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L'EGLISE DE MALGUENAC, son enfeu et sa pierre tombale

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DÉCOUVERTE, DANS L'ÉGLISE BE MALGUÉNAC, D'UN ENFEU ET D'UNE PIERRE TOMBALE SCULPTÉE.

L'église de Malguénac est une modeste construction, de peu d'élévation, en forme de croix latine, dont la nef, assez vaste, est reliée à celles des bas côtés par deux rangs de colonnes et des arcades ogivales. La grande nef, le transept et l'abside, autrefois lambrissés en berceau plein cintre, sont maintenant plafonnés. Les bas côtés le sont aussi en demi-berceau.

Eglise de Malguénac (Bretagne).

L'abside étant de très petite dimension, le maître-autel et les petits autels latéraux, ces derniers adossés aux murs du transept, sont à peu près sur la même ligne.

Toute l'église est largement ajourée. Trois fenêtres éclairent l'une, le chœur, l'autre le transept nord, et la troisième, de forme ogivale, refaite il y a peu d'années, le transept sud. Les deuxpremières sont à meneaux flamboyants, et la maîtresse vitre, d'un travail très fini, ne déparerait pas une cathédrale. Malheureusement, elle est légèrement masquée, à l'intérieur, par un rétable, monument cependant à conserver, mais que a le double défaut de cacher le plus beau détail de la construction, et d'être d'un style tout différent de celui de l'église. Le collatéral sud est aussi bien éclairé par deux fenêtres à arcades ogivales ; mais on ne peut pas en dire autant du collatéral nord, qui ne possède qu'une seule fenêtre dans le même style. Ce côte n'est, ni à l'intérieur ni à l'extérieur, en, harmonie avec le reste. Il accuse une plus ancienne construction que le reste de l'église. Je ne parle pas du bas côté sud qui a été complètement refait, ainsi que le porche, vers la fin du XIXème siècle. Une ouverture ogivale, fermée jadis, ainsi que le prouvent deux gonds, donne accès du bas côté dans le transept nord.

Les deux autels latéraux, autrefois dédiés à saint Jean et à saint Sébastien, le sont aujourd'hui au Rosaire et à sainte Marguerite. Le rétable du chœur, tel qu'en témoigne l’inscription suivante : « Fait faire par missire Raoul, rect. 1747 », date, ainsi que les boiseries qui surmontent les autels latéraux, de la première moitié du XVIIIème siècle.

Eglise de Malguénac (Bretagne).

Les fenêtres ogivales, une jolie crédence en trilobe et accolade, les arcades, deux autels, aujourd'hui disparus, adossés aux deux premières arcades de la nef, semblent indiquer la fin du XVème siècle ou le début du XVIème siècle.

Ces quelques descriptions données, j'en arrive à la découverte. Depuis longtemps j'avais remarqué dans le pignon du transept nord une ligne en forme d'arcade qui, bien que couverte à la chaux, tranchait nettement dans la maçonnerie. De plus, tout l'espace circonscrit par cette ligne rendait un son creux. J'en avisai, à plusieurs reprises, le vénéré et regretté M. Le Gallo, alors recteur de Malguénac, qui ne crut pas devoir à ce moment-là approfondir le mystère. Ce fut plus tard, quand il entreprit la réfection de la voûte de l'église, que profitant des ouvriers, il voulut bien se rendre à mon désir.

Quelques coups de marteaux et on fut vite mis en présence d'une cavité qui, dégagée, se transforma en un magnifique enfeu à double arcade, l'une ogivale, l'autre, intérieure, à plein cintre, le tout en pierre de granit. Cette découverte, inattendue, était assurément déjà bien intéressante, mais elle le fut bien plus encore par celle, à la base du tombeau, d'une pierre tombale qui, avec son personnage sculpté en relief, ferait envie à une cathédrale.

Malheureusement des vandales étaient passés là. Un trou béant, circulaire, pouvant donner passage à un homme, avait été pratiqué dans la pierre, anéantissant le bas des jambes du personnage, un peu au-dessus des pieds. A qui attribuer cet acte destructeur ? La tradition est muette, elle ne se souvenait même pas du tombeau, et les documents font défaut. On peut cependant, je crois, incriminer ces vampires qui, profitant des troubles de la Révolution, violèrent bien souvent les tombeaux, espérant y rencontrera des bijoux précieux.

Cet orifice permit toutefois de visiter l’intérieur du caveau sépulcral où nos présomptions se réalisèrent en constatant que les ossements gisaient pêle-mêle, dans un affreux désordre, au milieu de planches brisées qui, sans doute, provenaient des cercueils éventrés [Note : Respectueusement mis en ordre, es ossements ont été recueillis dans un, cercueil de chêne, préparé à cet effet, qui, après la restauration du caveau, y a été déposé].

La pierre tombale est une roche schistoïde, sculptée en relief, mesurant 1m, 90 de longueur et 0m, 90 de largeur. (Voir la figure ci-jointe bien imparfaite).

Pierre tombale de l'église de Malguénac (Bretagne).

Le personnage nous présente l'aspect d'un chevalier de la seconde moitié du XVème siècle. Le haubert, ou plutôt le haubergeon, apparaît sous la cotte d'armés ; des brassards avec cubitières articulées protègent les bras ; les jambes sont couvertes de plates nommées cuissards ; on ne distingue plus les genouillères ni les jambières ; les pieds paraissent appuyés sur un animal mutilé.

Le personnage porte sur la poitrine un écu blasonné audessus duquel on voit ses mains jointes, et, au côté gauche, une épée à deux tranchants soutenue par la ceinture militaire, qui ne se distingue qu'imparfaitement. Deux anges, de chaque côté de sa tête nue, supportent une banderole dont l'inscription est effacée. Enfin, sur le bord de la pierre, au côté droit du personnage, on lit le commencement de l'épitaphe, malheureusement ailleurs complètement illisible.

Une question se pose maintenant. Quel est le personage représenté ; à quelle famille appartient l’écusson sur lequel on distingue difficilement un arbre [Note : Quelques personnes croient reconnaître une fleur de lys]. Consultant les réformations et montres du XVème siècle et tenant compte seulement de la pièce de l'écusson à peu près visible : un arbre, nous n'avons plus à retenir que les trois noms des familles suivantes : de la Haye, du Guern, Rolland, qui portent comme pièce principale un arbre.

D'après Guy Le Borgne, La Haye porte d'azur à l'arbre d'argent, le tronc chargé d'un cerf passant d'or ; Le Guern, d'après un sceau de 1333, porte un aulne accompagné de deux oiseaux perchés ; et Rolland, en ne retenant que la famille qui porte dans ses armoiries un arbre : d'argent au cyprès de sinople, le tronc accosté de deux étoiles de gueules, surmontées chacune d'une merlette de sable (Guy Le Borgne).

Les Rolland et leurs héritiers à Maiguénac, ainsi qu'en témoignent trois actes de décès, — du 10 mai 1611, 1er juin 1646, 27 avril 1674 — avaient leur sépulture dans le chœur « au-devant du grand-autel, à côté de la chapelle de Monseigneur saint Jean ». A noter aussi que Rosenzweig signale dans son Répertoire archéologique, à l'article sur Malguénac, quelques fragments de vitraux dans l'église, aujourd'hui disparus, où l'on distingue encore plusieurs écussons : 1° de gueules à 7 macles d'or 3. 3. 1. (Rohan}, seul et allié à d'autres écussons mutilés ;  2° d'azur à une fleur de lys d’or (armes de Coetanfao qui est Kerriec).

Enfin, quel que soit le personnage sculpté, cette tombe a- t-elle toujours servi de fermeture au caveau de l'enfeu ? On pourrait en douter, car, sur l'un des bords, la pierre a été légèrement entamée, sans doute pour pouvoir l'utiliser à cet effet. J'ajoute que bien souvent dans les anciens registres il est question d'une « tombe bien située dans le chœur ». S'agirait-il de cette tombe ?

Cette grande dalle sculptée en ardoise ne s'harmonise pas non plus avec les arcades et l'appareil en granit de l'enfeu. De plus, les armoiries portées par le personnage ne sont pas celles des différents seigneurs de Lesturgant, le plus ordinairement inhumés dans cet enfeu où, d'après les anciens registres, ont été déposé les personnes suivantes :

— 13 janvier 1602. — Sépulture de demoiselle Françoise Chartier, dame de Kervenal, décédée le 8, au manoir de Sanizon ; inhumée à l'église paroissiale, en la chapelle de « Monsieur » saint Sébastien, « dans un tombeau estant à la muraille » de ladite chapelle.

— 5 septembre 1688. — Sépulture de Toussainte-Sainte Juhel, dame de la Boissière, du diocèse de Saint-Brieuc, décédée au château de Lesturgant, inhumée à l'église paroissiale, « dans la tombe de la voûte de la muraille de la chapelle dudit Lesturgant ».

— 25 novembre 1700. — Sépulture de messire Bernardin du Roscoët, chevalier, seigneur du Porzo, décédé à son château de Lesturgant ; inhumé à l'église paroissiale, « dans la tombe élevée en la muraille de la chapelle dudit Lesturgant ».

— 8 février 1705. — Sépulture d'écuyer Louis-Jean de Cléguenec, « seigneur chevalier » de Lantillac, décédé au château de Lesturgant ; inhumé à l’église paroissiale, « dans la tombe voûtée de la chapelle de Lesturgant, dus côté de l'évangile ».

Voici, de plus, quelques actes de décès de personnes dont la sépulture dans l'enfeu est moins précisée, mais qui, comme les précédentes, ne portent pas les armoiries de l'écusson du personnage de la pierre tombale.

— 30 décembre 1619. — Sépulture de Jean Boterel, écuyer, sieur de Saint-Nyzon ; inhumé dans l’église paroissicle, « plus haut que la grande tombe qui est devant le tabernacle du Sacre, vers la muraille, du costé de Saint-Sebastien ».

— 8 octobre 1640. — Sépulture de demoiselle Marguerite Boterel, fille aînée de Charles Boterel et de demoiselle Louise de Baud, sieur et dame de Kerisouet, Lesturgant, etc. ; inhumée dans l'église paroissiale, « en la tombe enlevée située dans le chœur, possédée de tout temps immémorial par lesdits seigneurs et leurs prédécesseurs ».

— 23 septembre 1692. — Inhumation dans le chœur de l’église paroissiale, de Messire Louis du Roscoet, chevalier, seigneur dudit lieu, de Lesturgant, Kerisoët, Le Porzo, Botmarch, Kervers, etc., décédé au château de Lesturgant.

Enfin, je citerai l'un des actes de décès d'un seigneur de Moustoir-Lan, Jérôme de Lesquen, écuyer, inhumé dans l'église de Malguénac, le 19 août 1747, « en vertu du droit de tombe que les seigneurs de la dite terre de Moustoir-Lan en ont ». Ceci à propos des Kerriec-Coëtanfao- qui ont possédé Moustoir-Lan au XVème siècle et l'ont laissé en héritage aux Cléguennec qui, eux-mêmes, comme leurs héritiers, les de Lesquen, ont usé du droit de tombe. S'agirait-il de la tombe sculptée ?

Si, à l'aide des actes de décès des anciens registres paroisisiaux, il a été facile de connaître la destination de l’enfeu dont l'heureuse découverte enrichit l'église de Malguénac, il n'existe, par contre, — outre les quelques actes de décès de la famille Rolland spécifiant l'existence d'une tombe au-devant du grand-autel — aucun document pouvant établir la véritable destination de la pierre tombale au personnage sculpté qui, bien que mutilée, offre encore un réel intérêt [Note : J'ai fait restaurer la partie mutilée de la tombe. Les jambes du personnage sont, autant qu'il a été possible, remises en état].

Quoi qu'il en soit, j'ai cru devoïr la faire connaître dans le cas où il lui arriverait de nouvelles avaries. C'est un monument funéraire digne de l'attention et qui, de plus, constitue un document lapidaire précieux pour l'histoire féodale assez peu connue de cette région, à tous points de vue pleine d'intérêt, et dont l'exploration et l'étude tant archéologique qu'historique donnent de curieux et imprévus résultats.

AVENEAU DE LA GRANCIÉRE.

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