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LA FAMILLE LE PAPPE DE KERMINIHY

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Marc Antoine Le Pappe et dame Ursule l'Honoré. — Devenus propriétaires de la terre de Kerminihy, par la vente qui leur en avait été faite par le marquis et la marquise de Mesle, ils ne tardèrent pas à s’y installer. Renée de la Marche, qui en avait hérité vers 1608, ne dût pas habiter cette grande habitation isolée. Après son mariage, elle suivit son mari dans les châteaux beaucoup plus importants de la famille du Chastel, et il ne reste pas de trace de leur séjour à Rosporden.

Il n’en est pas de même des Le Pappe. Cette famille, originaire de Kerveny, en Plougaznou, forma plusieurs branches qui se retrouvent en Lanarvily (au Liscoat), en Lanmeur, Landerneau et Dirinon. Ses armes sont d’argent à la corneille de sable becquée et membrée de gueules, traversée d’une lance de sable en barre la pointe en haut. La branche du Léon s’est éteinte en la personne de Monseigneur Le Pappe de Trévern, mort en 1842, évêque de Strasbourg.

Marc-Anthoine Le Pappe, seigneur du Bois-de-la-Haye, appartenait à la branche des seigneurs de Liscoat. Il se fixa dans la Cornouaille au XVIIème siècle, à la suite de son mariage, avec Ursule l'Honoré [Note : Sa tante, Renée l'Honoré, avait épousé Alain de la Marche, seigneur de Kerfors, cousin-germain de Renée de la Marche, alors dame de Kerminihy], ou Enoret qui appartenait à une ancienne famille très considérée à Quimper. Plusieurs de ses membres y avaient occupé des charges importantes et possédaient des manoirs aux environs, entre autres Keradenec, en Ergué-Armel, dont le propriétaire, Guillaume l'Honoré, était en 1586 lieutenant de la capitainerie de la place et chasteau de Concq. La famille l'Honoré fut déclarée d’extraction noble lors de la Réformation de 1669. Ses armes sont lozangé d’argent et de sable, qui sont Leslem, à la cotice de gueules brochante, au franc canton de pourpre chargé d’un destrochère d’argent soutenant un épervier du même.

Les Le Pappe, bien que prenant sur leurs actes le titre d’écuyer, ne se présentèrent pas à la réformation de 1669 ; leurs armes furent seulement inscrites à l'Armorial général en 1696.

Quand Marc-Anthoine le Pappe eut acheté Kerminihy, le 17 août 1656, il s’y installa avec toute sa famille Déjà le 17 mars précédent, il avait été appelé à donner sur un acte de baptême sa signature à côté de celles des représentants des familles notables de Rosporden.

Quelques actes relevés sur les registres de cette paroisse nous donnent des renseignements sur lui et sur sa famille.

Le 2 mars 1657, Ursule l'Honoré, dame du Bois-de-la-Haye et de Querminy, est marraine d’un fils de Jean Lemeur de Penboal (Penbuel).

Le 18 mai 1656, Marc-Anthoine Le Pape, signe l’acte de baptême du fils de noble homme Guillaume Changeon [Note : Seigneur de Nevars (en Kernével), sénéchal des seigneuries de Goarlot, Kerminihy, Coatcanton, etc.] et damoiselle Renée Houssin. Le parrain était Messire Jean-Charles-Claude le Jacobin, seigneur de Keranprat, conseiller du Roi et son garde des sceaux au Parlement de Bretagne ; la marraine. dame Renée Forget, épouse de Messire François Le Borgne, seigneur de Lesquiffiou, Kervegan, Trévalot, etc. Ce baptême est fait par le recteur d'Elliant en l'église Notre-Dame de Rosporden.

Le 22 novembre 1660, Corentin, né le 18 octobre, fils légitime et naturel d'escuier Marc-Anthoine Le Pappe et dame Ursule l'Honoré, seigneur et dame du Bois-de-la-Haye, Kerminihy, Launay, Liscoet et autres lieux, a été baptisé par Guillaume Rouzault, curé de R. (Rosporden). Le parrain escuier Joseph-Corentin Le Pappe, sieur de Kermorvan, et la marraine damoiselle Corentine de Trémic, dame de Keranizan.

Le 30 mars 1661, Jeanne-Antoinette, fille de René Le Floch, seigneur de Lisle, advocat en la cour, et de damoiselle Jeanne Le Roy, a pour parrain Marc-Anthoine Le Pappe, seigneur du Bois-de-la-Haye, du Querminihy, du Liscoat, etc, et pour marraine dame de Jaureguy, compagne de Messire François de Guergadalen, chevalier, seigneur du Drevers, baron de Goarlot.

Le 23 février 1665, baptême de Renée Durant, qui a pour parrain Messire Guillaume du Fresnay, baron de Baregan, seigneur du Plessis, K… et autres lieux, et pour marraine damoiselle Renée Le Pappe, damoiselle de Kerminihy (elle ne sait pas signer).

Le 4 août 1666, baptême de Jeanne Durand, qui a pour parrain escuier Joseph-Corentin Le Pappe, seigneur de Kermorvan, Kerezecq, et pour marraine dame Jeanne Le Pappe, dame de Mesros, Rosily, Mouster, Pratanrons, etc. Ursule l'Honoré présente signe cet acte.

Le 7 septembre 1667, Corentine, fille du fermier de Penbuel a pour « parrain sieur Corentin Le Pappe, sieur dict, du manoir de Penbuel, assisté de son précepteur et pédagogue [Note : Corentin, fils cadet de Marc-Anthoine Le Pappe, né le 22 novembre 1660, n’avait pas encore 7 ans. Son précepteur, Denis Le Flohic, qui signe à sa place, était plus tard recteur de Tourc'h] y soubsignant et l’affirmant capable », et pour marraine damoiselle Renée Goupil, damoiselle des Landes.

Par suite d’une lacune de quatre années (1669 à 1674) dans les registres de la paroisse de Rosporden [Note : Ces années manquent également sur les registres de la paroisse de Tourc'h. On peut expliquer ces lacunes par le trouble qu’apporta dans cette région la Révolte du papier timbré. Il y eut des clochers démolis, des cloches enlevées des clochers. Celles de Tourc'h ne furent rendues à la paroisse qu’en 1680. Le registre de 1674 est le premier dont les feuilles sont timbrée], j’ignore la date exacte de la mort de Marc-Anthoine Le Pappe, mais sa femme déclarée veuve en 1674 n’existait plus en 1679.

Antoine-René Le Pappe. — Antoine-René, fils aîné de Marc-Anthoine, était déjà marié à Marie-Elisabeth Le Livec, d’une famille originaire de Toullan, en Plumergat, dont les armes sont d’azur à trois croissants d’or, deux et un, à la fasce d’argent chargée d’une étoiles de gueules. Par la mort, de son père, il était devenu propriétaire de la terre de Kerminihy et en cette qualité il fournit, le 1er octobre 1679, la déclaration prescrite par les arrêts pour la Réformation des domaines. Cette déclaration, dans laquelle il est qualifié gendarme de la garde du Roy, est fort détaillée ; elle donne exactement la description du manoir et la désignation des métairies, domaines et fiefs qui constituaient la seigneurie. C’est à ce moment que son importance fut la plus considérable.

Le manoir comprenait une cour close carrée ayant 40 mètres de côté sur 35. Au fond de la cour se trouvait le donjon et le corps de logis principal, faisant face au midi. A l'est et à l'ouest il y avait des bâtiments de moindre importance. Au sud, la chapelle était adossée à un mur de clôture fort élevé, dans lequel une grande et une petite porte étaient ouvertes.

Il dépendait directement du manoir comme réserve et ferme une surface de 160 journaux (77 hectares), dont 74 en bois de haute futaye, terres chaudes, etc., plus « 86 journaux en garennes et pièces de terre dans lesquels il y a toujours retraite et refuges à lapins » [Note : En 1840, ces garennes existaient encore et formaient 40 hectares de landes incultes. Elles sont aujourd’hui complètement défrichées]. Il y avait en outre une surface de 56 journaux, formant autrefois le domaine du manoir de Penbohal (Penbuel), récemment transformé en ferme.

Les domaines dépendant de la seigneurie étaient nombreux, leur surface totale était d’environ 900 journaux. 

En Rosporden. — Kereloret (Kerangoc), Keranbroc, Kerdaner (Kerzaner), Ty-an-Palmer, Keranleué-Bihan, bien noble [Note : Le manoir de Kerédern (Quélédern), avait été récemment aliéné]. A cette liste on pourrait ajouter le manoir de Kerouriou (Kerriou), qu'Antoine-René Le Pappe acheta, vers 1685, de François de Kermeno, baron de Goarlot. Les terres de ce manoir comprenaient le lieu de Kerhuilet en fief de Roy. Pour le surplus, ainsi que pour le moulin de Kerouriou, elles dépendaient de la seigneurie de Coatcanton, à laquelle le baron de Goarlot était tenu de payer une redevance d’une obole.

En Elliant. — Ty-an-Caroff (bien noble) et son moulin, Keranbrinquen, Kernevez-Lagadec, Run-Huellaff, Keraudren, Larlan ; Le Merdy, lieu non hébergé, en commun avec le seigneur de Tréanna, et une lande contenant cinq journaux, autour de la chapelle de Saint-Guénel.

En Tourc'h. — Le manoir, le domaine et le moulin de Kervinidel (Kervidal), Kerdaniou, Kerlatous, Keranhéré, Kericuff, Rochjourden, Kerlivic, Kerlohiou.

En Scaër. — Kerrouez et le moulin de Roudouglaz.

En Kernével. —  Nevars-Huellaff.

Il y avait en outre de nombreux fiefs ; ils portaient sur beaucoup de pièces de terre détachées et sur une trentaine de villages, situés principalement en Elliant, quelques-uns en Saint-Yvi et Tourc'h et un en Scaër. Deux de ces villages, situés en Elliant, Kerverniou et Keranmoalic, étaient des manoirs d’une certaine importance.

En résumé, l’ensemble de la propriété représentait une surface d’environ 1.200 journaux (580 hectares), soit un sixième en réserve ou ferme et le reste en domaines.

Il est bien difficile de se rendre compte des revenus que la terre de Kerminihy pouvait procurer à son propriétaire. Pour la réserve les éléments font défaut : je n’ai pu retrouver le prix de location de la ferme de Penbuel. Voici, en résumé, quel était le produit des domaines :

Argent 242 livres.

En nature : Froment 41 quarterons et 2 rennées. Avoine 70 minots et 2 rennées. Seigle 13 minots.

Huit moutons, cent chapons et quatre poulets.

Les chefs-rentes, non compris les droits de champart, suite au moulin, etc., que l’on ne peut évaluer, rapportaient au Seigneur : en argent 25 livres, et en froment 20 quarterons et 5 écuellées.

Les prééminences d'églises et droits honorifiques attachés à la seigneurie étaient considérables. C’est en 1619 qu’il en est question pour la première fois et d’une manière sommaire. Les voici tels qu’ils sont formulés plus complètement dans la déclaration de 1679 ; à partir de ce moment, ils se reproduisent presque sans modification.

« En l’église trefviale de N.-D. de Rosporden, le seigneur déclarant est fondé aux mêmes droits, prérogatives et intersignes de noblesse comme ses auteurs, à cause de la dite terre et seigneurie de Kerminihy et d’avoir en la dite esglise les armes des anciens seigneurs de Kerminihy qui y sont en bosse et plate peinture, lesquelles sont d’argent à trois mollettes de gueules, les dites armes timbrées et pour devise Vive Dieu ! ».

« En la maîtresse vitre du grand autel sont deux écussons aux deux hauts soufflets du côté de l'Epistre. Au premier sont celles de Kerminihy, au second sont les mêmes, écartelées de celles du Plessis, qui sont d’argent au chaîne de sinople englanté d’or, chargé au canton dextre de deux haches d’armes de gueules adossées ; au bas de la dite vitre sont deux priants à genoux, soubs les auspices de saint Pierre, ayant pour leurs armes celles des seigneurs de Kerminihy ».

« En la chapelle de Saint-Jean, en la mesme esglise, du côté de l'Evangile, laquelle est prohibitive aux seigneurs du Kerminihy, sont aux plus hauts soufflets les armes de Kerminihy, plus au soufflet du côté de l'Evangile ; elles sont écartelées de celles du Plessis, et au soufflet et vis-à-vis, celles du Plessis sont écartelées de Querfloux, quy sont de gueules à trois croissants d'argent, et encore plus bas un pareil écusson que le précédent, et au bas de la dite vitre sont deux priants à genoux sous les auspices de saint Laurent, lesquels ont pour leurs armes celles du Plessis.

De plus, deux escabaux ou accoudoirs, l’un joignant la muraille costière de la dite chapelle, l’autre directement sous l’arcade au pied d’une tombe éminemment élevée enfeu ordinaire des seigneurs de Kerminihy, le dessus de la dite tombe et les côtés armoyés en bosse des armes de Querminihy et de ses aliances, lesdits écussons avec leurs supports ; de plus, trois tombes basses au côté de celle qui est eslevée, la dernière estante sous le marche-pied du grand autel.

Plus le sieur déclarant, à cause de la dite seigneurie du Querminihy est fondateur, premier et seul prééminencier après le Roy en la chapelle de Saint-Guénel, scittuée en la paroisse d'Elliant, où les armes des Kerminihy sont seules en toutes les vitres party de leurs aliances et en bosse dedans et hors l'esglise et au clocher, de plus a droit de litre et ceinture funèbre.

Plus le dict sieur à cause de la dite seigneurie, en possession immémoriale d’une tombe basse au milieu de l'esglise paroissiale de Tourc'h et d’avoir un écusson en la maîtresse vitre du côté de l'Evangile, qui est d'argeant à trois molettes de gueules écartelées et contre-écartelées des armes du Plessis et de Kerfloux, qui sont maisons alliées du Kerminihy.

En la paroisse de Kernével, en la chapelle du Rosaire, le sieur déclarant a un banc à deux accoudoirs armoyés en bosse des armes du Kerminihy et deux escussons en la vitre de la dite chapelle l’un d'argeant à trois molettes de gueules, l’autre de mesme, parti de gueules au lion d'argeant quy est le Combout.

Réserve expressément le dict sieur de faire mettre ses armes aux viltres ci devant déclarées.

A cause de laquelle terre et seigneurie de Kerminihy le dict sieur déclarant a droit de moyenne et basse juridiction et en possession immémoriale par lui et ses autheurs de l’avoir faict tenir et la faire exercer sur ses hommes vassaux et domaniers, par séneschal, procureur fiscal et greffier et de la faire servir par sergeant qu’il peut instituer à la dicte fin, laquelle juridiction se tient en l’auditoire du Roy, en la ville de Rosporden, au jour de jeudy, qui se transfère au lendemain, lors et quand il eschoit feste au dict jour, comme aussy a droit de faire faire par ses dicts officiers inventaire et provisions de mineurs dans les lieux et villages cy après mentionnés, et aussy de faire la cueillette des revenus de la dicte seigneurie de Querminihy par les vassaux d’icelle, lesquels doivent pour leurs bleds comble mesure de Rosporden » [Note : Le droit de juridiction, sans limitation, figure pour la première fois dans l’aveu de Pierre du Plessis (15 janvier 1575). La mention est reproduite dans les mêmes termes dans l'aveu d'Auffray du Chastel et de Renée de la Marche. Antoine-René Le Pappe ne réclamait que le droit de moyenne et basse justice ; il n’en jouit pas longtemps, ainsi qu’on le verra plus loin].

Les registres de la paroisse de Rosporden n’existent plus pour les années 1669 à 1673 ainsi qu’il a été dit précédemment. Mais à partir de l'année 1674, on y trouve de nouveau beaucoup de renseignements sur la famille Le Pappe. Voici quelques-uns des actes que j’ai relevés :

« Le 5 janvier 1674, à dix heures du matin, en la chapelle du manoir du Querminihy, du consentement, et adveu du Mr. illustrissime seigneur évêque de Cornouaille, fut célébré par Olivier du Louet, seigneur de la Rive, archidiacre de Poher, chanoine de Cornouaille, le mariage de messire François de Bois-Baudry, chevalier seigneur de Trans, domicilié au château de Trans, paroisse de Saint-Pierre-de-Trans, diocèse de Rennes, mineur autorisé, d’une part :

Et de damoiselle Renée Le Pappe, fille mineure de deffunct Marc Anthoine Le Pappe, escuier et dame Ursule L'Honoré, seigneur et dame de Bois-de-la-Haye, âgée de 16 ans, demeurant avec sa mère et tutrice au manoir de Querminihy, paroisse d'Elliant, diocèse de Quimper en Cornouaille, d’autre part, etc. ».

De nombreuses signatures suivent celles des mariés : Renée Le Pappe, François de Bois-Baudry, Ursule l'Honoré, Jeanne Le Pappe, Geneviève de Rosily, Catherine Pegasse, Marianne de Coëtlogon, Marie de Tremic, Françoise Leflo, Guillemette-Anne de Kersulgar, Marie-Elisabeth Le Livec, Constance Morice, Yolande-Françoise de la Marche, Marguerite Guillemin, Françoise Taniou, Jeanne-Anne de Tremic, Mené Guéguen, Mathurin de Rosily, François de Tremic, Guy de Kersulgar, Jean de Tremic, Joseph-Corentin Le Pappe, Marc-Anthoine Le Pappe, Antoine-René Le Pappe, Germain-Claude Le Pappe, Guillaume de Kerguélen, Gabriely Corran de Cleguennec, Charles-François de Bois-Baudry, du Kergoet de la Jumellays, Charles Dondel sénéchal, G. Changeon, Rodolphe Guillou Prêtre, Changeon, Guillemin, Denis Le Flohic, recteur de Tourc'h, Olivier du Louet.

Le 20 mars 1674, Esc. Germain-Claude Le Pappe, seigneur de Coatlespel, est parrain de Germain Calloch, fils du métayer de Kerminihy.

Le 18 août, à l’enterrement de Thomas Cantin, âgé de 72 ans, du manoir de Kerminihy furent présents, sa veuve Mélanie Floch et damoiselle Françoise Le Pape qui, interpellées, ont déclaré ne savoir signer.

Le 4 novembre 1676, baptême dans la chapelle de Kerminihy par Denis Leflohic, prêtre, recteur de Tourc'h, de François, fils naturel et légitime d'escuier Anthoine-René Le Pappe et dame Marie-Elisabeth Le Livec, seigneur et dame de Kerminihy. Les parrain et marraine ont été Illustrissime et Révérendissime Messire François de Coetlogon, évêque de Quimper et comte de Cornouaille, et dame Ursule de l'Honoré, dame du Bois-de-la-Haye.

A la suite des signatures du parrain et de la marraine se trouvent celles de personnes ayant, pour la plupart, signé au mariage du 5 février 1674.

Jean-Baptiste, enfant d'Antoine-René Le Pappe, né le 31 juillet 1677 et baptisé à la maison à cause de son infirmité, est présenté à l’église le 24 octobre suivant, par deux pauvres gens.

Le 4 janvier 1678, un enfant né à la métairie de Kery a pour marraine Marie-Elisabeth Le Livec, dame du Kerminihy et pour parrain Messire Denis Leflohic, recteur de Tourc'h.

Le 29 septembre 1678 mourut Ursule l'Honoré, dame du Bois de la Haye et du Kerminihy.

Le 20 août 1679, Renée Le Pappe et Joseph Le Pappe, nés les 31 mai 1677 et 4 août 1678, baptisés à la maison par le recteur de Tourc'h, ont reçu à l’église de Rosporden, avec permission de l’évêque, la cérémonie du baptême, par noble et discret Missire Jean Le Livec, prêtre, chanoine et théologal de Quimper et docteur en théologie, à la prière de noble et discret Missire Nicolas du Gourvinec, seigneur du Buzit, prêtre et recteur d'Elliant. Les parrains et marraines ont été : 1° pour Renée, escuier Bernard Crouézé, seigneur de Kervily  et de Coetaven et dame Renée Le Pappe, dame marquise de Trans [Note : Je remarque parmi les signatures celle de Renée Le Pappe, qui s’est transformée en atteignant les dimensions les plus aristocratiques] ; 2° pour Joseph, escuier Joseph Le Pappe, seigneur de Kermorvan, et dame Jeanne Pegasse, dame de Kervily.

Le 13 novembre 1679, baptême de Marie-Anne Le Pappe, née le 6 novembre, présentée à l’église par deux pauvres gens. Le père et la mère signent sur le registre.

Le 29 octobre 1680, Bonaventure-Olivier Le Pappe, né le 27 mai, après ondoiement à la maison, a été baptisé par noble et discret Missire François Amice, chanoine de Cornouaille, a été recteur de Kerfeunteun (sic). Le parrain noble et discret Missire Jean Le Livec, docteur en Sorbonne et théologue de Cornouaille, et la marraine dame Olive de Coetnours, dame de Coetlespel (femme de Germain-Claude Le Pappe).

Parmi les signatures figurent quelques nouveaux noms de famille : Jean de Landanet, seigneur de Coetglevarec, Joseph Corentin Cléguennec, René-François Geffroy, Joseph Geffroy. Cinq ecclésiastiques signent René Guéguen, prêtre, Rodolphe le Branquet, prêtre, Rodolphe Guilloux, prêtre, François Amice, Nicolas de Gourvennec, recteur d'Ellyant.

En 1680, la révolte du papier timbré avait été étouffée, et les cloches de Tourc'h furent rendues à la paroisse. A cette occasion, un acte a été dressé ; je le reproduis : « Décembre 1680. Et a été nommé par nobles gents, Guillaume Changeon, seigneur de Nevars, sénéchal de la juridiction de Coetheloret et autres juridictions, Goarlot, Coetcanton, Kerminihy et juridiction royale, cappitaine de la ville de Rosporden, et par dame Elisabeth du Livec, dame du Kerminihy, la maraine et aultres lieux, qui ont signé par leurs respects, et les soussignants présents. Et ce même jour ont été les cloches rendues de cette église paroissiale, après avoir été enlevées d’icelle, et rendues au château de Conq.. par cause des troubles de la paroisse et battement du tocsin de son. Signé Marie-Elisabeth du Livec, Changeon, Callomant (?), Kerguennec, Yves Lebail, prêtre, Henry Pompoul, prêtre et recteur ». Cette cloche n’existe plus.

Pierre Le Pappe, né le 16 août, ondoyé le 25, a été baptisé en 1685 seulement.

Le 27 août 1682, René-Antoine Le Pappe, seigneur de Kerminihy, et Claude Legal!, femme de Maurice Glémarec, notaire royal, sont parrain et marraine de Maurice Morvezen, du village de Quélédern.

Le 25 décembre 1682, baptême d’un fils de Pierre Hily, du manoir de Penhual ; les parrain et marraine ont été vénérable et discret Messire François Huet, prêtre et chapelain de Mr. du Kerminihy et dame Elisabeth-Marie du Livec, dame dudit Kerminihy.

Ursule Le Pappe, née le 29 avril 1684, baptisée le 26, a pour parrain et marraine ses frère et soeur, escuier François et damoiselle Renée les Pappes (sic), qui ne savent signer, assistés de Messire François Pérès, prêtre chapelain du dit Kerminihy et de damoiselle Claude Hernous. Elle meurt le 21 juillet suivant et est inhumée en « une tombe appartenant audit seigneur de Kerminihy, dans le grand choeur de l’église trefviale du dit Rosporden, en présence des mêmes témoins qu’à sa naissance ».

Le 12 février 1685, Messire Nicolas du Gourvinec, seigneur du Buzit, prêtre et recteur de la paroisse d'Eslian, avec permission de Messire l’abbé de Coetlogon, grand vicaire et official de Quimper, après proclamation des bancs en les paroisses de Saint-Colomban et Saint-Michel de Quimperlé, marie dans la chapelle du manoir de Messire Joseph-Corentin de Cleguennec, chevalier, seigneur de Kermadehoy et, dame Jeanne-Marie Pegasse, dame de Kernabat. Signent avec les mariés Françoise de Loenan, Jeanne Pegasse, Marie-Elisabeth Le Livec, Louise Le Livec, René-François de la Jumelaye, Joseph Geffroy, Antoine-René Le Pappe, M. Legac, Puymoret, prêtre, Mathurin Cadoret, prêtre, Nicolas du Gourvinec, seigneur du Buzit, recteur d'Elliant.

Le 30 juillet 1685, vénérable et discret Messire Jean Le Livec, docteur en théologie de la maison de Navarre et théologue de la cathédrale de Quimper, baptise dans la chapelle de la maison du Kerminihy deux enfants Le Pappe, à savoir :

Pierre, né le 16 août 1682 et ondoyé le 25 du même mois, ayant pour parrain et marraine Joseph Geffroy, seigneur du Rosiou, et dame Perrine Pegasse, épouse et compagne d'escuier René le Flo, seigneur de Branho, conseiller du Roy et son sénéchal et premier magistrat au siège royal de Quimperlay.

Louise-Marthe, née le 19 et ondoyée le 22 avril 1685, ayant pour parrain Messire Germain-Claude Le Pappe, seigneur de Coatlespel, et pour marraine dame Louise Le Livec, épouse du dit seigneur du Rosiou. Suivent les signatures : Perrine Pegasse, Joseph Geffroy, Louise Le Livec, Germain-Claude Le Pappe, Anne Pegasse, Marie-Elisabeth Le Livec, Olive de Coetnours, Joseph-Corentin de Cleguennec, Anne de Coetnours, Catherine de la Houlle, Jean de Landanet, René-François de la Jumellaye, M. Le Gac, François Blot, Changeon, Antoine-René Le Pappe, Rodolphe Guillou, prêtre, René Guéguen, prêtre, René Lemaguet, prêtre, Mathurin Cadoret, prêtre, Jean Le Livec, chanoine Nicolas du Gourvinec, recteur d'Ellyant.

Le 12 janvier 1687, Marc-Antoine Le Pappe a pour parrain et marraine Louis Thibaut, de Ruvey, trêve de Cadol, paroisse de Melgven, et Catherine Dornic, de Rosporden, qui ne savent signer. La seule signature est celle de Claude Hernou.

13 juillet 1687, inhumation de Louise Le Pappe, décédée le 12, à l’âge de 2 ans et 3 mois, en présence de Louise Paté, gouvernante du dit Kerminihy et plusieurs autres.

22 août 1687, noble François, fils d'Antoine-René Le Pappe, signe comme parrain l'acte de baptême du fils d’un fermier de la métairie de Kerminihy.

L’acte de baptême de Bernard Le Pappe, né le 5 avril 1688, est signé par Claude Hernou, à défaut des parrain et marraine qui ne savent signer.

31 mars 1689, Antoine-René Le Pappe signe comme parrain l’acte de baptême d’un fils de son métayer de Kerminihy.

Angélique Le Pappe, née le 13 avril 1689, a pour parrain Joseph-Corentin Le Pappe et pour marraine Marie-Anne Le Pappe, qui a déclaré ne savoir signer (elle a 10 ans). L’acte est signé par trois prêtres, dont Alain Guillou, prédicateur esté (sic) d'Elliant.

Le 9 octobre 1689, demoiselle Renée Le Pappe signe comme marraine au baptême de Renée Quéré, de Rosporden. Le parrain honorable homme René Le Broyer, marchand à Rosporden.

Le 14 décembre suivant Guillaume-Marie, fils de Jean Lemeur, du manoir de Kerrouriou, a pour marraine Marie-Elisabeth Le Livec, dame du Kerminihy, et pour parrain noble homme Guillaume Changeon, seigneur de Ménébris, advocat en la cour et capitaine pour la milice de Rosporden.

Le 22 décembre suivant, Marie-Anne, fille de noble homme François 0llivier, seigneur du Poulduff, et de Jeanne Taniou, est baptisée par Missire Jean-Louis de Kervenozaël, recteur d'Elyant L’acte est signé par le parrain noble homme Guillaume Changeon et.... par la marraine Marie-Anne de Boisguennech (Boisguéhenneuc), dame de Landanet, et par plusieurs personnes, entre autres par Antoine-René Le Pappe, de Kerminihy.

Anne-Hyacinthe Le Pappe, baptisée le 27 juillet 1690, a pour parrain et marraine deux personnages inconnus qui ne savent signer.

Le 29 juin 1691, Missire Guillaume le Cotten, prêtre de la paroisse d'Elyant, et dame Marie-Anne Le Pappe sont parrain et marraine d'Anne Perrine, fille de Jacques Lemasson, de la métairie du manoir de Kerminihy.

Le 6 mars 1692, la même est marraine avec Louis Tanion, advocat en la cour, d’un fils de Pierre Hily, du manoir de Penbual. Le baptême est fait par noble et discret Missire Jean-Louis de Kervenozael, recteur d'Elyant.

Hyacinthe Le Pappe, né le 1er juillet 1692 au manoir de Kerminihy, est baptisé le 6 par le recteur d'Elliant. Le parrain est escuier Le Gac, seigneur de Mesguen, faisant pour escuier Yves-Bonaventure Geffroy, seigneur du Pencleu ; la marraine dame Françoise Le Pappe, damoiselle de Coatlespel.

Le 17 mars 1693, décès d'Angélique, âgée d’environ 4 ans (aucune signature).

A Elliant, le 8 octobre 1693, Antoine-René Le Pappe est parrain de Marc-Antoine, fils de Messire Sebert de Landanet et de Marie-Anne du Boisguehenneuc, seigneur et dame de Landanet. La marraine est dame Marguerite de la Roche-Rousse, dame de Coetaudon.

Gertrude, le 15ème et dernier enfant d'Antoine-René Le Pappe et d'Elisabeth Le Livec, est baptisée le 5 novembre 1693. Les parrain et marraine ne savent pas signer.

A la date du 7 mars 1694 se trouve encore, et pour la dernière fois, sur les registres de la paroisse de Rosporden, un mariage mentionné comme décrété de justice par la juridiction de Kerminihy, qui ne tarda pas à être supprimée.

Le 13 avril 1695, « noble enfant Marc-Antoine Le Pappe et damoiselle Anne Poullain de Kerminihy » sont parrain et marraine d’un fils de Jacques Lemasson, de la métairie du Kerminihy. Le parrain, âgé de 8 ans, ne sait pas signer.

Le 27 mai 1696, décès de damoiselle Gertrude Le Pappe, âgée d’environ 2 ans, fille de deffunct Anthoine-René Le Pappe. Cet acte, qui porte entre autres les signatures de deux métayers Lemasson, Hily, etc., nous apprend la mort d'Antoine-René, mort que d’autres documents provenant des dossiers Coetlosquet aux Archives du Finistère, doivent faire reporter à 1694. Il en résulte en effet, qu'Elisabeth Le Livec était veuve le 23 juillet 1694, mais ne pouvait l’être que depuis fort peu de temps.

Une flotte anglaise avait menacé Brest d’un débarquement, qui eut lieu en effet à Camaret le 17 juin 1694, mais qui échoua piteusement.

Le ban et l’arrière-ban de la noblesse avaient été convoqués, et le « Rôle des Compagnies de l’évêché de Cornouaille », qui ont paru à la Revue du lundi 7 juin, passée par M. le maréchal de Vauban, constate la présence de onze compagnies, comprenant 11 capitaines, 32 officiers, 30 brigadiers et 191 cavaliers. L’état-major se composait du colonel et de 6 officiers.

Antoine-René Le Pappe, qui était en 1679 gendarme de la garde du Roy n’était plus compris dans les cadres de l'armée régulière, d’après les nombreuses mentions de sa présence à Rosporden que l’on trouve dans les registres paroissiaux et il figure sur le rôle de la 9ème compagnie, commandée par M. du Couédic de Kergoualer. Il mourut donc entre le 7 juin et 23 juillet.

Le lieutenant du Bois-de-la-Baye. — Un des fils d'Antoine René, certainement l’aîné de François qui n’avait que 19 ans, nous est connu seulement par les trois pièces suivantes provenant des dossiers Coetlosquet, qui se rapportent à de fréquents passages à Quimper de détachements allant, les uns se concentrer à Brest, en vue d’un débarquement en Irlande ; les autres, renforcer l’armée royale en Flandre.

La première est la copie d’une feuille de route portant « Fait à Versailles, le 18 novembre 1695. Signé Louis et plus bas Letellier. — Nous, syndics de la ville de Quimper, certifions la copie de route cy dessus véritable ayant été levée sur le registre de la communauté en la dite ville [Note : A cette même date, on constate sur le registre le passage d’un détachement de 15 hommes venant de Blesle (Auvergne), ayant à faire un voyage de 53 jours pour rejoindre, au château de Brest, la compagnie du chevalier du Terrage au régiment de Navarre], et qu’en conséquence de la dite route, nous aurions fait donner le logement et l’étape à M. du Bois-de-la-Haye, lieutenant au régiment d’infanterie de Bourbon et à sa Reveüe, le cinquiesme jour de febvrier dernier et partit le sixiesme du même mois pour continuer sa route, et que le seigneur du Bois-de-la-Haye n’est point marié, et est fils de Mme du Querminihy. Fait à Quimper, ce 26 mai 1696. Signé Malherbe, syndic ».

La feuille de route spécifie que les hommes de recrues seront conduits par le lieutenant et un sergent, de Quimper à Maubeuge, où ils rejoindront la compagnie de Chateauneuf. A cette même date, on constate sur le registre le passage d’un détachement de 15 hommes venant de Blesle (Auvergne), ayant à faire un voyage de 53 jours pour rejoindre, au château de Brest, la campagnie du chevalier du Terrage au régiment de Navarre, du régiment de Bourbon, et elle indique avec les étapes les villes où il y aura séjour. Cette pièce m’a paru intéressante à reproduire :

Gouvernement de Bretagne. — Quimper-Corentin, Rosporden, Quimperlé (séjour), Hennebont, Auray, Vannes (séjour), Ambon, Muzillac-Herbignac (séjour), Savenay, Couëron, Nantes (séjour), Ancenis.

Gouvernement de Tours. — Ingrandes, Angers (séjour), Saint-Mathurin, Saumur (séjour), la Chapelle-Blanche, Langeais, Tours (séjour), Amboise.

Gouvernement d'Orléans. — Blois, Beaugency, Orléans (séjour), Artenay, Angerville-la-garce.

Gouvernement de Paris. — Etampes (séjour), Chartres (Maintenant Arpajon), Corbeil, Chaulne, Meaux (séjour).

Gouvernement de Soissons. — La Ferté-Milon, Soissons, Laon (séjour), Marle, Guise.

Gouvernement du Hainault. — Landrecies, Maubeuge, où ils joindront la dite compagnie.

On remarquera avec quel soin cet itinéraire évite la traversée de Paris. Sa longueur est de 750 kilomètres, comprenant 37 étapes d’environ 20 kilomètres, mais très inégales, et onze séjours. C’est en somme un voyage à pied d’une durée de 48 jours en hiver, imposé aux hommes et à leurs chefs pour fournir quinze recrues à l’armée de Flandre. Dieu sait en quel état étaient alors les routes, et dans lequel état étaient les malheureuses recrues à leur arrivée à Maubeuge !

Le lieutenant du Bois-de-la-Haye remplit la mission dont il était chargé, et servait à la compagnie de Rasteau du régiment de Bourbon-Infanterie, le 12 novembre 1696, d’après la troisième pièce délivrée par le marquis de Vieuxpont, colonel de son régiment, « certificat pour lui servir en cas de besoin ».

Ce fils de « la dame du Querminihy », dont il n’est plus trouvé aucune trace ne figure dans aucun des actes de partage de la succession d'Antoine-René Le Pappe. Il est donc décédé peu après 1696, et on peut supposer que les fatigues du voyage ont pu contribuer à sa mort prématurée.

Elisabeth Le Livec. — Antoine-René Le Pappe laissait sa veuve dans une situation de fortune fort embarrassée. Des seize enfants issus de leur mariage, il en restait une dizaine à la charge de leur mère, et aucun n’était en mesure de lui venir en aide [Note : Antoine-René Le Pappe avait eu treize fils et trois filles, et il n’eut aucun petit-fils de son nom]. Le service à l’armée était très onéreux pour les gentilshommes ; en outre, la situation financière n’avait pu que s’aggraver par l’achat du manoir de Kerouriou (aujourd’hui Kerriou) [Note : La surface totale de cette terre, qui comprenait Kereven, maintenant Kerhuilet, était de 220 journaux, plus de 100 hectares] qui lui avait été vendu par le baron de Kerveno. Le Pappe avait également fait des dépenses considérables à son habitation et, tout en conservant le bâtiment principal, le donjon et la chapelle, il avait reconstruit, un autre corps de logis fermant la cour au couchant. Ce bâtiment, qui a 42 mètres de longueur, est tout en pierre de taille d’un appareil soigné, mais très simple d’ornementation en raison de sa destination. Les mansardes également en granit avec frontons alternativement triangulaires et circulaires, rappellent celles de la Gendarmerie et de la Préfecture de Quimper. Au XVIIIème siècle, il est appelé le bâtiment neuf ; actuellement il est toujours en bon état, seul reste intact de l’ancien château.

Marie-Elisabeth Le Livec avait encore d’autres sujets de préoccupation. Ses armes avaient bien été enregistrées à l'Armorial général, le 20 novembre 1696 ; six membres de la famille Le Pappe y figuraient également, portant tous les mêmes armes, la corneille percée d’une flèche [Note : Renée Le Pappe, veuve François de Boisbaudry, écuyer ; Mathurin-René Le Pappe, seigneur de Kermorvan ; Olive de Coetnours, veuve Germain-Claude Le Pappe, seigneur de Kerespers ; Polycarpe Le Pappe, seigneur du Liscoet et Claude du Poulpry, sa femme ; Jean-Baptiste Le Pappe, escuyer seigneur du Querminihy ; Noël Le Pappe, seigneur de la Villerabel] ; mais cette inscription n’était pas une présomption de noblesse, et la famille Le Pappe fut poursuivie pour usurpation. Les droits de fief et de juridiction invoqués par Antoine-René Le Pappe dans sa déclaration du 1er octobre 1679 avaient été contestés par les commissaires du Roi, renouvelant les arguments de l’arrêt rendu sur l'aveu d'Auffray du Chastel de 1619.

En 1685, par une sentence du 20 janvier, Le Pappe avait été débouté de ses droits de fief, diligence et mouvance sur les villages de Penvern. Larlan et Botdaniel ; mais sur appel, il fut maintenu dans ses droits sur ces villages et dans le droit de percevoir les rentes d’icelles.

Un autre arrêt de 1684 le débouta également pour le village de Kerlivinen, mais le maintint pour Mengleuz, à charge de bornement dans les deux mois.

Huit ans plus tard, par un arrêt de la cour du 16 janvier 1692, le Roy est maintenu dans la mouvance de Keranmoalic, Tyancaroff, etc.

Par un autre arrêt du même jour, Le Pappe est débouté de son droit de moyenne et basse justice, faute d’acte justifiant, sa possession depuis 1575, et ne pouvant représenter les actes d’accord passés à cet effet le 23 février 1619.

« L’exercice continu de cette juridiction qu’il invoque n’est pas reconnu suffisant pour en justifier le maintien ».

Enfin, le 15 juillet 1693, sur appel il fut définitivement débouté du droit de moyenne justice pour le fief de Querminihy et de la mouvance du lieu et terre de Keranguen. En même temps, il fut condamné pour usurpation de noblesse à 500 livres d’amende.

La juridiction cessa donc de fonctionner : sa dernière manifestation sur les registres de la trêve de Rosporden est à la date du 7 février 1694, pour le mariage d'Alain Legall et d'Hélène Gourmelen, « décrété de justice par la juridiction de Kerminihy ».

Mais, sans attendre la solution définitive de ces longs débats, Le Pappe, pour obéir aux injonctions des intendants, tout en protestant qu’il avait toujours joui de la qualité de noble et en faisant réserve de ses droits, avait été obligé de payer, le 1er juillet 1693, les sommes qui lui étaient réclamées comme héritier non noble de sa mère, Ursule l'Honoré.

Ces sommes s’élevaient à un chiffre élevé :

Manoir de Kerminihy, pour la métairie louée : 230 livres.

La censive du moulin de Roudouglas, en Kernevel (juridiction de Goarlot) : 120 livres.

Lieu noble de Penbohal (Penbuel) : 114 livres [Note : Sur le registre de la paroisse de Rosporden est mentionné, à la date du 7 juin 1697, le décès à la métairie noble de Penbuel, de Buquet d'Arnouville, directeur général des domaines du Roy en l'évêché de Cornouaille. Y était-il appelé par ses fonctions à l’occasion du règlement de la succession d'Antoine-René Le Pape ?].

Lieu noble de Kervinedel : 30 livres.

Le moulin de Kervinedel : 60 livres.

Lieu noble de Keroué, en Scaër (juridiction de Concq) : 18 livres.

Deux fiefs sur terres nobles en Elliant…

Après la mort de son mari, Elisabeth Le Livec eut à payer des sommes considérables, d’abord pour Keroriou, son moulin et dépendances ; ensuite les droits de fief dus par son mari, puis par la succession de son mari pour Kerminihy, Penbohal, Kervinedel, Keroué, moulin de Mao, dans les paroisses d'Elliant, Tourc'h et Scaër ; enfin, en 1704, pour le moulin de Roudouglas et le lieu de Nevars-Huellaff, sous la foy et juridiction de Goarlot.

Je ne saurais affirmer que cette énumération soit complète, mais la veuve avait encore de graves sujets de préoccupation qui lui étaient communs avec les autres membres de sa famille. Les Le Pappe ne pouvaient accepter sans protester les décisions qui les privaient des honneurs et des privilèges de la noblesse, et j’ai retrouvé la trace de plusieurs réclamations qu’ils firent et renouvelèrent.

Requête de Polycarpe Le Pappe, seigneur de Liscouet, en Lanarvilly, demandant le rétablissement dans la qualité de noble, pour lui et pour Geneviève de Rosily, veuve de Joseph-Corentin Le Pappe, sieur de Kermorvan, au nom et comme fondée de pouvoirs de Mathurin-René Le Pappe, son fils, requête à laquelle s’associent Marie-Elisabeth Le Livec, veuve d'Antoine-René Pappe et Jean-Baptiste, Le Pappe, seigneur de Kerminihy, son fils.

Protestation signée par Jean-Baptiste Le Pappe, seigneur de Kerminihy, procureur du Roi de la sénéchaussée et siège présidial de Quimper, tant en son nom personnel que comme représentant Mathurin Le Pappe, seigneur de Kermorvan, Marie de Poulpry, veuve de Polycarpe Le Pappe, tutrice de ses enfants mineurs et Marie Elisabeth Le Livec, aussi tutrice de ses enfants.

Ces démarches et celles faites par d’autres Le Pappe n’eurent aucun résultat, et Jean-Baptiste fut chargé par ses parents de demander la décharge de l’amende de 4.000 livres à la quelle ils avaient été condamnés séparément. Cette décharge ne fut pas obtenue, et ils durent se borner à demander la restitution des papiers qu’ils avaient déposés. Cette fois ils eurent satisfaction, sauf pour trois pièces reconnues fausses. Un sieur Audigier reconnut les avoir fabriquées [Note : Transaction entre Jean Le Pappe et Christophe Toulgoët, le 3 août 1522 ; transaction entre Jean Le Pappe et François Le Pappe, 29 octobre 1554 ; contrat de mariage de François Le Pappe et Catherine Le Gat, 18 janvier 1598. Ce dernier était père de Marc-Antoine Le Pappe, acquéreur de Kerminihy].

Olive de Coetnours veuve de Germain Claude Le Pappe seigneur de Coetlespel fut l’objet de poursuites analogues.

Jean-Baptiste Le Pappe, qui était depuis entré dans la magistrature, paraît avoir été l’agent le plus actif de ces réclamations faites dans l’intérêt de toute la famille. Dans plusieurs lettres, qui ont été conservées, le sr. de Lescoat s’adresse toujours à lui « mon cher et honoré neveu ». Ces lettres portent un cachet aux armes des le Pappe et des Coetnours (massacre de cerf).

Pendant les années qui suivirent la mort d'Anthoine René les registres de la paroisse de Rosporden ne fournissent que peu de renseignements.

Le 1er septembre 1700, Esc. Pierre Le Pappe et Anne Poullain dame de Villeroy sont parrain et marraine de Jeanne, fille de Pierre Hily du manoir de Penbual.

Marie-Anne Le Pappe est marraine en 1701 de la fille d’un charbonnier « à présent au bois du Kerminihy » et un peu plus tard de Toussaint, fils de Louis Guénézet. Le parrain est Guillaume Changeon advocat en la cour, sr. de Menebriz.

Le 1er septembre 1710 eut lieu à Elliant un baptême de cloches dont je reproduis l’acte textuellement : « Ce jour premier de septembre, mil sept cent dix ont été bénittes et nommé deux cloches, l’une paissante de six cent quinze livres nommé par Messire Sébastien Mahé, chevalier, seigneur de Kermorvan et dame Anne de la Roche dame de Kerstrat, parrain et marraine, et l’autre paise deux cent soixante douze livres nommé par Messire Louis-René de la Marche, chef de nom et d’armes et dame Anne-Marie Le Livec dame du Kerminihy. La première pour servir à la chapelle du Rosaire (au bourg d'Elliant) nommé Marie-Anne Sébastienne et la seconde pour servir à la chapelle de Saint Guennel [Note : Chapelle prohibitive aux seigneurs de Kerminihy] nommé Anne-Louise Guenelle. La bénédiction faite par Missire Germain Floch, prêtre, par permission de l'Evêque en présence de noble et V. Missire Jean-Louis de Kervenozaël sr. Recteur d'Esliant et des Soub., Anne de la Roche, Anne-Marie Le Livec du Kerminihy, Louis-René de la Marche, Sébastien-Maurice Mahé de Kermorvan, de Kerguern Kermorvan, Anne-Josephe de Treanna, Suzanne Mahé, Joseph Treouret, Kermorvan Mahé le vieux, de Landanet, du Lezlo Le Pappe, Guillaume Cutuillic recteur de Tourc'h, René Le Flao, prêtre, curé d'Elyant, Barbé, Philippe, curé de Rosporden, Leroux, Frances, Kervenozaël recteur d'Ellyan, Germain Floch, prêtre ».

Ces cloches n’existent plus.

Deux mois plus tard eut lieu le baptême de la grande cloche de l'Eglise de Rosporden ; voici l'acte qui a été dressé de cette cérémonie : « Le septième de décembre mil sept cent dix a reçu les cérémonies de l'Eglise la grande cloche de l'Eglise de Rosporden, pesante quatorze cent livres fondue par délibération du général de la dite ville a été nommée Anne-Jan-Baptiste par Maistre [Note : Le mot Maistre surcharge Messire rayé. Pol de Courcy suppose que Jean Baptiste a été anobli en 1700, ce que contredisent les démarches faites par lui après cette date. Cet anoblissement a du être une conséquence des charges qu’il a occupées au présidial de Quimper vers 1710] Jan-Baptiste Le Pappe, seigneur de Kerminihy procureur du Roy au présidial de la ville de Quimper, et par dame Anne Riou, dame du Guilly Sénéchale de Concarneau. Ladite administration faite et célébrée par Messire Louis Philippe, curé de Rosporden, par permission de Monseigneur de Quimper. Ont assisté à cette célébration les soussignants et autres : Anne Riou du Guilly, J. B. Le Pappe du Kerminihy procureur au présidial de Quimper, Kergoat Leguillou, capitaine de Rosporden, Villeroy Marchand, lieutenant de la compagnie de Rosporden, Halnay, Louise Charlot du Guilly, La Kergoat Leguillou, Callando, La Poulbran, Jeanne-Françoise Halnay, Jeanne Callando, Lenaour prêtre, Philippe curé ».

Cette cloche n’existe plus.

La liquidation de la succession d'Anthoine René devait être longue et laborieuse, d’autant plus que le dernier des enfants n’était pas encore majeur. Aussi longtemps que sa veuve vécut, la fortune parait être restée indivise entre ses mains, mais elle avait confié à son fils aîné Jean Baptiste, la gestion de ses affaires, attendu son infirmité et impossibilité d’agir.

Le 10 janvier 1714, Dame Elisabeth Le Livec, dame douairière de Kerminihy, veuve d'Escuyer Anthoine René Le Pape, vivant seigneur du Kerminihy mourut et le 18 janvier suivant eut lieu la levée des scellés. Des 16 enfants qu’elle avait eus, furent présents seulement, 5 fils et 2 filles, à savoir : Jean Baptiste Le Pappe, Bonaventure Le Pappe, bachelier de Sorbonne, promoteur de Cornouaille, Hyacinthe Le Pappe, Pierre sr. de Lestauh, Marc Antoine Le Pappe sr. du Bois de la Haye, Damoiselle Marie Anne Le Pappe du Kerminihy, Anne Hyacinthe Le Pappe émancipée de Justice.

Jean Baptiste Le Pappe né le 24 octobre 1677, avait peut-être commencé, mais certainement terminé ses études à Paris. Il y obtint le 21 juillet 1695 le grade de bachelier et en 1697 le certificat utriusque juris. En 1704 il fut nommé substitut du procureur du Roy au siège présidial de Quimper en remplacement de maistre Jan de Livec sr. de Kerlivain Conseiller du Roy et président à ce même présidial. A cette occasion il dut présenter un certificat de non-parenté avec les autres membres du siège. Il devint par la suite en 1710 Conseiller du Roy et procureur général en la sénéchaussée et siège présidial de Quimper. Peu après il épousa Anne Marie Le Livec fille de son prédécesseur et sa cousine germaine.

En raison de ses fonctions, il eut, le 20 février 1730, à notifier à Monsieur de Ploeuc, Evêque de Quimper d’avoir à présenter sans délai « le dénombrement de son évêché faute de quoy toutes les suites requises et saisie de son temporal seraient immédiatement faites ». Six jours seulement s’étaient écoulés depuis que Hilarion de Bec-de-lièvre procureur de l'Evêque avait prêté au Roi en la chambre des comptes de Nantes le serment demandé pour le temporal de son Evêché, et que l’arrêt avait été rendu par la Cour.

Cette signification si hâtive n’est qu’un épisode de la lutte engagée à Quimper entre les Juridictions Royale et Episcopale (Reguaires) (Registre des Requêtes ordinaires de l’hôtel du Roy).

Un procès, qui lui avait été intenté à raison de ses fonctions, lui donna pendant de longues années de grandes préoccupations. Un sr. Auvril lieutenant général de police à Brest avait à plusieurs reprises reçu des reproches de ses chefs, reproches qui lui étaient transmis par l’intermédiaire de Le Pappe. C’est à ce dernier qu’il s’en prit en l’assignant et le prenant à partie « à raison de l’indigne vexation que le dit Le Pappe a personnellement fait souffrir au dit A., que faute par le dit Le Pappe d’avoir nommé le prétendu dénonciateur, condamner le dit Le Pappe à 120.000 livres de dommages-intérêts ».

Un premier arrêt du 17 septembre 1726, tout en écartant la demande, n’avait pas donné complète satisfaction à Le Pappe. Le sr. A. non découragé, engagea une nouvelle action, et c’est seulement le 8 octobre 1735 qu’un arrêt mit définitivement Le Pappe à l’abri de toutes les poursuites faites contre lui. Sans contester au demandeur le droit de prise à partie, cet arrêt déclare que, si cette action n’est pas impossible, elle ne peut être exercée contre Le Pappe qui s’est toujours conformé aux ordres des magistrats ses supérieurs et aux arrêts du Parlement de Bretagne.

La correspondance de Le Pappe fait voir qu’il n’était pas absolument tranquille, il se demandait s’il n’y aurait pas encore quelque formalité à accomplir. Une lettre de son procureur à Paris le rassura complètement.

J.-B. Le Pappe survécut peu à cette satisfaction, car il mourut à son domicile de Quimper place Terre au Duc, le 14 novembre 1735 et fut enterré le lendemain dans la chapelle du Paradis en l’église Saint-Mathieu. « Ont assisté à cet enterrement les MM. du Présidial et autres ».

Il ne laissait qu’une fille Elisabeth Renée qualifiée « riche héritière » qui avait épousé à Saint-Mathieu de Quimper le 22 août 1731. Messire Michel Yves Marie de Coetlosket, chevalier seigneur de Keranot [Note : Michel de Coetlosquet était veuf], du Hély, etc. Voici les signatures qui suivent l’acte de ce. mariage célébré par Alain do Coettosket, chanoine de l'Eglise Royale de Morlaix :

S. Renée Le Pappe, Michel du Coetlosket, Anne Marie Monot du Coetlosket, Jean Baptiste Le Pappe du Kerminihy, procureur du Roy de Quimper, Anne Marie Le Livec du Kerminihy, Du Coetlosquet de Gouendour, de Quelen de Keraret, Marie Anne Le Pappe de Rosily, Mauricette Cabon du Tymeauter, Anne Hyacinthe Le Pappe de Kerfort, Anne de Kerguelen de Kerlivain, Marie Ursule Goueznou de Tresurin, Thomas Richer, de Rosily de la Tour, De Mathezon de Kerpeoch, Bois de la Haye Le Pappe, de la Marche de Kerfort, de Moelieu Goandour, Anne Mahé, Anne Richer, Piriou Recteur, du Coetlosquet, chanoine de Morlaix.

Après la mort de son mari, Anne Le Livec renonça par acte du 27 février 1736 au bénéfice de la communauté qui avait existé entre elle et son mari et demanda seulement son trousseau. Sa fille n’y faisant pas d’objections, il lui fut adjugé 500 livres pour habits de deuil et 1484 livres pour trousseau, en effets ou en argent. Les seules difficultés vinrent du côté de M. de Coetlosket, qui refusa à sa femme héritière bénéficiaire, de suivre à la succession de son père. Elle fut obligée de se faire autoriser de justice.

Le 24 janvier 1757 elle était veuve et procéda à la liquidation de la succession de son mari comme tutrice de son fils et de ses deux filles.

L’acte de partage des biens de la succession d'Antoine-René Le Pappe et de sa femme n’a pas été retrouvé, mais un acte du 13 janvier 1714, donne l’énumération des personnes intéressées à cette succession, c’est-à-dire de leur sept enfants : Jean-Baptiste, Bonaventure, Pierre, Marc-Antoine, Hyacinthe, damoiselle Marie-Anne, damoiselle Anne-Hyacinthe. mineure émancipée de justice.

C’est entre deux de ses enfants Pierre et Anne-Hyacinthe que fut partagée la terre de Kerminihy, les cinq autres reçurent leur part héréditaire en vertu d’arrangements qui ne sont pas connus.

Jean-Baptiste, dont il a été question précédemment ne posséda personnellement aucune terre et il n’ajouta généralement à son nom que celui de Kerminihy. Il est appelé quelquefois sr. De Keriner.

Bonaventure, Bachelier de Sorbonne fût promoteur de Cornouaille.

Marc Antoine porta comme son grand-père et son père le nom de sr. du Bois de la Haye, terre dont l’emplacement m’est inconnu. Il était propriétaire de. Lesuzan en Dirinon, mais il se trouvait souvent à Kerminihy. C’est là qu’il est mort en 1760 sans laisser d’enfants et probablement sans avoir été marié.

Hyacinthe. On ne sait rien de ce fils mort jeune.

Marie-Anne mariée à N. de Rosily-la-Tour.

A défaut d’un acte de partage deux aveux de 1731 et de 1752 font connaître comment la terre de Kerminihy fut divisée entre les deux autres enfants Pierre et Anne-Hyacinthe.

Pierre de Leslau, le second fils devint possesseur d’une partie de la terre de Kerminihy comprenant tous les domaines situés dans les paroisses d'Elliant, Tourc'h et Scaër, ainsi que Ty-an-palmer  et Kereloret (Kerangoc) dans la trêve de Rosporden. Ces domaines, représentant une surface de 815 journaux, continuaient néanmoins à faire partie du fief de Kerminihy. Il eut en outre au manoir le corps de bâtiment neuf qui se trouve au couchant de la cour, la jouissance par indivis de la moitié de cette cour à la charge de laisser la liberté du four, la possibilité de faire un petit jardin au nord du grand corps de logis et au levant de l’aire à battre de la métairie ; de plus quatre charretées de paille de seigle, deux charretées de foin données en temps de saison et le laissé aller de deux vaches pâturer avec celles du métayer.

Cette installation commune ne devait pas être durable ; aussi, dès 1731, nous trouvons Pierre installé au manoir de Kerblin (Québlin), paroisse de Lothéa, près de Quimperlé.

Il avait épousé Jeanne Le Floch et n’eut qu’une fille unique, Thérèse-Antoinette, mariée à escuier Antoine de Boutouillic, seigneur de Prenassy, ancien capitaine commandant du 2ème bataillon du régiment de Navarre-infanterie, chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis.

La trace de sa présence ne se trouve à Kerminihy qu’au moment, où il vient régulièrement toucher ses rentes. Il existe une série de quittances du domaine de Kerambriquen, signées par lui jusqu’au 11 février 1760, ensuite par son gendre Boutouillic, jusqu’au 18 mars 1780 ; enfin par la dame Le Pappe de Prenassy, sa fille, qui, elle-même, ne tarda pas à succomber.

Elle ne laissait pas d’enfant, et sa fortune passa à la fille de sa cousine-germaine, Anne-Le Pappe. Cette nièce à la mode de Bretagne, dame Marie-Louise de la Marche-Kerjan, dame de Kerminihy, ne fut pas mise en possession avant 1783. Elle hérita en même temps d’un procès dont il sera question plus loin.

Anne-Hyacinthe Le Pappe. — Le plus jeune enfant reçut pour sa part le manoir de Kerminihy (logis principal et donjon), la réserve et les bois, les fermes du manoir et de Penbuel, les domaines de Keraubroc, Kerzanner, Keranleué-bihan et les landes entourant la chapelle de Saint-Guenaël, soit 215 journaux en fermes et 175 journaux en domaines, le tout en Rosporden. En outre, elle conservait les droits de fief et les nombreuses redevances que la seigneurie possédait sur différentes terres situées en Elliant et Tourc'h, y compris les domaines attribués à son frère Pierre Le Pappe. Elle conservait également les honneurs et prééminences appartenant à la seigneurie de Kerminihy, dont elle était devenue propriétaire.

Le .. août 1718, Anne-Hyacinthe, âgée de 28 ans, épousa Messire Joseph-François de la Marche, seigneur de Kerfors, chevalier, dont le grand-père Yves de la Marche, était cousin-germain de Renée de la Marche, marquise du Chastel.

Le futur avait 25 ans, et d’après le contrat de mariage, passé chez Maître Leprédour, notaire à Quimper, Messire François-Louis de la Marche, son frère aîné, demeurant au manoir de Kerfors, en Ergué-Gabéric, lui donna la somme de 600 livres de rente, « et en outre, ce pour toute fin et perfection de partage noble, 1.250 livres en argent comptant, promettant lui tenir compte des éligements qu’il pourrait faire des prétentions que leur deffunct père avait contre M. le président de Lattay de Saint-Pern, et des prétentions de la succession de feu Messire le marquis du Chastel et de la Garnache ».

Joseph François de la Marche et Anne-Hyacinthe Le Pappe vinrent se fixer à Kerminihy, dont le manoir était inhabité depuis quelques années.

Des difficultés s’élevèrent entre les enfants la Marche, à la suite de la mort de leur père. Cela résulte d’une assignation donnée par huissier en 1720, « à la requête de noble et discret Missire Louis-Joseph de la Marche, recteur de la paroisse d'Esquibien, y demeurant ; de Messire Joseph-François de la Marche, seigneur de Kerfors, demeurant au manoir de Kerminihy, paroisse d'Elliant ; de demoiselle Barbe-Rose-Martine de la Marche, demeurant au presbytère d'Esquibien, et de demoiselle Marie-Thérèse de la Marche, demeurant à Quimper [Note : Sur cette liste, le nom de Jean-François de la Marche, jésuite, frère des demandeurs, ne figure pas. Il n’est mort qu’en 1762] ... .. à Messire-François-Louis, chef de nom et d'armes, de la Marche, seigneur dudit lieu, chevalier de l'Ordre militaire du Mont-Carmel, demeurant à Quimper, paroisse de Saint-Julien, pour comparaître à la première audience de la juridiction des Reguaires pour voir juger entre les parties le partage des biens de la succession de feu Messire Louis-René de la Marche, seigneur dudit lieu, et celle de feue dame Marie-Rose de Tréouret, leur père et mère ».

Joseph-François de la Marche et Anne-Elisabeth Le Pappe eurent six enfants, tous baptisés à Rosporden.

Joseph-Hyacinthe, né le 20 novembre 1720, baptisé par Messire Yves Le Boult, docteur de Sorbonne, official de Cornouaille et recteur de Saint-Mathieu. Les parrain et marraine sont deux mendiants de la trêve de Rosporden, Cet acte est signé par Anne Poullain de Villeroy, Joseph-Louis de Tréouret, Bois-de-la-Haye Le Pappe, Le Boult, Joseph-François de Kerfort de la Marche, Philippe curé. Cet enfant est mort le 8 mai 1722.

Marie-Louise, née le 7 novembre 1721. Les parrain et marraine sont Messire Francois-Louis de la Marche, chevalier, seigneur de Kerfort, grand-père, et demoiselle Marie-Anne Le Pappe, dame de la Tour et de Rosily. A leurs signatures s’ajoutent celles du père et d’un oncle, Messire Louis-Joseph de la Marche, recteur d'Esquibien et de Lenaour, prêtre.

Elisabeth-Rose, née le 25 février 1723. Les parrain et marraine sont Messire Marc-Antoine Le Pappe, seigneur du Bois-de-la-Haye et damoiselle Barbe-Rose-Martine, dame de la Marche, oncle et tante de l’enfant. Après les signatures du parrain et de la marraine, je trouve seulement les suivantes : Père Augustin de Lanniou, capucin, F. Augustin de Lanniou, capucin, Philippe, curé.

Pierre-Joseph, né le 2 août 1724. Les parrain et marraine sont Pierre Le Pappe, seigneur de Leslauz et Marie-Thérèse de la Marche.

Marie-Josèphe, née le 3 juin 1726 a pour parrain et marraine deux pauvres gens de la trève.

Elisabeth-Louise, née le 5 décembre 1728. Les parrain et marraine sont Messire Louis-Joseph de Tréouret, chevalier, seigneur de Kerstrat, Coeteloret, Trohanet, et dame Elisabeth-Renée Le Pappe, dame de Kerminihy, fille de Jean-Baptiste.

Je ne retrouve aucune mention du père de ces enfants jusqu’à son acte de décès inscrit sur les registres de la paroisse de Rosporden.

« Le 31ème jour d’octobre 1734 a été inhumé dans l'église de N.-D. de Rosporden le corps de Messire Joseph-François de la Marche, chevalier, seigneur de Kerfort et de Kerminihy, âgé de 41 ans, et ont assisté au convoi les soussignés avec plusieurs autres. Philippe, curé ». Les signatures manquent.

Des six enfants qu’il avait eus de son mariage avec Anne-Hyacinthe Le Pappe trois filles âgées de 13, 8 et de 6 ans avaient survécu.

En raison de l’existence de ces enfants, Chapon, greffier de la Cour royale de Concarneau, se présenta dès le surlendemain, 2 novembre, au manoir de Kerminihy et, après avoir fait un inventaire sommaire du mobilier, se borna à apposer les scellés sur une armoire située dans la pièce ou le seigneur de Kerfort faisait son cabinet, armoire qui contenait beaucoup de papiers. Le procès-verbal est signé par la veuve Le Pappe de Kerfort et par son frère du Bois de la Haye. Le même huissier se présenta de nouveau les 11, 12 et 13 janvier 1735, accompagné cette fois de quatre personnes appelées pour donner estimation aux meubles, à savoir : pour la batterie de cuisine, Antoine Céheau ; pour les meubles, François Le Bihan ; pour la lingerie demoiselle Michelle Pouchard veuve Delanoë ; pour les bestiaux et autres meubles ainsi que pour les ouvrages de campagne, Julien Nerzic, Kerdaner.

Cet inventaire est fort détaillé et je ne puis en reproduire que quelques extraits.

Mobilier.

Dans la cuisine, l’arrière-cuisine, la boulangerie et la cave, il est énuméré dix objets en cuivre rouge, quatorze en cuivre jaune, onze en fer et fonte, quatre armoires, huit chaises, etc., le tout estimé : 144 livres 11 sols.

Dans la salle :

Une armoire à deux battants de chataigné avec sa clef et serrure : 24 livres.

Une autre armoire à deux battants de chataigné, sans garniture : 18 livres.

Une armoire à buffet à trois battants avec ses clefs et clavure en bois chataigné : 10 livres.

Deux petites tables et une table pliante en bois de sapin : 3 livres 15 sols.

Huit chaises et quatre fauteuils de paille... : 6 livres.

Deux plants bourés : 1 livre.

Deux ronds de table bois de chataigné : 2 livres.

Deux chenets avec les pelles et pinces : 3 livres.

Dans l’antichambre (au 1er étage) :

Un lit carré avec sa paillasse, coëtte et mauvaise couverture de laine : 12 livres.

Deux chaises de paille avec une vieille table en bois de chêne : 1 livre 10 sols.

Dans la seconde chambre (la grande) :

Un lit à l’impériale avec sa garniture de rideaux gris, coëtte et traversin de plume et deux oreillers, matelas, la courte pointe d’indienne et couverture de laine : 100 livres.

Un autre lit à tombeau avec coëtte,  matelas, traversin, oreiller et rideaux de laine : 30 livres.

Une table carrée bois de chêne : 1 livre 10 sols.

Six chaises et quatre fauteuils de clisse : 4 livres.

Un autre fauteuil garni d’ouvrage à point d'Hongrie : 4 livres.

Un miroir à l’ancienne mode garni de cuivre : 24 livres.

Une paire de chenets avec pelle et pince : 3 livres.

Dans la chambre à l’approche du feu seigneur de Kerfors :

Un lit à tombeau avec sa paillasse, coëtte, traversin, oreiller de plume et couverture d'indienne : 24 livres.

Un autre lit garni de la même façon que le précédent   : 24 livres.

Une table à pied tourné bois de noyer : 2 livres.

Cinq chaises de clisse : 1 livre.

Quatre chaises à perroquet couverts de cuir rouge : 3 livres.

Dans le cabinet de M. de Kerfors :

Une armoire à deux battants, en bois de chataigner, fermée à clef, sur laquelle sont posés les scellés : 9 livres.

Une chaise et un petit tabouret de bois : 10 sols.

Une petite scie estimée : 10 sols.

Une épée d’argent doré avec son ceinturon : 30 livres.

Une paire de pistolets, avec leurs fourreaux garnis d’un vieux galon d’argent : 20 livres.

Une housse garni d’un vieux galon d’argent : 2 livres.

Un fusil garni de cuivre : 6 livres.

Un autre fusil garni de fer : 7 livres.

Un bas, deux ménequins, un voilant et deux crochets de fer  : 1 livre 10 sols.

Dans la chambre au-dessus de la salle :

Une armoire à buffet à deux battants bois de fustets avec sa clef et serrure : 6 livres.

Dans la chambre du pavillon :

Un lit quarré garni de rideaux de cherge verte avec sa paillasse, coëtte de plume, matelas et traversin : 24 livres.

Une petite couchette avec sa paillasse et coëtte de balle et une mauvaise couverture de laine blanche : 5 livres.

Une table carrée avec son tiroir avec une autre petite à couverture brisée : 2 livres.

Trois chaises de paille et trois chaises de bois : 3 livres.

Deux chenets de fer sans pelle ni pince : 15 sols.

Dans l'antichambre :

Une armoire à deux battants bois de chêne et de chataigné avec sa clef et serrure : 18 livres.

Un vieux coffre en bois de chêne avec sa clef et clavure : 2 livres.

Une chaise percée bois de guignier : 1 livre 10 sols.

Une vieille table à pieds tournés : 10 sols.

Dans la chambre, au-dessus de la cuisine :

Deux vieilles couchettes avec leurs coëtte de balle, paillasse et couverture sans rideaux : 4 livres.

Dans la chambre au-dessus de la boulangerie :

Huit douzaines de membrures et planches tant de chêne que de châtaignier : 32 livres.

Dans le grenier au-dessus des chambres :

Deux douzaines et demye de vieilles planches ayant déjà servi de cloison : 6 livres.

Linge.

Je résumerai cette partie de l’inventaire qui est très détaillée. Il y est constaté :

35 douzaines de serviettes chacune de 2 livres 5 sols à 3 livres.

Quelques-unes plus grandes : 8 et 9 livres.

82 nappes de 2 et 3 livres les plus grandes : 6 à 9 livres.

72 draps de toutes dimensions.

33 houilles d’oreiller.

1 pièce de quarante aulnes d'étoupe de chanvre : 20 livres.

1 pièce d'étamine blanche de 50 aulnes : 50 livres.

1 pièce de berlinge de 40 aulnes : 20 livres.

1 pièce de berlinge gros roux de 18 aulnes : 7 livres.

Hardes et habits du seigneur de Kerfors.

Une douzaine et demie de chemises garnies de mousseline : 36 livres.

Une douzaine de vieilles chemises de nuit : 12 livres.

Une douzaine de tour de col de mousseline : 2 livres.

Quatre paires de bas de laine : 3 livres.

Un surtout de bouracan gris : 12 livres.

Trois vieux habits, l’un de drap couleur de canelle, l’autre d'étamine vieille couleur de feu et le troisième d’une étamine brune : 24 livres.

Trois vieilles culottes : 3 livres 10 sols.

Une douzaine de mouchoirs de couleur : 6 livres.

Deux paires de souliers : 3 livres.

Une pièce de toile de gros lin étante au métier estimée le fil, sans comprendre la façon : 35 livres [Note : On peut rapprocher Joseph-François de la Marche, tisseur de lin, du gentilhomme broyeur de lin par nécessité dont parle Renan dans ses mémoires. Sa garde robe est bien modeste à coté de celle de Claude du Chastel].

Argenterie.

Deux flambeaux avec mouchette et porte-mouchette, dix cuillères, neuf fourchettes, huit cuillères à café, six couteaux à manche d’argent, deux salières, une écuelle, une grande cuillère potager, deux gobelets, une petite gondolle [Note : Vase en forme de gondole. Aujourd’hui les hors d’œuvre sont servis sur la table dans des bateaux], un petit poivrier, un pot d’argent, le tout pesant 23 livres, à 48 livres 18 sols le marc, soit : 984 livres 18 sols.

Un cachet d’argent : 2 livres 10 sols.

Six plats et trois douzaines et demie d’assiettes d'étain estimé à raison de 10 sols la livre : 29 livres 12 sols.

L’inventaire mentionne ensuite :

Une bride et une selle : 3 livres.

Un pressoir à une seule vice : 30 livres.

Vingt barriques de cidre à cent sols la barrique : 100 livres.

Une pendule sonnante : 15 livres.

Des bouteilles, etc., etc.

Sept échelles dont trois pour les couvreurs.

Tout le matériel nécessaire pour la culture, etc.

Les prix auxquels ont été estimés les animaux et les produits de la ferme fournissent les éléments d’une comparaison intéressante avec les prix à d’autres époques.

Une vieille jument et deux poulains : 36 livres.

Un jeune cheval : 75 livres.

Un vieux petit cheval : 24 livres.

Un cheval : 45 livres.

Deux grands boeufs, à 57 livres l’un : 114 livres.

Deux torillons, à 25 livres l’un : 50 livres.

Quatre veaux d’un an, à 6 livres l’un : 24 livres.

Douze vaches, à 12 livres l’une dans l’autre : 150 livres.

Une grande truye : 30 livres [Note : On voit quel intérêt on attachait dès lors à l’élevage du cochon d’après le prix auquel la truie est estimée comparativement aux vaches].

Une petite truye : 10 livres.

45 milliers de foin à 4 livres 10 l’un estimé : 225 livres.

9 minots de froment à 9 livres l’un : 81 livres [Note : Le minot valait 88,6 litres à la fin du XVIIIème siècle, soit neuf minois pour huit hectolitres].

42 minots de seigle à 3 livres l’un : 126 livres.

30 minots d’avoine à 1 livre 9 sols l’un : 52 livres 10 sols.

2 minots de pois à 5 livres l’un : 10 livres.

L’inventaire contient ensuite la désignation des titres, pièces isolées et liasses, renfermés au nombre de plus de cent cinquante dans l’armoire sur laquelle les scellés avaient été apposés.

Tous ces documents sont postérieurs à 1656, date de l’achat de la terre de Kerminihy par Marc-Antoine Le Pappe, et n’auraient probablement, fourni aucun renseignement sur les origines de la propriété. Ce sont des aveux présentés par les fermiers, des pièces de procédure et des quittances sans intérêt. J’y trouve la trace d’un procès entre le sr. de Kerfors et le sr. de Musuillac, propriétaire de Tréanna. Deux aveux sont fournis à la seigneurie de Kerminihy pour les lieux de Penvern-Meingleuz et Cosquer, l’un du 25 juillet 1665 par dame Louise Furic, dame de Toulgoat, veuve du feu seigneur de Toulgoat (comte de Bienassis), l’autre du 25 février 1717 par le tuteur des demoiselles de Bienassis.

Vient ensuite la continuation de l'inventaire pour la métairie du manoir. Je me borne à en extraire les chiffres suivants de l’estimation :

Un taureau noir : 24 livres.

Six boeufs de 51 livres à 27 livres.

Douze torillons de 12 livres à 7 livres 10 sols.

Onze vaches de 25 livres 10 sols à 19 livres 10 sols.

Trois génisses de 10 livres 10 sols à 9 livres.

Une jument blanche : 30 livres.

Deux pouliches : 30 livres et 15 livres.

De la lecture de cet inventaire on retire l’impression que, si les propriétaires de Kerminihy jouissaient d’une assez large aisance, l’intérieur du manoir était loin de contenir des objets précieux comme le constatent pour beaucoup de châteaux les inventaires qui ont été conservés. Il n’y a rien d'étonnant, Joseph-François de la Marche avait trois frères plus âgés que lui, et plusieurs sœurs, de son côté, Anne-Elisabeth Le Pappe avait dû partager l'héritage paternel avec quatre frères et une soeur.

Madame de la Marche survécût plus de trente ans à son mari. Le 27 juillet 1752 elle dut fournir au Roi l’aveu et dénombrement des biens dont elle avait hérité. A la fin se trouve la formule suivante :

« … Déclarant la dite dame de Kerfors que les biens et rentes cy-devant employés se payent par les vassaux et domainiers de la dite seigneurie de Kerminihy, les froments et seigles à la mesure comble de la terre et seigneurie de Kerminihy et les avoines à la même mesure comble et foulée ».

Précédemment les déclarations fournies par les domainiers aux seigneurs de Kerminihy portaient que les redevances en grains doivent être fournies « à la mesure » de Rosporden. La mesure de Kerminihy était-elle la même que celle de Rosporden ? et la mesure de Rosporden était-elle la même que celle de Concarneau ? C’est probable, mais la question des mesures seigneuriales est bien difficile à élucider.

Les registres de la paroisse de Rosporden renseignent sur quelques personnes de la famille de la Marche.

Le 1er janvier 1744 damoiselle Marie-Josèphe de la Marche de Kerfors est marraine de Joseph, fils du métayer de Kerminihy.

Le 30 janvier suivant damoiselle Elisabeth-Louise de la Marche, dame du Boys de la Haye est marraine d'Elisabeth Sancéau.

Le 13 janvier 1749 l'acte de mariage d’une orpheline habitant au château de Kerminihy porte la signature d'Elisabeth de Kerfors de la Marche.

L’importance de la personnalité du recteur d'Elliant, Louis-Joseph de la Marche, beau-frère d'Anne Le Pappe, a conduit le curé de Rosporden à porter sur son registre la mention suivante :

« L’an 1754 le 24 septembre vers les 3 ou 4 heures de l’après-midi a été inhumé dans le cimetière d'Elliant le corps de noble et discret missire Louis-Joseph de la Marche licentié en Sorbonne et recteur d'Elliant depuis environ 15 ans, décédé le jour précédent environ 2 heures après-midi, dans son presbytère d’une révolution de goutte après quatre jours de maladie, environ la soixantième année de son âge. Les funérailles ont été célébrées par noble et discret missire Dugua recteur du Grand Ergué, Conannou curé de Cadal, Le Roy curé et Rigallou prêtre de Rosporden, Coquil curé de Saint-Yvi, Créoff curé de Locmaria, Jaouen curé, Legal, Quéré, Garec et Tessier prêtres d'Elliant. S. Le Roy curé ».

Nous avons dit précédemment que la position de fortune de la famille de la Marche n’était pas très brillante, aussi, les deux filles ne trouvèrent pas facilement à se marier. La cadette, Marie-Josèphe, n’avait pas à compter sur l'héritage de Kerminihy destiné à sa soeur aînée et, à 32 ans, elle se décida à un mariage, qui était peut-être avantageux au point de vue de la fortune, mais le mari qu’elle acceptait n’était pas jeune, sa noblesse personnelle était bien récente,  et il avait un fils de 27 ans d’un premier mariage avec Marie-Anne Cossoul, d’une famille de très honorables marchands de Quimper.

Voici l’acte de mariage :

« Après fiançailles faites, etc. Le 29 août 1758 dans la chapelle du château du Kerminihy, une seule publication de ban à l’église tréviale de Rosporden et à Saint-Mathieu de Quimper fut célébré le 11 septembre 1758 par moi recteur d'Elliant licentié en droit, par permission à la chapelle du château du Kerminihy, le mariage de messire Gabriel-Louis Gouesnou de Kerdour, sr. de Kerlagatu, Kervastal et autres lieux, veuf de dame Marie-Anne Cossoul de Saint-Mathieu de Quimper — et damoiselle Marie-Josèphe de la Marche dame de Kerfort, fille majeure de feu messire Joseph-François de la Marche, chevalier, sr. de Kerfort et de dame Anne-Hyacinthe Le Pappe, dame de Kerfort. S. Marie-Josèphe de la Marche de Kerdour, Gabriel-Louis Goueznou de Kerdour, Le Pappe de Kerfort, Barbe de la Marche, Marie-Louise de la Marche du Kerminihy, Marguerite-Louise Le Borgne de Laxalde, François-Louis de la Marche, Marie-Rose Blanchard. M. a. Le Pappe du Bois de la Haye. P. a. de Suasse recteur d'Elliant ».

Le 22 mars 1759, la soeur aînée, damoiselle Marie-Louise de la Marche dame de Kerminihy est marraine du fils de n. h. Jean-Jullien Trobert, sr. de la Garenne. Le parrain est haut et puissant seigneur Joseph-Christophe de Tréouret comte de Kerstrat, etc.

Quelques mois plus tard, madame de la Marche perdait son frère, Marc-Antoine, plus âgé qu’elle seulement de trois ans, et qui paraît être toujours resté son conseiller après la mort de son mari. Voici son acte de décès :

« Le 7 mai 1760 fut inhumé dans la tombe du château et seigneurie de Kerminihy en l’église de Rosporden le corps de Marc-Anthoine Le Pappe, sr. du Bois de la Haye et autres lieux âgé d’environ 70 ans décédé d'hyer au dit château du Kerminihy, muni des sacrements de l’église. S. Lenir avocat, Krieger [Note : Procureur et notaire dans la Cour royale de Concq, fabrique de l’église Notre-Dame de Rosporden], Coatpont, Lebescond [Note : Avocat à la Cour. Sénéchal de la Juridiction de la chatellenie de Tréanna] Villenneuve, Billette, Le Bars [Note : Notaire et procureur au siège royal de Concq, syndic de Rosporden], Desnos, Bosredon prêtre, Conannou curé de Cadol, Coquil curé de Rosporden, P. a. de Suasse prêtre recteur d'Elliant ».

Quelques semaines plus tard, Marie-Louise se mariait à son tour à l’âge de 38 ans. Elle épousait François de Kerjan, lieutenant des vaisseaux du Roy, appartenant à une famille d’ancienne noblesse des environs de Saint-Ronan dont les armes sont d’argent à la tour couverte de sable. Il devint capitaine de vaisseau et ne mourut qu’en 1812, âgé de 97 ans.

Les fiançailles furent célébrées le 31 mai 1760 par messire P. a. de Suasse, recteur d'Elliant, dans la chapelle domestique du château de Kerminihy par permission de Mr. l’abbé des Cognetz, vicaire général et official de l'Evêque de Quimper. Les fiancés furent mariés dans l’église tréviale de Rosporden, le 9 juin 1760 par messire Jean-François de la Marche, chanoine et vicaire général de l'évêché de Tréguier [Note : Le futur évêque de Saint-Pol-de-Léon]. Ils sont désignés ainsi qu’il suit dans l’acte de mariage : Messire François de Kerjean chevalier seigneur de Kerjean, fils majeur de feu messire Maudé Christophe de Kerjean, chevalier seigneur de Kerjean et de dame Julienne Gourio, dame de Kerjean, lieutenant des vaisseaux du Roy au département de Brest, originaire de Lokornan (Saint-Ronan, domicilié à Brest, paroisse Saint-Louis, et damoiselle Marie-Louise de la Marche, dame de Kerminihy, fille majeure de feu messire Joseph-François de la Marche, chevalier seigneur de Kerfors et de damoiselle Anne-Hyacinthe Le Pappe, dame de Kerfors, de cette trêve de Rosporden.

L’acte est signé Marie-Louise de la Marche de Kerjan, Le Pappe de Kerfors de la Marche, Le Borgne de Laxalde, de Kermorvan Le Borgne, Marie-Rose Blanchar, François-Louis de la Marche, de Querdour, le chevalier de Penfeuntenyo, Michel prêtre, N. Coquil curé de Rosporden, de la Marche chanoine et vicaire général de Tréguier.

Ils eurent quatre enfants.

L’aînée Marie-Hyacinthe-Françoise baptisée par P. a. de Suasse recteur d'Elliant, née le 3 novembre 1762. La marraine est Anne-Hyacinthe Le Pappe grand-mère et le parrain écuyer, François-Marie de Penfeuntenyo.

Marie-Josèphe-Renée, née le 29 avril 1764 et baptisée par N. Coquil recteur de Plonivel. Les parrain et marraine sont deux pauvres gens. L’acte porte les signatures suivantes : Le Pappe de Kerfors de la Marche, Barbe de la Marche, Marie-Jeanne Le Borgne de Kermorvan, Michel prêtre, N. Coquil, recteur de Plonivel. Cet enfant mourut le 12 janvier 1768.

Le 22 octobre 1765 par permission de Messire René des Cognets, vicaire général et official en date du 16, Marie-Françoise-Renée-Armande fut baptisée dans la chapelle du château de Kerminihy. L’acte est signé par esc. François-Louis-Armand-Marie de la Marche parrain, Julienne-Renée du Gourio de Kerjan marraine, Antoine Boutouillic de Prenassy, Decamp, Marie-Josèphe de la Marche de Kerdour, Barbe de la Marche, Loëdon prêtre, N. g. Loëdon curé de Rosporden [Note : Loëdon devint plus tard recteur de Gourin et fut nommé député aux Etats-Généraux, représentant le clergé]. Cet enfant mourut en octobre 1768.

Le 16 février 1768 par permission de MM. Le grands vicaires du diocèse, Marie-Thérèse-Antoinette fut baptisée dans la chapelle du château de Kerminihy. Les parrain et marraine sont deux pauvres gens, qui ne savent signer. L’acte porte les signatures suivantes :   Kerjean, N. g. Loëdon prêtre curé, Loëdon prêtre, Michel Quéré prêtre curé d'Elliant, Messager prêtre curé d'Elliant. 

Ce dernier enfant mourut jeune et l’aînée de ces quatre filles survécut seule.

Remontant de quelques années en arrière nous trouvons mentionnée, le 10 novembre 1764, l’inhumation de dame Anne-Hyacinthe Le Pappe, dame veuve de Messire Joseph-François de la Marche chevalier, dame propriétaire de la terre et seigneurie de Kerminihy, décédée le 9 de ce mois, âgée d’environ 78 ans (74 en réalité).

Etaient présents Messires Rolland Michel de la Noë, J. J. du Laurens sr. de la Barre advocat, Corentin-Pierre Krieger, Delanoé et autres, N. g. Loëdon prêtre curé de Rosporden, Loëdon prêtre, Ledu prêtre curé d'Elliant, P. a de Suasse recteur d'Elliant.

Anne Le Pappe avait été dame de Kerminihy pendant près de 50 ans, et a laissé trace de son passage dans un première restauration de la chapelle du manoir.

Cette chapelle est certainement fort ancienne, bien que les aveux de la seigneurie n’en fassent pas mention avant 1619. Au XVIIème et au XVIIIème siècles son existence s’est affirmée par la célébration de baptêmes et de mariages, mais, d’après l’examen des parties qui en ont été conservées, elle remonte à des temps plus éloignés.

La porte ogivale, par le profil de ses moulures, par les aigrettes et le plumet qui l’accompagnent, indique le XVème siècle. Elle est surmontée d’un écusson aux armes de Kerminihy. A l’intérieur de la porte une pierre d’angle est refouillée pour former bénitier.

La table de l’autel consiste en une seule pierre de granit ayant 2m26 de longueur sur 0m22 d’épaisseur, et présentant sur le côté une moulure très simple, un demi-cercle et une gorge. Le corps de l’autel est un massif cubique de Om55 de hauteur, formé de cinq blocs de granit : la base moulurée a 0m28 de hauteur.

Le retable en bois encadrait un tableau qui a disparu. De chaque côté deux colonnes ioniques accouplées supportent un fronton triangulaire interrompu au milieu pour faire place à un petit édicule avec niche. J’ai pu constater, avant qu’il ait été remis en place, qu’il avait été autrefois entièrement peint en blanc. Les moulures et spécialement quelques champs portaient encore des traces de peinture rouge, bleue et or. On voyait au milieu de la frise, entouré d'arabesques, un écusson avec les trois molettes de Kerminihy. Sur le soubassement les trois monogrammes M. A, I H. S, et I. 0. S., également entourés d'arabesques, rappelaient la Sainte famille à laquelle cette chapelle était dédiée.

Au commencement du XVIIIème siècle la chapelle a dû être l’objet d’une reconstruction partielle comprenant le haut de la façade, le clocher et une partie des murs latéraux. Une fenêtre très simple en oeil de bœuf et quelques ornements sont caractéristiques de cette époque, ce que confirme une inscription sculptée avec caractères en relief sur une pierre des murs latéraux F. ANNO  1724.

La reconstruction du clocher doit remonter à peu près à la même époque. Elle est datée par la présence d’un cadran solaire en ardoise accompagné d’un écusson avec les armes, parti de Le Pappe et de la Marche. Au dessous, on lit l'inscription MORVAN. F. ANNO.....  

Deux tableaux dans le style du XVIIIème siècle, qui représentent en buste saint Pierre et sainte Madeleine, ont été conservés.

Lors d’une visite des églises et chapelles du diocèse, prescrite par l'Evêque de Quimper en 1782, la chapelle de Kerminihy est mentionnée dans les termes suivants : « La Sainte Famille, décemment pourvue ».

Quelques années plus tard l’office divin cessa d’y être célébré. La chapelle fut abandonnée et finit par être transformée en magasin jusqu’au moment où la couverture s’effondra : il fallut alors abattre une partie des murailles qui menaçaient ruine.

Au milieu du XIXème siècle les propriétaires du château, qui avaient depuis longtemps le désir de rendre la chapelle à son ancienne destination, purent enfin le réaliser. La façade fut reconstruite en conservant la porte et en utilisant dans le clocher et dans les murs tout ce qui subsistait de l’ancienne chapelle. L’autel fut remis en place et la messe put enfin y être célébrée le 21 octobre 1870 [Note : Le château renfermait alors la nombreuse famille du propriétaire qui s’y était réfugiée].

Quelques mois après la mort de madame de la Marche de nouvelles cloches furent mises en place dans l'église de Rosporden.

Voici l’acte rappelant cette cérémonie : « Le douze août 1765 ont été bénites par le soussigné la grande cloche de l’église de Rosporden et le timbre de la dite trêve. La grande cloche a été nommée Marie-Louise- Antoinette, par écuyer Antoine du Laurens de la Barre, sénéchal et premier magistrat de Concarneau et par dame Marie-Louise de la Marche dame du Kerminihy épouse d’écuyer François de Kerjan, chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis et lieutenant des vaisseaux du Roy. Le timbre a été nommé par Maître Pierre-Corentin Krieger, procureur au siège royal de Concarneau, fabrique de Rosporden et par dame Marguerite-Céleste Leguillou, épouse d’écuyer Jean-Jacques du Laurens, sieur de la Barre, advocat en parlement et a été nommée Céleste Perrine ».

S. de la Marche de Kerjan, Leguillou de la Barre, Krieger, du Laurens, Gougeard, Desnos, de la Barre, N. g. Loëdon prêtre curé de Rosporden, Loëdon prêtre, G. h. Le Guillou prêtre, P. a. de Suasse recteur d'Elliant.

Cette cloche existe encore. Elle porte d’un côté le double écusson des Kerjan et des la Marche, de l’autre côté un écusson avec les armes des du Laurens (d’azur au sautoir d’or), avec l'inscription suivante : « Nommé par écuyer Antoine du Laurens de la Barre Sénéchal de Concarneau et par dame Marie de la Marche dame de Kerjan et du Kerminihy, Messire N. g. Loëdlon curé, Messire Krieger fabrique. M. Guillaume fondu en 1705 ».

Les années suivantes je ne trouve rien à mentionner que le décès survenu à Kerminie (sic) [Note : Cette orthographe correspond à la prononciation actuelle] le 7 février 1778 de dame Julienne-Renée de Gourio, veuve d'Escuier Maudé Christophe de Kerjan. Elle fut immédiatement inhumée dans l’église de Rosporden.

Mademoiselle de Kerjan se maria jeune avec M. de Kermorial, dont la famille d’ancienne extraction est originaire de Baye, près de Quimperlé, et a pour armes d’azur au greslier d’argent accompagné de trois fleurs de lys du même. Mr. de Kermorial [Note : Paroisse supprimée par le Concordat et réunie à la paroisse de Kerfeunteun], né à Cuzon le 12 juillet 1748, était fils de Messire Léonard de Kermorial-Kermorvan et de dame Marie-Jeanne de Boutouillic. A 16 ans il s’engagea comme volontaire dans la marine, devint garde-marine en 1767, lieutenant de vaisseau en 1779 et quitta le service en 1785, après son mariage.

En 1769 il était embarqué sur la gabarre La Dorothée qui fit naufrage le 17 décembre à quelques milles de Brest. L’équipage put se réfugier sur un rocher où il resta sans abri pendant 52 heures, sans que la tempête permit de lui porter secours. Comme indemnité pour la perte de tous leurs effets le commandant La Martelière reçut 1.200 livres et les marins 40 livres. Kermorial, qui après le débarquement avait été mis trois mois en prison pour une cause non spécifiée, reçut pour toute indemnité son traitement de 30 livres par mois pendant ces trois mois.

Plus tard il prit part aux opérations militaires pendant la guerre de l'Indépendance américaine et reçut à cette occasion la décoration de l’ordre de Cincinnatus, fondé par les officiers de l'armée de Washington [Note : Cet ordre devait d’abord être héréditaire, mais cette disposition fût bientôt supprimée comme entachée de tendances aristocratiques. La décoration représentait d’un côté Cincinnatus abandonnant la charrue, et de l’autre l'aigle des Etats-Unis. Le dernier membre de l’ordre est mort en 1865]. En 1785 il quitta le service, peu après son mariage.

Voici l’acte de ses fiançailles du 10 juin 1783 : « Fiançailles dans la chapelle domestique du château de Kerminihy en cette trêve par délégation du recteur d'Elliant et par permission de l'Evêque, par Messire Charles Guy Le Borgne de Kermorvan prêtre chanoine de l’Eglise cathédrale de Quimper, avec permission de la Cour adressée à M. le comte d'Hector commandant la marine à Brest : de Messire François-Pierre-Jean de Kermorial, seigneur de Kermorvan et autres lieux, lieutenant des vaisseaux du Roy, chevalier de Saint-Louis, fils de feu Jean-Marie Léonard de Kermorial seigneur de Kermorvan et de feu Marie-Jeanne Boutouillic, originaire de la paroisse de Cuzon et domiciliée en la paroisse de Saint-Louis de Brest et damoiselle Marie-Hyacinthe-Françoise de Kerjan fille de Messire François-Christophe de Kerjan, seigneur de Kerminihy et autres lieux, ancien capitaine de vaisseau et chevalier de Saint-Louis et de dame Marie-Louise de la Marche dame de Kerjan, originaire et domiciliée de droit en cette trêve et de fait en la paroisse de Saint-Ronan en ville close de Quimper. En présence des père et mère de la fiancée, de Messire Henri-Joseph de Kerguern sr. du dit lieu et autres, lieutenant des vaisseaux du Roy, cousin germain du nouveau marié, chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis, Messire Charles de Penfeuntenyo seigneur de son nom, Messire Michel-Jean-Alexandre Laënnec prêtre docteur de la faculté de Théologie de Paris, de la maison et Société de Sorbonne et recteur d'Elliant. Signé J. de Kermorial, M. h. f. de Kerjan, Kerjean, de la Marche de Kerjan, de la Marche de Kerdour, de la Marche, Armande de Kerjan, Pépin de Calan, Armande de Kerennevel, Anne de Penfeuntenyo, la Lande de Calan, Louis de la Lande, le chevalier de Penfeuntenyo de Kerguern, Le Borgne de Kermorvan chanoine, Laënnec prêtre docteur de la maison et Société de Sorbonne, recteur d'Elliant ».

Le même jour, immédiatement après les fiançailles, eut lieu le mariage dont l’acte contient encore plus de détails que le précédent.

M. et Mme de Kermorial eurent plusieurs fils.

Joseph-François-Marie, né à Cuzon le 9 mars, ondoyé par permission le 10 mars et baptisé le 9 juin 1784 par permission dans la chapelle domestique du château de Kerminihy. Le parrain est Messire Joseph-René de Kerguern, seigneur du Mur et autres lieux, lieutenant des vaisseaux du Roy, chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis ; la marraine est dame Marie-Louise de la Marche, dame de Kerjan.

L’acte est signé de la Marche de Kerjan, de Kerjan, Anne-Françoise-Marie de Penfeuntenyo, Kerguelen de Kerguern, de Kermorial, de Kerguern, Kerjan de Kermorial. Duparc Locmaria, Legoff, prêtre, Kergourlay, curé, Laënnec, recteur d'Elliant, docteur de la maison et société de Sorbonne.

Le second fils, François-Marie, né à Cuzon le 26 juillet 1785, fut, par permission du même jour, baptisé dans la chapelle du château de Kerminihy, le 23 juillet. Le parrain fut Messire François-Christophe de Kerjan, seigneur de Kerminihy, et la marraine damoiselle Anne-Françoise Le Baillif de Kerbeuzec.

Les signataires de l’acte sont : Anne-Françoise Le Baillif de Kerbeuzec, de la Marche de Kerjan, Armande de Kerjan, Le Goarant de Tromelin, de Kermorial, Tassy Le Goff, Kergourlay et Laënnec, comme ci-dessus. Cet enfant, mourut jeune.

Un troisième fils, Amédée, né à Quimper le 3 janvier 1787, baptisé le même jour à Saint-Mathieu a pour parrain son frère qui ne sait pas signer et pour marraine Agathe-Geneviève-Françoise du Parc.

Jusqu’à la suppression des registres paroissiaux, je ne trouve plus à mentionner que l’acte suivant de l’inhumation de la sœur de Mme de Kerjan : 6 juillet 1784, dame Marie-Josèphe de la Marche, veuve de Messire Gabriel-Louis Gouénou, seigneur de Kerdour et autres lieux, âgée d’environ 57 ans, décédée en son hôtel à Quimper, le 8 juillet 1784, a été le jour suivant transporté en cette église. Le corps a été présenté par vénérable et discret Messire René-Jean Bourbris, recteur de Saint-Ronan, en la dite ville de Quimper, et à la réquisition de M. et de Mme de Kerjan, seigneurs du Kerminihy, a été ouvert l’enfeu de la dite terre de Kerminihy, dans lequel a été inhumé le cadavre de la défunte. Ont assisté MM. du Laurens de la Barre, Le Goarant de Tromelin, du Laurens de la Barre et autres ; S. Laënnec, recteur d'Elliant, R. Bourbris, recteur de Saint-Ronan de Quimper.

Deux années plus tard, M. et Mme de Kerjan furent inquiétés, ainsi qu’il a été dit précédemment, au sujet du village de Keranbriquen, dont Mme de Kerjan avait hérité à la mort de sa cousine-germaine Elisabeth Le Pappe, dame veuve de Boutouillic. Voici à quelle occasion :

Le 5 juillet 1751, noble homme Pierre Le Pappe, sieur de Leslau, et dame Jeanne Lefloch, son épouse, avaient vendu à Alain Costiou, de Keranbriquen, le fonds perpétuel de ce village, moyennant le paiement d’une somme de 1.000 livres comptant et, en outre, à chaque terme de Saint-Michel, d’une somme de 50 livres égale à la redevance payée précédemment par Costiou.

L’acquéreur fut régulièrement mis en possession le 13 septembre 1754, après trois publications faites trois dimanches consécutifs, à la sortie de la grand'messe : le 15 septembre, à la chapelle de Saint-Adrien ; le 22, à l’église paroissiale d'Elliant, et le 29, à la chapelle Sainte-Marguerite.

Ce village, jadis tenu à titre de domaine congéable, était un bien noble dépendant du fief de Kerminihy, dont il avait été démembré par suite du partage de cadets, à la mort d'Antoine-René Le Pappe. La vente du 5 juillet 1751, sans tenir compte de cette situation, le désigna comme devant relever roturièrement de Sa Majesté en son domaine de Concarneau, et le soumit seulement au profit du vendeur au paiement d’une rente viagère de 50 livres.

Aucune difficulté ne se produisit pendant plus de trente ans [Note : D’après l’article 282 de la coutume de Bretagne, la prescription ne s’exerçait en cette matière qu’au bout de quarante ans], et le 22 juillet 1786, après la mort d'Alain Costiou, son fils, Alain Costiou, en son nom personnel et pour ses cohéritiers, fournit pour le lieu de Keranbriquen aveu et déclaration au seigneur et dame de Kerjan. Les uns et les autres avaient perdu de vue les termes de l’acte de vente du 5 juillet 1751 et considéraient toujours Keranbriquen comme soumis au fief de Kerminihy. Mais le domaine royal, ayant à déterminer les droits à percevoir au sujet de la succession d'Alain Costiou, reconnut l’erreur et fit sommation à ses héritiers de payer les droits de franc-fief, fort élevés, qu’ils se trouvaient devoir comme roturiers propriétaires de biens nobles. La famille Costiou, qui ne s’attendait pas à pareille réclamation, se retourna contre les héritiers de son vendeur. La question fut soumise à plusieurs juristes et, en dernier lieu, il fut établi qu’il n’était pas au pouvoir de Pierre Le Pappe de changer la nature du fief de Keranbriguen (ou Keranbriquen). Ce domaine était donc resté bien noble, malgré l’énonciation contraire de l’acte de vente. Le Pappe avait ainsi commis une faute dont ses héritiers étaient responsables, et par suite les Costiou avaient droit à une indemnité. M. de Kerjan, sans contester ce droit, chercha à en régler le chiffre à l’amiable, mais il ne put réussir.

Alain Costiou, après avoir préalablement révoqué l'aveu du 22 juillet 1786, assigna donc M. de Kerjan, le 25 octobre 1788, devant la cour royale de Concarneau et obtint, le 26 janvier 1789, un jugement favorable à sa demande. M. de Kerjan fut condamné à rembourser à Costiou : 1° la somme de mille livres, payée en 1751 ; 2° une autre somme de 1.028 livres, pour les droits de transfert réclamés par le domaine royal ; 3° une troisième somme de 378 livres pour le rachat à la mort d4Alain Costiou. Enfin, M. de Kerjan était condamné à garantir les Costiou contre ce qu’ils auraient à payer pour les franc-fiefs à venir, à qui il était pour ce motif alloué une dernière somme de 934 livres [Note : Cette somme était calculée de la manière suivante : on estimait le nombre de franc-fiefs à payer pendant quarante ans à 3, (1 par décès, 2 par échéance, chiffre inférieur à la réalité), soit pour vingt ans, 1 1/2. Le revenu pour Keranbriguen était estimé 495 et en le diminuant de la rente de 50 livres, puis, ajoutant la taxe de 8 sous par livre, on arrivait au chiffre de 623 livres, pour un droit de franc-fief, soit 934 livres 50 pour la période de 20 ans].

Le chiffre total de l’indemnité, 3.340 livres, augmenté des intérêts et des frais, s’élevait en définitive à plus de 5.000 livres, somme énorme dans ces temps agités.

A la suite du jugement, il y eut transaction sur le chiffre des frais ; l'afféagement de 1751 fut annulé et M. de Kerjan consentit, le 2 avril, pour Keranbriguen, une baillée de 9 ans à titre de domaine congéable, transformée le 29 décembre suivant (1780) en baillée à titre de féage roturier.

Le rôle de la capitation de la noblesse pour l’année 1789, le dernier qui ait été dressé, fournit quelques renseignements intéressants [Note : Archives de Kerminihy ; semblables rôles existent aux archives du Finistère pour d’autres années]. Je trouve dans la paroisse d'Elliant la mention « M. de Kerjan et dom : » figurant pour la somme de 24 livres (36 en 1788). Cette réduction paraît avoir été faite par mesure générale.

Ce rôle a été dressé pour l'évêché de Cornouaille, qui s’étendait alors sur une partie des départements actuels des Côtes-du-Nord (aujourd’hui Côtes-d’Armor) et du Morbihan, et comprenait Rostrenen, Gourin et le Faouët. Comme terme de comparaison j’en extrais quelques chiffres.

Il y avait 359 cotes mentionnées, dont 264 étaient inférieures à 25 livres ; 72 comprises 101 à 180 livres ; six supérieures à ce chiffre, à savoir : Cheffontaine, 338 livres ; Ploeuc, 350 livres ; Tinténiac, 451 livres ; marquis du Gage, 487 livres ; Rosily, 577 livres, et Roquefeuille, 688 livres.

Les villes de Quimper et de Quimperlé figuraient pour 70 et 28 cotes.

Quatre membres de la famille de la Marche étaient inscrits à Ergué-Gabéric pour 142 livres 10 sols, à savoir :

Mr. de la Marche père et dom : 54 livres.

Mr. de la Marche aîné, etc. : 75 livres.

Le Chevalier de la Marche, etc. : 9 livres.

Mademoiselle de la Marche, etc. : 4 livres 10 sols.

Total : 142 livres 10 sols.

Deux cotes Kermorial figuraient, l’une à Cuzon, près de Quimper, pour 35 livres, et l’autre à Quimperlé pour une livre.

L’ancien régime n’avait plus devant lui que quelques mois d'existence, et les Etats-Généraux du royaume étaient réunis à Versailles ; mais la noblesse bretonne invoquant ses anciens privilèges et les clauses du traité de réunion, avait refusé de nommer des députés à l'Assemblée nationale, se séparant ainsi du Tiers-Etat et de la majorité du clergé. Il y eut cependant quelques hésitations. Ainsi, le journal de Théophile-Marie Laënnec, père du célèbre médecin, publié par M. Arm. du Chatellier, contient l’anecdote suivante, à la date du 2 août 1789 :

« MM. du Châtel et de Kermorial ont reçu une lettre-circulaire de M. le vicomte de Pontual, gentilhomme de Rennes, membre de la commission intermédiaire, qui les invite à se réunir à Rennes pour révoquer le serment fameux et députer à l'Assemblée nationale. M. de Kermorial a envoyé sa lettre à M. de la Marche (son oncle), et M. du Châtel a envoyé la sienne à M. de Penfeuntenio. J’ignore ce qu’a répondu celui-ci ; c’était le plus fort des ligueurs. M. de la Marche est le plus vieux ; vous allez voir s’il est le plus sage. Voici sa réponse :

Je reçois, dit-il, votre lettre et celle que vous me faites l'honneur de me communiquer. Si, en répondant à M. de Pontual, vous pensez devoir lui parler de moi , vous lui direz que sa façon de penser n’est pas la mienne ».

« Traduction de cette correspondance :

LES DEUX NOBLES

(air de Joconde)

Gentilhomme sage et loyal,

Au feudiste la Marche

Le plebéyen Kermorial

Disait, mon patriarche,

Souffrez que la nation

Sans nos conseils passe outre,

Le Roy nous prêche l’union

Je veux mourir j... f... » [Note : Cette chanson composée par Laënnec fait allusion à la lutte engagée en 1765 entre la Royauté et le Parlement, à la suite d’un arrêt du Conseil du Roy, jugé attentoire aux droits de la Bretagne. Tous les conseillers donnèrent leur démission à l’exception de douze, qui reçurent des démissionnaires le surnom injurieux de j... f.., dont la malignité publique s’empara pour qualifier d'Ifs pendant longtemps les douze non-démissionnaires].

Les opinions de Kermorial avaient pu, pour lui et pour beaucoup de Français ayant combattu dans la guerre de l'Indépendance, être influencées par leur contact avec les Américains. N’était-il pas lui-même membre de l’ordre des « Cincinnati » ?.

Deux jours plus tard, dans la nuit mémorable du 4 août 1789, l'Assemblée nationale prononça la suppression du régime féodal, avec toutes ses conséquences. La noblesse, déchue de tous ses privilèges, fut privée de plusieurs sources de revenus abolis en raison de leur origine.

La seigneurie de Kerminihy avait cessé d’exister. Les derniers seigneurs, Marie-Louise de la Marche, dame de Kerjan, et M de Kerjan, son mari, n’étaient plus que de simples propriétaires. La terre de Kerminihy, déjà divisée lors du partage au XVIIIème siècle entre Pierre et Anne Le Pappe, voyait ses revenus amoindris par la suppression des chef-rentes et autres redevances féodales : elle était enfin sérieusement menacée par les demandes de suppression des droits du propriétaire foncier sur les tenues exploitées au titre de domaine congéable [Note : Ces droits, successivement restreints par les lois des 6 août 1791, 27 août 1792 et 17 juillet 1793, furent supprimés le 29 floréal an II (18 avril 1796)].

M. de Kerjan, ancien capitaine de vaisseau, était, quelques années avant 1789, membre de la Loge de la Parfaite Union de Quimper. Son nom figure sur une liste publiée récemment, à côté de ceux des du Bot de Grégo, marquis du Grégo, du Haffont, de Keratry, de Kerbiquet, de Kerguelen, de Kernafflen, etc. Il ne faut pas oublier qu’à cette époque la Franc-Maçonnerie n’était pas ce qu’elle est devenue au XIXème siècle. Au nombre des affiliés, on voyait figurer des personnes appartenant à la magistrature, à la noblesse, au clergé, voire même des princes de sang.

Fort âgé au moment de la Terreur, M. de Kerjan qui avait 77 ans, dut à cette circonstance d’échapper à la proscription. Il fut pourtant arrêté le 15 octobre 1793, mais relâché au bout de quelques jours [Note : Le mari de Marguerite Mahieuc, dont il est question à l’occasion de l'Histoire du Comité révolutionnaire de Quimper (par M. Trévédy), était peut-être parent, mais certainement pas fils de François de Kerjan et de Marie-Louise de la Marche], le 26 octobre, et ne fut plus inquiété. Il survécut à sa femme, et ne mourut que le 16 octobre 1812, âgé de 96 ans. Son souvenir est resté longtemps vivant dans le pays, associé à la crainte qu’inspirait l’apparition de son esprit qui, disait-on, revenait la nuit dans la chambre qu’il avait habité au vieux manoir.

Mme de Kerjan n’avait conservé des quatre enfants issus de son mariage, qu’une fille, Mme de Kermorial, décédée à Quimper, le 8 avril 1790, et inhumée dans un enfeu dépendant de la terre Kerdaniel, appartenant à son mari. Mme de Kerjan survécut peu à sa fille, mais la date de sa mort n’est pas connue. Elle laissa pour uniques héritiers ses petits-fils Joseph, François et Amédée de Kermorial, dont les biens furent administrés par leur père et garde naturel, François-Pierre-Jean de Kermorial.

L’un de ces trois enfants mourut jeune ; les deux autres servirent leur pays dans les armées de terre et de mer, et devinrent, l’un lieutenant-colonel, l’autre capitaine de corvette. A la génération suivante, le nom de Kermorial n’était plus porté que par un fils du colonel, commis de la marine à Lorient, qui est mort sans avoir été marié. Avec lui s’éteignit la famille de Kermorial, qui n’est plus représentée en Cornouaille que par sa petite-fille, Mme Billette de Villeroche, de Concarneau. C’est ainsi que, de toutes les familles qui ont possédé la seigneurie de Kerminihy pendant les cinq siècles où son histoire est connue, aucune n’a de représentant de son nom au commencement du vingtième siècle (Villiers du Terrage).  

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