Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

LES CORDELIERS DE GUINGAMP - LA TERRE SAINTE - GRACES

  Retour page d'accueil       Retour " Ville de Guingamp "   

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

« En 1283, écrit D. Morice, les Cordeliers s'établirent à Guingamp, sur la paroisse de Saint-Sauveur, vers le nord de cette ville. Leur établissement fut d'abord peu de chose ; mais Gui de Bretagne, comte de Penthièvre, fils d'Arthur II, augmenta si considérablement cette maison qu'il en fut regardé comme le véritable fondateur ».

D'Argentré et Albert-le-Grand ne parlent pas du premier établissement spontané des Cordeliers. « L'an 1283, dit notre hagiographe, le quatriesme octobre, jour et feste de sainct François, Guy de Bretaigne, comte de Pentyevre, et Ianne d'Avaugour, sa femme, fondèrent le convent de Sainct­François de l'ordre des Cordeliers, sur le bord des fossez de leur ville de Guenkamp, entre les portes de la Fontaine et de Tréguier ».

Guy de Penthièvre mourut en 1331, et fut inhumé dans l'église qu'il venait de bâtir, à côté de Jeanne d'Avaugour, morte en 1326.

Charles de Blois eut pour les pauvres enfants de Saint-François le même amour que son beau-père, et ce fut à la protection de ce religieux prince, et surtout à son tombeau, que le couvent des Frères-Mineurs de Guingamp dut sa haute illustration.

Le bienheureux Charles de Chastillon écrit Albert de Morlaix, « fit bastir, en l'église des Cordeliers de Guenkamp, un autel en l'honneur de sainct Louys de Marseille (de la famille duquel il avait l'honneur d'estre extraict), fit peindre toute la dite église, faire le jubé, les chaires du choeur et le pavé jusqu'au grand autel, leur donna plusieurs ornements de soye, de velours et de drap d'or, des chandeliers d'argent, deux croix d'argent enrichies de pierreries, un Epistolaire et un Evangelistaire ornez de pierres précieuses, toutes les quelles choses luy coustèrent jusqu'à huict mille huict cents cinquante florins d'or ».

Saint Louis de Marseille, auquel fut dédié l'autel de Guingamp, était un prince de la maison maternelle de Chatillon, second fils de Charles II, roi de Naples et comte d'Anjou. Le prince Louis, religieux franciscain et évêque de Toulouse, mourut à l'âge de vingt-trois ans, le 19 août 1297, et fut enterré dans le choeur des Cordeliers de Marseille, d'où il fut appelé Louis de Marseille. Il a été mis au nombre des saints par le pape Jean III.

D'autres libéralités du pieux duc de Bretagne sont encore révélées par l'enquête du procès de sa canonisation. Ce que la foi et la dévotion ont fait pour les arts est prodigieux : Pietas ad omnia utilis est. La stérilité artistique de nos siècles incroyants, comparée à la fécondité du moyen–âge, en est la meilleure preuve.

Charles de Blois avait choisi l'église des Cordeliers pour sa sépulture ; il en écrivit à ces religieux en ces termes : « Charles, duc de Bretaigne, vicomte de Limoges, et Jeanne, duchesse et vicomtesse des ditz lieux, à nos bien améz le guardien et le convent des Frères Mineurs de Guingamp qui à présent sont et qui pour le temps advenir seront, salut. Pour ce que nous ditz Duc et Duchesse, d'un commun assentement, avons ordonné et élu nostre sépulture, quant à Dieu plaira faire son commandement de nous, en vostre église doudict convent de Guingamp, entre le grand aultier et les pieds de Monseigneur et de Madame de Penthièvre que Dieu pardoint ; nous vous mandons et deffendons, prions et requerons, sur ce que vous nous pouvez desplaire, que vous ne sépulturez nul corps, quelque soit, ne de quelconque estat, dedans le tueur de la dicte église, fort tant seulement les corps des fondateurs d'icelle, quand le cas se offrira ».

Eglise de Grâces, près de Guingamp (Bretagne).

Le dimanche 29 septembre 1364, la dague d'un soldat anglais frappait traîtreusement le glorieux vaincu d'Auray, et, quelques jours après, les Cordeliers de Guingamp recevaient les reliques de leur vénérable bienfaiteur. A partir de ce moment, le couvent reçut le nom de Terre-Sainte. Des miracles s'opérèrent au tombeau de Charles : « L'Anglois qui l'avoit tué, raconte notre inimitable légendaire, s'estant venté d'avoir fait le coup, forcena et devint enragé et hors de sens ; de sorte que ses parents l'ayant lié et garrotté, le menèrent à Guenkamp, nu sépulchre du bienheureux Charles, où, après avoir fait leurs prières et oblations, il revint à son bon sens, et s'agenouïlla devant le sépulchre, y fit ses oraisons, et se donna, soi et tous ses biens, au service du dit monastère des Cordeliers de Guenkam ».

Les Frères-Mineurs de Guingamp prirent une part active aux démarches tentées pour la canonisation du religieux prince, et que firent seules échouer des considérations politiques faciles à comprendre.

F. Raoul de Kerguyniou, cordelier guingampais, dirigea cette délicate affaire, comme mandataire de Louis de France, duc d'Anjou, gendre de Charles ; de Marie de Chatillon, sa fille ; de Jeanne de Penthièvre, sa veuve, et de Jean et Guy de Chatillon, ses fils, prisonniers en Angleterre. F. Raoul, par son zèle et son habileté, se montra digne de cette haute confiance.

Plusieurs religieux du couvent de Guingamp figurent au nombre des témoins de l'enquête : F. de Kelen, prêtre ; F. Derrien, du Tiers-Ordre ; F. Jean Lay, prêtre. Notons, pour mémoire, deux autres témoins guingampais, Michelet Barbelot, barbier et valet de chambre du duc ; Prigence Hamonou, receveur du prince pour ses revenus du pays de Guingamp.

La veuve de Charles, l'héroïque Jeanne de Penthièvre, vint elle-même, vingt-et-un ans après la mort de son mari, dormir à ses côtés, sous les dalles de la Terre-Sainte.

En 1403, Jean de Blois, mort à Lamballe, fut transporté à Guingamp, et inhumé près de son père et de sa mère.

Après que François Ier eut rendu son lustre à la maison de Penthièvre, le couvent de Terre-Sainte devint de nouveau la sépulture de cette noble famille. Jéhan de Brosse y fut enterré en 1565. Sébastien de Luxembourg, pieux sous le casque comme Charles de Blois lui-même, et dont saint François de Sales disait « qu'il scella de son sang et trespas les progrès d'une vie très-chrétienne, digne de la grande maison dont il estoit, » reposa auprès de son oncle.

Le 14 décembre 1562, Jéhan de Penthièvre avait pris dans l'argenterie des Cordeliers cent marcs d’argent qui furent estimés 1.800 livres, pour lesquelles le comte hypothéqua les halles de Guingamp. Cette somme fut remboursée, en 1581, par Madame de Martigues. Le couvent menaçait ruines et les 1.800 livres auraient pu servir à le rebâtir ; mais les religieux étaient lassés de cet emplacement, si proche des remparts, et qui faisait qu'à chaque siège leur maison était envahie par la soldatesque : ils placèrent leur pécule, à fort bons intérêts, chez deux marchands de la ville. Bien leur en prit ; car, en 1591, le prince de Dombes incendia le monastère et ne laissa pas pierre sur pierre.

La Terre-Sainte fut dès lors abandonnée, et la libéralité de la duchesse de Mercœur et de la famille de Kerisac permit aux Cordeliers de bâtir un nouveau couvent proche de la chapelle de Notre-Dame de Grâces, située à une demi-lieue de Guingamp, sur la paroisse de Saint-Michel.

Bien que les origines de la chapelle de Grâces ne remontent qu'au XVIème siècle, elles sont enveloppées d'une obscurité que j'essaierai peut-être en vain de dissiper.

Dans les dernières années du XVème siècle, un mendiant Franciscain construisit, au village du Beuzit, et contre le talus d'un convenant au sieur de Kerisac, une petite loge en forme d'oratoire. Ce rustique sanctuaire attira extraordinairement la dévotion des fidèles, de sorte que les gouverneurs de la paroisse de Saint-Michel songèrent à bâtir en ce lieu une chapelle plus convenable. Or, c'était le temps où la duchesse Anne accomplissait ce pèlerinage durant lequel elle reçut tant de marques éclatantes de l'amour de ses Bretons, et prodigua elle-même tant de faveurs à sa fidèle province. L'escarcelle de la duchesse s'ouvrit généreusement pour la fondation de la chapelle projetée par les paroissiens de Saint-Michel, et, le 15 mars 1507, fut posée la première pierre de l'un des plus riches et des plus merveilleux sanctuaires de Notre-Dame, en Bretagne. Cette date est constatée par une double inscription qu'on lit, à l'extérieur, sur la base de la tour de Grâces, et sur la corniche du lambris, à l'intérieur.

Eglise de Grâces, près de Guingamp (Bretagne).

A peine les constructions étaient-elles commencées, qu'un procès fut intenté par la famille de Kerisac, qui prétendait au titre de fondateur de la chapelle, pour avoir donné le terrain sur lequel on la bâtissait. Les gouverneurs de Saint-Michel répondaient que la famille de Kerisac avait bien fait offre d'un terrain pour avoir le titre de premier fondateur ; mais que cette offre avait été repoussée, et que l'on bâtissait un peu au-dessous de la fontaine du Franciscain, précisément pour ne rien devoir aux Kerisac.

Le Parlement débouta le sieur de Kerisac de sa demande, par un arrêt du 5 octobre 1509, dans lequel j'ai puisé les principaux détails de ce récit ; et les constructions continuèrent avec une nouvelle ardeur, du consentement de l'évêque de Tréguier. Les bornes de cet ouvrage ne me permettent pas d'entrer dans l'étude détaillée de cette admirable chapelle, monument complet, sorti tout entier de la pensée du même artiste, dernière fleur du style ogival éclose sur le sol breton.

Ce qu'il y a de très-remarquable, c'est que les sculptures de Grâces ne sont autre chose qu'un long poème où sont stigmatisés tous les vices, sous la figure de Franciscains paresseux, avares et gourmands. Etait-ce une leçon de morale, était-ce une sanglante satire ? Quoi qu'il en soit, ces sculptures sont magnifiques de verve grotesque, et, pierres ou bois, dénotent certainement un très-habile ciseau et une luxuriante imagination. Voyez cette gargouille, c'est un gros Cordelier qui presse de ses deux mains son ventre trop plein, et dont la bouche grimace pour vomir ; étudiez l'une après l'autre les scènes rabelaisiennes, ciselées comme dessinait Callot, le long de la corniche du lambris : ici, c'est un moine ivre qui roule sous une tonne immense et se noie dans une mer de vin ; là, c'est un moine encore dont la sordide avarice se livre à un métier que ma plume ne peut décrire ; ailleurs, un diablotin lubrique brouette en enfer une charretée de nones ; tout cela est encadré dans un merveilleux fouillis de feuillage et d'arabesques, qu'animent des chasses fantastiques et que peuplent tout un monde d'animaux bizarres. La conclusion de ce poème étrange, c'est un bas-relief isolé où deux anges en pleurs montrent au peuple la sainte face du Christ, sanglante, meurtrie et couronnée d'épines, expiation éternelle de tous les désordres et de tous les scandales dont l'artiste vient de vous offrir la représentation cynique.

La pensée franciscaine, on le voit, remplit chaque détail de cette curieuse chapelle, et pourtant Grâces n'appartint aux Frères-Mineurs que cent ans après sa fondation ; mais on n'a pas oublié qu'un Franciscain, en bâtissant en ce même lieu un oratoire de mottes et de feuillage, avait été la première cause de la dévotion à Notre-Dame, et de la construction du monument.

La réintégration des Penthièvre dans leur apanage, leur transmit le droit de présentation de la chapelle de Grâces et le titre de fondateurs. Une transaction de 1559, entre eux et les Kerisac, établit que ces derniers sont seulement les bienfaiteurs de l'église bâtie sur un fonds qui leur avait appartenu.

A l'époque où les Cordeliers furent chassés de leur couvent de Terre-Sainte, René Chomard était chapelain de Grâces. Touché de compassion pour les pauvres expulsés, il les accueillit dans sa maison, et, les voyant sans demeure et sans église, il se démit de sa chapellenie en leur faveur, et supplia les Penthièvre de leur donner la chapelle et ses dépendances, pour qu'ils pussent y établir un couvent.

La duchesse de Mercœur consentit volontiers à cette pieuse demande, et, dans le courant de l'année 1605, la donation fut successivement approuvée par le pape Paul V, le roi Henri IV et le Parlement de Bretagne.

Madame de Martigues ajouta à ce don la somme de mille livres tournois, pour aider à bâtir le nouveau monastère. La reconnaissance des Cordeliers proclama solennellement Madame de Martigues et Madame de Mercœur, leurs dames, leurs fondatrices et leurs princesses.

Le terrain du couvent était trop exigu et ne comprenait que cent quarante-trois cordes ; « noble et puissant Claude Hingant de Kerisac, mu de dévotion pieuse et désireux de participer aux bonnes prières qui se feroient dans le couvent, » y ajouta, en 1613, une donation de deux cent quarante-six cordes de terre.

Eglise de Grâces, près de Guingamp (Bretagne).

Il ne reste plus rien de la maison des Cordeliers ; mais la chapelle de Grâces subsiste, et sert aujourd'hui d'église paroissiale à la commune du même nom. On y conserve précieusement les restes du bienheureux Charles de Blois, dans un reliquaire mesquin et de mauvais goût que le duc de Chatillon fit construire, en 1753, pour honorer la mémoire de son glorieux ancêtre : un duc de Chatillon aurait pu faire mieux.

 

Bretagne : Histoire, Voyage, Vacances, Location, Hôtel et Patrimoine Immobilier

DE LA FONDATION DES FRÈRES MINEURS DE GUINGAMP ET DES CHOSES REMARQUABLES ENSUITE.

En l'an 1283 (1233 ?), le 4 octobre, jour de saint François, les Frères-Mineurs Cordelliers arrivèrent à Guingamp, et la même année y furent établis en leur emplacement, donné par illustre prince Guy de Bretagne, comte de Penthièvre et cadet du duc Jean III ; et mourut icelui Guy, en l'an 1330, après madame Jeanne d'Avaugour, sa compagne, qui mourut l'an 1327, le 28 juillet (août ?), et fut la dite Dame enterrée au dit couvent, en habit de Ste Claire, l'un et l'autre dans leur tombeau, dans le choeur de l'église.

Ce même Guy fit, par sa diligence et ses soins, canoniser saint Yves, patron des Bretons, qui prit l'habit du Tiers-Ordre de S. François au dit couvent de Guingamp, peu d'années avant son trépas.

L'an 1319, le 23 janvier, Louis d'Avaugour, évêque de Saint-Brieuc, mourut et fut enterré dans l'église des Frères-Mineurs de Guingamp, proche le sépulcre de madame Jeanne d'Avaugour ; il donna entr'autres choses deux mitres, dont l'une est en broderie d'or et d'argent d'une assez notable valeur.

En l'an 1328, illustre dame Marie de Beaumont, dame d'Avaugour, fut enterrée au dit couvent, en habit de Ste Claire.

On répond ici à ceux qui disent que ce sont les seigneurs d'Avaugour qui sont fondateurs du couvent des Frères-Mineurs de Guingamp, que la conséquence qu'ils tirent des illustres d'Avaugour, n'est qu'à cause de Jeanne d'Avaugour, femme de Guy de Bretagne, qui avait eu Guingamp du duc Jean III, soit en partage ou échange pour le pays de Limousin, et ainsi ils se trompent, puisque le couvent était sur les terres de Guy, cadet, comme dit est, du duc de Bretagne ; et, en effet, les ducs sont toujours dits fondateurs par succession ou autrement.

Et de vrai, en l'an 1362, Charles de Blois, duc de Bretagne, fait défense aux Frères-Mineurs de Guingamp de permettre aucun enterrement dans le choeur de leur église, à la réserve des fondateurs, parce que lui et madame la duchesse sa femme font élection de leur sépulture au dit Couvent ; ce qu'ils n'auraient, ce semble, fait si ce avaient été les seigneurs d'Avaugour qui auraient donné le fonds du dit couvent.

En l'an 1364, le 29 septembre, le duc Charles de Blois mourut à la bataille qu'il eut à Auray, avec Jean de Montfort (ils prétendaient tous deux le duché de Bretagne), et il fut enterré au dit Couvent, dans le tombeau de Guy ; les reliques du quel Charles et son coeur furent enchassés en un carré de plomb, qui sont à présent à Notre-Dame de Graces, et ont toujours été en grande vénération et le tient-on pour saint. Et, en effet, à la recommandation de Charles VI, roi de France, sous le pontificat d'Urbain V, on travailla à sa canonisation, qui fut cessée par la mort du dit Urbain. Albert-le-Grand, Jacobin, en fait mention dans la légende des Saints de Bretagne. Ce même Charles donna de rente annuelle, par fondation, au dit Couvent, soixante livres monnaie, qui étaient beaucoup en ce temps-là.

L'an 1384 mourut madame la duchesse femme du duc Charles, et fut enterrée au dit Couvent, en la même voûte.

L'an 1403, illustre prince Jean de Bretagne, premier né du dit Charles de Blois, comte de Penthièvre, fut enterré dans la même voûte du dit Charles, son père.

L'an 1565, illustre prince Jean de Bretagne, duc d'Estampes, gouverneur de Bretagne, mourut et fut enterré au dit Couvent, en la voûte du dit Charles.

 L'an 1401, révérend père en Dieu monseigneur Pierre Morel, évêque de Tréguier, lequel fit de grands biens au dit Couvent ; il dressa la bibliothèque, il fonda une chapellenie dans l'église principale de la ville de Guingamp, et en donna la présentation au gardien du dit Couvent, quel droit on a fait, perdre depuis les dix ans [Note : Le titre même de cette chapellenie existe, et prouve que les religieux élevaient ici une prétention tout-à-fait erronnée].

Le seigneur comte de Laval, une des signalées maisons de Bretagne, donna de rente, au dit Couvent, il y a plus de 150 ans, comme le pense, par acte, un tonneau de froment valant 32 boisseaux, chaque boisseau valant un écu. C'est aujourd'hui monseigneur De Guémené qui paie.

L'an 1444 mourut noble chevalier Sylvestre, seigneur de Langarzou, et fut enterré au dit Couvent, auquel il donna, de fondation perpétuelle, trois tonneaux froment par an, qui ont été, par des peu affectionnés à l'Ordre, changés en deux cents livres par an ; il y a le tiers de perte.

L'an 1521, mourut noble seigneur Yves de Roscerff, seigneur du dit lieu et du Bois de La Roche ; il fut enterré au dit Couvent, en habit de S. François. Il donna à perpétuité, de fondation, 36 boisseaux froment, qui valaient 36 écus. C'est à présent monseigneur le marquis du Liscoët qui est chef de cette fondation et fort affectionné aux religieux du dit Couvent.

L'an 1431, noble chevalier Jean, vicomte de Pommait, mourut en l'habit de S. François et fut enterré au dit Couvent, après y avoir fait de grands biens.

L'an 1422, Allain Kerpuns, seigneur baron de Crapado, mourut au dit Couvent, en habit de S. François, et y fut enterré, après y avoir demeuré deux ans.

L'an 1490, Louis-Pierre Henry, seigneur du Runiou, etc., donna de rente de fondation un tonneau froment au Couvent de Saint-François de Guingamp, où il fut enterré.

L'an 1543, écuyer Jean Rolland et demoiselle Marie Fougue firent fondation à perpétuité, au Couvent des Frères-Mineurs de Guingamp, de 30 boisseaux froment par an.

Il y a, au dit Couvent, une bulle de Sixte IV, d'heureuse mémoire, qui, confirmant celle de Martin V, donna pouvoir aux religieux de l'observance de recevoir, au nom de l'Eglise Romaine, toutes les choses offertes ou données par testament ou autrement, à perpétuité ou pour un temps, et ordonne un syndic qui les pourra recevoir et même demander en jugement, en cas de refus des héritiers du testateur ; la dite bulle datée du jour de devant les calendes de mars de l'an 1471, le premier an de son pontificat.

Il y a aussi plusieurs autres bulles données en faveur du dit Couvent, qui était fort chéri des ducs ; entr’autres, du bienheureux Charles de Blois, comme on voit par la bulle qu'il obtint du pape Clément VI, en l'an 1345, par laquelle les religieux du dit Couvent sont dispensés de l'étroite pauvreté, et leur donne pouvoir de posséder en commun, avec défense d'aliéner aucune chose du monde, des dons de ses prédécesseurs, de lui, de sa femme ni de ses défunts, à peine d'excommunication : donné à Avignon, le 9 des calendes de mars, l'an 3 de son pontificat. Cette même bulle fut confirmée par Urbain V, à Viterbe, le 6 des calendes de septembre, l'an 7 de son pontificat.

Les personnes de ce temps qui disent avoir vu le Couvent des Frères-Mineurs de Guingamp debout, disent que ce pouvait être un des plus beaux de l'ordre, et il est fort croyable qu'il était beau, puisque plusieurs ducs de Bretagne et quantité de personnes illustres y ont été enterrés.

En l'an 1581, très-haute et puissante dame Marie de Bauquaire, dame de Martigues, duchesse douairière de Penthièvre, veuve de très-haut, puissant et illustre prince Bastien de Luxembourg, duc de Penthièvre, pair de France, prince de Martigues, etc., après la mort de son prince et époux, non moins touchée de piété que de la recommandation de son dit époux, fit deux fondations au dit Couvent, l'une pour satisfaire à la volonté de son dit époux, l'autre pour elle (on appelle ces fondations, les fondations de Monsieur et de Madame), et pour fonds d'icelles, donna trois mille livres, qui produisent aujourd'hui quelques huit vingts livres de rente.

La piété de ma dite dame n'a pas été bornée par ce seul bienfait, non plus que celle de Madame Marie de Luxembourg, duchesse de Penthièvre, douairière de Mercœur, princesse de Martigues, veuve de très-haut et illustre prince monseigneur Philippe-Emmanuel de Lorraine, vivant duc des dits duchés, prince du Saint-Empire et du dit Martigues, etc. ; car, par l'incursion des diverses guerres civiles avec les ennemis de l'Eglise Romaine en l'an 1591, le Couvent de Saint-François de Guingamp et celui de Saint-Dominique ayant été rasés à raz de terre, messire René Chomar, prêtre doyen de Notre-Dame-de-Grâces, éloigné d'un mille de la ville de Guingamp, s'étant démis en faveur des religieux du dit Couvent de Saint-François entre les mains de mes dites dames, leurs altesses firent don du dit doyenné aux dits religieux, en l'an 1605, avec des sentiments aussi bien de leur très-grande pitié que piété vers les dits religieux, leur faisant don ; voici leurs termes : « La chapelle de Notre-Dame-de-Grâces, avec les logis, édifices, cours, jardin, fruits et revenus qui en dépendent, et tous les droits qui nous appartiennent en icelle, à cause de la fondation qu'en ont fait nos prédécesseurs, seigneurs du dit Guingamp, et de nos autres droits entiers seigneuriaux et ducaux ». Ce sont les termes de mes dites dames. Cette chapelle est médiocrement grande, bâtie en pierres de taille, avec une tour et pyramide au-dessus de pareille étoffe ; tour de plus de 50 à 60 brasses de haut, avec des garides fort adroitement travaillées, icelle tour garnie de quatre grosses cloches qui font une sonnerie qu'on peut appeler une des plus belles de l'Ordre, aussi bien que la plus belle tour : on ne saurait aujourd'hui bâtir une pareille avec l'église et fondre de pareilles cloches, pour 80 à 100 mille livres.

Les ornements, tant de la dite chapelle que de l'ancien Couvent, se peuvent dire des plus beaux de la Province. Il y a simplement cinq calices, dont l'un est d'une fort notable grandeur, les autres médiocres. Les prêtres de l'église principale de Guingamp prétendent un calice de notable grandeur et valeur, qui leur fut baillé à garder pendant les troubles de la guerre, lors de la démolition de l'autre Couvent, par un doyen de Notre-Dame-de-Grâces ; il y a en écriture sous la patte d'icelui : Notre-Dame-de-Grâces. Il y a plusieurs autres argenteries, comme reliquaires garnis de reliques de plusieurs saints qui sont présents des ducs, bénitiers, aspersoir, encensoir, navette, cuillère, pax tecum, deux croix, l'une plus grande qu'on porte en procession, qui était autrefois garnie de pierreries à l'estime de plus de mille écus ; il y a encore une autre d'assez belle grandeur, et plusieurs autres moindres qu'on peut estimer 3 à 400 livres ; l'autre moindre, et que porte l'hebdomadier en procession, est de pareille étoffe d'argent, dorée et enrichie de deux morceaux assez notables de la vraie croix de Notre-Seigneur ; il y a aussi deux custodes, l'une dans le sacraire où est le Saint-Sacrement, l'autre dans le coffre où est le trésor, en soleil pour exposer le Saint-Sacrement, et l'une et l'autre d'assez notable grandeur.

Il y a dans le sacraire un morceau du bois de la couronne de Notre-Seigneur, de la longueur de deux doigts presque. Le peuple a tellement expérimenté la vertu de cette sacrée relique dans l'infirmité de la vue, que même beaucoup qui ne voyaient presque point, après qu'on leur a mis cette relique sur la prunelle de l'oeil (chose tout-à-fait remarquable qu'on n'y peut souffrir un fétu ; cette relique n'y fait aucune douleur), ils en ont reçu incontinent guérison, et l'on vient de plus de 50 lieues rendre dévotion à cette sacrée relique et à la Vierge, l'image de laquelle est une des bien faites du monde, et en sa peinture et en sa sculpture.

Ce lieu de Notre-Dame-de-Grâces est en fort grande vénération pour les miracles qui y ont été faits par les mérites et les intercessions de la sacrée Vierge, lesquels à la vérité on a été peu soigneux de mettre en lumière, soit par négligence, ou plutôt par une raison qui n'est pas moins coupable, qui est d'appréhender que le peuple ne croie que ce soit plutôt pour tirer de l'argent de leur offrande que pour publier les dits miracles à l'exaltation du Saint Nom de Dieu et des mérites de la sacrée Vierge. Mais, en effet, tous ceux qui se sont voués à Notre-Dame-de-Grâces dans leurs périls, tant sur mer que sur terre, ont été soulagés et préservés ; comme on peut prouver par l'accident qui arriva dans la maison de monsieur Desvilliers, de la ville de Guingamp, le grenier duquel effondrant, les grains tombant avec le plancher, couvrirent son fils aîné étant dans le berceau, sans lui faire aucun mal, son père et sa mère l'ayant voué à Notre-Dame-de-Grâces ; ils sont tous vivants. Et par l'accident qui arriva à un marchand vivant de Bordeaux, lequel tombant en une extrémité de maladie, jusqu'à avoir perdu la parole et le mouvement de tous ses sens, ayant invoqué Notre-Dame-de-Grâces, revint incontinent en une si parfaite santé qu'il fut jamais. Il vint quelques semaines après Pâques dernier rendre ses voeux.

Il se fait assemblée à la dite Chapelle le jour de l'Assomption de Notre-Dame, qu'on appelle ici jour du pardon de la dite église de Notre-Dame-de-Grâces, où il se trouve environ quinze ou vingt mille personnes. Il y a ce jour-là indulgence plénière pour sept ans, qui ont commencé en 1645.

La situation du lieu du Couvent de Notre-Dame-de-Grâces est parfaitement belle et agréable, avec un enclos proportionné en grandeur à la beauté du lieu, qui est à la vérité plus agréable en son aspect qu'en ses richesses, car il n'est que de trois cent livres de revenu, qui consiste en terres, dixmes, et quelque peu de bois taillis. Les offrandes ou casuel pouvant valoir quatre à cinq cents livres. Le revenu assuré, tant de l'ancien que nouveau Couvent de Notre-Dame-de-Grâces, vaut 1.200 livres, sans comprendre le casuel.

Il y a deux grands corps de logis bien bâtis, logement du doyen, dont l'un sert pour loger les hôtes, avec deux volières garnies de quelques cents couples de pigeons de fuye.

On a acquis plusieurs terres pour rendre l'enclos plus parfait, qui contient de muraille quelques trois mille toises dans son circuit. Notre Saint-Père le Pape, Paul V, donna bulle en faveur des religieux de Saint-François de Guingamp, pour posséder la chapelle de Notre-Dame-de-Grâces avec tous les fruits et revenus et tout ce qui en dépend, conformément au don que mesdames les duchesses en firent aux dits religieux. La dite bulle est datée du 6 novembre l'an 1605, l'an premier de son pontificat.

Il s'est fait une seule fondation au dit Couvent de Notre-Dame-de-Grâces, par messire 0llivier Perrot, prêtre, depuis que les dits religieux y sont, de la valeur de 40 livres de revenu annuel.

En l'an 1633, l'onzième avril, fut posée la première pierre d'un corps de logis contenant en longueur 50 à 60 pieds, dans lequel il y a une cuisine, la dépense ensuite, le réfectoire après et une chambre d'hôte ; le tout, bout à bout, et au-dessus est le dortoir, où il y a seize chambres égales et deux plus petites, les toutes suffisantes pour loger ce que le Couvent peut porter de religieux (vu la cherté des ouvriers à présent), et à côté de ce corps de logis un cloître ; les dites chambres du dortoir meublées de chaslits, paillasses, et couvertures et matelas en quelques-unes. Ce corps de logis a été commencé et fini par les soins et la diligence du R. P. F. Guillaume Le Court, gardien, qui mourut par une mauvaise récompense de ses travaux, six mois après avoir logé ses religieux et soi-même dans le dortoir neuf [Note : Dom Guillaume Le Court fut assassiné par deux de ses moines : il y a sur cet événement un guerz, publié par M. A. Desjars , dans l'Annuaire des Côtes-du-Nord de 1851].

Ce fut le R. P. F. Pierre Bissit, profès du dit ancien Couvent, qui fut cause du bâtiment de la Chapelle Notre-Dame­de-Grâces, et le sollicita autant par sa piété et bon exemple et par la dévotion qu'il portait à la Vierge, que par ses autres soins et instructions pour l'entreprise du dit bâtiment. Il mourut le 12 février 1517.

Le R. P. F. Jean Lacheptier fut le premier gardien de Notre-Dame-de-Grâces, homme de très-grande probité, comme le témoignent les anciens de ce temps qui l'ont connu ; et après lui, le R. P. Broussaye, docteur de Paris, qui a grandement travaillé au bien de cette maison, tant par sa bonne vie et bon exemple, que par les soins temporels qu'il a apportés pour l'avancement du Couvent.

L'ancien obituaire fut brûlé dans le jardin du vieux Couvent, ou autrement perdu (ainsi que beaucoup d'autres titres, par la perte desquels les Frères souffrent aujourd'huy), de sorte que l'on ne peut pas cotter ici les personnes illustres qui ont paru dans le dit Couvent en piété et en doctrine ; il est pourtant très-certain qu'il a été presque toujours gouverné par des personnes signalées comme docteurs de Paris et autres facultés, et il est d'autant plus croyable, qu'il est vrai que les ducs ont toujours fort chéri et ont eu un soin fort particulier du dit Couvent.

Dans les archives, sont les actes concernant les fondations ci-dessus, savoir :

La fondation de Charles de Blois.

La fondation de monsieur et madame de Martigues.

La fondation de monsieur le prince de Guémené.

La fondation de monsieur le marquis Dossivat, sur Langarzou.

La fondation de monsieur le marquis du Liscouët, sur le Bois de La Roche.

La fondation de monsieur de Keranroux, aujourd'huy de Essac, sur le Runiou.

La fondation de Kergoffiou.

La fondation de dom 0llivier Perrot, prêtre, et plusieurs autres petites fondations faites au dit ancien Couvent, plus tous les actes concernant les rentes de la chapelle de Notre-Dame-de-Grâces. Tous lesquels actes ci-dessus, et enfin tous les actes du dit Couvent, sont spécifiés dans l'inventaire qui en a été fait et commencé, le dernier jour de septembre 1636, par les soins et diligence du R. P. F. Guillaume Le Court, et fini le 31 décembre de l'an 1636.

Quant à la bibliothèque, il y a quelques neuf cents tomes de livres, les uns in-folio, les autres in-quarto et in-octavo, entre lesquels sont parties des Pères et autres auteurs divers et aussi d'autres humanités, tous lesquels livres ne sont pas encore en ordre, pour le peu de temps qu'il y a qu'ils sont dans la bibliothèque neuve.

On a oublié à mettre en son lieu les miracles arrivés dans la paroisse de Goudelin, dans laquelle il y avait une peste générale, de laquelle mourut plus de 150 personnes, laquelle cessa incontinent après qu'ils eurent rendus leurs voeux en procession en la dite église de Notre-Dame-de-Grâces, et depuis les sept à huit ans en ça.

Nous soussignés, supérieur et religieux du Couvent de Notre-Dame-de-Grâces, certifions que le tout ci-dessus a été recueilli dans les Mémoires et Archives du Couvent, en ce qui concerne les antiquités ; et, quant aux miracles qui sont arrivés, sur la relation de ceux moines à qui ils sont arrivés.

Ce jour 3 mars 1647. Signé : HUET et autres. (S. Ropartz).

 © Copyright - Tous droits réservés.