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HISTOIRE DE L'EGLISE DE LA MARTYRE

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L'église de La Martyre, qui dépendait de Ploudiry, a été jadis un important lieu de pèlerinage, rendu encore plus célèbre par la tenue d'une foire très fréquentée.

Pour expliquer le nom de La Martyre (en breton Itron vari ar Merer), on a essayé successivement de deux légendes, dont aucune n'a eu un grand succès. La plus ancienne, d'après laquelle l'église aurait été bâtie sur le lieu du meurtre du roi Salomon, a peut-être pour origine une fausse interprétation d'une sculpture du porche.

L'acte le plus ancien que nous connaissions sur cette église est une donation de 1423 citée dans un inventaire de titres de 1663 conservé aux Archives du Finistère, mais, si la nef et le porche sud offrent bien les caracteres du XVème siècle, le clocher et le porche occidental ouvert à la base du clocher semblent dater du XIIIème siècle.

L'ossuaire porte la date de 1619.

La sacristie, dont la construction fait l'objet d'un dossier aux Archives du Finistère, a remplacé en 1697 une ancienne sacristie placée derrière le chevet, selon une disposition que l'on peut voir encore, par exemple à Saint-Nonna de Penmarc’h.

Eglise de la Martyre (Bretagne).

Intérieur. — La nef, lambrissée et dépourvue de fenêtres, cormprend six travées ; elle est partagée par un arc-diaphragme. Les grandes arcades en tiers-point moulurées, larges et bases, reposent sur de gros piliers en losange, à l'exception des piliers placés sous l'arc-diaphragme, que ont un plus grand nombre de faces. Les supports sont cantonnés de colonnettes ; ils ont des bases prismatiques des chapiteaux ornés de feuillages ou de scènes de chasse.

Les bas-côtés non voûtés se terminent par un mur droit. Le bas-côté sud, demeuré dans son état primitif, est refendu par cinq arcs, diaphragmes. Le bas-côté nord, beaucoup plus large et sans arcs de refend, a l'apparence d'une seconde nef. On y remarque des scènes grotesques sculptées sur les sablières.

Dans le bas-côté sud se trouve un bénitier en granit daté de 1601 et décoré d'un ange qui tient dans chaque main un grand aspersoir.

L'édifice, dépourvu de transept, se termine par une abside à trois pans ajourés chacun par une fenêtre.

Il faut signaler une châsse d'argent de la fin du XVIème siècle ornée des statuettes des apôtres qui portent leurs attributs : un lanternon s'élève au-dessus du toit à double rampant, percé de quatre lucarnes.

Reliquaire de l'église de la Martyre (Bretagne).

Vitraux. — L'église de La Martyre possède de beaux vitraux du XVIème siècle malheureusement très mutilés et dont les débris ont été remontés sans ordre.

Dans la fenêtre à l'extrémité du bas-côté sud, on trouve la scène du Jugement dernier assez complète, puis un certain nombre de fragments qui appartenaient à un arbre de Jessé, à une Annonciation et sans doute à une autre scène difficile à déterminer. On lit sur un morceau de ce vitrail la date de 1562.

Dans la fenêtre de gauche du chœur : l'Agonie, le Baiser de Judas, la Flagellation, le Couronnement d'épines, des fragments d'une Cène, des donateurs, parmi lesquels un duc de Rohan présenté par un évêque ; dans la fenêtre centrale : la scène du Calvaire, incomplète et mal remise en plombs, car le diable se trouve placé par erreur au-dessus du bon Larron ; dans la fenêtre de droite : fragtments de la Résurrection, de l'Ascension, de l'Apparition aux Saintes Femmes, de la Fuite en Égypte, de l'Ensevelissement, de la Descente, aux limbes et du Noli me langere.

 

Extérieur. — A l'extérieur de l'église, il faut remarquer surtout le clocher et le porche méridional. Le clocher, adossé à la façade, est très simple ; on voit seulement sur chaque face une baie géminée en tiers-point. La baie de l'est se trouve aveuglée par le toit de la nef. La flèche qui sert d'amortissement est dépourvue de clochetons et de lucarnes. Une balustrade qui se compose d'arcs redentés en tiers-point entoure la plate-forme. Au bas du clocher, du côté, ouest, s'ouvre un porche à voussures en tiers-point soutenues par des colonnettes auxquelles des masques assez grossiers servent de chapiteaux ; les bases se trouvent enterrées par suite de l'exhaussement du sol. Le porche sud voûté d'ogives est plus intéressant.

Elevé au XVème siècle, il commence la série si curieuse des porches sculptés du Léon. Comme ceux de Pencran et de Guimiliau, il porte des marques d'appareilleur sur chaque sujet. Sur les piédroits de l'entrée, on voit d'un côté l'Adoration des Mages — les Mages sont identiques à ceux du calvaire de Tronoën, près de Penmarc'h — et la scène de l'Annonciation aux Bergers, vers lesquels descend un ange portant un phylactère ; en face, sur les montants à gauche de la porte : la Visitation, l'Annonciation, la Circoncision. Sur les faces extérieures des montants, de petits compartiments contiennent des figurines de saints sculptées en faible relief.

Sur les voussures, deux guerriers, l'épée à la main, se tiennent debout à côté d'un roi debout également. Il faut voir là Hérode donnant ses ordres pour le massacre des Innocents. Cette scène, bien qu'isolée, doit rentrer dans la série des scènes de l’enfance du Christ capricieusement disposées. Il faut se rappeler ici les observations faites à propos du calvaire de Plougastel et du porche de Pencran.

Il est possible — ceci à titre de simple hypothèse — que cette scène mal comprise ait paru représenter le meurtre du roi Salomon.

Dans les voussures sont placés également des anges, couronnés d'une abondante chevelure, comme ceux qui décorent un des autels du Folgoët.

Les sculptures, mutilées, du tympan représentent la Nativité. Il faut y noter ce détail amusant d'un ange jouant avec un des glands de l'oreiller du lit sur lequel la Vierge est couchée.

A l'intérieur du porche sont placées, suivant l'habitude bretonne, les statues des douze apôtres. La porte géminée qui donne accès dans l'église est surmontée d'une statue de Vierge datée de 1619. Sur le bénitier se détache la figure de la Mort.

 

Ossuaire. — L'ossuaire, d'aspect bizarre avec ses lourdes sculptures dans le style de la Renaissance bretonne, fut bâti, en 1619, contre le porche. La porte en plein cintre, à triple voussure, est flanquée de deux colonnes corinthiennes qui supportent un linteau divisé en trois compartiments où sont sculptés un buste d'homme et un buste de femme se faisant pendant : au milieu, un écusson est entouré du collier de Saint-Michel. Au-dessus, sous un fronton à rampants concaves, une niche dont le dais est soutenu par deux cariatides contient la statue de saint-Paul de Léon foulant le dragon. De chaque côté de cet ensemble s'ouvre une fenêtre. Dans les écoinçons se déroulent des phylactères qui portent gravés en relief des vers bretons sur la Mort et l'Enfer.

Eglise de la Martyre (Bretagne).

Porte du cimetière. — Au sud de l'église et donnant accès au cimetière s'élève une porte monumentale des plus intéressantes. Elle est encadrée par trois moulures en anse de panier et par un cordon en accolade qui viennent buter contre des pinacles : au-dessus règne une balustrade formée de mouchettes rudimentaires. Sur la face antérieure des contreforts, deux consoles portent les statues de la Vierge agenouillée et de l'ange de l'Annonciation. Au sommet, les croix des larrons sont plus basses que celle du Christ, plantée au milieu de la balustrade et dont la base est décorée d'une Pietà. Sous le crucifix même, un gros massif en encorbellement porte le Christ du Jugement entre deux anges qui sonnent de la trompette. Au revers du crucifix, on voit le Christ de Résurrection et deux anges. Plus bas, deux autres anges tenant un phylactère sonnent également de la trompette et deux sauvages velus font office de cariatides.

Cette porte monumentale se trouve placée entre deux petites ouvertures en anse de panier, au milieu d'un mur de clôture couronné par une coursière où l'on accède par un escalier et où l'on devait célébra des messes en plein air : ses extrémités communiquent par des portes avec deux logis anciens. 

(Par M. Lucien LÉCUREUX).

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