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Prieuré de Saint-Martin de Josselin

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Le Prieuré de Saint-Martin de Josselin (membre de Marmoutiers) d'après les Chartes existant aux Archives du Morbihan et celles données par Dom Morice.

1. Le premier titre du fonds de Saint-Martin est la charte relative à sa fondation. Elle commence ainsi : « Si quelqu’un veut savoir clairement comment le vicomte Josselin, fils du très-illustre vicomte Eudon, donna, pour le salut de son âme et de celles de ses parents, à Dieu et à Saint-Martin et à nous, moines de Marmoutiers, agissant sous le seigneur abbé Guillaume, la première année de son ordination, c’est-à-dire l’an de l'Incarnation 1105, si quelqu’un dis-je, désire clairement connaître cela, nous le renvoyons à la notice écrite à Marmoutiers, qui est ainsi intitulée : Cyrographum de Castro Joscelini, charte qui est conservée dans les archives de notre monastère pour l’instruction de nos successeurs ».

C’est donc en 1105 que le vicomte Josselin, appelé aussi Josthon, donna cette maison à Guillaume, abbé de Marmoutiers ; Josselin pria le prélat de consacrer l’église du prieuré en y apportant de l’abbaye quelques saintes reliques, et en 1110, sous le pape Pascal, Louis roi de France, Alain comte de Bretagne et Benoît évêque d'Alet, l’abbé Guillaume ouvrit, en présence de ses moines de Marmoutiers, les châsses renfermant des reliques de la sainte Croix, de saint Corentin évêque, de saint Flavien martyr, de saint Fulgence évêque, de saint Samson évêque et de saint Martin abbé ; ces reliques furent ensuite placées à Saint-Martin par l’abbé lui-même. Les noms à remarquer parmi les témoins de cet acte sont les suivants : Gilon, fils d'Anskitille, Geoffroy l'orfèvre, et Jean l'orfèvre fils de Pierre l'orfèvre. Sancelin cellerier. Payen chambrier. Robert le Tort.

 

2. Le 2ème titre est daté de 1108 et contient la donation de Josthon, vicomte de Josselin, au prieuré de Saint-Martin de la quatrième partie de l’église de Notre-Dame de Josselin ; cette partie avait d’abord appartenu au clerc Eudon, et, depuis sa mort, était retournée libre entre les mains de Josthon. De plus il accorde aux moines la possession des trois autres parties de cette même église s’il leur est possible de les acquérir d’ailleurs, ou si lui-même peut les leur donner, au cas qu’elles lui reviennent entre les mains. L’abbé Guillaume était présent à cet acte, qui fut passé dans le chapitre du prieuré, ainsi que Guillaume prieur de Marmoutiers, Garin de Lanrigan, Raoul prieur de Josselin, Milon prieur de Saint-Malo, Pierre bailli. Even sacriste, Gilon fils d'Anskitille. Du côté du vicomte étaient Simon son beau-frère, fils de Bernard de la Roche. Gingomar chapelain de Josthon.

 

3. La 3ème charte est la confirmation par Benoît, évêque d'Alet, du don qu’avait fait Josthon aux moines, de la quatrième partie de l'église Notre-Dame, qui dépendait de sa juridiction.

Cette charte offre un passage extrêmement curieux : c’est celui de la donation figurée de l’évêque à l’abbé : « J’ai fait ce don, dit-il, au moyen du couteau de Raoul, prieur de Saint-Martin de Josselin, que j’ai remis entre les mains du seigneur Guillaume, abbé de Marmoutiers, dans le parloir, devant la porte de sa chambre, en présence de beaucoup de témoins : Girard, légat. Grallon, mon chapelain. Hervé, prieur de Saint-Méen. Judicaël. Guihomar, mon frère. Du côté des moines : Guillaume, abbé de Marmoutiers. Guillaume, prieur. Even, sacriste. Raoul, prieur de Josselin. Tetbaldo de Columbis. Gingomar. Trothmund. André de Gomez. Pierre de Loroux. Garin de Lanrigan. Laurent, chanoine de Saint-Médard. Tylon, clerc ».

 

4. Le titre suivant ne porte pas de date, mais il est antérieur à la mort du vicomte Josselin qui y est cité.

C’est un acte de Geoffroy, fils de Riou de Lohoiac, qui approuve la concession faite par sa mère et par son oncle Gautier de l'Epine du passage près du château de Lohoiac pour tous les hommes sujets du monastère partout où ils demeurent, avec tout ce qu’ils portent ou conduisent. Parmi les témoins figurent l'abbé Guillaume et le vicomte Josselin avec ses frères Guihenoc, Geoffroy et Alain.

 

5. Il paraît qu’en mourant Josselin avait fait don aux moines du prieuré de toutes ses espèces en argent, en or et en deniers ; après sa mort son frère Geoffroy, successeur à la vicomté, assisté de ses frères Alain et Bernard, prétendit que cet acte de donation était faux. Ils donnèrent rendez-vous dans le château de Lohoiac à Guillaume, abbé de Marmoutiers, qui s’y trouva, accompagné des évêques de Saint-Malo et de Rennes, des abbés de Rennes, de Redon et de Saint-Méen et d’autres dignitaires, afin de décider ce qu’il fallait faire dans cette circonstance. Le vicomte et ses frères, voyant que les moines ne voulaient céder en rien, prirent le parti de s’arranger à l’amiable. L’abbé, après avoir pris conseil de ses amis, octroya aux frères deux coupes d’or que Josthon avait données pour contribuer à la construction de l’église de Saint-Martin et, afin que le souvenir de cette concession demeurât, l’abbé ordonna de donner dix sous au jeune Bernard, frère du vicomte.

De nombreux témoins souscrivirent à cet arrangement. Parmi eux on remarque Rivallon évêque d'Alet. Marbodus, évêque de Rennes. Guillaume, abbé de Marmoutiers. Donoal, abbé de Saint-Melaine. Hervé, abbé de Saint-Sauveur de Redon. Guillaume, abbé de Saint-Méen. Geoffroy, vicomte. Alain et Bernard enfant, ses frères. Gautier de Lohoiac. Conan de Sirent (peut-être de Sérent). Gautier, clerc de Noyal. Raoul, prieur de Josselin. Payen de Chemillé.

 

6. Morvan, évêque de Vannes, veut aussi contribuer à l’augmentation du prieuré de Josselin et, par un acte daté de 1116, il lui donne l’église de Crédin, sans préjudice des droits de l’évêque. Cette concession fut faite en l’église Saint-Pierre de Vannes, devant l’autel Saint-Hilaire, entre les mains de Raoul, prieur de Josselin ; de Josselin, moine, fils de Dérian ; et d'Eudon, moine. Les témoins furent : Norman, chanoine. Bernard, sacriste. Guyomar, doyen. Guethenoc, doyen. Maître Abraham. Judicaël, clerc. Gonou  fils de Fucon.

 

7. Nous traduisons la plus grande partie de la charte suivante qui est remarquable : « Sachent, tous présents et à venir que Geffroy, vicomte, fils d'Eudon, affligé depuis longtemps, par ordre de Dieu, d’une infirmité, et couché sur son lit dans son palais, sous le coup de la maladie, cependant ayant conscience de lui-même, appela à lui Rivallon, évêque d'Alet et Alain, vicomte, son frère, avec une grande partie des barons et des bourgeois ; et d’abord, pour le salut de son âme, ayant pris conseil de l’évêque et de ses clercs, par qui il fut muni du Saint-Viatique, il se donna lui-même à Dieu et à saint Martin et à ses moines pour qu’ils le fissent moine lui-même dans le prieuré de Josselin, si la maladie qui le tourmentait le conduisait au tombeau. En outre, il donna aux mêmes moines, soit qu’il mourût, soit qu’il vécût, toute sa part de la dîme de Guillac, c’est-à-dire de la moitié de cette plé (plage) …. Il fit ce don par les mains de Rivallon, évêque d'Alet, dans celles du prieur Raoul, au moyen d’un certain bâton dont on se servait pour le défendre de l’importunité des mouches ». Parmi les nombreux témoins mentionnés au bas de cet acte, nous citerons : Rivallon, évêque d'Alet. Marchenus, abbé de Saint-Jacut. Raoul, prieur. André, moine. Raoul, prieur de Sainte-Croix. Geoffroy, prieur de la Trinité. Enisan, prieur de Saint-Léan. Etienne et Morvan, prêtres de Notre-Dame. Parmi les laïques : Gautier l'Epine de Lohoac. Bernard, enfant, frère du vicomte. Robert et son frère Jacut, fils d'Enisan. Josselin de Langorlay. Phili, sénéchal. Robert de Merdrignac. Payen et Denoal fils de Gleen. Conan de Siren et Judicaël son fils. Hervé Trésloen. Gleen, fils de Guriou. Moron de Ploasmel. Hervé et Roger, fils de Fantou. André, fils de Caradoc. Judicaël Planzon. Rafred et Etienne, fils de Hildeard. 1118.

 

8. Le titre suivant, daté de 1128, pourrait être regardé comme faux, car l’écriture est du XVème siècle, et cependant il ne peut passer pour une copie puisqu’il est signé A. de Rohan et qu’il porte un sceau en double queue. Nous en faisons cependant mention. Il est du vicomte Alain de Rohan qui donne au prieuré la moitié du bourg établi devant la porte de son nouveau château appelé Rohan et un moulin auprès de ce château. « Cet acte fut passé, dit le vicomte, en notre château de Rohan, la susdite année, sous notre paragraphe et notre sceau, en témoignage de la chose ».

Note : Alain de Porhoët, troisième fils d'Eudon Ier vicomte de Porhoët, avait reçu en apanage de son frère, Geoffroi Ier, en 1120, le fief de Rohan. Ses descendants prirent le titre de vicomte de Rohan, et cette illustre maison a joué, dans l'histoire de Bretagne et l'histoire de France, un rôle tel que rien de ce qui intéresse ses origines ne saurait laisser l'historien indifférent.

Il va sans dire que les actes d'Alain de Porhoët, vicomte de Rohan, sont extrêmement rares. M. Rosenzweig en avait recueilli deux, publiés après sa mort dans le Cartulaire du Morbihan. Le premier, daté de 1127, est tiré du ms. fr. 22319 de la Bibliothèque Nationale ; c'est une copie de la fin du XVIIème ou du commencement du XVIIIème siècle, faite par les Bénédictins au moment où ils rassemblaient des matériaux pour leur grande Histoire de Bretagne (Note : Le ms. fr. 22319 fait partie de la collection dite des Blancs-Manteaux). Cet acte est ainsi analysé par M. Rosenzweig : « Alain, comte de Porhoët, donne aux moines de Saint-Martin de Josselin tout l'emplacement situé à la porte du nouveau château de Rohan pour y construire une église et un cimetière ». Le second, daté de 1128, est tiré du fonds du prieuré de Saint-Martin de Josselin aux Archives du Morbihan ; nous croyons devoir le reproduire ici [Note : La publication faite par M. Rosenzweig n'est pas entièrement sans fautes de détail] : « Anno ab incarnatione Domini millesimo centesimo vigesimo octavo, Ludovico rege regnante, Conano Britannorum comite, Ego Allanus vice comes dono et donavi Sancto Martino necnon monachis monasterii apud castrum Josselin totum burgum ante portam castri mei novi quod vocatur Rohan et unum molendinum et dimidiam villam, id est terram ad unam carucam sufficientem prope meum castrum et totum jus percipiendi decimas in parrhocia (sic) Sancti Petri de Querdin [Note : Crédin, canton de Rohan] usque ad meum castrum, retentis palleis, et dimidiam jurisdictionem curie communis de Querdin, ad deprecationem anime et animarum defunctorum meorum. Actum in nostro dicto castro de Rohan, anno supradicto, sub paragrapho et sigillo nostro in rei testimonium. A. DE ROHAN ».

Original parchemin, ont dit M. Rosenzweig et, après lui, M. du Halgouët, qui donne une traduction de cet acte, sans y attacher d'ailleurs l'importance que lui mériterait une authenticité indiscutable, car ce document prouverait, nous semble-t-il, l'existence d'une chancellerie seigneuriale au château de Rohan, dès 1128 [Note : A cette époque seuls les grands feudataires avaient une chancellerie, et le plus souvent même les donations faites à des monastères étaient rédigées par les soins du bénéficiaire. Cf. GIRY, Manuel de Diplomatique, p. 816 et suivantes].

Malheureusement, cet acte est un faux qui ne résiste pas à l'examen. M. L. Galles, en 1858, s'en était douté ; étudiant successivement les anciens titres du prieuré de Saint-Martin de Josselin, il écrivait à propos de l'acte qui nous occupe : « Le titre suivant, daté de 1128, pourrait être regardé comme faux, car l'écriture est du XVème siècle, et cependant il ne peut passer pour une copie puisqu'il est signé A. de Rohan et qu'il porte un sceau en double queue ». Le sceau, disparu, devait être un sceau rapporté. En tout cas, il n'aurait pas suffi à prouver l'authenticité d'un acte que tout dénonce comme un faux de la fin du XVème ou du commencement du XVIème siècle : l'écriture, la substance du parchemin, beaucoup trop fin et trop souple pour être du XIIème siècle, l'emploi du style personnel alors que toutes les autres donations seigneuriales faites à cette époque au prieuré de Josselin sont rédigées sous la forme classique de chartes-notices (GIRY, loc. cit., et Cartulaire du Morbihan, passim), l'absence de témoins, la formule sub paragrapho et sigillo nostro, enfin la signature elle-même. Sa seule présence est insolite, mais il suffit de la considérer un instant pour être fixé sur sa date ; nous en donnons ci-dessous un décalque : 

Josselin : prieuré de Saint-Martin

[Note : On pourra comparer cette signature avec d'autres de la même époque, en particulier avec celles reproduites par le Duc DE LA TRÉMOILLE dans son ouvrage : Correspondance de Charles VIII avec Louis II de La Trémoille pendant la guerre de Bretagne (1488)].

Ce faux grossier présente de singulières analogies avec la copie des Blancs-Manteaux. M. du Halgouët n'a pas manqué d'en être frappé et l'explique ainsi : « Le 5 des calendes d'avril de l'année précédente, promesse de donation avait été faite, au couvent même de Saint-Martin de Josselin, sur l'autel, en présence de Jostho ou Josselin, fils du donateur, et de plusieurs témoins. Entre les deux chartes le texte ne diffère guère, si ce n'est que l'acte donné au château de Rohan ne porte pas le motif réel de la donation : faire construire une église et un cimetière tout proche du château » [Note : H. DU HALGOUET, La Vicomté de Rohan..., p. 1 et 2].

Il est évident que, malgré cette similitude, les deux actes publiés par M. Rosenzweig ne procèdent pas l'un de l'autre. Mais nous nous sommes demandé s'ils n'avaient pas une source commune, et nous avons été assez heureux pour retrouver, dans le fonds du prieuré de Saint-Martin de Josselin (Voir archives du Morbihan), l'acte original de la donation faite par Alain de Porhoët aux moines de ce prieuré ; cet acte est en fort mauvais état, presque illisible par suite de l'usure du parchemin, et c'est pourquoi, sans doute, il n'a été signalé ni par M. Rosenzweig, ni par M. Galles. Nous donnons une transcription, ligne par ligne, de ce document, tel que nous avons pu le lire, en nous aidant de la copie du ms. fr. 22319, et de la publication faite par Dom Lobineau et par Dom Morice, dont nous parlerons plus loin.

Josselin : prieuré de Saint-Martin

Josselin : prieuré de Saint-Martin

En interligne, entre la 19ème et la 20ème ligne, au-dessous du mot comes, un mot finissant par uel ou niel.

Au dos : De castro Joscellini.

Sur le repli, les fentes par lesquelles passaient les lacs où était appendu le sceau (Note : Dom Lobineau dit n'avoir plus vu que les lacets du sceau ; l'appension du sceau sur cordelette de chanvre était en effet la plus fréquemment usitée à cette époque par les établissements monastiques).

Dom Lobineau et Dom Morice ont connu ce document et l'ont publié (Dom Lobineau, Histoire de Bretagne, T. II, Preuves : col. 156 ; - Dom Morice, Histoire de Bretagne, T. I, Preuves : col. 554). Leur publication, contrairement à ce que dit M. du Halgouët, (H. DU HALGOUET. La Vicomté de Rohan ..., p. 2, note 1), diffère sensiblement de le copie des Blancs-Manteaux donnée par M. Rosenzweig. Il est certain que les savants Bénédictins ont eu l'original entre les mains, comme ils l'affirment ; mais, à la fin du XVIIème siècle, le parchemin était déjà très endommagé et presque aussi difficile à lire qu'aujourd'hui, si bien que le texte qu'ils nous ont transmis n'est pas, en réalité, une transcription, mais nous offre une adaptation des divers fragments lisibles de l'acte, comme on s'en rendra facilement compte en le comparant avec celui que nous avons donné plus haut (Note : M. l'abbé MARTIN a publié et traduit le texte des Bénédictins dans son Histoire de Rohan Saint-Gouvry, 1104-1926, p. 14 et 15. Il dit à tort, page 12, que l'original de la donation d'Alain de Porhoët est conservée dans la collection des Blancs-Manteaux, ms. fr. 22319) :

Josselin : prieuré de Saint-Martin

De cet ensemble de textes, il résulte clairement que quelque temps avant sa mort (Note : Alain de Porhoët est mort en 1128), Alain de Porhoët avait donné, au prieuré de Saint-Martin de Josselin, une place devant son nouveau château de Rohan pour y construire une église et un cimetière, un moulin, des droits sur la paroisse, les dîmes et la justice de Crédin ; deux chartes originales de Jacques, évêque de Vannes, de 1129, suffiraient à nous le prouver [Archives du Morbihan, fonds de Saint-Martin de Josselin, 5 H 2. La première confirme au prieuré la possession de la chapelle de Rohan (Cartulaire du Morbihan, p. 168) ; la seconde contient un accord au sujet du tiers de l'église de Crédin et des dîmes de cette église (Id., P. 170)]. Or, le faux du XVème siècle rappelle ces diverses donations, sans rien y ajouter ; il n'a donc pas été fait pour permettre aux moines de revendiquer des droits usurpés. Il est vraisemblable d'admettre que dès la fin du XVème siècle l'original était devenu à peu près indéchiffrable, et que c'est pour remédier à cet état de chose qu'un moine du prieuré refit (Note : Les actes refaits ou re-écrits sont nombreux jusqu'au XIème siècle ; par la suite ils sont beaucoup plus rares, car on avait des notions juridiques, sur la valeur des actes, plus fermes et plus précises. Cf. GIRY, op. cit., p. 867) une charte de donation, en essayant de lui donner un caractère d'authenticité par l'apposition d'une fausse signature et d'un sceau emprunté à un autre acte ; il y a faux matériel, il n'y a pas faux moral. Il n'y a pas lieu de s'étonner que le faux ait été daté de 1128 ; l'original est, en effet, du 5 des calendes d'avril 1127, 28 mars 1127 ou 1128 ; nous ne possédons pas assez de renseignements sur le style usité en Bretagne au début du XIIème siècle pour pouvoir dire avec quelque certitude à quelle année doit être reportée la donation originale [Note : Ni les Bénédictins, ni A. de Courson dans ses Prolégomènes au Cartulaire de Redon, ni de La Borderie ne se sont préoccupés de rechercher quels étaient les styles employés dans les chancelleries bretonnes, au temps des rois ou des premiers ducs. Le peu que nous avons vu à ce sujet nous porterait à croire que le style de France fut en usage dès le XIIème siècle, mais nous n'oserions l'affirmer ; ce style fut le seul usité à partir du XIIIème siècle]. Mais le faussaire du XVème siècle ne se posa pas tant de questions ; il vivait en un temps où l'on employait couramment le style de Pâques ; il n'a lu que le mot aprillis, pour lui avril 1127 ou 1128 ; se conformant peut-être à une tradition ancienne, il a opté pour 1128.

A quelle occasion fut fait ce faux ? Nous aurions désiré pouvoir émettre au moins une hypothèse. Mais les archives du prieuré de Saint-Martin ne nous fournissent aucun renseignement. Il n'y a trace ni de procès, ni de contestation litigieuse, à la fin du XVème siècle, au sujet des biens donnés par Alain de Porhoët. Peut-être l'abbaye de Bon-Repos, fort mal administrée à cette époque (Voir H. DU HALGOUET, op. cit., p. 158 et suivantes), eut-elle des démêlés avec les moines de Josselin pour la délimitation de leurs droits réciproques ? C'est possible, mais nous ne pensons pas que, même à cette époque, un faux aussi grossier ait pu servir en justice. Quoi qu'il en soit, si les biens donnés à Saint-Martin de Josselin en 1128 lui furent quelque jour contestés, le prieuré obtint gain de cause, puisqu'en 1698 on trouve dans le « Dénombrement des maisons, terres, rentes ... et autres droits dépendant du temporel du prieuré de Saint-Martin de Josselin ..., par Louis de Coëtlogon ..., évêque ... de Saint-Brieuc, prieur commendataire de Saint-Martin » (Archives du Morbihan, fonds de Saint-Martin de Josselin), la mention suivante, au f° 33 v° : « En la paroisse de Crédin. — Déclare ledit seigneur prieur de Saint-Martin qu'il a la moitié du fief, bailliage et jurisdiction de la cour commune s'extendant en la paroisse de Crédin et autres circonvoisines, rentes, deniers et chappons, droits, profits, revenus et émolumens procédents à cause dudit fief et de la justice, exceptés toutefois les droits de barre, corvées et moulture du moulin de Couësmor ».

En résumé, il n'y eut qu'une donation faite par Alain de Porhoët au prieuré de Saint-Martin de Josselin. La charte-notice originale a donné naissance à trois autres documents, qui sont dans l'ordre de leur valeur diplomatique :

1° La transcription publiée par Dom Lobineau et Dom Morice ;

2° La copie des Blancs-Manteaux, ms. fr. 22319 de la Bibliothèque Nationale ;

3° Le pseudo-original de 1128, en réalité faux de la fin du XVème siècle.

Ces trois documents ne faisant que résumer l'acte original, aucune des conclusions que l'on en a tirées ne se trouve infirmée, sinon le fait, qui n'avait pas été mis en relief, de l'existence possible d'une chancellerie seigneuriale à Rohan dans les années qui suivirent l'érection de la vicomté et la construction du château. (G.-B. DUHEM).

 

9. Le 9ème acte émane de Jacques, évêque de Vannes de 1128 à 1132, qui ratifie la concession faite par son prédécesseur des biens donnés à Saint-Martin par les prêtres Guyomar et Rivald, ainsi que par Even, laïque, frère de Guyomar ; c’est-à-dire l’église de Sainte-Julitte de Molac avec tout ce qui revient à l’autel ; la moitié du cimetière qu’ils possédaient par droit héréditaire et la moitié des dîmes de toute la paroisse, ainsi que la terre qui leur revenait comme alleu. Ce don fut fait avec cette clause que les donateurs pourraient quand ils le voudraient, prendre l’habit monacal à Marmoutiers, et que, si Even, qui était laïque, aimait mieux prendre femme que faire profession, il jouirait pendant sa vie de la moitié de l’alleu. Ils ajoutèrent à ce don une maison qu’ils possédaient avec un courtil dans le cimetière susdit. « Ce fut fait dans l’église de Sainte-Julitte, un jour de Dimanche, devant la paroisse qui était alors présente ». Jacques ne se contente pas de ratifier la donation de son prédécesseur, il donne aussi pour son propre compte à Saint-Martin, la chapelle de Notre-Dame de Lermen, qui était membre de l'église de Sainte-Julitte.

 

10. Le même Jacques, évêque de Vannes, ratifie encore la donation faite par Morvan, de l’église de Crédin, ainsi que le don qu'Alain avait fait de la chapelle de Rohan.

 

11. Vient ensuite une charte de Jean, évêque de Saint-Brieuc, qui mérite d’être citée presque en entier. Après avoir établi que chaque évêque doit, dans son évêché, diviser avec justice les dons faits par les fidèles, il ajoute : « C’est pour cela que moi, Jean, par la grâce de Dieu, évêque de Saint-Brieuc, avec le consentement unanime de notre chapitre, accordons aux moines de Saint-Martin de Josselin, saufs les droits de notre église dans le pays de Porhoët, l'église de la Ferrière et celle de Lantenac, de manière que l’entrée et la sortie des prêtres qui desserviront ces églises se fassent par les mains des moines de Marmoutiers qui demeurent au monastère de Saint-Martin de Josselin. Les bénéfices de ces églises seront divisés, selon la volonté des moines, entre eux-mêmes et les prêtres afin qu’aucun scandale ne s’élève parmi les serviteurs de Dieu. Nous confirmons de plus et nous concédons tout ce qui a été transporté à ces moines par offrandes des fidèles, dans l’évêché de Saint-Brieuc. Nous leur accordons en outre l'Eglise de la Bienheureuse Vierge Marie fondée devant le château appelé vulgairement Jugon, et le cimetière que nous avons consacré à l’honneur de Dieu pour l’utilité du peuple de ce château, ainsi que la paroisse que nous avons assignée à cette église, nous, notre clergé et Olivier, seigneur dudit château. Nous défendons d’inhumer et d’ensevelir les corps des défunts aux croix des quatre chemins et dans les terres non consacrées pour servir de cimetière, mais nous voulons que les corps des fidèles de ce château reçoivent la sépulture dans ce même cimetière de Jugon. Nous ne permettons cependant d’enterrer les corps à cette chapelle, autrefois hôpital, et donnée avec cet hôpital aux moines de Saint-Martin, qu’avec le consentement des moines et de leur prêtre. Que ceux qui suivront ce qui est contenu dans cette confirmation faite pour le bien de Marmoutiers soient délivrés des chaînes de leurs péchés, que ceux qui y contrediront soient punis de l'anathème éternel. Fait l’an de l'Incarnation du Seigneur 1129. Indiction VII ».

Après la signature de l’évêque viennent les témoins qui sont : Judicaël, doyen. Hamon, archidiacre. Alexandre, prochantre. Roallen, chanoine. Hervé, chanoine. Geoffroy, chanoine. Foulquier, sacriste. Maurice, neveu de l’évêque. Hamon, prêtre de Trégueux. Gosbert, prieur de Lamballe. Garin et Aldebert, moines de Marmoutiers. David, prêtre. Urvod, clerc, et beaucoup d’autres.

 

12. La 12ème charte est de Conan, duc de Bretagne, qui ordonne aux soldats et aux bourgeois de Ploërmel de ne faire payer aucun impôt aux hommes dépendant des moines de Saint-Martin. Témoins : Geoffroy, vicomte. Alain, chapelain. Hervé d'Elbret. Daniel, fils de David. André prieur. Foulquier, et plusieurs autres. - 1129.

 

13.  La même année, une discussion s’éleva entre les moines et maître Geoffroy, fils de Raoul, touchant la troisième partie de l’église de Crédin et la troisième partie de la dîme de cette paroisse, c’est-à-dire la partie que tenait ce Raoul. Jacques, évêque de Vannes, voulant mettre fin à cette discussion, ordonna que ledit Geoffroy jouirait pendant sa vie de la moitié de cette dîme, et qu’après sa mort les moines posséderaient intégralement toute cette aumône, les droits de l’église de Vannes saufs. — Parmi les témoins on remarque : Jacques, évêque. Guyomard, archidiacre. Maître Abraham. Rainald, prêtre. André, prieur. Hervé. Jean. Robert. Foulquier. Gleius. Judicaël. Hamon, moines. Parmi les laïques : Mahias. Guyomar. Robert, fils d'Ermelin. Robert, fils de Rafred. Hervé, homme de Dieu. Daniel, fils de Glehoard. Hervé Fantou. Hervé, domestique.

 

14. Le titre suivant est un acte de l'évêque d'Alet qui règle la conduite que doivent tenir entre eux les moines et les prêtres de Notre-Dame de Josselin afin de prévenir tout scandale. Il est aussi daté de 1129 et passé dans l’église de Saint-Martin.

 

15. Par la 15ème charte, Donoal, évêque d'Alet, fait connaître que tout ce que le clerc Aldroïn avait donné de ses possessions dans l’église de Ménéac de Porhoët à Saint-Martin de Josselin, il l’accorde lui-même de pure et bonne volonté. Il lui donne aussi la chapellenie de la moitié de cette même église que tenait Aldroïn. Sur la demande du vicomte Geoffroy et de son fils Eudon, il accorde encore aux moines tout ce que ledit Aldroïn tenait d’eux dans le cimetière, ou en dîmes, ou en terres. Ceci fut fait dans la maison du doyen Morvan, à Josselin, l’an 1130. Et furent témoins : l'évêque Donoal. David, archidiacre. Gradlon, chapelain. Morvan, doyen. Alfred. Brient. Samson. Maingui de Guillac. Hervé de Lanouée, tous prêtres. Gautier, chanoine. Parmi les moines : André, prieur. Algomar. Hervé. Foulquier. Robert. Du côté des laïques : Geoffroy, vicomte. Eudon, son fils. Phili, sénéchal. Alfred Chef de Mail. Aldroïn, fils de Jacut. Judicaël et Carbonellus, fils de Conan. Eudon, fils de Payen. Rio, fils de Donoal. Brient, neveu de l’évêque. Rafred, fils d'Hubert. Guyomard. Gronnard. Inisan, fils de Prigent. Eudon, fils de Guethenoc. Fantou, fils de Bernard, et beaucoup d’autres.

 

16. Vers le même temps, Donoal, évêque d'Alet, concéda au prêtre Brient, que lui présentèrent les moines, la chapellenie de Josselin.

 

17. C’est aussi vers cette époque qu’il faut placer la donation que fit à Saint-Martin le vicomte Geoffroy, de deux parts du sixième denier de toute la rente de l’église de Lanouée avec deux sixièmes des prémices et des dîmes appartenant à cette église, entre les mains d'Odon, abbé de Marmoutiers. Ce don fut reçu par les mains de Donoal, évêque d'Alet, et remis aux moines.

 

18. Le même Donoal donna ensuite au prieuré la chapelle Saint-Nicolas de Guern avec toutes ses appartenances. Parmi les témoins de cet acte qui n’est pas daté se trouvent : David, archidiacre. Richard, neveu de l’évêque. Alfred Chef de Mail. Judicaël, fils d'Huës. Febvrier, fils de Grinou. Mengui, fils de Chalavadre.

 

19. En 1131, Raoul, sous-diacre, fils de Tualen le Roux, donne au prieuré, pour le salut de son âme, tous les droits qu’il avait dans l’église de Lanouée en oblations, en dîmes et en terres. Cette aumône est approuvée par Donoal. Témoins : Gradlon, chapelain. Morvan, doyen. Even de Guinni. Richard, neveu de l’évêque. André, prieur de Josselin. Turgis, prieur de Saint-Malo. Guillaume, prieur de Saint-Melaine. Tehelle, moine.

 

20. La charte suivante, datée de 1132, doit être reproduite ; car elle est curieuse en ce qu’elle relate un jugement de l’évêque de Saint-Malo entre les moines de Saint-Martin et des laïques. C’est un précieux témoignage de la manière dont on rendait la justice au XIIème siècle.

« Moi Donoal, par la grâce de Dieu évêque d'Alet, je transmets à la connaissance des fidèles que, devant nous, il a été appelé de la calomnie tenue par Rosellus, fils de Giroard de Lanvaux, contre les moines Saint-Martin, sur les choses que son père tenait en Huerniguel (peut être Gourhel). En effet, Rosellus disait que les moines avaient reçu de son père en gage ce qu’ils possédaient en cet endroit et que, pour cela, il voulait le dégager. Les moines, au contraire, présentèrent une charte par laquelle Giroard et son frère Hervé leur avaient concédé tout ce qu’ils tenaient à ferme, ou par vente, ou comme aumône. Giroard et Hervé leur avaient fait cette donation lorsque Robert le Tort, leur frère, avait été reçu dans le monastère. Cette charte était de plus signée par beaucoup de témoins dont huit existaient encore. Cependant Rosellus et ceux de son parti réclamaient contre cette charte qu’ils disaient fausse. Les moines leur opposèrent qu’ils prouveraient sa véracité par le témoignage de plusieurs personnes. Comme Rosellus refusait cette preuve si les huit témoins n’étaient produits, nous délibérâmes en notre conseil qu’il n’était pas nécessaire que ces huit témoins fussent présentés pour prouver la chose ; mais nous décidâmes que les moines en produiraient quatre qui confirmeraient la charte et que, de cette manière, ils posséderaient ce qu’ils tenaient maintenant par quelque droit que ce soit. Les moines se préparèrent à faire approuver cette charte, comme il avait été réglé et jugé, mais ils ne retrouvèrent plus personne pour recevoir leur preuve. Et furent présents à ce jugement : David, archidiacre. Grallon, chapelain. Richard, mon neveu. Raoul, archidiacre de Vannes. Abraham, chanoine de Vannes. Geoffroy, vicomte. Donoal, fils de Guihomar, et autres. Fait par la main de Pierre le Dinannais ».

 

21. Nous avons vu dans la 13ème charte une discussion s’élever entre les moines et un certain Geoffroy, fils de Raoul, touchant les dîmes de Crédin. Vers 1137, ce Geoffroy remit ces dîmes entre les mains de Yves, évêque de Vannes, successeur de Jacques, lesquelles dîmes, l’évêque Yves remit aussitôt au prieuré.

 

22. Le 22ème titre est de 1153 et émana du comte Eudon qui, pour la rédemption de son âme et de celles de ses prédécesseurs, avec l’assentiment et le conseil de ses frères Joscius, vicomte, et Alain Ceoche, accorda le don de Lesveren fait aux religieux par Marie, fille d'Isaac, et les siens. Et comme les moines le priaient de lui accorder quelques coutumes sur certaines terres ainsi que l’avait fait son père Geoffroy, il leur accorda le cens, le droit d'ost, le droit de past, les droits que levait le seigneur en mariant son aîné, ou en achetant des terres, ou quand il lui fallait payer sa rançon, et les coutumes sur les terres dont les noms suivent : Penret ; Guerniguel ; Bruhurunt ; le quart de Penguily ; une partie de la terre qui appartenait autrefois à Tual le Roux ; le tènement des prêtres de Ménéac ; la terre de l'abbé Audren. Témoins du côté du comte : Phill, sénéchal, Eudon et Donoal, ses fils. Riolch, fils de Donoal. Joscius, fils de Prugent. Pierre, fils de Giraud. Hervé, fils de Tréfloen. Alain, fils de Geoffroy. Boscher, chapelain. Maître Geoffroy. Meloch. Jean. Jobard. Aimery et plusieurs autres. Du côté des moines : Hervé, prieur. Guillerme. Turpin. Judicaël, Brient, doyen. Donoal. Rivallon. Gautier. Renaud. Hervé de Pennet. Tual. Hervé Passelande, et plusieurs autres.

 

23. Albert, qui tint l’évêché de Saint-Malo de 1163 à 1184, eut une contestation avec Henry, abbé de Marmoutiers, touchant le sixième et le neuvième deniers de l’église de Lanouée que celui-ci prétendait lui appartenir. Cette discussion fut terminée, par l’accord suivant : Pendant la vie d'Albert, les moines toucheront annuellement dix sous sur ladite église, cinq sous à Noël et cinq sous à Pâques, ensuite ils pourront réclamer si bon leur semble. Témoins : Geoffroy, archidiacre. Raoul, archidiacre. Sylvestre, doyen de Porhoët. Pierre, doyen de Carentoir. Hervé, prêtre de la Trinité. Hervé, prêtre de Mohon. Guyard, prêtre de Infintec (nom douteux). Jean, chapelain de Talensac, et beaucoup d’autres.

 

23 bis. Eudes, comte de Bretagne, voyant que Robert, abbé de Marmoutiers, ne se pressait pas de faire achever les édifices de Saint-Martin, commencés par son oncle Josthon, lui écrit d’y mettre ordre au plus tôt, sans quoi il se verra obligé de suspendre le paiement des dîmes accordées par le même Josthon à Saint-Martin ; il lui demande une réponse. Dom Morice cite cette lettre parmi d’autres titres de l’an 1155, mais je crois qu’elle dut être écrite peu avant le voyage que ce comte fit à Marmoutiers en 1164, d’après le titre qui va suivre (Dom Morice, T. I., col. 623).

 

24. L’acte suivant est de 1164 et raconte comment Eudon, comte de Bretagne, se rendit à Marmoutiers, et là, pour le salut de son âme et de celles de ses parents, et à cause des tourmentes qui agitaient la Bretagne, il donna à Saint-Martin de Josselin cent quarts de blé à prendre sur ses domaines héréditaires, et de plus, la moitié du passage de Ninian, à l’exception de la dîme qu’y prélevaient les chanoines de Saint-Sauveur, avec le tiers du droit de bouteillage dans le port de Vannes, et comme cette partie du bouteillage appartenait à son frère Josdius, il fit avec eux cet accord : si ses neveux, fils de Joscius, voulaient la leur laisser libre et exempte, ils la posséderaient paisiblement, si, au contraire, ils refusaient le dédommagement que lui-même leur offrait, et voulaient retenir cette part, il donnerait aux moines des rentes équivalentes à ce droit de bouteillage. Ce fut fait au chapitre de Marmoutiers devant les personnes qui avaient accompagné le comte : Raoul, vicomte de Donges. Henri d'Arundel. Geoffroy de Monfort. Raoul de Merdrignac, fils de Robert. Guillaume de Clairvaux. Alain de Tinténiac. Olivier de Grandville. Chef d'Asne. Mais comme Robert, abbé de Marmoutiers, ne connaissait pas le membre de son abbaye existant à Saint-Martin de Josselin, puisqu’il n’y était pas encore venu, le comte le pria de s’y rendre afin de voir par lui-même si les dons de son oncle, le fondateur de l'Eglise, étaient suffisants, et encore pour admirer la beauté de ce lieu. Enfin l’abbé y vint et y trouva l’évêque de Quimper, Bernard, ainsi que Sylvestre, abbé de Redon ; Hervé, abbé de Villeloup ; Guehenoc, abbé de Saint-Gildas et Guy, abbé de Saint-Sauveur. Dans cette assemblée, le comte change sa donation de cent quarts de blé en celle des dîmes de la paroisse de Guilliers, sauf celles qu’y percevaient les chanoines de Saint-Sauveur. Si cette dîme ne produit pas au moins cent quarts, le comte se charge d’y suppléer ; si, au contraire, elle excède cent quarts, il cède le surplus aux moines. Cet acte est autorisé par Alain de Rohan, parent d'Eudon, qui donne en même temps aux moines l’autre tiers du droit de bouteillage au port de Vannes. Cette concession fut faite entre les mains de Geoffroy, alors archidiacre de cette patrie (probablement le Porhoët), qui en investit l’abbé et les moines. Les principaux témoins furent : Geoffroy, archidiacre. Pierre, chapelain de Saint-Ouen. Rainald, prêtre de Saint-Nicolas, qui était venu avec l’abbé. Benoît, prêtre. Moïse, prêtre de Ploduoc. Judicaël de Crédin. Alain de Rohan. Raoul, vicomte de Donges. Etienne, frère du comte. Judicaël de Malestroit. Barthélemy de Questembert. Guillaume de Coettro. Geoffroy, fils de Gleen. Raoul, vicomte. Maître Boscher. Du côté des moines : Etienne, grand prieur de Marmoutiers. David, notaire. Aimery, chapelain de l’abbé. Aimery, hospitalier. Raoul, moine. Pierre, prieur de Josselin. Haimon, sacriste. Garnier, Geoffroy et Evain, moines. Guéhenoc, prieur de Malestroit. Judicaël, prieur de Rochefort. Parmi les serviteurs des moines : Eschuiard. Hugues, hospitalier. Roscinou, chambrier de l’abbé. Albert l’Anglais. Rivallon le Roy. Robin. Simon. Gautier de la Roche. Gautier Gasache. Donoal, serviteurs des moines. Cornu, Geoffroy et Olivier, brevigeri.

 

24 bis. Dom Morice (T. I col. 595) rapporte une charte de Rouaud, évêque de Vannes, qu’on peut placer vers l’année 1175, relative à des plaintes que le prieur et les moines de Saint-Martin lui adressaient touchant la difficulté de percevoir la dîme de Crédin et la grande diminution qu’avait subie cette dîme. L’évêque excommunie ceux qui refuseraient de payer et invite les chapelains de Rohan et de Crédin à renouveler cette excommunication tous les jours de dimanches et de fêtes. Les témoins furent : D. , archidiacre de Vannes. A. , doyen. M. , moine. S. , prieur de Josselin. Donoal, moine. Jean, prêtre de Crédin, et Robert, prêtre de Saint-Gonnery. Pierre, chapelain de Sainte-Marie de Vannes.

 

25. L’an 1179, une discussion s’éleva entre Albert, évêque de Saint-Malo et le prieuré au sujet de l’église de Ménéac. Voici la convention qu’ils firent ensemble pour terminer ce différent : Cette église appartiendra aux moines, sauf le droit de l’évêque, c’est-à-dire que, quand le siége presbytéral de Ménéac sera vacant, ils éliront un chapelain et le présenteront à l’évêque de Saint-Malo ; quant aux rentes de l’église, elles seront fidèlement partagées par moitié entre les moines et le prêtre. Cet acte fut passé à Tours pendant l’octave de Saint-Denis, devant les témoins suivants : Geoffroy, archidiacre. Raoul, archidiacre. Jean, abbé de Saint-Jacques de Montfort. Sylvestre, doyen de Porhoët. Pierre, doyen de Carentoir. Etienne et Hervé, chanoines. Hervé, chapelain de la Trinité. Hervé, chapelain de Mohon. Pierre de Ménéac. Girard, abbé de Cormeroy. Pierre d'Augan, chanoine de Saint-Maurice de Tours. Otbert, sous-doyen de Saint-Martin. Frairiald, chanoine de Saint-Martin. Hamon, sacriste de Marmoutiers. Gervais, bailli. Hugues, aumônier. Etienne, prieur de Josselin. Etienne de Pierrefont. David, moine. Moyse, notaire.

 

26. La 26ème charte, intitulée Cyrographum, porte la date de 1199 et contient un accord passé par devant Guéhenoc, évêque de Vannes, Pierre, archidiacre et T., trésorier de la même église, entre Josselin, évêque de Saint-Brieuc, et Etienne, prieur de Saint-Martin, au sujet des chapelles de la Verrière et de Lantenec. Après de longs débats, les parties s’accordèrent de la manière suivante : Le droit de concession desdites chapelles est à la présentation du maître des écoles, et appartient du reste à l’évêque de Saint-Brieuc. Dans ces chapelles, le prieur de Saint-Martin touchera annuellement huit sous et six deniers. Le chapelain, pourvu par l’évêque de Saint-Brieuc, prêtera serment de fidélité pour l’une ou l’autre de ces chapelles devant l’évêque et le prieur, ou leurs procureurs ; il paiera fidèlement lesdites pensions à Saint-Martin. Après que ces deux dignitaires eurent promis, devant l’évêque de Vannes, de garder inviolablement cet accord, l’évêque de Saint-Brieuc confirma la donation des dîmes appartenant à Saint-Martin dans tout son évêché.

 

26 bis. Un acte, rapporté par Dom Morice (T. I., col. 800) sous la date de 1205, vient combler une lacune dans le fonds de ce prieuré. Par cet acte, Alain IV, vicomte de Rohan, confirme à Saint-Martin le don que lui avait fait son prédécesseur Joscius de l'église de Crédin avec toutes les dîmes et la moitié de la paroisse, ainsi que la forêt qui est entre cette terre et la rivière d'Oust ; il retient cependant une rente sur ces biens et promet de veiller aux intérêts et à la sûreté des moines. Le même vicomte leur donne aussi l'église de Kergrist ainsi que la bourgade, libre de tout impôt et exaction, pour la rente de vingt sols que les religieux lui devront payer tous les ans à la Saint-Michel. Il leur concède encore le passage du Blavet, à Pontivy, avec quelques droits, et la terre nommée Terre des prêtres.

 

27. L'an 1225 vit se renouveler une ancienne querelle assoupie depuis plus de 90 ans entre les moines et les héritiers de Rosellus qui, par l’accord de Donoal évêque de Saint-Malo, avaient été reconnus possesseurs de biens cédés comme gages par Hiroard ou Giroard, père de Rosellus. En 1225 donc, le prieur prétendit entrer en possession de ces mêmes biens situés en Guerniguel ; et les descendants de Hiroard et de Rosellus, c’est-à-dire Olivier, fils de Frech, son épouse Haias, et ses enfants Olivier, Jean, Eudon, Hodierne et Thame, invoquèrent la charte de Donoal. Cette altercation cessa enfin grâces aux instantes prières d'Eudon fils du comte, qui confirma par l’apposition de son scel l'arrêt de l’évêque Donoal.

 

28. Cinq ans plus tard le même Eudon échangea avec le prieuré une terre nommée la Vigne du comte Geoffroy, contre des emplacements dans les fossés de son château.

 

29. La réimpression du dictionnaire d'Ogée a fait mention de tanneries et de moulins à tan existant encore à Josselin. Je ne sais si l’auteur, en écrivant ces lignes, avait sous les yeux la charte de 1231, qui est la 29ème du fonds de Saint-Martin, mais ce qu’il y a de certain c’est que cette branche de commerce n’était pas une nouvelle industrie dans la ville de Josselin, puisque dès le XIIIème siècle le comte Eudon faisait de la donation d’un moulin à tan l’objet d’une charte spéciale ; l’histoire de ce moulin, qu’un des prieurs de Josselin a pris soin d’écrire en quelques lignes au haut de la charte, a quelque chose de particulier et d’intéressant puisqu’elle fait voir combien, à une époque où la dîme prélevée par le clergé n’était déjà plus qu’un impôt onéreux, les cultivateurs tâchaient de se soustraire à cet impôt et d’éluder autant que possible l’observation des charges auxquelles ils avaient été soumis.

« Comme la vie des hommes est courte et que leur mémoire meurt avec eux, les choses qui se passent actuellement doivent être confiées à l'écriture qui reste plus longtemps. C’est pourquoi moi, Eudon, fils du comte, fais savoir à tous que j’ai donné et accordé en pure et perpétuelle aumône au couvent de Marmoutiers, afin qu’il fasse tous les ans mon anniversaire, mon moulin à tan sous le château de Josselin, situé sur le fleuve d'Oust, ainsi que mon corps, que j’ai désiré être enseveli dans le monastère de Saint-Martin de Josselin. Et afin que cela demeure vrai et stable, j’ai fait munir de mon sceau la présente charte ».

Voici maintenant l'annotation écrite au XVIIIème siècle : 

« Ce titre est à conserver. Par un grand déluge du fleuve d'Oust, les habitations des hommes de Josselin et les moulins à tan furent emportés suivant la tradition, il y a environ 400 ans. Depuis ce temps, il n’y a eu aucun tanneur à Josselin et on rétablit, au lieu d’un moulin à tan, un moulin à battre filasse, les vassaux étant obligés d’y porter leurs filasses pour être festoupées. Et les vassaux qui paient la dixme gerbe (?) des filasses au 12ème et qui payaient encore le 12ème des filasses sèches pour être festoupées au moulin, cessèrent de semer du lin et du chanvre, et par ce moyen l’on perdait la dixme gerbe (?) et le droit de moulin. Ce moulin était désert et devenu inutile et détruit depuis plus de 200 ans ; et cette destruction a remis les sujets dans leur ancien train de semer des filasses dont la dixme se perçoit, ils avouent par un aveu le droit de leur moulin, mais il serait dangereux de le réédifier parce qu’ils feraient comme leurs pères et on perdrait les deux droits. Ce que dessus a été écrit au mois de juillet 1743 ».

 

30. L’an 1239, une discussion s’éleva à Saint-Malo entre Guillaume, sieur de Derval, et Aliénor son épouse, d’une part, et le prieur et les moines de Josselin de l’autre, au sujet de deux quarts de seigle et d’un quart de froment que le sieur Mol … et Cadiocus, son fils, soldats, avaient donnés à Saint-Martin, au dire des moines, pour incendie et dévastation commises par eux à Josselin. Enfin les deux parties s’arrangèrent à l’amiable et Guillaume de Derval convint de donner aux moines cinq minots de seigle à la mesure de Ploërmel, à prendre sur ses dîmes de Ploërmel, à la Toussaint de chaque année.

 

31. L’année suivante, l’archevêque de Tours fut obligé de s’entremettre entre l’évêque de Vannes et l’abbé de Marmoutiers au sujet de certains droits auxquels l’évêque prétendait sur les vassaux du prieuré de Saint-Martin demeurant à Vannes.

 

32. La succession des titres de Saint-Martin éprouve ici une lacune de près de cent ans, soit qu’ils aient été anéantis, soit qu’aucune donation n’ait été faite au prieuré pendant ce laps de temps. Au XIVème siècle, on retrouve une confirmation de Charles de Valois, comte d'Alençon, frère du roi de France, des biens donnés à Saint-Martin par Eudon, comte de Bretagne.

 

33. Depuis le XIVème siècle jusqu’au XVIème ou ne trouve pas ou presque pas de renseignements sur le prieuré. Il est probable qu’il soutint sa renommée pendant quelque temps, puis que la guerre de succession le ruina comme beaucoup d’autres que la sainteté des lieux ne mettait pas à l’abri de la fureur des soldats et surtout de soldats armés contre leurs compatriotes. Cependant, s’il ne recevait pas toutes ses rentes, il conservait ses terres et ses droits, et quand les règnes des derniers ducs vinrent mettre un peu de paix au sein de la nation bretonne, les établissements religieux firent valoir leurs titres et rentrèrent en possession des dîmes et héritages que leur avait légués la piété des Croisés du XIIème siècle.

Jean, duc de Bretagne, pour faire face aux exigences des guerres qu’il avait à soutenir contre Charles de Blois, son compétiteur, s’était emparé de beaucoup de droits, et entre autres, du droit de bouteillage au port de Vannes, qui appartenait depuis de longues années aux moines de Saint-Martin. Ces religieux ne manquèrent pas de réclamer énergiquement la restitution de ce droit ; aussi, en 1365, le duc Jean leur octroya-t-il une charte par laquelle il les remettait pleinement en possession de cette prérogative, et ordonnait à ses capitaines, connétable et receveur de Vannes de les en laisser jouir paisiblement.

En 1479, le prieur devait aveu au sire de Rohan (Dom Morice, T. II., col. 39) ; le revenu du prieuré était alors de 500 livres.

En 1516, Antoine Fumée, prieur commendataire de Saint-Martin, met obstacle à ce que les religieuses carmélites bâtissent à Vannes le couvent qui devait porter le nom de Nazareth, sur un terrain appartenant au prieuré ; il concède néanmoins cet endroit à condition que la nouvelle communauté paie chaque année quarante livres bonne et forte monnoye de Bretagne et que, dans l’église des Carmélites, on construise un autel et image de Monsieur Saint Martin pour mémoire de la fondation dudit prieuré de Saint-Martin.

 

34. En 1580, Philibert Bouin, prieur commendataire, afferme à Cyprien Rouxel, sieur de Lecadeuc, en Guilliers, à Jean Mestayer, sieur du Bosq, et à Bertrand l'Abbé, sieur du Lézillier, demeurant en la ville de la Trinité-Porhoët, le tout du revenu tant certain qu’incertain du prieuré de Saint-Martin pour la somme de mille trente écus d’or, à la charge auxdits prieurs de nourrir et d’entretenir deux religieux par an pour faire et entretenir le service divin audit prieuré, payer la pension due au vicaire de Crédin sur les dîmes de ladite paroisse, trois quartiers et demi au prieur de Saint-Samson sur les dîmes de Crédin, six mines de blé au vicaire de Saint-Martin, d’acquitter la table abbatiale à l’abbaye de Marmoutiers et le cens.

En 1698, ce prieuré avait droit de haute, moyenne et basse justice dans une partie des paroisses de Saint-Martin de Josselin, Lanouée, Guégon, Croix-Helléan, Mohon, Crédin et autres circonvoisines.

Le prieur avait droit de bouteillage sur tous les débitants de vin ou cidre en détail, dans la paroisse de Saint-Martin, fauxbourg de Glastinnier et de Loyat, à savoir : 2 pots de vins ou de cidre par pipe.

Il avait le droit de poitrine sur le bétail tué à Saint-Martin ou à Glastinnier, le droit de fermage, le droit de croquetage ou droit sur les marchands qui vendent avec crocs ou poids, le droit de colombier, le droit de garenne et de chasse, le droit de pêche dans la rivière d'Oust, le droit de moulin à eau sur les moulins de Rouvray, en Lanouée, le droit de corvée sur tous ses vassaux et sujets, le droit de coûtume, le droit d'homme, etc.

Enfin, dans le XVIIIème siècle, le revenu du monastère de Saint-Martin était de 8.077 livres 18 sous.

 

LISTE DES PRIEURS DE SAINT-MARTIN.

1105-1118. Raoul, 1er prieur. — 1129-1131. André. — 1137. Giraldus. — Vers 1145. S. — 1150-1153. Hervé. — 1164. Pierre. — 1170-1204. Etienne. — 1220-1225. Ranulfus. — 1428. Fr. Salmon Chevalier. — 1432. Fr. Jean de Cahideuc. — 1443-1445. Fr. Geoffroy Bertran. — 1465-1495. Fr. Geoffroy Guyton, abbé de Lantenac, en 1495. — 1516. Antoine Fumée. — 1565-1586. Maître Philibert Bouin. — 1615-1616. Maître Alain Bonin. — 1671-1698. M. Louis Marcel de Coëtlogon, évêque de Saint-Brieuc, abbé de Bégar (Bégard). — 1715. Maître Olivier Ternin Hinou, abbé de la Forest. — 1720. Guillaume Aubrée.

M. L. Galles

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