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LES BOURGEOIS ET PAYSANS DE LANDELEAU

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Au civil, Landeleau après avoir dépendu, au moins jusqu'au XVIème siècle, de la sénéchaussée de Carhaix, se trouvait sous la juridiction de Châteauneuf. C'est là qu'exerçaient leurs charges les fonctionnaires royaux : sénéchal, avocat, notaire, huissier, procureur et autres agents dont les attributions étaient administratives et judiciaires. Le sénéchal était le premier de ces fonctionnaires. De 1670 à 1727 nous trouvons comme sénéchaux de Châteauneuf : Guillaume de Botmeur, Guilloroux, de la Boissière, du Bot de la Salle, de la Jarrière. Le sénéchal pouvait porter des arrêts : nous voyons du Bot de la Salle réglementer par un arrêt la tenue des assemblées paroissiales à Landeleau. Du sénéchal on ne pouvait en appeler qu'au Parlement et du Parlement au Conseil du Roi.

A côté de ces officiers royaux d'administration et de judicature, il y avait les fonctionnaires attachés aux juridictions seigneuriales importantes et qui portaient les mêmes noms que les fonctionnaires du roi. Ainsi nous trouvons à Châteaugal un bailli ou sénéchal, un avocat et juge de ladite juridiction, un notaire, un sergent ; leurs attributions consistaient à faire rentrer les produits des droits féodaux et des fermages du seigneur, à rédiger les contrats, instruire les procès, etc. Cela, faisait des juridictions superposées les unes aux autres ; c'était là un des abus de l'ancien régime. Le sénéchal de la cour royale de Châteuneuf se plaignait en 1717, dans une lettre à l'Intendant, de ce que la campagne fût remplie de juges, de greffiers et de procureurs. L'examen des cahiers paroissiaux de Landeleau confirme bien le fait. Les fonctionnaires royaux ne voyaient pas d'un bon oeil cette multitude de charges qui leur faisaient concurrence. Louis XIV avait voulu réduire le nombre des notaires, sur le rapport de Charles Colbert qui avait été envoyé en mission en Bretagne ; mais les Etats et le Parlement de Rennes avaient refusé d'enregistrer l'édit royal.

Les officiers royaux subalternes ne résidaient pas toujours au siège de la sénéchaussée ; plusieurs vivaient à Landeleau qui, soulignons-le ici, avait assez d'importance pour être une barre, c'est-à-dire une annexe de la juridiction royale de Carhaix ou de Châteauneuf. Avec les fonctionnaires seigneuriaux et les artisans aisés, ils composaient ce que l'on pourrait appeler la petite bourgeoisie de campagne.

Mais c'étaient les paysans qui participaient le plus activement à l'administration temporelle de la paroisse. Depuis l'époque de la Ligue jusqu'à la Révolution, les événements locaux nous sont surtout connus par les délibérations du conseil politique, encore appelé le général de la paroisse. Ce conseil était composé de 12 membres délibérants auxquels se joignaient, à titre consultatif, le recteur et le juge de la juridiction dont l'église relevait. Après annonce faite au prône de la grand'messe précédente, ils se réunissaient ordinairement à la sacristie pour traiter des affaires qui intéressaient la paroisse au civil et au religieux. Tandis que les villes avaient leur communauté municipale distincte et leur fabrique distincte, le corps politique, dans les paroisses rurales, cumulait les attributions de nos conseils municipaux et de nos conseils paroissiaux. Au premier titre il répartissait les impôts par l'intermédiaire des collecteurs ou égailleurs qu'il nommait librement, en principe pour un an ; les collecteurs dressaient les rôles ou la liste des contribuables avec leur quote-part d'impôts, sauf les rôles du clergé et de la noblesse qui étaient établis par des commissions de leur Ordre. En leur qualité de conseillers paroissiaux, les délibérants rédigeaient le cahier des recettes et des dépenses de l'église, la charge et la décharge selon les termes de l'époque. Les comptes devaient être soumis à l'examen de l'évêque quand il venait dans la paroisse pour sa visite pastorale et pour la Confirmation.

Les délibérants devaient assister régulièrement aux réunions qui avaient lieu environ tous les trois mois, ou plus souvent, suivant l'importance de la paroisse ; dans l'intervalle, ils déléguaient leurs pouvoirs à l'un d'entre eux : à Landeleau ce délégué renouvelé tous les ans s'appelait le procureur terrien.

Sous la sécheresse des procès-verbaux de comptes et de délibération des cahiers rédigés par le corps politique de Landeleau, nous trouvons des détails révélateurs de la vie locale. Aux temps anciens les seigneurs, comme les bourgeois et les paysans, avaient été assujettis aux fouages ou impôt par feu, par foyer, qui étaient le nom donné à la taille en Bretagne. En 1472, le duc de Bretagne François II dispensa le seigneur de Châteaugal, Louis de Chastel, seigneur de Mezle, de payer les fouages sur une partie de ses terres. On a souvent récriminé contre la taille ; on a plaint le paysan taillable et corvéable à merci, et souvent, en effet, cet impôt fut une charge écrasante pour les populations rurales. Mais si les nobles en étaient exempts, c'est parce que, en compensation ils devaient au roi le service militaire, ou parce qu'ils s'étaient affranchis de la taille par voie de rachat, en versant une fois pour toutes une forte somme. Mais ils n'échappaient pas aux autres droits royaux, la capitation ou cote personnelle et le vingtième ou impôt sur le revenu. Le clergé, de son côté, qui était dispensé des fouages et des vingtièmes pour les biens d'Eglise, et à partir de 1710 de la capitation, était assujetti aux impôts pour ses biens personnels et devait le don gratuit sous la forme de décimes. Remarquons, chemin faisant, que les régimes qui suivront ce que l'on appelle l'ancien régime ne supprimeront pas les impôts ; ils en changeront tout simplement les noms. La bourse du roi comme le sera depuis celle des gourvernements, de quelque dénomination qu'ils soient, était un gouffre sans fond et toujours béant. Parmi les subsides que le pouvoir royal réclamait, le plus important en Bretagne était le don gratuit. Nous trouvons trace dans le cahier de 1696 de la somme que la paroisse de Landeleau versa cette année-là au Trésor royal : elle s'élevait à 500 livres.

Le pauvre bûcheron de La Fontaine gémissait sur la milice, qui était l'impôt dû pour les étapes des troupes. Les habitants de Landeleau semblent bien faire entendre la même doléance. Nous sommes au temps des dernières guerres de Louis XIV : en 1690 les troupes logent à Landeleau. Les frais de logement et de ration sont au compte des habitants. Il faut croire que les frais furent jugés excessifs, puisque le corps politique dut subir un procès pour les payer. Mais la paroisse contribue au ravitaillement des troupes de Sa Majesté en envoyant du blé aux magasins du roi à Port-Launay. L'armée se composait alors de soldats de métier et se recrutait au moyen d'enrôlements volontaires. Quand les enrôlements ne suffisaient pas, on recourait au tirage au sort jusqu'à concurrence des besoins. En 1709, Landeleau paie 100 francs au receveur de Quimper pour être dispensé de fournir son milicien. Un soldat à fournir pour une paroisse de plus de mille habitants ! Qu'on était loin alors du service obligatoire !

La corvée, encore une plainte qui revient sur les lèvres du bûcheron de la fable ! Elle était bien impopulaire, en effet. A Landeleau elle se présenta sous la forme de la corvée des grands chemins : c'était le nom donné à l'entretien des routes. En 1755, l'intendant de Bretagne, Le Bret de Pantin, ordonna aux habitants d'aller travailler sur la route de Carhaix à Morlaix ; ils se contentent de répondre qu'ils se trouvent à plus de quatre lieues de l'endroit où le travail doit se faire. En 1759, l'ingénieur des Ponts et Chaussées les invite à contribuer à la réfection de la route de Carhaix à Landerneau. Nouveau refus, parce que cette route est à plus de deux lieues du clocher de Landeleau. Ceci est dit en termes laconiques dans le cahier paroissial. Nous ne savons les suites qui furent données à ces refus. La corvée des grands chemins n'est pas plus ancienne que le XVIIIème siècle. On lui doit l'amélioration, presque la création du système routier breton. Au moment de la Révolution, la Bretagne avait plus de 900 lieues de nouvelles routes ouvertes, dont 400 sous l'administration du duc d'Aiguillon (commandant de la Province de 1753 à 1768), qui fit également mettre en état la même longueur d'anciennes routes. Tous ces travaux avaient été faits par les paysans, sauf les ouvrages d'art qui étaient au compte des Etats, c'est-à-dire de l'Assemblée provinciale. La corvée a laissé un souvenir désagréable parmi les paysans et pourtant les documents montrent qu'ils préféraient la faire plutôt que de subir à la place un impôt supplémentaire comme il en fut question.

Quand on parle de la corvée dans les temps plus anciens, c'est de la corvée seigneuriale qu'il s'agit : elle consistait pour les vassaux à rentrer les foins du seigneur, à faire sa moisson, etc. Nous ne savons si les habitants de Landeleau la supportèrent sans trop de récrimination. Les extraits que nous avons vus des cahiers paroissiaux ne nous renseignent pas comme nous l'aurions voulu sur les relations entre les seigneurs et les paysans. Comment les seigneurs de Châteaugal exerçaient-ils leurs droits féodaux ? Leurs officiers se livraient-ils à des mesures vexatoires ou usaient-ils de ménagements envers les usagers ? Nous n'avons pas d'éléments pour répondre à ces questions. Tout ce que nous apprennent ces trop courts extraits sur le chapitre intéressant dont nous venons de parler, c'est que les seigneurs et dames de Châteaugal servaient parfois de parrain et de marraine aux enfants de leurs vassaux, que le seigneur de Musuillac fit, en 1708, des avances aux paroissiens pour la part de contribution de ces derniers aux réparations du presbytère et que, quelques années plus tard, le président de Marbeuf, pour la commodité du service divin dans l'église, autorisa Jacques Le Mée, recteur, à ôter l'enfeu de Châteaugal et à le placer dans un endroit où il ne gênerait ni le clergé ni les fidèles.

(L. Kerbiriou).

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