nom, fils d'Alain III et époux de Jeanne de Dinan-Montafilant, fonda la chapellenie et prébende de SAINT-GILLES.

Enfin le 3 février 1397, Bertrand Gouyon, IIIème du nom, sire de Matignon et compagnon d'armes de Du Guesclin, de concert avec Robert, chevalier, et Olive Guéhenneuc, son épouse, créèrent une chapellenie pour desservir l'autel SAINT-GEORGES en l'église Notre-Dame et lui assignèrent pour traitement « le dit Gouyon sa dîme Saint-Sauveur de Lamballe, valant 14 quartiers de blé, mesure de Lamballe et la dite Olive plusieurs pièces de blé et des rentes en froment, à charge pour le chapelain d'assister au service divin et de célébrer chaque semaine une messe en l'honneur de SAINT GEORGES, une en l'honneur de SAINT SÉBASTIEN, une en l'honneur de SAINT CHRISTOPHE et une en l'honneur de SAINTE CATHERINE ».

On ignore les dates de fondation des chapellenies et prébendes dédiées à SAINTE MARGUERITE, SAINTE CATHERINE et SAINT CHRISTOPHE, mais d'après les conditions posées par les fondateurs de la prébende Saint-Georges, il y a tout lieu de croire qu'elles existaient à cette époque et que la célébration du service divin y était déjà organisé.

Ainsi depuis le XIVème siècle et sans doute auparavant, si l'on s'en tient aux termes exprimés dans les fondations que l'on vient de reproduire, sept chapellenies constituaient dès alors la collégiale de Notre-Dame de Matignon et font d'elle la plus ancienne en date après celle de Saint-Guillaume des collégiales existant sur le territoire du diocèse de Saint-Brieuc d'avant la Révolution. Mais les titulaires de ces prébendes, quoique comptant parmi eux un « doyen », étaient-ils vraiment chanoines au sens canonique de ce mot, ou, lorsqu'on les qualifiait de ce titre, était-ce un simple terme de courtoisie ? Nous n'osons répondre positivement à cette question, car nous ne connaissons pas de document pontifical érigeant suivant les exigences du droit canonique une collégiale à Matignon. C'est ainsi que si, dans le Catalogue des lettres de Nicolas V concernant la province de Tours, publié en 1908 par Varicelle, chez Picard à Paris, ce pape confère à Mathurin Million, chapelain perpétuel dans l'église du Guildou (sic), la chapellenie de Sainte-Marie de Matignon, valant 21 livres tournois de revenu, il ne faut pas oublier que la chancellerie apostolique parle à cette occasion d'une chapellenie et non d'un canonicat, alors que ses scribes n'ignoraient pas la différence des deux termes (op. cit., p. 137).

Le même volume nous renseigne aussi que le 29 juillet 1452 (époque à laquelle on pratiquait largement la pluralité des bénéfices) le même pape conférait « à Thomas Johahnis, recteur de Pléneuf, nonobstant son église paroissiale, qu'il pourra garder, une chapellenie perpétuelle, au patronage du seigneur de Matignon, valant 15 livres tournois : Son titulaire, ajoute ce document, est obligé de dire un certain nombre de messes chaque semaine, partie dans la dite église, partie dans la chapelle du château, de la Roche-Goyon, située dans les limites de cette paroisse, et, en assistant aux offices dans l'église collégiale de Notre-Dame, il a droit aux distributions quotidiennes » (op. cit., p. 237) [Note : La prébende en question n'est malheureusement pas dénommée : S'agirait-il d'un démembrement de la chapellenie de SAINT-MICHEL, fondée autrefois en l'église de Plévenon, puis transférée au château de la Roche-Goyon et dont Jehan Gouyon, époux de Marguerite Mauny, demoiselle de Thorigny, ratifia la fondation le 1er août 1425 (ou 1435) ? Ogée, dans la première édition de son Dictionnaire, assure que le même Jehan fit en 1441 une nouvelle fondation dans l'église de Matignon au profit de cette chapellenie. Le 11 janvier 1561, François Gouyon, seigneur de Beaucorps et de Saint-Jean, déclarait dans un aveu posséder en l'église N.-D. de Matignon une chapelle et chapellenie appelée Saint-Michel et avoir droit d'y présenter un chapelain. Dans un nouvel aveu du 3 mai 1634, un de ses descendants affichait les mêmes prétentions, mais celles-ci n'étaient pas admises par les Matignon de la branche, aînée. Cette fondation, au dire du recteur Nicolas, aurait valu 46 livres de revenu en 1706, mais elle était grevée de 2 messes par semaine. Nous verrons qu'elle avait encore un titulaire en 1790].

Cette fois, le terme « collégiale » est bien inséré dans le document papal, et nous le retrouvons employé le 23 juin 1459 dans un mandement de Mgr Jean Prigent, évêque de Saint-Brieuc, « annonciatif d'une lettre du pape Pie II, du 12 novembre précèdent, accordant sept ans et sept quarantaines d'indulgences, à ceux qui, étant confessés et contrits, visiteront l'église collégiale de Notre-Dame de Matignon la veille ou le jour de l'Assomption, entre les premières et secondes vêpres et à ceux qui contribueront à l'augmentation, conservation et décoration de cette église » (Archives Côtes d'Armor, Inventaire des titres de la collégiale de Matignon, précité).

Cependant les auteurs des Anciens Evêchés de Bretagne, T. I, p. 2, écrivent que le secrétaire de l'évêché de Saint-Brieuc avant la Révolution appelait au synode diocésain MM. les chapelains des collégiales de Lamballe et de Matignon, qui n'étaient, assurent-ils que de simples collégiales de chapelains

A l'appui de leurs dires, on pourrait citer le compte de 1516, conservé à la série G. 8 des Archives Nationales et dans lequel on mentionne seulement sept chapellenies et non pas sept canonicats, « apud Matignon », lesquelles étaient Saint-Gilles, Saint-Georges, Sainte-Catherine, Saint-Christophe, Sainte-Marguerite, Saint-Etienne et la B. Vierge Marie dont nous venons précédemment de relater la fondation. Chacune d'elles était taxée cinquante sols, somme qui n'indique pas des revenus bien considérables [Note : Le 24 juin 1554, Henri II écrivait à Jean du Tillay, évêque de Saint-Brieuc. A propos d'une réclamation des doyens, chantres, chanoines, chapelains et chapitres des églises de N.-D. de Quintin, Lamballe, Saint-Guillaume en Saint-Brieuc et Matignon, qui se plaignaient d'avoir été trop durement taxés et pour l'inviter à procéder à une nouvelle taxation (Anciens Evêchés de Bretagne, T. 1er, p. 391)].

Ogée, auteur de la fin du XVIIIème siècle, dans la première édition de son Dictionnaire de Bretagne, se contente de mentionner que Matignon possède une église collégiale et n'entre pas dans d'autres détails que ceux que contient Moreri, sans doute parce qu'il n'avait pu s'en procurer davantage.

En 1788, à l'occasion du compte de décimes du clergé du diocèse de Saint-Brieuc, on énumère les chapellenies de la collégiale de Matignon, mais on évite de prononcer dans la circonstance le mot de « canonicat ». Il est vrai que le Pouillé publié par Alliot en 1648 cite le chapitre de Matignon, mais vu les erreurs accumulées dans cette compilation, cet argument ne nous semble pas très probant. Au surplus, si les chapelains de la collégiale de N.-D. de Matignon n'avaient pas strictement droit au titre de chanoines, ils en avaient quand même les obligations ; c'est que nous allons voir en passant en revue les documents qui énumèrent en détail les devoirs de leur charge

Ecoutons en effet le mandement du 10 novembre 1569 dans lequel Jacques de Matignon, alors maréchal de France, ordonne à ses officiers « d'aider Dom François Guillaume à pointer les chapelains, défaillants aux heures ordonnées pour le service divin et à compter les amendes qu'ils pourraient encourir. Deux sols pour défaut de dire la messe, 6 deniers pour défaut de la répondre ; 12 deniers pour avoir manqué matines, autant pour avoir manqué vêpres ; 6 deniers pour chaque fois qu'ils n'assistaient pas à prime, tierce, sexte, none et complies ».

Du reste, le 12 avril 1603, les chapelains de l'église collégiale de Matignon déclaraient être tenus « de célébrer chaque jour trois messes, l'une de rorate qui est une grand'messe, l'autre de requiem et une messe basse. En outre, chaque lundi une messe appelée bénédicité, auquelle ils étaient tous tenus d'assister. Ils devaient aussi s'assembler tous les matins pour dire et chanter matines, prime, tierce, sexte et none et vers les trois ou quatre heures de l'après-midi réciter vêpres et compiles ». Pour s'acquitter de ces absorbantes fonctions, auxquelles nombre d'authentiques chapitres ne sont pas toujours astreints, même de nos jours, les dits chapelains devaient naturellement résider et desservir leurs chapellenies, sous peine de saisie de leurs bénéfices. L'un d'eux, à cet effet, était désigné pour signaler les défaillants.

Mais il ne suffit pas d'être assujetti à des devoirs nombreux et divers, encore faut-il s'en acquitter avec ponctualité. Or, il semble que les chapelains de Matignon l'oubliaient parfois, si bien que le 10 mai 1615, un des vicaires généraux de Mgr de Marconay, évêque de Saint-Brieuc, leur enjoignait « d'avoir à célébrer le service divin suivant leurs anciennes fondations et le règlement qu'ils avaient accepté et commettait deux ecclésiastiques pour pointer les défaillants ».

Ceux-ci récidivaient quand même assez souvent, puisque le 21 septembre 1617, on totalisait le produit des amendes qu'ils avaient encourues pour acheter un tableau pour le grand autel et cette situation se perpétuait encore jusqu'au 6 octobre 1630, car à cette date, Jean Langlays, sieur du Pont-Brûlé, procureur fiscal du Comté de Matignon, constatait que les chapelains du collège de cette ville « avaient cessé de célébrer le service auquel ils étaient tenus pour les seigneurs de Matignon, tant les dimanches que les autres jours de la semaine ».

La perfection du reste n'est pas de ce monde et il est beaucoup plus facile d'accepter des obligations que de ne pas négliger de les remplir. C'est ainsi qu'en 1714 et en 1716, on procédait encore contre certains chanoines : Messires Guillaume-Joseph Samson, chapelain de Saint-Gilles, Jacques Le Masson, chapelain de Sainte-Catherine et Robert Boullot, chapelain de Sainte-Marguerite, afin de les obliger à résider personnellement et à remplir les devoirs attachés à leurs chapellenies.

Cependant le 6 octobre 1653, on avait fait un beau règlement tout neuf pour Messieurs les chapelains de Matignon. En même temps qu'on l'avait allégé notablement quant aux obligations qui leur incombaient auparavant d'après la déclaration du 12 avril 1603 précitée, tout avait été excellement ordonné pour le service divin ; qu'on lise plutôt : « Les chanoines (sic) et chapelains chanteront à notes les petites heures selon l'ordre du bréviaire romain. L'office commencera les dimanches et fêtes à 6 heures du matin en été et à 7 heures en hiver, et aux jours sur semaine, à 7 heures en été et à 8 heures en hiver. Immédiatement après prime et tierce se chantera une messe des défunts selon les rubriques du missel romain ; à la suite se chantera sexte, puis la grand'messe de l'office du jour, à la fin de laquelle se chantera none, Salve Regina et Libéra me Domine, versets et oraison [Note : En réalité les excellents chanoines devaient chanter deux grand'messes tous les jours et les petites heures canoniales]. Les dimanches et fêtes, vêpres et complies se chanteront à trois heures de l'après-midi. Aux fêtes de Noël, Pâques, la Pentecôte, la Fête-Dieu et l'Assomption se chanteront matines et laudes et l'office du jour. Vêpres, complies et salut pendant l'octave du Saint Sacrement ».

Tous les chanoines et chapelains étaient tenus à résidence et l'on tiendrait registre des absents qui devraient payer pour défaut de chaque messe, les dimanches et fêtes, 20 sols ; sur la semaine 10 sols et 1 sol pour chaque petite heure, applicables par moitié au profit des présents et l'autre moitié, au bénéfice de la fabrique.

Mais ce n'était pas tout que Messieurs les Chapelains s'acquittassent régulièrement de leur office, il fallait aussi apaiser et mieux encore prévenir les dissentiments et rivalités qui ne pouvaient manquer de surgir entre M. le recteur de Saint-Germain-de-la-Mer, chef de la paroisse dans laquelle se trouvait la collégiale et les chapelains de celle-ci. Le texte de la convention qui fut passée à cet effet le 8 février 1701 ayant été conservé, nous allons en donner les dispositions principales.

D'après cet acte, les parties conviennent « que le prédicateur de Carême prêcherait à la Collégiale suivant l'ancienne coutume, à l'exception du jour des Rameaux et du jour de Pâques où il prêcherait à Saint-Germain et qu'il ne recevrait point de bénédiction en l'église collégiale. Que le recteur ferait l'office paroissial le Vendredi-Saint, auquel assisteront les doyen et chanoines et percevra les offrandes que l'on donnera à l'adoration de la Croix qui sera apportée à Saint-Germain. Que les doyen et chanoines iront processionnellement à Saint-Germain le dimanche des Rameaux pour y assister au service paroissial et que le recteur se rendra au devant d'eux  et au dehors la porte du cimetière. Idem, le jour du Saint Sacrement, pour assister à la procession qui commencera à l'église paroissiale et s'achèvera à la Collégiale, où le sieur recteur officiera tout le jour, après y avoir transporté le Saint Sacrement, parce qu'aussi le recteur consent que le doyen ou un chanoine reporteront le Saint Sacrement à l'église paroissiale où, par déférence, que leur fera le recteur, ils célébreront la grand'messe. Enfin, que les sépultures qui se feront en la collégiale se feront à l'alternative ». Signé : Eustache de Vêchy, sr. de Saint-Georges, doyen, qui prend soin d'ajouter la mention « sans préjudices à mes droits ». — M. Nicolas, recteur de Saint-Germain. — Armand Le Barbenson, trésorier de la collégiale. — P.-J. Sanson. — Gilles Morin.

Ce recteur Nicolas dont on vient de relever la signature, a rédigé le 19 juin, sur la demande de Mgr de Boissieux, son évêque, un mémoire des fondations de la paroisse de Saint-Germain-Matignon (il ne dit pas Saint-Germain-de-la-Mer) ainsi que de celles de l'église collégiale de Matignon.

Dans cette pièce que nous avons sous les yeux, on lit « qu'il y a dans l'église collégiale sept prébendes ou autrement dit  sept chapellenies », dont nous venons de donner rémunération. « La première, dit-il, est la chapellenie de Saint-Georges, à qui l'on attribue la dignité de doyen, quoiqu'il ne paraisse aucun titre, ni de fondation, ni d'érection. Cette prétendue dignité, ajoute ce bon recteur, vaut 300 livres de revenu »

Celle de Saint-Gilles autant, celle de Saint-Christophe, 350 livres ; celle de Sainte-Catherine, 240 livres ; celle de Sainte-Marguerite, 180 livres ; celle de Notre-Dame, 160 livres et celle de Saint-Etienne, l'une des plus anciennes, 90 livres seulement. Les chiffres que produisit le recteur Nicolas, marquent entre les différents chapellenies des inégalités choquantes. Certains de leurs desservants s'en accommodaient mal, aussi l'un d'eux, François Langlays, chapelain de Sainte-Catherine, plaida-t-il longtemps, mais vainement, de 1640 à 1644, pour que l'on eût porté à la même somme le revenu de chaque prébende. 

Mais indépendamment de celles-ci, nous fait savoir le rédacteur de la déclaration de 1706, d'autres fondations étaient desservies dans l'église collégiale : c'était d'abord celle du chanoine Pierre Guéhenneuc, qui, le 12 mars 1672, avait fondé à perpétuité quatre services aux différentes fêtes de la Très Sainte Vierge et avait poussé la sollicitude jusqu'à assurer une messe basse le dimanche matin, léguant pour ces diverses fins vingt-quatre livres de rente.

Dom Julien Brouard, chapelain de Saint-Michel, avait de son côté légué un journal de terre le 22 novembre 1601 afin de participer aux prières et heures canoniales et de fonder un obit le jour Saint-Michel auquel les chapelains étaient tenus d'assister.

Pour être complet, M. le recteur Nicolas aurait dû aussi mentionner qu'aux débuts de l'an 1472, Dom Pierre Tranchant, prêtre de la ville de Matignon, avait donné à la fabrique de son église collégiale une maison, jardin et déports sise près le Martray, plus deux journaux de terre et un boisseau de froment de rente. Mais bien que cette donation figure dans l'inventaire des titres que nous utilisons, peut-être n'avait-elle déjà plus ses effets aux débuts du XVIIIème siècle.

Ajoutons aussi dans le même ordre d'idées, qu'au mois de juin 1498, un membre des branches cadettes de sa famille, François Gouyon avait, à l'exemple de ses aînés, fondé lui aussi deux messes à célébrer à perpétuité chaque semaine, dont l'une au moins devait être acquittée dans l'église collégiale de Matignon.

Pour achever ce que nous avons, à dire de l'église en question, rappelons qu'en 1487 la confrérie Notre-Dame y était régulièrement érigée et qu'en 1707, celle de Saint-Sébastien y florissait également. Nous aimerions aussi à citer la confrérie Saint-Pierre que l'on trouve à Matignon dès la fin du XVème siècle, mais nous ne saurions dire si son siège se trouvait dans la collégiale ou dans la chapelle de Saint-Pierre dont nous parlerons plus loin.

Notons pour finir que les chanoines n'avaient pas le droit de se faire inhumer dans leur collégiale, pas plus que celui d'y faire et de laisser faire une seule sépulture sans l'autorisation du seigneur de Matignon ou de son représentant. C'est ainsi que Charles Sicot, titulaire de la chapellenie Saint-Gilles, étant décédé presque subitement, le 22 octobre 1749, fut inhumé dans l'église Saint-Germain où il avait rempli les fonctions de vicaire aux environs de 1731.

Il était bien entendu aussi que les offrandes faites à l'église le jour Saint-Michel, c'est-à-dire le 29 septembre, appartenaient à la fabrique et une ordonnance épiscopale du 22 avril 1655 portait que les amendes encourues par les chapelains pour absences à l'office et aux messes, amendes arrêtées au 16 avril 1654, et que les débiteurs ne se hâtaient point de solder, devraient être acquittées sans tarder, sous peine de suspense.

Etait-ce les chapelains qui entretenaient leur collégiale ; nous ne le savons : le 3 juillet 1628, Vincent Sanson, armurier (sic), s'obligeait à mettre en état l'horloge de la collégiale et à l'entretenir durant six ans, moyennant 20 livres et 8 boisseaux de froment, à ce destinés par la fabrique. A la date du 31 août 1650, figure une quittance de 240 livres pour un rétable placé dans la collégiale, mais là s'arrête nos renseignements sur l'ornementation de cette église. Nous ne sommes pas plus documenté sur son architecture. Nous n'en connaissons que les quelques lignes déjà citées, qu'Habasque a fait paraître dans l'Annuaire des Côtes-du-Nord de 1845. Il faut avouer que si ce qu'il écrit est exact, nous n'avons pas à regretter la disparition de l'édifice en question.

Il en était de même des maisons prébendales. C'était, semble-t-il, des logis bien modestes. L'entretien en incombait à MM. les chapelains, mais ceux-ci comme tous les usufrutiers, s'acquittaient plutôt mal de ce devoir, si bien que le 16 novembre 1632, on était contraint de constater qu'il était indispensable d'en reconstruire une partie. Du reste on jugera du peu d'importance de ces logis par la description que l'on dressa de deux d'entre elles à l'occasion de l'échange que l'on en fit le 21 janvier 1809 contre le presbytère de Saint-Germain qui ne servait plus alors à loger le clergé et qui fut acquis pour 1.525 fr. le 7 août de cette année par M. Auguste de la Motte-Fouqué (ou Motte-Fouquè)  [Note : Le château de la Motte-Fouqué se trouvait en Normandie], propriétaire, à Matignon.

D'après l'état des lieux des deux immeubles en question, acquis par la municipalité pour abriter son curé, l'une de ces habitations dite de Sainte-Catherine, joignait le bas de l'église collégiale de Matignon. Elle consistait au rez-de-chaussée en une cuisine avec fenêtre vitrée et porte au devant, plus une autre porte de communication avec la collégiale, avec un « doublé » au-dessus en terre sur vieux « Carrasseaux » et solives ; l'ensemble mesurant six mètres de large sur cinq mètres vingt-cinq de long, de dedans en dedans, et, sur la dite cuisine se trouvaient une chambre et un cabinet séparés par une cloison en terre. Le cabinet au nord éclairé par une petite fenêtre et la chambre pourvue d'une grande et d'une petite fenêtre avec grenier au-dessus en terrassis.

Les dits greniers, chambre et cabinet servis par un mauvais, escalier en bois ; un petit cellier en appentis au nord. Les dits logements construits en pierre et, couverts en ardoises, le tout en médiocre état ; une petite cour au devant close d'une haie, dans laquelle est une retraite à cochons et une plus petite à volailles, ainsi qu'un petit jardin non planté d'arbres et renfermé par des talus, le tout se joignant et touchant l'église par le nord et de toutes autres parts le chemin qui conduit à Matignon et au village de Groseil, l'ensemble estimé 600 fr.

L'autre demeurance dite de Sainte-Marguerite était encore plus, exiguë et plus délabrée. Nous croyons inutile de reproduire sa description. Elle joignait au nord le chemin qui conduit à Matignon et à la fontaine Notre-Dame. On l'estima à 480 fr. seulement (Archives Côtes-d'Armor, série Q, biens de 1ère origine).

Bretagne : Histoire, Voyage, Vacances, Location, Hôtel et Patrimoine Immobilier

Les chanoines de la Collégiale à l'époque de la Révolution.

Depuis que les descendants des fondateurs de la Collégiale avaient en 1421 acquis par une riche alliance le comté de Thorigny-sur-Vire en Normandie et résidaient le plus souvent au château de ce nom, depuis que les mêmes avaient dès le XVIème siècle occupé les plus hauts emplois à la Cour de France et que l'un d'eux, déjà duc de Valentinois, consentit en 1717 pour devenir prince souverain de Monaco, à substituer à son nom de Gouyon-Matignon, premier banneret de Bretagne celui de Grimaldi, les seigneurs de Matignon, disons-nous, désorgarnisèrent trop souvent le service divin dans leur collégiale par la qualité des candidats qu'ils présentaient à leurs bénéfices. C'est ainsi qu'en 1790, lors de la suppression de la Collégiale à la suite des lois de l'Assemblée Constituante, sur sept chapelains, trois ne résidaient pas, à commencer par le doyen, LUCIEN-FRANÇOIS DU CHAUFFOUR (ou du Chaffour), prêtre du diocèse de Paris, titulaire de la chapellenie Saint-Georges, lequel avait été présenté le 23 juillet 1747, n'étant que tonsuré et étudiant au collège Sainte-Barbe. Il déclarait en 1790 que son bénéfice lui valait 333 livres de revenu avec 173 livres de charges à déduire car il devait sans doute payer un remplaçant.

PIERRE-FRANÇOIS DE VAUDEVIRE DU MOULINS, simple minoré du diocèse de Bayeux, résidant à Thorigny, paroisse Saint-Laurent, avait été présenté en juillet 1787 pour la chapellenie Sainte-Marguerite, laquelle selon sa déclaration rapportait net 963 livres en 1790. Ce minoré n'était pas du reste de première jeunesse, car il accusait 73 ans en 1794.

CHARLES-ANNE-GABRIEL ROBERT (ou de Robert) avait été pourvu le 4 août 1780 de la chapellenie Saint-Gilles valant 627 livres 13 sols 2 deniers en 1790. A cette date, son bénéficiaire achevait ses études au collège de Reims.

Il n'était pas jusqu'à la toute petite chapellenie de Saint-Michel que n'avait tenté le curé de N.-D. de Verneuil, au diocèse d'Evreux, l'abbé LE ROY, lequel en avait été pourvu le 21 août 1765, et cependant elle ne lui rapportait que 76 livres 16 sols de revenu net, mais pour nos excellents voisins, normands, même les menus profits ne sont pas à dédaigner.

Avec JEAN-RENÉ FELIN, vraisemblablement natif de Hénon, nous entrons enfin dans la série des chanoines résidants. Il était titulaire depuis le 20 janvier 1742 de la chapellenie Sainte-Catherine qui lui valait en 1790, 672 livres de revenu net. Il y joignit le 1er mars 1743 la petite cure du Plessis-Balisson, qu'il ne conserva que quelques mois, puis il se fixa définitivement à Matignon où nous le voyons, de 1750 à 1754, unir à ses fonctions celles de vicaire à Saint-Germain-de-la-Mer, et un peu plus tard le desservice de la chapelle de Sainte-Brigitte en Saint-Cast. Ce fut lui qui revint en hâte de ce sanctuaire où il s'en était allé célébrer la messe et qui donna l'alarme aux habitants de Matignon lors du passage des Anglais en septembre 1758. M. Felin mourut à Matignon sans avoir prêté serment. Ses funérailles eurent lieu le 1er novembre 1791. Faute de mieux, elles furent célébrées par le curé constitutionnel de la localité et seuls les assermentés des environs : Bouguet de Saint-Cast, Goupil de Saint-Pôtan et Prioulle de Pléboulle signèrent son acte de décès.

JEAN LÉCUYER, pourvu le 20 novembre 1781 de la chapellenie Saint-Etienne, valant 360 livres 8 sols 5 deniers de revenu net en 1790, était né à Saint-Germain-de-la-Mer le 22 février 1727, du mariage de Jean et de Jeanne Guéhenneuc. Il avait reçu la prêtrise en 1755 et, pour augmenter ses ressources, il desservait lors de la Révolution la chapelle Saint-Marc en Saint-Germain, appartenant en 1706 au sieur de Queridy-Visdelou, ainsi que celle de la Guérande en Hénanbihen. L'abbé Lécuyer, qui avait été d'abord vicaire de sa paroisse aux environs de 1758, et qui signait encore en cette qualité le 26 avril 1770, trépassa à Matignon le 13 septembre 1792 échappant ainsi en sa qualité d'insermenté aux lois persécutrices révolutionnaires, mais son cadavre dut subir les obsèques présidées par le curé constitutionnel de Matignon, l'abbé Amateur Dayot, dont nous parlerons plus loin.

GILLES-FRANÇOIS-RENÉ QUÉTISSANT, né à Pléboulle en 1757, fut pourvu le 10 avril 1781 de la chapellenie de Saint-Christophe qui lui rapportait 1.048 livres 12 sols de revenu en 1790. Il devint le recteur Saint-Jacut-de-la-Mer en 1809, et fut condamné à l'exil comme insermenté le 19 octobre 1792 par le Directoire des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor). En conséquence il dut séjourner dix ans tant à Jersey qu'en Angleterre en punition de son attachement à l'orthodoxie catholique.

JEAN-GILLES BOUDET, né à Saint-Germain-de-la-Mer vers 1747, titulaire de la chapellenie de Notre-Dame, en la collégiale de Matignon, laquelle depuis le 6 mai 1781, lui rapportait 765 livres de revenu. Il embrassa les idées nouvelles et devint curé assermenté de Pluduno en 1791. Après avoir baptisé sous les prénoms de Peuplier-Liberté David, un jeune enfant qui trépassa le 30 frimaire an II, Boudet, ainsi que son vicaire Marc Civelle, ex-dominicain de Nazareth, ne craignit pas de faire voir jusqu'à quels actes de lâcheté, la peur peut entraîner des individus que leur éducation et leurs principes eussent dû, à défaut de l'honneur, retenir sur la pente glissante de la chute. 

Boudet, qui avait été emprisonné comme prêtre par ordre du représentant Ruamps, se maria pour recouvrer sa liberté suivant l'arrêté du représentant Le Carpentier, puis divorça sept mois plus tard, la Terreur étant passée. Après avoir été pillé par les chouans qui le firent se mettre à genoux et crier « Vive le roi et la bonne religion », l'ex-chanoine de Matignon dut quitter Pluduno en juin 1795 et se retirer dans son pays natal. C'est là qu'il trépassa, âgé de 49 ans seulement, le 2 juin 1796 et nous apprend son acte de décès, « ses parents furent obligés de le faire inhumer au plus vite sans aucune cérémonie par ce que le corps du défunt rendait de très mauvaises odeurs et exhalaisons »

Pour ne pas clore sur ce malheureux Boudet la liste des prêtres natifs de Saint-Germain-Matignon, nous allons donner ici la biographie, d'un autre ecclésiastique, qui fut lui aussi chanoine, mais de la collégiale de Quintin et fit montre de plus de dignité dans sa conduite.

CONSTANT-ANNE-MARIE-FRANÇOIS DE LA MOTTE-FOUQUÉ naquit à Matignon le 13 juillet 1753, du mariage d'écuyer François de La Motte-Fouqué et de Marie-Anne Robinot de Saint-Régeant. Après avoir fait son cours au collège de Dinan, où nous le trouvons élève en 1769, il reçut la prêtrise le 18 avril 1778. Non seulement M. de la Motte-Fouqué ne prêta pas serment, mais il signa l'Exposition de la Doctrine Catholique avec les prêtres fidèles du diocèse de Saint-Brieuc. Condamné à la déportation le 19 octobre 1792, à cause de son attachement à l'orthodoxie, comme des membres de sa famille avaient été auparavant bannis de France par Louis XIV à cause de leur attachement au protestantisme, ce prêtre se présenta le 4 novembre de l'an précité devant la municipalité de Matignon et déclara que « pour obéir à l'arrêté du département, il veut se retirer à Jersey ou Guernesey, et demande un passeport, ne voulant, toutefois, ajouta-t-il, ne renoncer en aucune manière à sa qualité de citoyen français, ni être privé de ses droits ». Peut-être se réfugia-t-il auprès des membres de sa famille fixés en Allemagne depuis la révocation de l'Edit de Nantes, car son nom, que nous le sachions, ne figure pas sur la liste des prêtres secourus à Jersey ou en Angleterre. Nous le trouvons revenu en France le 3 septembre 1802. Après avoir été vicaire à Saint-Pôtan de 1805 à 1810, puis en la même qualité à Plévenon, M. de la Motte-Fouqué mourut, âgé de 83 ans, le 20 mars 1835, dans l'ancien presbytère de Saint-Germain-de-la-Mer et son corps fut inhumé dans le vieux cimetière voisin.

La famille de la Motte-Fouqué (ou Motte-Fouquè) est éteinte en Bretagne, mais en 1914, un de ses représentants servait comme capitaine à l'Etat-Major du général de Bulovv, et sous le Premier Empire un de la M. F. de la branche allemande, s'occupait de littérature et avait, paraît-il, une certaine réputation à cette époque (Auguste Lemasson).

 © Copyright - Tous droits réservés.