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CAHIER DE DOLÉANCES DE LA GUERCHE-DE-BRETAGNE EN 1789

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GROUPE DE LA GUERCHE. (Ville de La Guerche et paroisses de La Selle-Guerchaise, Moussé, Rannée, Drouges et Forges).
Les six cahiers qui composent ce groupe présentent entre eux des liens très étroits, et c'est celui de la ville de La Guerche qui les a directement ou indirectement inspirés. Nous les partageons en deux sous-groupes d'une part ceux qui ont été adoptés sous la présidence de René-Charles. Perrière de Jonchère, avocat au Parlement, subdélégué à La Guerche, sénéchal de la ville et baronnie ; d'autre part ceux qui ont été adoptés sous la présidence de Guillaume Leclerc de Romefort, avocat et procureur fiscal de la baronnie. Dans le premier sous-groupe, nous avons placé d'abord le cahier de la ville (1er avril), dont celui de La Selle-Guerchaise (3 avril) n'est qu'une réduction ; le cahier de Moussé (4 avril) est presque identique à celui de La Selle, mais il a emprunté directement quelques dispositions à celui de la ville ; le cahier de Rannée (5 avril) semble être le résultat d'une combinaison entre ceux de La Selle et de Moussé, mais avoir aussi tiré profit de celui de Drouges (4 avril), qui appartient au second sous-groupe. Ce second sous-groupe comprend les cahiers identiques de Drouges (4 avril) et de Forges (5 avril), visiblement influencés par celui de la ville de La Guerche, mais présentant aussi des points de contact avec celui de Moussé.

 

LA GUERCHE.
Chef-lieu de subdélégation. — Département d'Ille-et-Vilaine, arrondissement de Vitré, chef-lieu de canton.
CAPITATION. — Rôle de 1789 (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 4065) ; 215 articles, 2 nobles, douze chanoines et un régent, 92 pauvres exempts. Total, 1.716 l. 11 s. 9 d., se décomposant ainsi : capitation, 1.143 l. 16 s. 8 d. ; milice, 172 l. 10 s. ; casernement, 388 l. 5 s. 1 d. ; frais de milice, 12 l. (Ibid., C 3981).
VINGTIÈMES. — 999 l. 12 s. 11 d.
VINGTIÈMES D'INDUSTRIE. — Rôle de 1789 (Ibid., C 2168) : 29 articles ; total, 47 l. 5 s. 4 d.
OGÉE. — Il y a tous les mardis un marché où il se vend beaucoup de grains et de fil, qui est tout le commerce de cette ville, où l’on compte 3.000 communiants.

PROCÈS-VERBAL.(voir la note 1 qui suit). — Assemblée électorale, le 1er avril, au lieu ordinaire des délibérations, sous la présidence de René-Charles Perrière de Jonchère, avocat en Parlement, sénéchal de la ville et baronnie de La Guerche (voir la note 2 qui suit). — Comparants : Le Clerc de Romefort, procureur fiscal de la baronnie de La Guerche (16 ; 1 servante, 2) ; Renouard du Boisboulaye, ancien syndic, commissaire des Etats (21 ; 2 domstiques, 4) ; Coursier de Bonneville, échevin (15) ; Guérin, échevin [notaires et procureur?] (6 livres ; 1 servante, 2) ; Perrigault, notaire et procureur (7 ; 1 domestique, 2) ; Coursier de la Rinjardière, bourgeois (22 ; 2 domestiques, 4) ; Perrière de Mauny, avocat (36 ; 2 domestiques, 4) ; Coursier de Schencey, miseur (» +1,10) ; Corvée Dutertre, échevin ; Dein de la Buraiserie, bourgeois, greffier de la commanderie (4 ; 1 domestique, 2) ; Charil Dumée, échevin (19 ; 1 domestique, 2) ; Dubreil Guyot, officier de la milice bourgeoise ; Bigot de Lorgery, avocat et correspondant de la Commission intermédiaire (20 ; 2 domestiques, 4) ; André Marin, perruquier (2) ; Jacques Bouin (3) ; Jean Basin, cordonnier (5) ; Nicolas Grivel, marchand tailleur (2 ; 1 compagnon, 2) ; Malherbe de la Fauconnerie, échevin (10 ; 3 domestiques, 6) ; Pierre Tourtellier, marchand (5 ; 1 compagnon, 2 ; 1 petite domestique, 1 +0,13, 4) ; Jean-Baptiste Fleuri (3 ; 1 compagnon 2) ; Simon Quentin (1) ; Pierre Lamoureux (2 ; 1 compagnon, 2) ; Jean Desbois, cordonnier (2,10 ; 1 compagnon, 2) ; Jean Augault, tanneur (5+1) ; François Michonnaux, aubergiste (4 ; 1 domestique, 2) ; Jacques Clouet, voiturier et marchand (6 ; 1 domestique, 2+0,15) ; Jean Morel (voir la note 3 qui suit) ; Jean Le Bascle, maréchal (3) ; Joseph Hubert (10 ; 3 domestiques, 6 +0,15) ; Pierre Pouchard, boucher (4+0,10) ; Augustin Jary, serrurier (2,10 ; 2 compagnons, 4) ; Augustin Gendron, boucher (3 ; 1 compagnon, 2 +0,10) ; Jacques Dupont, vitrier (2) ; Louis Allouet (2,10) ; Jean Le Roux, sellier (7+1) ; René Allanan, ferblantier (2) ; René Jeusset, messager (5) ; François La Claye ; Pierre Louin, taillandier (voir la note 4 qui suit) (3 ; 1 compagnon, 2) ; François Monnier, bourbier (2) ; Julien Le Coeur (» +0,10) ; Jean Doré, cabaretier (1) ; René Doudet, menuisier (2 ; 1 compagnon, 2) ; Pierre Chasle, maréchal (3 ; 1 domestique, 1) ; Guy Maugendre, marchand (12 ; 1 domestique, 2+0,15); Malherbe des Masures, échevin (30 ; 3 domestiques, 6) ; Legay, notaire et procureur (voir la note 5 qui suit) (17 ; 1 domestique, 2) ; Julien Girard, boucher (4 +0,10) ; Michel Hubert, marchand (24 ; 2 domestiques, 4 +1,110) ; François Guyot, perruquier (5) ; René Ricou, hôte (3) ; René Fouillée, marchand (8 +0,10) ; Pierre Girard ; Marion fils, notaire et procureur (12 ; 1 domestique, 2) ; Marion père, échevin ; Jean-François Viel (3) ; Coursier des Longrais, bourgeois ; Jolly, notaire et procureur (18 ; 1 domestique, 2) ; Pierre Hervouin, marchand (6 ; 1 domestique, 2) ; Jean Gouraud, marchand de cuir (3+0,10) ; Michel Le Ray, huissier (1) ; Jean Aubry, aubergiste (4 ; 1 domestique, 2,10 ; 1 servante 2) ; Jean Hervouin, messager (3 ; 1 domestique, 2,10 ; 1 servante, 2) ; Pierre Basin, menuisier (1 petit compagnon, 1) ; Charles Nupied (3) ; Joseph Cossonnet (32) ; Pierre Noton, cabaretier (1,10). — Députés : Renouard du Boisboulay ; Perrière de Mauny ; Guyot Dubreil père ; Michel Hubert.

Note 1 : Les chiffres qui, dans la liste des comparants, suivent ceux de la capitation, indiquent les cotes d’imposition aux vingtièmes d’industrie.

Note 2 : Il est aussi subdélégué. Sa capitation est de 25 livres ; il a 3 domestiques, côtés 6 livres.

Note 3 : Peut-être le même qu’un Morel, marchand, imposé aux vingtièmes d’industrie pour 10 sous.

Note 4 : Au rôle des vingtièmes d’industrie, il y a sieur Louin, marchand, imposé 10 sous, qui est peut-être le même.

Note 5 : Au rôle des vingtièmes d’industrie est inscrit un sieur Legay, fermier du prieuré de Saint-Nicolas, imposé 1 l. 10 s., et qui est peut-être le même que celui-ci.

 

Plaintes, remontrances et doléances des municipalité et commune de la ville de La Guerche, à réunir au cahier général des charges du Tiers Etat qui sera arrêté en la sénéchaussée de Rennes, pour être présenté aux Etats généraux du royaume.

[1] Demander que, dans tous les cas, les Etats généraux votent par tête et non par ordre.

[2] Demander à vérifier s'il existe un déficit dans les finances, en quoi il consiste, d'où il est provenu ; en solliciter une loi qui oblige chaque province et chaque ministre, chacun dans son département, à rendre un compte détaillé à la Nation de ses recettes et dépenses, de manière qu'on puisse comparer facilement les comptes de chaque province et de chaque ministre avec le compte général qui sera rendu chaque année par le contrôleur général des finances, et qui rende les dits ministres responsables d'une mauvaise administration, ainsi que ceux qui en seront chargés par les différentes provinces, et qu'en conséquence, il soit dressé par la Nation une formule claire et précise suivant laquelle tous les dits comptes seront rendus.

[3] Solliciter une loi qui défende tout emprunt pour les besoins de l'Etat, sans le consentement de la Nation, et, au cas que des emprunts soient jugés nécessaires à l'avenir par la Nation, demander qu'ils ne puissent jamais être faits qu’au denier vingt, par la raison que la différence des deniers favorise la cupidité des prêteurs, en grevant les débiteurs, et attendu que les emprunts ci-devant faits ont eu lieu sans, le consentement de la Nation, qui en toute rigueur pourrait se dispenser de les acquitter, et que la plupart de ses emprunts ont été consentis sans retenue de droits royaux, demander que les dits droits royaux soient retenus à l'avenir jusqu'à l’amortissement des dits emprunts.

[4] Demander que les dépenses de la Cour soient fixées en raison des besoins de l'Etat à une somme qui, dans aucun cas, ne pourra être augmentée ; que la caisse du Roi soit distincte de celle de l'Etat, de manière que celle-ci ne puisse jamais être employée au besoin de la famille royale ; et demander, en même temps, la rentrée des biens engagés au domaine de la couronne.

[5] Demander que les Etats généraux aient un retour périodique tous les cinq ans, à une époque fixe, et même plus souvent si les besoins de l'Etat et du peuple l'exigent, suivant les circonstances particulières, telles que le décès du Monarque, la minorité de son successeur, une guerre imprévue, etc., à défaut de quoi tout impôt cessera d'être perçu.

[6] Demander que les Etats provinciaux et assemblées provinciales soient composés à l'instar des Etats généraux, et convoqués tous les deux ans, à une époque fixe, pour régler leur administration intérieure et la régie des impôts.

[7] Demander la suppression de tous privilèges pécuniaires et de tous privilèges exclusifs, aussi odieux dans leur principe que dans leurs effets, sans exception d'ordres et d'individus.

[8] Demander que la Nation prenne connaissance du régime du clergé et que toutes les abbayes et bénéfices simples, vacants, et excédant le revenu de deux mille livres, soient tenus en réserve, à la mort de chaque titulaire, jusqu'à ce que les déficits de l'Etat et du Clergé soient remplis.

[9] Demander que les gens de mainmorte et tous les corps et corporations aient la faculté de colloquer en rentes constuées leurs deniers sur des particuliers (voir la note qui suit).

Note : L’article 14 de l'édit du mois d’août 1749 interdisait à tous les gens de mainmorte de posséder des rentes constituées sur des particuliers, à moins d’y être autorisés par lettres patentes ; mais l’article 18 du même édit leur permettait d’acquérir et de recevoir des rentes constituées sur le roi, le clergé, les diocèses, pays d’Etats, villes et communautés, sans être obligés d’obtenir des lettres patentes (ISAMBERT, Anciennes lois françaises, t. XXII, pp. 226-235).

[10] Demander que tout ecclésiastique ne puisse, conformément aux lois canoniques, posséder plusieurs bénéfices, à moins qu'ils ne soient pas suffisants pour le faire vivre décemment en suivant son état, et qu'en conséquence, il soit fait une loi qui défende à tout ecclésiastique de posséder plusieurs bénéfices excédant ensemble le revenu de douze cents livres, et qui permette à tout ecclésiastique non pourvu de jeter un dévolu sur l'un des bénéfices de celui qui en posséderait plusieurs contre la loi, avec pouvoir de le courir en justice comme on court un bénéfice vacant en Cour de Rome (voir la note qui suit).

Note : Sur l'histoire de la législation canonique en matière de cumul de bénéfices, voy. HINSCHIUS, Das Kirchenrecht der Katholiker und Protestanten, t. II (System des Katholischen Kirchenrechts, Berlin, 1878, in-4°), pp. 417-436. — En 1693, dernière date pour laquelle nous possédions des renseignements précis, chacun des chanoines de la collégiale de La Guerche ne jouissait que de 212 l. de rente par an (GUILL0TIN DE CORSON, Pouillé, t. III. p. 12).

[11] Demander que les Evêques soient tenus à la résidence dans leurs diocèses, et la suppression de toutes provisions et dispenses en Cour de Rome, et généralement de tous droits qui se payent au Pape.

[12] Demander que la Nation assemblée s'occupe des moyens de dispenser les généraux de paroisse des réparations des presbytères (voir la note qui suit), et que les ecclésiastiques ne perçoivent d'autres dîmes que celles connues sous le nom de grosses dîmes, et qu'à l'égard de toutes les autres dîmes, telles que celles qui se perçoivent sur les lins, chanvres, porcs et agneaux, et connues sous le nom de menues et vertes dîmes et de charnage, qui sont des dîmes insolites, soient et demeurent supprimées.

Note : Il n'y avait pas de presbytère à La Guerche, qui, au point de vue paroissial, dépendait de Rannée ; les fonctions du culte étaient exercées dans la ville de La Guerche par les chanoines de la collégiale (GUILLOTIN DE CORSON, op. cit., t. IV, p. 677).

[13] Demander la suppression de tous impôts, sans exception, et le rétablissement de ceux qui seront jugés nécessaires par la Nation pour remplir le déficit et fournir au besoin de l'Etat, mais simplifiés dans le plus petit nombre possible, lesquels impôts seront supportés par tout individu des trois ordres, sans exception, et sur un même rôle pour chaque imposition, en raison des facultés de chaque contribuable.

[14] Demander la suppression de la corvée en nature et une subvention en argent pour en tenir lieu, qui sera supportée par les trois ordres, en raison des facultés de chaque individu (voir la note qui suit).

Note : Les habitants de La Guerche n'étaient astreints à la corvée, ni dans la ville, ni dans la banlieue ; comme dans toutes les villes de Bretagne, les travaux des grandes routes y étaient effectués par des entrepreneurs, à la suite d'adjudications, aux frais de la communauté des habitants et à l'aide d'une subvention des Etats (DUPUY, Administration municipale, 2ème partie, pp. 29-30). Sur les travaux exécutés dans la banlieue de La Guerche en 1784-1786 et le règlement des dépenses qu'ils ont nécessitées, voy. Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 4857.

[15] Demander la suppression des droits de traites domaniales par terre et par eau, de toute espèce, des droits de traites foraines et de passe-porte, si nuisibles au commerce intérieur, et que les dits droits soient perçus aux frontières du royaume, s'ils sont absolument jugés indispensables.

[16] Demander qu'au cas que la suppression de la gabelle aurait lieu, la subvention qui sera établie en argent pour y faire face soit supportée par les provinces actuellement sujettes à la gabelle, et, au cas que cette suppression n'eût pas lieu, demander la liberté entière du commerce de sel en Bretagne, même dans les deux lieues limitrophes.

[17] Demander la suppression de tous les droits qui se perçoivent par les contrôleurs des actes, et qu'au cas qu'aucuns d'eux fussent jugés indispensables pour la sûreté publique, demander qu'ils soient réduits à la plus modique somme possible, et que les délibérations des différents corps et corporations politiques soient dispensées des formalités de contrôle, et demander en même temps l'abolition de la formule (voir la note qui suit).

Note : « Formule est le nom générique par lequel on entend les papiers et parchemins timbrés, parce que, par la déclaration du 19 mars 1673, il avait été ordonné qu’il serait dressé un recueil de formules tant des actes judiciaires que de ceux des notaires. Ces formules n'ont jamais eu lieu par rapport aux difficultés et aux inconvénients qu’on y trouva ; néanmoins les papiers et parchemins timbrés, dont l’usage a été ensuite ordonné, ont conservé ce nom de formule » (BOSQUET, Dictionnaire raisonné des Domaines et droits domaniaux, au mot Formule).

[18] Demander la suppression des bureaux de toiles et droits y annexés, qui se perçoivent arbitrairement et arrêtent l'activité du commerce (voir la note 1 qui suit), ainsi que des droits sur les cuirs (voir la note 2 qui suit) et sur le fer.

Note 1 : Le bureau des toiles de La Guerche fut créé, en même temps que celui de Fougères, par arrêt du Conseil d'Etat en date du 17 août 1738 (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 1531) ; c'était là que, conformément aux prescriptions de l'arrêt du Conseil d'Etat du 22 mai 1736 et des lettres patentes du 29 du même mois, les fabricants du voisinage devaient, avant de mettre en vente leurs toiles, les faire visiter par deux inspecteurs marchands et par le commis préposé à la marque. Des lettres patentes des 1er, 4 et 28 juin 1780 (Ibid.) apportèrent quelques modifications à cette réglementation ; l'article 11 de celles du 4 juin fixait les droits à 1 sou par empreinte, marque ou plomb apposés sur les étoffes. Les bureaux des toiles ont été supprimés par décret de la Constituante en date du 27 septembre 1791 ; cette suppression a provoqué un certain nombre de plaintes. Voy. GERBAUX et SCHMIDT, Procès-verbaux des comités d'agriculture et de commerce de la Constituante, de la Législative et de la Convention, t. II. pp. 634, 635, 637 et 679.

Note 2 : Il y avait à La Guerche, en 1778, deux tanneurs, qui occupaient trois compagnons ; ils travaillaient annuellement 1.200 peaux de vaches et le chiffre de leurs affaires montait a 14.000 l. (Arch. Nat., F12 651).

[19] Demander la suppression des maîtrises et jurandes.

[20] Demander la suppression des écoles militaires, trop onéreuses à la Nation.

[21] Demander la prohibition du tabac en baril, pernicieux pour la santé (voir la note qui suit).

Note : A la suite de plaintes nombreuses contre la mauvaise qualité du tabac vendu en Bretagne, le Parlement ordonna, le 15 septembre 1784, qu'il serait procédé à une vaste enquête ; les experts qui opérèrent à Morlaix conclurent « que l'entassement de 400 livres de tabac trop mouillé et trop salé dans un baril de petite capacité donne lieu à une fermentation qui, acide au bout de deux mois, peut devenir putride par un plus long séjour dans les barils », et ils affirmèrent « que, dans cet état de putridité, même dans celui de l'acidité, cette poudre, universellement distribuée, peut donner lieu à des maladies d'autant plus dangereuses qu'elles seront plus lentes à se montrer et qu'elles attaqueront le genre nerveux dans son origine, sans qu'il soit aisé d'en soupçonner la cause ». Aussi le Parlement de Rennes rendit-il, le 15 octobre de la même année, un nouvel arrêt qui interdisait à tous agents et entreposeurs du fermier de distribuer ou faire distribuer du tabac venu en barils ; un arrêt du Conseil d'Etat cassa cet arrêt du Parlement le 19 mars 1785, mais défendit d'humecter le tabac après sa pulvérisation. Sur cette affaire et sur les différends auxquels elle donna lieu entre le Contrôleur général des finances et le Parlement de Bretagne, voy. Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 2042.

[22] Demander la suppression des privilèges de l'ordre de Malte (voir la note qui suit).

Note : Les privilèges accordés à diverses reprises par les rois de France à l'ordre de Malte avaient été confirmés en dernier lieu au mois d'octobre 1776 par des lettres patentes de Louis XVI (ISAMBERT, Anciennes lois françaises, t. XXIV, pp. 253 et suiv.). Sur la commanderie de La Guerche, voy. GUILLOTIN DE CORSON, Les Templiers et les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalen, dits Chevaliers de Malte, en Bretagne (Nantes, 1901, in-8°), pp. 121-165.

[23] Demander la suppression de la compagnie des Indes, plus nuisible au commerce qu'avantageuse, et établir la concurrence (voir la note qui suit).

Note : Dans sa réunion du 19 février 1769. le Tiers de Bretagne avait entendu « lecture d'un mémoire sur trois objets différents, savoir, 1° sur la Compagnie des Indes et sur les inconvénients qui résultent de cet établissement pour le commerce général du Royaume et en particulier pour celui de cette province ; 2° sur les effets de l'arrêt du Conseil du 30 août 1784, qui, ouvrant nos colonies aux étrangers et leur y donnant l'entrée, a porté le coup le plus funeste au commerce français et à la navigation nationale ; 3° sur la franchise établie dans le port de Lorient, dont le régime fiscal et rigoureux tient dans une gêne cruelle non seulement cette place de commerce, mais encore toutes les villes et bourgs voisins qu’il expose sans cesse à une espèce d'inquisition » (Le Héraut de la Nation, n° 30, p. 477). — Les privilèges de la Compagnie des Indes ont donné lieu, vers la fin de l'Ancien Régime, à de vives polémiques et à la publication de nombreux mémoires et factums, souvent intéressants par les détails qu'ils contiennent sur le commerce maritime de la France. Voy. CORDA, Catalogue des factums… de la Bibliothèque Nationale, t. II. p. 537 et suiv.

[24] Demander la suppression des milices, et, au cas que l’on ne puisse l'obtenir, demander que les domestiques des ordres privilégiés soient tenus au tirage du sort (voir la note qui suit).

Note : Durant la période 1781-1786, la ville de La Guerche fournit quatre miliciens, dont deux en 1781, un en 1782 et en 1785. En 1781, sur 57 jeunes gens présents au tirage, 44 furent exemptés ou réformés (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 4704).

[25] Demander la suppression de toutes espèces de pensions, dons et gratifications, et que ceux qui se distingueront au service de l'Etat soient récompensés par un grade supérieur, dont les appointements sont plus considérables, ou décorés par des titres purement honorifiques.

[26] Demander qu'il soit fait une nouvelle répartition des impôts dans toutes les provinces du royaume et dans les villes et paroisses de chaque province, proportionnée aux facultés de chacune, et, attendu que la première répartition pourrait être vicieuse, demander qu'on procède tous les cinq ans à une nouvelle répartition.

[27] Demander la proscription de la vénalité de toutes espèces de charges et la modération des émoluments y attribués.

[28] Demander qu'il soit établi une Cour souveraine dans chaque province pour rendre la procédure moins onéreuse.

[29] Demander que toutes les hautes charges, soit dans la magistrature, soit dans le militaire, soient partagées entre les membres de l'ordre de la Noblesse et ceux de l'ordre du Tiers et données au concours à ceux qui seront jugés avoir plus de talent et de mérite, et que tous les sujets de l'Etat soient jugés par un nombre égal de juges de l'un et l'autre ordre dans les Cours souveraines.

[30] Demander la suppression des juridictions d'attribution et qu'on ne puisse plaider en plus de deux tribunaux pour être jugé en dernier ressort.

[31] Demander la suppression de toutes les petites juridictions seigneuriales et de ne laisser subsister que celles établies dans les chefs-lieux, de manière qu'elles ne soient pas distantes de plus de cinq à six lieues, lesquelles pourront juger en dernier ressort toutes affaires qui n'excéderont pas une somme de cinquante livres, ou telles autres sommes qu'il plaira de fixer à la Nation, parce qu'il y aura toujours trois juges dans ces juridictions, et, au cas que la Nation ne juge pas à propos de supprimer toutes les petites juridictions, demander que les officiers d'icelles résident dans le lieu de leur exercice et que les juges et procureurs fiscaux ne puissent faire les fonctions de procureur dans aucune juridiction.

[32] Demander que la Nation assemblée fixe un terme pour la décision d'un procès dans chaque tribunal, de manière qu'une contestation ne puisse exister plus de trois ans pour obtenir un jugement en dernier ressort ; et que toutes les charges de judicature, même dans les juridictions seigneuriales ; soient rendues inamovibles comme dans les juridictions royales, juqu'à forfaiture jugée ; en un mot, demander généralement la réformation des lois civiles et criminelles.

[33] Demander l'abolition des lettres de cachet sans réserve et que les délits de tous sujets quelconques, sans exception, soient suivis en justice réglée, qu'il n'y ait plus de distinction de peine entre les sujets des trois ordres et que la famille d’une personne flétrie en justice soit admise à posséder des charges publiques.

[34] Demander que les lois militaires soient soumises à la revision des Etats généraux pour en réformer les abus.

[35] Solliciter une loi qui défende de tendre des charges qui confèrent la noblesse héréditaire et qui ne l'accorde que personnelle à ceux qui auront rendu de grands services à l'Etat.

[36] Demander la suppression de tous droits d'aînesse et une parfaite égalité dans les partages, tant dans les successions directes que dans les successions collatérales, soit entre nobles, soit entre roturiers, et que les lots soient tirés au sort.

[37] Demander qu'il soit permis à tout individu dans les trois ordres de posséder des biens nobles et roturiers sans être assujetti à aucunes impositions particulières pour la possession de ces biens, d'où s'ensuit la suppression des francs-fiefs, des fouages ordinaires et extraordinaires, etc, etc.

[38] Demander que les commissaires intermédiaires dans chaque province soient chargés des travaux confiés à MM. les intendants, qui seront supprimés, et que partie de leur traitement soit employée à faire une légère rétribution aux dits commissaires, et que l'autre partie retourne au profit de l'Etat et des provinces.

[39] Demander que les adjudications d'octrois soient faites à l’avenir et sans frais par les corps municipaux, devant lesquels les comptes seront également rendus et sans frais pour être définitivement soumis à la revision des Etats provinciaux (voir la note qui suit).

Note : L'adjudication des octrois était faite par le général des finances, en présence du maire et des échevins ; celle des octrois percus dans la banlieue ou des augmentations au profit du trésor royal était passé par l’intendant ou son subdélégué (DUPUY, Administration municipale, pp. 334-335. Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 784 et 799). Les comptes étaient rendus à la chambre des Comptes de Nantes, qui s’allouait pour cela des épices, 271 l. 8 s. pour le compte de 1782-1783, par exemple (Ibid., C 3932). — Lors de l’adjudication des octrois de La Guerche en 1781, les frais de l’arrêt du Conseil d'Etat autorisant la levée de ces octrois, des lettres patentes sur cet arrêt, de l'enregistrement au Parlement, à la Chambre des Comptes et à la Généralité des finances montèrent à 1.329 l. 14 s. (Ibid., C 799), outre 412 l. pour frais d’adjudication à la Généralité des finances (Ibid., C 3932). Cette adjudication fut passée moyennant le prix annuel de 2.500 l. ; la ferme des droits de 1 s. par pot de vin et de 6 d. par pot de cidre vendus chez les débitants d’Availles, Moutiers, Domalain, Visseiche, Marcillé-Robert et Drouges fut adjugée pour 1.030 l., celles des 6 d. par pot de vin et 3 d. par pot de cidre à titre d’augmentation des anciens octrois, pour 540 l. (Ibid., C 799).

[40] Demander un règlement général et uniforme pour toutes les municipalités du royaume, soit qu'on en augmente le nombre, soit qu'on ne l'augmente pas, par lequel règlement il sera entr'autres choses ordonné que les membres qui composeront les municipalités seront élus à la pluralité des suffrages, par tous les habitants du Tiers Etat des villes, nés Français et naturalisés, âgés de vingt-cinq ans, domiciliés et compris au rôle des impositions ; que l'élection pour la députation aux Etats provinciaux sera faite de la même manière ; que les membres qui composeront les municipalités ne seront nommés que pour trois ans, à l'expiration duquel temps il en sera nommé de nouveaux, ou les mêmes seront seulement continués pour trois ans, et que les président, syndic et receveur seront élus par les membres qui auront été élus pour composer la municipalité, comme aussi que, pour composer les municipalités, il ne puisse être nommé dans une même famille plus de deux membres parents au degré prohibé, et demander, en outre, que les offices en titre des municipalités soient supprimés et remboursés (voir la note qui suit).

Note 1 : Répondant, le 11 avril 1785, à l'enquête instituée par la Commission intermédiaire, en vertu de la délibération des Etats du 3 février précédent, et destinée à préparer « un plan général de municipalité pour toutes les villes de la province » la communauté de ville de La Guerche fournissait sur son organisation les renseigements suivants : « Le premier registre qui soit aux archives commence au 30 mars 1680, où il est appris que les juges présidaient les assemblées... Le 6 février 1703, la mairerie fut achetée par M. le duc de Villeroy et unie à la charge de sénéchal du lieu. Après le remerciement du sieur Sigay et la suppression des maireries, la communauté fut présidée par les juges, en conséquence d'un arrêt du Parlement du 17 mai 1725, qui... ordonne qu'il n'y aura que les juges, procureur fiscal, les maire et syndic, le chefcier, deux chanoines députés du chapitre, le recteur de Rannée, doyen de La Guerche, deux gentilshommes, deux avocats, un médecin, huit notables à vie, dont quatre nommés par la communauté, quatre par le bureau des hôpitaux, l'administrateur en charge, celui qui aura sorti l'année précédente et deux procureurs de la juridiction. Jusqu'au 27 juin 1736, que le sieur Régnier de la Masurais obtint une commission de maire, la communauté fut ainsi gouvernée. En 1742, M. le duc de Villeroy acheta sur les têtes de son sénéchal et son alloué deux charges de maire, sur celle de son lieutenant la charge de procureur du roi syndic, et sur celle de son procureur fiscal celle de greffier secrétaire en titre ; toutes ces charges, par le décès des uns et des autres, sont tombées aux parties casuelles, ce qui empêche la communauté de nommer à la mairerie, et, depuis la mort du dernier maire, arrivée en 1768, la communauté était présidée par les syndics, mais, le 1er septembre 1778, les officiers de justice se sont pourvus au Parlement, qui a remis en usage son arrêt du 17 mai 1725, en sorte que la communauté se gouverne actuellement ainsi que dans ses commencements » (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 3932). Voy. aussi, sur la vénalité des offices municipaux de La Guerche, la liasse C 398.

[41] Demander que les sommes payées annuellement par les municipalités aux commissaires des guerres pour leurs logements soient également supprimées (voir la note qui suit).

Note 1 : Dans le rapport du 8 avril 1785, cité à la note précédente, la communauté de ville déclare qu'elle « ignore sur quel fondement le sieur Tuffin Dubreil, commissaire des guerres [à Rennes] en exige 50 l. par an pour son logement, laquelle somme se paye sur les ordonnances de Mgr l'Intendant ». Dans un état des charges et dépenses annuelles de la ville, en 1784, la communauté se plaint de cette dépense, qui n’est autorisée par aucun arrêt du Conseil, et demande à l’intendant de la supprimer (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 799). Toute l’histoire de cette affaire est exposée dans une lettre adressée, le 14 septembre 1783, par l'intendant Caze de la Bove à la communauté de Vitré, qui lui avait adressé une semblable plainte : « Les villes qui se trouvent dans les départements des commissaires des guerres contribuent, aux fins d'un état de répartition arrêté par le ministre le 20 mars 1778, au logement de 200 l. attribué à chacun de ces commissaires, en sus de celui qui est payé par la province ; il est vrai que ci-devant votre communauté ne contribuait pas au payement du logement de M. Dubreil ; c'étaient les villes de Saint-Malo et Dinan, la première pour 150 l. et l'autre pour 50 l. ; mais, le nombre des commissaires des guerres ayant été augmenté en Bretagne, l'on a affecté les villes de Saint-Malo et Dinan au payement du logement du commissaire du département de Saint-Malo et l'on a fait payer celui du département de Rennes par les communautés de Fougères, Vitré, La Guerche et Châteaubriant ; le logement du commissaire ordonnateur qui est censé résider à Rennes est payé par la communauté de cette ville... » (Ibid., C 939). Outre les 200 l. dont il vient d'être question, le commissaire Tuffin Dubreil recevait des Etats, sur le fonds de casernement, une indemnité de logement de 400 l. ; cette indemnité était ordonnancée par la commission intermédiaire, sur le vu d’un état des commissaires employés en Bretagne, état dressé chaque semestre par le commissaire ordonnateur de la division de Bretagne, visé par l’intendant et par lui transmis à la Commission (Ibid., C 4697).

[42] Demander la suppression de tous les gouvernements et lieutenances de province, même des places milliaires et des émoluments y attachés, qui retourneront au profit de l'Etat et des provinces.

[43] Demander que les grands propriétaires soient tenus comme les petits propriétaires, de payer les vingtièmes dans les paroisses où les biens sont situés, et qu'aucun ne puisse être imposé pour tous ses biens dans une même paroisse lorsqu'ils sont situés dans différentes paroisses.

[44] Demander la réduction de toutes les différentes mesures, poids et aunes, sur une dimension uniforme pour tout le royaume.

[45] Demander qu'il soit fait une loi qui prononce des peines graves contre les administrateurs et directeurs des postes qui ouvriraient ou supprimeraient des lettres et paquets qui leur sont confiés.

[46] Demander la suppression de toute espèce de banalité.

[47] Demander qu'il soit permis d'amortir au denier qui sera fixé par la Nation toutes les rentes de quelques espèces qu'elles soient, tant foncières que féodales, dues aux seigneurs de fiefs et gens de mainmorte, et, au cas qu'on ne puisse obtenir la permission d'amortir les dites rentes, demander la suppression des frêches ou consorteries, c'est-à-dire que les dites rentes ne soient plus solidaires et que chaque particulier qui doit une portion de rente en consorterie ne puisse être appelé pour payer la portion de ses consorts, et qu'il lui soit permis de payer sa portion séparément de ses consorts, sans être tenu à la solidité.

[48] Et, attendu que les grands seigneurs et les gens puissamment riches trouvent le secret de payer au Roi beaucoup moins de rachats et de lods et ventes qu'ils ne reçoivent de leurs vassaux, supplier Sa Majesté d'en faire remise aux seigneurs de fiefs en supprimant ces droits, qui, en raison de cette suppression, ne pourront plus être perçus par les seigneurs de fiefs.

[49] Demander la suppression des droits de péages, coutumes, fuies et garennes, et la suppression du retrait féodal.

[50] Demander qu'il soit permis à tout propriétaire de détruire sur son terrain toute espèce de gibier privativement à toute personne, même aux seigneurs de fiefs, et de pêcher dans toute rivière et ruisseau, vis-à-vis de son terrain, dans lesquels ruisseaux et rivières il sera également permis de faire rouir le lin et le chanvre, vis-à-vis de sa propriété.

[51] Et, attendu que par un droit exorbitant en Bretagne, droit qui est l'effet de l'ancienne servitude féodale, les généraux de paroisse sont tenus de la nourriture et entretien des bâtards, quoique les seigneurs de fiefs recueillent leurs successions, demander que la nourriture et entretien des dits bâtards et enfants trouvés soient à l'avenir à la charge des propietaires de fiefs dans l'étendue desquels ces bâtards seront conçus et trouvés.

[52] Et, attendu encore que la manière dont se fait la réformation des fiefs en Bretagne est si vexatoire qu'il en coûte quelquefois à un pauvre particulier beaucoup plus que la valeur de son héritage pour en rendre aveu à son seigneur, demander que cette réformation soit simplifiée de la manière la moins onéreuse au public.

[53] Demander que tous seigneurs et propriétaires de rentes foncières et féodales ne puissent en demander plus de cinq années, ainsi que cela se pratique pour les rentes constituées.

[54] Demander la suppression de tous les ordres mendiants. Demander la liberté de la presse.

[55] Demander qu'aucun propriétaire ne soit tenu de faire une déclaration pour les bois qu'il abat pour son usage et que cette déclaration n'ait lieu que pour les bois qu'il vend à son profit.

[56] Demander que la prescription, actuellement quadragénaire en Bretagne, soit réduite à trente ans.

Arrêté en l'hôtel de ville de La Guerche sous notre seing et ceux des dits habitants qui savent signer, le premier avril mil sept cent quatre-vingt-neuf.

[Suivent 57 signatures, plus celles du président Perrière de Jonchère et du secrétaire Pirot].

(H. E. Sée).

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