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LA LIGUE A LANDELEAU

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A la fin du XVIème siècle, la Bretagne subissait les horreurs des guerres religieuses. Moreau, chanoine de Cornouaille, licencié en droit et présidial de Quimper, raconte les scènes de violence qui attristèrent le Tréguier, le Léon et plus particulièrement la Cornouaille depuis 1589 jusqu'à 1597. Au début de ces tristes discordes intestines, le roi Henri IV était protestant, puisqu'il ne se convertira au catholicisme qu'au mois de juillet 1593. Les Bretons, en grande majorité, ne voulaient pas reconnaître un souverain protestant. Ils furent entraînés dans la lutte par le duc de Mercœur, de la famille des Guises, qui étaient les grands chefs catholiques en France. La guerre devait durer neuf ans et se terminer par la défaite de Mercoeur et la soumission de la Bretagne à Henri IV, contre lequel l'hostilité n'avait plus de raison d'être depuis sa conversion. Moreau a connu les choses qu'il rapporte, ou pour les avoir vues lui-même, ou pour avoir été renseigné par des témoins. Muni de ces informations, il composa son Histoire de ce qui s'est passé en Bretagne durant les guerres de la Ligue.

Les protestants, partisans du Roi, étaient appelés les Royaux, les catholiques étaient connus sous le nom de Ligueurs. Les Anglais débarquèrent sur nos côtes pour aider les Royaux ; les Espagnols vinrent au secours des Ligueurs et occupèrent une partie du territoire. En Bretagne, ils apportèrent des renforts à l'armée de Mercœur. Toutes sortes de malheurs fondent sur la province : sièges de villes, démantèlement de forteresses, insurrections de paysans.

En 1590, une troupe gaillarde de Royaux, composée de gentilshommes de Saint-Brieuc, Tréguier, Lannion et autres places de leur parti, s'empare de Carhaix qui ne put résister : cette ville n'avait pas de garnison et n'était close que de barrières et de murailles peu élevées. Les premiers assaillants entrèrent par-dessus les murs, ouvrirent les barrières et la cavalerie les suivit. Le lendemain, ils pillèrent la ville, enlevèrent tout ce qu'il y avait de beau en fait d'ameublement. Plusieurs habitants furent tués ; d'autres, faits prisonniers. Quelques-uns prirent la fuite et alertèrent le pays. Le bruit se répandit de paroisse en paroisse, on sonna le tocsin et les paysans se mirent aussitôt sous les armes, se dirigeant de toutes parts vers Carhaix, conduits par un vieux soldat gentilhomme du nom de Lanridon. Mais comme ils manquaient d'expérience et de discipline, ils n'allèrent pas bien loin. Ils tombèrent dans une embuscade de quatre à cinq cents cavaliers qui, les prenant de tête et de flanc, leur coupèrent le chemin, les mirent en fuite ou les jetèrent dans la rivière où beaucoup se noyèrent. Leur chef Lanridon périt ainsi et on l'enterra à Collorec. Les Royaux, dépassant la rivière, poursuivirent la bande de Ligueurs de tous côtés sur un espace de plus d'une lieue et demie. Il se fit dans cette déroute une grande tuerie de paysans. La paroisse de Landeleau avait fourni son contingent à ces malheureuses troupes, et l'historien la signale comme ayant perdu dans ces batailles un grand nombre d'hommes.

Au mois d'avril de la même année, le seigneur de Landeleau, Francois du Chastel, marquis de Mesle, commandant au nom de la Ligue la place de Quimperlé, fut surpris par les Royaux une nuit qu'il n'y avait à la porte de la ville que quelques sentinelles. L'ennemi fit sauter la porte à coups de pétards et entra en nombre dans la ville où ceux qui résistèrent furent tués ; d'autres, surpris par cette attaque inopinée, se rendirent sans combat. Le capitaine réussit à se sauver et se réfugia dans son domaine de Châteaugal.

Après l'affaire de Collorec, les Royaux étaient retournés à Carhaix où ils mirent le feu. Quelque temps après, ils délibérèrent pour savoir s'il fallait revenir sur le lieu de leurs exploits. Le but proposé était le siège du château du Granec, habité par le seigneur de Pratmaria. Ceux qui étaient partisans de l'expédition espéraient trouver là du butin en abondance et obtenir du seigneur une forte rançon. Un seul émit une opinion contraire, et l'on a pensé depuis qu'il agit ainsi pour sauver le seigneur de Pratmaria qui était son parent. Il fit observer que le château du Granec était solidement construit, armé d'une forte garnison et que le seigneur était un vieux capitaine expérimenté. Quant au butin, il n'était pas si précieux qu'on le prétendait. Ce serait une témérité que d'attaquer le Granec : il n'y avait rien à gagner et l'on risquait de tout perdre. Cet avis prévalut au grand avantage du seigneur de Pratmaria qui, en réalité, n'avait pas six hommes pour résister avec lui. Mais il était exact que le château était bien fortifié à l'intérieur et flanqué de puissantes tourelles aux quatre coins.

Le pays avait échappé à un terrible danger ; mais trois ans plus tard, il sera le théâtre d'une expédition plus redoutable, commandée cette fois par un homme qui, bien qu'il eût pris parti pour la Ligue, était devenu le plus sinistre des détrousseurs de grand chemin, un véritable chef de brigands, Guy Eder, sieur de la Fontenelle. « Chrétien de nom, mais Turc de fait », dit Moreau, cette bête de proie à face humaine ne trouvera un châtiment insuffisant pour ses forfaits que dans le supplice de la roue qu'il subira à Paris, en la place de Grève, le 27 septembre 1602, à peine âgé de 28 ans. En attendant il tue, vole, rançonne, terrorise sans merci ses coreligionnaires : il aurait sur la conscience le massacre de 30.000 personnes. Il avait fait de l'Ile Tristan, en Douarnenez, une forteresse imprenable, le repaire d'où il s'élançait avec ses bandes sur la campagne. Malheur à ceux qui tombaient entre ses mains : il en est qui moururent misérablement dans des cachots infects ; d'autres étaient condamnés à s'asseoir sur un trépied à cuir nu qui les brûlait jusqu'aux os ; d'autres étaient dépouillés de leurs vêtements et plongés au cœur de l'hiver dans des barils pleins d'eau gelée.

Il convoitait le château du Granec et ses biens. Sachant le lieu fortifié, il l'emporta par ruse avec une poignée d'hommes. Ceux-ci s'étant présentés à la porte de château avec un ordre portant la fausse signature d'un ami du seigneur de Pratmaria, ce gentilhomme trop crédule fit abattre la porte du pont-levis et la bande fit irruption, l'arquebuse amorcée et la mèche allumée. Tout ce qui avait de la valeur fut emporté et le propriétaire mis hors de sa résidence. Une fois dans la place, la Fontenelle la fortifia de plus belle, en faisant creuser et élargir les douves, et prit son logement dans ce bon nid, résolu de s'y tenir pour quelque temps, afin d'exercer ses rapines sur les lieux d'alentour, riches en vivres et en objets précieux. Les paysans de Collorec, de Landeleau et des environs, à la nouvelle qu'un si petit groupe d'hommes occupait l'intérieur du château, pensèrent en venir à bout, en privant la garnison de ravitaillement et de secours. Mais la Fontenelle, débouchant à l'improviste avec cinquante ou soixante cavaliers, fonça sur ces campagnards mal aguerris et en fit un carnage de sept à huit cents ou davantage, ne cessant de les poursuivre depuis le grand matin jusqu'à une heure de l'après-midi. La cruauté du capitaine-brigand fut telle qu'il ne permit pas aux parents des morts d'emporter les corps et, conclut l'historien « c'était une grande compassion de voir ces pauvres rustiques mangés par les chiens et, la nuit, par les loups... ».

La Fontenelle avait fait du Granec sa seconde forteresse et aussi inexpugnable que l'Ile Tristan. Moreau nous dit qu'il resta quelque temps. Il nous est facile d'imaginer l'inquiétude, l'angoisse des habitants de la région. Le souvenir en était resté dans la mémoire des gens. Cinquante ans plus tard, en 1643, Marguerite Le Poullain, du bourg de Landeleau, témoignait avoir vu le corps d'un jeune gentilhomme exposé dans l'église pendant un jour et une nuit : c'était, disait-elle, le fils du seigneur du Granec, tué au bourg de Landeleau pendant la Ligue.

(L. Kerbiriou).

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