Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

L'ANCIEN COLLÈGE DE LESNEVEN (1833-1914)

  Retour page d'accueil       Retour Ville de Lesneven    

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Le 15 mai 1832, le Conseil municipal. de Lesneven était appelé à délibérer sur « une demande formée par M. l’abbé Hervé Roudaut, prêtre desservant de la paroisse de Plounéour-Trez, à l’effet d’être autorisé à établir un collège à Lesneven ».

Lesneven (Bretagne) : le collège.

L’abbé Roudaut, qui avait dirigé avec succès le collège de Quimper de novembre 1827 à décembre 1830, désirait rentrer dans l’enseignement.

Le Conseil municipal s’empressa d’accueillir très favorablement sa demande, car il voyait dans l’installation d’un collège une source de revenus, d’autant plus importante que Lesneven était privée depuis 1780 des « institutions administratives et judiciaires qui faisaient sa prospérité ».

Le Recteur d’académie appuya la demande de l’abbé Roudaut. Mais l’administration supérieure ne se hâta pas de répondre. C’est le 18 décembre seulement que le Conseil royal de l'Instruction publique autorisa l’ancien principal du collège de Quimper à ouvrir un Pensionnat à Lesneven.

Lesneven (Bretagne) : le collège.

Quelques semaines plus tard, le 1er mars 1833, l’abbé Roudaut installait son Pensionnat dans l’ancien cou­vent des Récollets.

L’abbé Roudaut, pourvu du diplôme de maître de pension, ne pouvait « élever son enseignement que jusqu’à la quatrième classe inclusivement ».

C’est pourquoi, plein de sollicitude pour son oeuvre et dans l’intérêt de la ville de Lesneven et du pays environnant, il ne tarda pas à demander l’érection de son Pensionnat en collège communal de plein exercice : ce qui lui donnerait le droit de distribuer l’enseignement jusqu’aux classes de rhétorique et de philosophie.

Le Conseil municipal soutint énergiquement les démarches de l’abbé Roudaut. Et pour empêcher leur échec, il ouvrit, en octobre 1834, une souscription « à l’effet d’assurer » — avec une allocation annuelle pour le Principal de 2.500 francs — « pendant les cinq premières années consécutives les dépenses du collège communal de Lesneven ». Le montant de la souscription s’éleva à 19.114 francs répartis entre 61 souscripteurs : chiffres importants pour une ville « sans ressources » et qui comptait au plus trois mille âmes.

Lesneven (Bretagne) : le collège.

L’administration universitaire s’inclina devant un désir aussi nettement formulé. Et le 10 février 1835 une ordonnance de Louis-Philippe érigeait le Pensionnat de l’abbé Roudaut en collège communal.

L’abbé Roudaut, qui était chargé de la rhétorique, avait comme collaborateurs des prêtres et des laïques. L’enseignement était celui des grands collèges, c’est-à-dire littéraire et scientifique.

Le Collège entra vite « dans une bonne voie de progrès ». En 1836, il avait 243 élèves, dont 150 internes.

Lesneven (Bretagne) : le collège.

Malheureusement l’abbé Roudaut vécut bientôt en mauvaise intelligence avec l’abbé Chenu, professeur de mathématiques. Le Bureau d’administration du Collège se rangea du côté de l’abbé Chenu et à la fin de 1836, il demanda « le remplacement de M. Roudaut ». Celui-ci démissionna dans les derniers jours de janvier 1837.

Il fallait lui trouver un successeur. Des démarches furent faites près de plusieurs ecclésiastiques du diocèse ; elles n’aboutirent pas. Aussi le Bureau d’administration finit-il par s’adresser à l’abbé Chenu, qui était originaire de la Manche. L’évêque, Mgr. Poulpiquet, sanctionna le 3 mars le choix de l’abbé Chenu, qui fut nommé, par arrêté ministériel du 10 mai, principal de Lesneven.

Lesneven (Bretagne) : le collège.

Le principalat de M. l’abbé Chenu (1837-1848) fut une époque agitée.

Rappelons d’abord que le Collège fut en régie durant cette période, ce qui amena, à cause de la mauvaise administration, une diminution notable du nombre des élèves.

Second fait : l’abbé Chenu fut en butte à une persécution insensée. D’aucuns ne lui pardonnaient pas d’être étranger au diocèse. D’autres le considéraient comme un obstacle à la transformation du Collège en une institution libre. Tous voulaient son départ.

Lesneven (Bretagne) : le collège.

L’abbé Chenu était fortement soutenu par l'Evêque, le Recteur d’académie et différentes personnalités lesneviennes.

Ses ennemis triomphèrent. Mais leur victoire fut incomplète, car le Collège demeura un établissement universitaire.

M. l’abbé Daniel, ancien professeur au Collège de Lesneven et auxiliaire dévoué de l’abbé Monfort à Saint-Pol-de-Léon, succéda à l’abbé Chenu.

Parmi les maîtres qui enseignèrent sous le troisième principal, nous trouvons Francisque Sarcey. Professeur au lycée impérial de Chaumont, Sarcey refusa « d’expliquer Virgile en menton ras » comme le demandait une circulaire ministérielle. C’est pour le punir de ses « horribles méfaits » qu’il fut déporté, en mars 1853, au Collège de Lesneven. Mais le Ministre s’était trompé. Au lieu d’infliger une cruelle « disgrâce » au jeune et savant professeur, il lui procura, au contraire, « l’aubaine d’une retraite agréable et studieuse, en compagnie d’une douzaine de bons prêtres, qui devinrent très vite ses amis ».

Avec le passage de Sarcey à Lesneven, l’achat du Collège par la Ville peut servir à caractériser le principalat de l’abbé Daniel. L’affaire, je dois rajouter, ne fut réglée définitivement qu’en janvier 1858, c’est-à-dire un peu après le départ de l’abbé Daniel qui fut appelé, en 1857, à diriger le Grand Séminaire de Quimper.

Lesneven (Bretagne) : le collège.

Un de ses professeurs, M. l’abbé Cohanec, lui succéda. Le nouveau principal était un prêtre fort instruit et d’une conversation très agréable. L’administration universitaire le tenait en haute estime. La Municipalité de Lesneven, de son côté, ne lui cachait pas ses sympathies.

Mais le Collège coûtait cher à la Ville de Lesneven. Aussi aurait-elle été contente de le céder à l’autorité diocésaine. Des pourparlers furent engagés entre le maire, M. Hardy, et Mgr. Sergent. Pourquoi n’aboutirent-ils pas ? Je l'ignore. En tout cas, je ne regrette pas leur échec, car il a permis au Collège de Lesneven de vivre près d’un demi-siècle encore dans la meilleure intimité avec l'Université, au bénéfice du pays et pour le bon renom de l'Université elle-même.

Au moment où s’engageaient, à notre connaissance, les derniers pourparlers entre le Maire de Lesneven et l'Evêque de Quimper, l’abbé Cohanec, dont la santé était mauvaise, se préparait à démissionner. En 1868, il fut nommé recteur de Landéda.

L’abbé Cohanec désirait que le principalat fût confié M. l’abbé Alexis Bergot, originaire de Lesneven. Il n’eut pas le successeur de son choix, puisque la direction du Collège fut donnée à un Alsacien, M. l’abbé Follioley, principal du collège de Saint-Claude.

Le nom de l’abbé Follioley est connu — à juste titre — dans toute l'Université. Mais l’est-il assez à Lesneven ?. Les Anciens du Collège savent-ils bien ce qu’a fait pour leur chère Ecole le prêtre distingué qui la dirigea pendant quatre ans et quelques mois (décembre 1868-mars 1873) ?. Etudes, organisation matérielle, tout fut de sa part l’objet de soins assidus et éclairés. Son oeuvre est de celles qu’on ne résume pas ; il faut la connaître dans le détail.

On aurait eu à regretter vivement le départ de l’abbé Follioley, si le Collège n’avait été dirigé dans la suite, pendant vingt ans, par M. l’abbé Roull.

D’un dévouement de tous les instants, M. Roull fut un « grand constructeur ». On lui doit la chapelle, consacrée le 18 mai 1875. C’est lui qui a fait construire un superbe bâtiment de deux étages, à gauche, en entrant dans la cour d’honneur, et une aile de deux étages également, parallèle à la chapelle, entre le jardin et la cour des Grands. Enfin, des classes furent construites dans le jardin.

Ces divers bâtiments étaient à peine achevés que le Collège entrait dans une période très intéressante de son histoire : l’ère des traités décennaux entre la Ville et l'Etat. Le premier contrat de ce genre fut signé en 1891.

Deux ans plus tard, M. Roull était placé à la tête de la paroisse Saint-Louis, de Brest.

M. l’abbé Gloanec lui succéda. Le seul événement important de son principalat fut le renouvellement de l’engagement décennal expirant au 1er janvier 1901, malgré un rapport défavorable de l'Inspecteur d'Académie qui déclarait au sujet du Collège : « Je ne puis en approuver ni l’esprit ni la direction ».

Par le nouveau traité, la chaire de philosophie était laïcisée. Son titulaire, M. l’abbé Kérandel mourut en juin 1901. Il fut remplacé par M. Louis Gillet, licencié ès-lettres, ancien élève de l'Ecole normale supérieure.

Lesneven (Bretagne) : le collège.

La signature du second traité décennal correspondait à une crise très sérieuse. C’était « l’époque où la lutte religieuse paralysait toutes les initiatives... Les parents, les prêtres eux-mêmes, inquiets pour l’avenir, hésitaient à diriger vers le Collège les enfants les mieux disposés ». A Lesneven, comme dans tous les établissements ecclésiastiques, le nombre des élèves diminua beaucoup, ce qui affecta profondément M. Gloanec.

De plus, « les difficultés d’administration s’accumulaient.... Certains fonctionnaires malveillants ne négligeaient pas leurs critiques à ce collège de la République dirigé encore par des curés. M. Gloanec avait trop de coeur pour supporter l’outrage avec calme et sang-froid. Sa santé en souffrit ».

Fatigué, il résigna ses fonctions en 1907 et se retira à Guipavas, sa paroisse natale.

M. l’abbé Moënner, huitième et dernier principal, prit donc la direction du Collège à un moment très difficile.

Tout entier à son œuvre de restauration, il n’épargnera ni son temps ni sa peine. Ce ne sera pas inutilement, car bientôt le Collège de Lesneven sera de nouveau au nombre des meilleurs collèges de France.

D’autres, il est vrai, préparent sa fermeture. Déjà en 1886, la « Lanterne » avait demandé la laïcisation intégrale du Collège. Plus tard, en 1904, l' « Action » publie un article contre les collèges de Lesneven et de Saint-Pol-de-Léon « où l’on conspire contre la République ». En 1907, M. Yves Lefebvre écrit dans « Pages libres » : « Ces deux collèges sont en plein pays breton comme les forteresses intellectuelles de la Chouannerie ». Quatre ans après, M. Antoine Bott expose au long dans la « Bretagne nouvelle », revue mensuelle des « Bleus de Bretagne » la « situation anormale du séminaire de Lesneven ». En 1912 et 1913, les articles se multiplient un peu partout.

« Péniblement émus » de cette campagne dont le but était « d’empêcher le renouvelleraient du contrat du Collège de Lesneven », les membres laïques de l' « Amicale des professeurs du Collège » adressèrent une pétition au Ministre de l'Instruction publique, le 22 février 1913. Ils la terminaient par le voeu suivant : « Notre plus vif désir est de voir le Gouvernement de la République maintenir à cet établissement son caractère actuel, persuadés que, loin de dégénérer, il continuera dans l’avenir, comme dans le passé, à former des hommes éclairés, des citoyens dévoués sur qui le pays puisse être toujours en droit de compter ».

Le Ministre, M. Viviani, répondit, le 24 décembre 1913, à la Chambre des députés. On discutait le projet de loi relatif au renouvellement des traités passés entre l'Etat et les Villes pour l’entretien des collèges communaux de garçons. M. Viviani monta à la tribune pour déclarer qu’il demanderait à la Municipalité de Lesneven de renoncer aux ecclésiastiques qui se trouvent dans son Collège, et que, si la Municipalité n’acceptait pas cette condition, lui, ministre, refuserait d’apposer la signature de l'Etat au bas du contrat.

Après les déclarations du Ministre, M. Louis Soubigou, député de la 3ème circonscription de Brest, prononça un discours « très éloquent et très complet » — suivant les expressions mêmes de M. Viviani — pour défendre le Collège de Lesneven et les intérêts divers (intérêts de la Commune, de la région, des maîtres, de l'Université) que léserait la laïcisation projetée.

M. Alexandre Lefas, député d'Ille-et-Vilaine et membre de la commission de l'Enseignement, intervint aussi dans la discussion. Mais, malgré une argumentation très précise que renforçait l’autorité dont il jouissait à la Chambre, il ne put, avec M. Soubigou, assurer le triomphe de la justice et du bon sens.

Deux mois après, le 27 février 1914, le Conseil municipal de Lesneven, repoussait à l’unanimité par 13 non et 3 bulletins blancs la laïcisation du Collège...

Lesneven (Bretagne) : le collège.

Le 30 septembre 1914, le Collège de Lesneven fermait ses portes. Avec lui disparaissait un établissement qui a rendu à la société de très grands services et à qui une collaboration loyale d’environ quatre vingt ans entre l'Université et l'Eglise avait donné une physionomie originale (Eugène Corgne, ancien professeur au Lycée de Pontivy).

 © Copyright - Tous droits réservés.