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LES AUGUSTINS DE LAMBALLE

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Jean Ier, dit le Roux, comme duc de Bretagne et plus encore en qualité de comte de Penthièvre, voulut avoir des moines dans sa bonne ville de Lamballe. Il appela des religieux connus sous le nom de frères de la pénitence ou de frères sachets, à cause de leur vie pauvre et mortifiée et de l'espèce de sac dont ils se couvraient. C'était une congrégation de religieux Augustins différente de celle des Ermites. Jean Ier les avait placés en dehors de sa forteresse et même de l'enceinte de la ville, sur la vieille terre de la Garde. Jean II, son fils, enrichit à son tour ce nouveau couvent ; et, dans son testament, lui légua cent livres, somme très forte pour cette époque. Ce fut saint Louis qui fit venir d'Italie ces religieux fort austères qui, non seulement pratiquaient une abstinence de viande perpétuelle, mais aussi ne buvaient que de l'eau. Leur extrême pauvreté, le petit nombre de ceux qui se vouaient à un genre de vie aussi dur et surtout les décrets du Concile de Lyon qui supprimèrent les ordres mendiants à l'exception de quatre, firent tomber insensiblement l'ordre des frères sachets. Jean III, comte des Bretons, avant de donner le comté de Penthièvre en partage à Guy, son frère, les remplaça en 1317, de sa propre autorité, sans avoir consulté le Pape ni même Alain de la Roche, plus connu sous le nom d'Alain de Lamballe, évêque de Saint-Brieuc, par les Ermites de Saint-Augustin. Le Pape Jean XXII punit cette usurpation des droits de l'Eglise en lançant une excommunication contre ce prince qui se repentit, reconnut sa faute, en demanda pardon au Souverain Pontife qui lui pardonna et confirma alors le nouvel établissement. Aussi, la fondation des Augustins à Lamballe lui est attribuée.

Note : La fondation du couvent des Augustins à Lamballe (7 juillet 1317). A la sixième et dernière session du concile de Lyon, le 17 juillet 1274, fut lu le décret Religionum diversitatem qui abolissait les ordres mendiants, autres que ceux des Prêcheurs, Mineurs, Carmes et Augustins, et auxquels leurs constitutions enlevaient le droit de posséder et imposaient la nécessité de mendier leur subsistance. La dissolution immédiate n’était exigée que des ordres non approuvés par le Saint-Siège ; aux autres, il était seulement interdit de recevoir des profès, de créer de nouvelles maisons et d’aliéner celles déjà existantes, dont la disposition était réservée au Saint-Siège sous peine d’excommunication contre les contrevenants [Note : Corpus juris canonici in VI, lib. III, tit. XVII. — Sur l’ordre des Sachets, dont les origines sont peu connues, voyez Hélyot, Histoire des ordres monastiques, t. III, chap. XX, p. 175. Paris, 1715]. A Lamballe, diocèse de Saint-Brieuc, le couvent des frères de la Pénitence de Jésus-Christ, dits Sachets à cause de la forme de leurs robes de bure, fut atteint, ainsi que toutes les fondations du même ordre, par la constitution de Grégoire X, mais il subsista jusqu’à la mort du dernier religieux. Le duc Jean III de Bretagne, dont les ancêtres avaient fondé ce couvent, se crut autorisé à en disposer en faveur des frères Augustins de sa propre autorité. S’étant aperçu bientôt de sa méprise, il avoua à Jean XXII son ignorance des réserves portées par le décret conciliaire de 1274 et sollicita la confirmation de sa donation. Le pape y consentit volontiers et par surplus releva le duc de l’excommunication qu’il avait dû encourir, par une bulle du 7 juillet 1317 (G. Mollat).

Fondation du couvent des Augustins à Lamballe

Fondation du couvent des Augustins à Lamballe

 

 

 

 

 

 

 

 

 

   

Les libéralités des seigneurs du pays vinrent bientôt enrichir ce couvent. Olivier de Tournemine donna, en 1337, cent vingt livres de rente et demanda à être inhumé dans le chœur de la chapelle, ainsi que Isabeau de Machecoul, son épouse. Leur tombeau a subsisté jusqu'en 1793. Isabeau était morte en 1338 et Olivier en 1342, avant la guerre de succession.

Les Tournemine, arrière-petits-fils des comtes de Lamballe par les femmes, choisirent la chapelle de l'Ave Maria comme lieu de sépulture, bien qu'ils eussent déjà une chapelle à l'abbaye de Saint-Aubin-des-Bois, du côté de l'évangile, avec caveau et statues. En 1363, Charles de Blois enrichit la chapelle des Augustins de Lamballe d'une précieuse relique de saint Yves.

En 1370, Thomas Thesselin, prieur des Augustins, dans sa déposition lors de l'enquête sur les vertus et les miracles du vieux Charles de Blois, dit que ce prince avait donné trente florins d'or à son couvent et qu'il l'avait enrichi d'une portion de côte de saint Yves. Il ajouta qu'il avait vu ce pieux comte de Penthièvre porter à Notre-Dame une relique du même saint au milieu d'un immense concours de peuple et de tout le clergé, recteurs et religieux du comté. Jean III n'avait donné que le lieu et place de la maison conventuelle. Olivier de Vauclair ajouta les champs et terres de la Garde « esqueulx champs et terres la foire aux chevaux, vaches, pourceaux et austres est accoustumée estre chascun an à la feste de Saint Denys et le lendemain et comme ladicte foire se poursuit sur les champs jouxte les murs de l'hébergement aux dicts religieux d'une partie et l'esve ou eau du ruisseau qui descend du moulin devant la porte de la ville au moulin du prieuré de Saint-Martin d'autre partie ».

Ceux qui connaissent Lamballe voient facilement de quelle importance était ce legs qui leur livrait tout le terrain qui s'étend depuis le moulin de la ville, y compris le Jeu de paume, jusqu'au moulin de Saint-Martin avec les jardins du Pavillon et la plus grande partie du haras.

Les legs y abondèrent de toutes parts jusqu'aux guerres de la Ligue. Pendant les XVème et XVIème siècles, les Augustins se ressentirent fortement des dissensions qui désolèrent le pays et subirent trois ou quatre pillages de la part des lansquenets du prince de Dombes. Leur maison et leur église furent complètement mises à sac.

Depuis cette époque jusqu'à sa ruine, peu d'accroissements furent faits à cette communauté. On y ajouta seulement le clocher dont le style architectural contrastait hideusement avec le reste de l'édifice. Un historien de notre pays a pu dire : « Des bâtiments spacieux, un vaste enclos, une belle chapelle du XIVème siècle, embellie encore au commencement du XVIème par d'élégantes additions, faisaient, de ce couvent un des principaux établissements de la Congrégation des Augustins de Bretagne » (Sigismond Ropartz, Portraits bretons).

Les religieux de Lamballe, comme ceux de Rennes et de Vitré, appartenaient à la réforme de Bourges et étaient, par conséquent, de ceux que l'on désignait sous le nom de Petits Augustins. Il n'y eut jamais au monastère de l'Ave Maria (c'était le titre de la maison de Lamballe), plus de cinq ou six profès, mais la congrégation y avait en même temps un de ses collèges, sorte de noviciat où l'on instruisait les jeunes gens qui se destinaient à entrer dans l'ordre.

Pendant plusieurs siècles, les moines Augustins rendirent les plus éminents services aux paroisses du Penthièvre par leur zèle et leur dévouement à prêcher l'évangile. Partout on les voyait organiser des retraites, des missions et des pèlerinages où les populations accouraient en foule pour entendre la parole entraînante des pieux missionnaires. Longtemps à l'abri des souffles délétères dont ils subirent la fatale influence, ils furent de vrais pionniers de l'évangile pour notre pays où ils entretinrent et augmentèrent, par la parole et leurs vertus austères, le feu sacré de la foi.

L'on compte parmi eux bon nombre de prieurs qui se firent remarquer par la sainteté de leur vie et leur dévouement vraiment apostolique. Le Révérend Père Ange Le Proust suffirait à lui seul à les illustrer. C'est lui qui fonda, à une époque malheureuse, cette congrégation des Hospitalières de Saint-Thomas de Villeneuve qui se voue depuis plus de deux cents ans aux soins des malades, des vieillards et des orphelins, avec un dévouement au-dessus de tout éloge. Malheureusement, l'heure de la décadence arriva pour les Augustins de Lamballe, comme pour tant d'autres communautés, lorsque le laïcisme, au moyen de la Commende, envahit les charges ecclésiastiques pour en recueillir les bénéfices sans en accepter les responsabilités. Peu à peu, insensiblement, la ferveur première s'évanouit, le zèle diminua, la vie naturelle étouffa la vie spirituelle et engendra le relâchement, source de tous les maux.

Le Révérend Père Ange Le Proust, de sainte mémoire, venait d'être nommé prieur de la maison de Lamballe, dans un chapitre tenu à Montmorillon sous la présidence du R. P. Lucchini, général de l'ordre. Nouveau Vincent Ferrier, il parcourut en apôtre le Poitou, le Berry et la Bretagne.

Ce n'était point un orateur brillant ni un élégant rhéteur, mais c'était un théologien plein de science, à l'accent si convaincu, à la parole si ardente qu'il ne laissait aucun doute dans l'esprit et savait admirablement le chemin du coeur. Aussi eut-il un grand ascendant sur les âmes qu'il ramenait en foule à Dieu et à la vertu ; c'était un grand convertisseur. Chose extraordinaire, ce véritable apôtre qui s'était aperçu en arrivant à Lamballe du relâchement de ses frères en religion n'eut aucune influence sur eux ! Toutes ses prières, toutes ses exhortations furent vaines ! Tous les moyens qu'il employa pour les rappeler à l'observation de leur règle vinrent se briser contre une indifférence et un parti pris qui dénotaient un mal invétéré. Ils en étaient arrivés à un tel degré de révolte et d'insubordination contre l'autorité, ils avaient tellement perdu tout sentiment du plus vulgaire respect pour leurs supérieurs hiérarchiques que, comme des écoliers révoltés, ils résolurent de se venger des remontrances de leur pieux et saint prieur, le R. P. Ange Le Proust ! ! ! Et pour ce, ils l'enfermèrent à clef dans sa chambre pendant un mois, lui passant sa maigre pitance de chaque jour par le trou au chat de sa porte. Cette gaminerie, qu'on aurait peine à croire si elle n'était affirmée par des témoignages irrécusables, nous donne une idée du relâchement incroyable dans lequel étaient tombés ces pauvres moines Augustins dès la fin du dix-septième siècle.

A cette époque, des discussions passionnées s'élevèrent entre eux et le clergé des paroisses à l'occasion des funérailles faites dans leur église.

Les bons offices de l'Evêque de Saint-Brieuc ne parvinrent point à les calmer, mais un arrêt du Parlement de Bretagne y mit fin en condamnant leurs empiétements. La mort du Père Ange, arrivée en 1697, fut un véritable deuil pour la ville de Lamballe où ses hautes vertus et son immense charité avaient laissé un impérissable souvenir. Ses confrères, au contraire, finirent par s'y faire détester, tant était grand le discrédit que leur valut leur vie désor­donnée. Nous en avons pour preuve l'affiche suivante qui fut apposée sur la porte de leur couvent en 1785.

« Nous promettons un louis pour récompense aux gens de bonne volonté qui auront assez d'adresse et de charité pour administrer vingt coups de bâton au Père Enau, fils d'un mitron de Rennes, et actuellement, mais depuis beaucoup trop longtemps, mauvais prieur des Augustins de Lamballe, pour faire aboutir un gonflement qu'a le susdit Père entre les deux épaules ».

Ils aimaient à s'ingérer dans l'administration ; aussi étaient-ils arrivés à tenir les registres de la Communauté de ville, sur les marges desquels nous n'avons pas été peu étonnés de rencontrer des gouailleries et des moqueries de tout genre qu'ils décochaient à l'adresse du clergé des paroisses.

C'est avec ce mauvais esprit et ce dévergondage qu'ils furent surpris par la Révolution. Lorsqu'elle éclata, la municipalité s'empressa d'installer dans leur couvent les bureaux de l'administration civile et criminelle. On fit l'inventaire des biens meubles et immeubles, et il s'éleva à la somme de 112.284 livres. Tous ces biens furent vendus et le maire, au nom de la commune, ne se porta acquéreur que des bâtiments conventuels de l'église et du vaste enclos qui les entourait et dont la moitié fut donnée plus tard à l'hospice civil. Sans doute, il n'était pas au pouvoir des Augustins de conserver ces biens et les pieuses fondations confiées à la garde et à la piété de leurs devanciers, parce que la force et la violence en temps de trouble primeront toujours le droit ! Mais il est un trésor au monde que nulle puissance ne peut ravir, c'était leur honneur et celui de leur ordre. Les malheureux n'en eurent aucun souci ; ils laissèrent dans le plus profond oubli les vertus et les magnifiques exemples de saint Thomas de Villeneuve et du Père Ange Le Proust. La fidélité, le courage et les pressantes exhortations de leurs confrères, les Augustins de Lannion, ne purent les arrêter dans la voie fatale où ils s'étaient engagés.

Aveuglés par une rare perversion d'esprit, ils imitèrent la lâcheté et la bassesse de Luther dont l'hérésie et les affreux scandales avaient déshonoré leur ordre. Leur défaillance devint une pierre d'achoppement pour plusieurs et entraîna même beaucoup d'hommes simples et craintifs. Toutes leurs avances au parti sectaire de Lamballe ne purent les mettre à l'abri des persécutions et du mépris public.

Leur défection s'appuyait sur les motifs les plus futiles et les plus contradictoires ; Jean Verne, leur prieur, a tenu à le constater dans un acte authentique conservé aux Archives municipales. Son âge, ses cheveux blancs, sa longue habitude de vivre sous la règle des Ermites de Saint-Augustin : rien ne put réveiller dans son âme aveuglée le sentiment de la dignité, le respect de lui-même.

Né a Moulins, le 8 février 1725, suivant attestation de Berger, conseiller du roi, lieutenant général de la sénéchaussée et siège présidial de Moulins, en date du 21 janvier 1744, il avait fait profession en 1746, dans l'église du couvent de Saint-Nicolas de Tolentino de Paris, faubourg Saint-Germain. Quand vint-il à Lamballe ? On l'ignore. A l'âge de 65 ans, il se crut obligé de faire, devant la municipalité assemblée, la déclaration suivante : « Je serais porté de coeur, par devoir et par goût, à continuer la vie commune, si je me voyais seulement réuni aux religieux de ma province, mais considérant que l'Assemblée Nationale veut confondre dans les maisons qu'elle indiquera les différents individus des différentes provinces de l'ordre avec lesquels la nôtre n'a eu aucun rapport ni intimité, dont nous ignorons pour la plupart les noms, à la réunion desquelles les trente-deux maisons de notre province se sont opposées en 1770, je dépose sur votre bureau la protestation en forme de la maison de Lamballe, du 6 septembre 1770. Je déclare renoncer aux cloîtres non tels qu'ils sont encore, mais tels que l'Assemblée Nationale se propose de les former, pour mener en mon particulier, autant que les changements de temps pourront le permettre, la vie que j'ai vouée au Seigneur, lorsque je me suis fait religieux ; je déclare aussi vouloir rester dans ma maison jusqu'à ce que l'on s'en sera emparé et que l'on m'aura signifié d'en sortir : alors, la nécessité contraignant la loi, je chercherai un autre domicile dans la ville. Signé : Jean VERNE, moine-prieur » (Archives municipales).

Dès le 6 septembre 1790, le frère René-Nicolas Le Vavasseur, né à Saint-Brice en Coglès, diocèse de Rennes, le 5 avril 1758, sous-diacre et religieux profès depuis le 16 février 1783, avait déclaré vouloir profiter de la liberté de rentrer dans le monde accordée par les décrets de l'Assemblée Nationale.

Le 24 octobre, le frère Alexandre Le Brun qui avait fait profession dans le diocèse d'Amiens, en 1766, suivant attestation de l'évêque, quitta également la communauté de l'Ave Maria. Quand l'abbé de Souleville prêta serment à la Constitution civile du clergé en l'église Notre-Dame, nous avons déjà vu que Jean Verne s'empressa de l'imiter ainsi que Jacques Jeanrod, sous-prieur, Théodore Bernard et Julien-Armel Echélard ; depuis ce moment, l'on ne parle plus de ces trois derniers.

Le prieur seul continua de jouer le plus triste rôle qui contrastait singulièrement avec la noble et belle conduite des recteurs de Saint-Jean et de Saint-Martin, MM. Milet et Brault.

Comme il devait s'y attendre, il reçut bientôt l'ordre de quitter la maison des Augustins. Le franc-maçon Le Dissez de Penanrun, fils, comme maire, le lui signifia le 23 novembre 1791, par la lettre suivante : « Monsieur et respectable confrère, le corps municipal obligé de tirer parti de toute l'étendue de l'emplacement qu'il a acquis dans le couvent des ci-devant religieux Augustins de cette ville, se voit dans la nécessité de vous prier de chercher un logement en ville, le plus tôt qu'il vous sera possible ; mais, en même temps, il me charge de vous témoigner tout le regret de ne pouvoir plus longtemps vous laisser jouir d'un appartement auquel vous paraissiez attaché ; il lui eût été bien doux de se trouver à même d'en agir autrement avec un citoyen aussi digne de l'estime publique et de l'attachement de tous ceux dont il est connu. LE DISSEZ, maire » (Archives municipales).

L'on ne pouvait pas le jeter sur le pavé avec plus de politesse, car l'on gardait encore certaines formes, mais l'heure des expulsions violentes n'allait pas tarder à sonner. Voilà donc la récompense de toutes ses coupables et criminelles concessions. On lui refusait un coin de chambre dans son ancienne propriété. Il se vit forcé, le malheureux, d'aller demander asile à une pauvre bonne femme, Sainte Auffray, qui l'accueillit comme un mendiant sans feu ni lieu. Une très belle bibliothèque avait été amassée et rangée dans l'une des salles du couvent ; elle était très riche en ouvrages de prix. Une partie des volumes fut portée à Saint-Brieuc et l'autre constitua la bibliothèque publique installée aux Ursulines. Comme cela ne pouvait manquer d'arriver, beaucoup d'ouvrages furent volés, et, plus tard, l'on trouva dans plusieurs familles, qui ne savaient qu'en faire, une quantité de volumes de grande valeur.

L'on conserve précieusement à la mairie de Lamballe les épaves arrachées à des mains inconscientes ou réclamées par l'administration centrale de Saint-Brieuc.

Pour toute consolation, on l'appela dans le corps municipal et on le nomma curé constitutionnel de Saint-Martin.

Ces deux fonctions ne lui donnèrent ni prestige, ni considération ; il demeura sans influence et sans autorité ; tout le temps qu'il resta à Saint-Martin il fut l'objet de la risée publique. Ses nouvelles paroissiennes, sans respect pour sa personne, lui firent avanies sur avanies ; nous en avons la preuve dans les plaintes amères d'un conseiller municipal, consignées au procès-verbal d'une séance conservé aux archives municipales.

L'on ignore ce que devinrent ses émules en schisme et en hérésie. Trois, dit-on, abjurèrent leurs erreurs au retour de la paix religieuse et le quatrième mourut dans l'impénitence finale. Si la nullité de l'ex-Augustin Verne le protégea, nous croyons aussi que son titre de franc-maçon n'y fut pas étranger. En 1793, il s'était fait recevoir dans la loge maçonnique de notre ville et y avait prononcé les affreux serments accoutumés. Son brevet de cérémonie a été longtemps conservé dans une honorable famille de notre connaissance avec son tablier, sa truelle et son triangle.

Le trait suivant peint la faiblesse ou plutôt l'inconcevable lâcheté de ce pauvre dévoyé. L'un de ses collègues avec lequel il était lié d'amitié, Jacques Riallan, conseiller municipal, ayant été accusé d'incivisme, fut incarcéré pendant deux ans, parce que l'on avait trouvé chez lui une lettre renfermant des expressions blessantes pour la République, et faisant connaître qu'un paquet adressé à M. Gofvry, vicaire général de Saint-Brieuc, demeurant à Jersey, chez M. Milet, curé de Lamballe, avait dû être expédié par Jacques Riallan. Jean Verne eut l'impudeur de remplir les fonctions de commissaire-enquêteur pour découvrir l'auteur de l'envoi. Son zèle révolutionnaire en fut récompensé par un certificat de civisme, en 1794 ; ce qui ne l'empêcha point d'être quelques semaines plus tard arrêté et jeté en prison, comme un vulgaire réactionnaire. Ni son tablier de franc-maçon, ni son écharpe municipale ne purent le sauver ; un ordre du proconsul Carpentier, représentant du peuple à Saint-Malo, lui fit donner un successeur comme conseiller.

En 1796, il n'eut pas honte d'ajouter à tous ses actes criminels le serment de haine à la royauté, pour lequel son ministère de charité aurait dû lui inspirer la plus vive répulsion. Depuis cette chute, le plus profond silence a régné sur sa personne. Puisse-t-il avoir eu la grâce de se repentir avant de mourir ! ! ! Aujourd'hui, de l'église des Augustins, comme de leur maison conventuelle, il ne reste plus pierre sur pierre.

(le diocèse de Saint-Brieuc durant la période révolutionnaire).

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