Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

LES SAINTES-MARIES DE LA MER

et

LA GUÉRISON MERVEILLEUSE D'UN ANCIEN ÉVÊQUE BRETON

  Retour page d'accueil       Retour "Guémené-Penfao

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

A l'extrémité de ce véritable désert provençal appelé la Camargue, dans l'île formée par les différentes branches du Rhône se jetant dans la Méditerranée, s'élèvent au bord des flots l'église de Notre-Dame de la Mer ou des Saintes-Maries et la bourgade née à l'ombre de ce temple.

Quand après avoir quitté Arles et traversé plus de trente kilomètres de plaine sauvage sans habitations et sans cultures, on aperçoit enfin le sanctuaire des saintes, l'on demeure frappé d'étonnement, car cette église ne ressemble à nulle autre : c'est une véritable forteresse du moyen-âge. La nef est entièrement soutenue par des contreforts qui forment en même temps des mâchicoulis ; des crénaux entourent le sommet, et un toit plat, caché par ces ouvrages de défense, permet de circuler librement sur tout l'édifice. Deux lions de marbre antique semblent garder la porte ; quant aux fenêtres, rares, étroites et allongées, ce sont de vraies meurtrières. Le chœur, en hémicycle, surmonté d'une double rangée de crénaux et de machicoulis, supporte un superbe donjon crénelé comme tout le reste de ce singulier édifice.

Telle se présente extérieurement l'église des Saintes-Maries, dominant le village, le désert et la mer.

A l'intérieur, ce sanctuaire n'est pas moins intéressant : voici d'abord dans la grande et sombre nef un puits d'eau douce réputée miraculeuse ; une vaste crypte s'étend sous le chœur, et autour de ce dernier règne une magnifique colonnade composée de colonnes antiques de marbre précieux ; au-dessus de ce chœur s'élève le donjon renfermant la chapelle dite de Saint-Michel ; une ouverture fait communiquer cette chapelle aérienne avec la nef, et permet de faire descendre chaque année, à la fête des saintes Maries, les chasses vénérées des bienheureuses patronnes du lieu.

C'est pour conserver, en effet, durant les guerres du moyen-âge les reliques de Marie Jacobé et Marie Salomé que fut construite cette forteresse religieuse. La tradition ne dit-elle pas que ces saintes femmes, parentes de Notre-Seigneur, abordèrent en ce lieu avec sainte Madeleine, y vécurent dans la solitude au fond même de la crypte actuelle, y élevèrent un autel au vrai Dieu, et, après leur mort, y furent inhumées ? N'ajoute-t-elle pas que sur l'emplacement de leur humble demeure fut construite en l'honneur tout d'abord de la Mère de Dieu [Note : Quelques auteurs disent que Marie Jacobé et Marie Salomé élevèrent elles-même une petite église en l'honneur de la sainte Vierge, et que ce modeste sanctuaire fut le premier temple consacré à Notre-Dame dans les Gaules] une église qui prit de sa position le nom de N.-D. de la Mer ? Plus tard le culte rendu aux Saintes Maries fit donner leur propre nom à cet édifice.

Mais n'oublions pas non plus Sara leur servante ; elle mourut elle-même en odeur de sainteté et reçut la sépulture près de ses bonnes maîtresses. Elle est regardée comme la patronne spéciale de ces peuplades nomades appelés Bohémiens, et ce n'est pas un des moindres attraits du grand pèlerinage qui se fait encore le 25 mai de chaque année aux Saintes-Maries que le culte tout particulier rendu à Sara dans la crypte de l'église par les Bohémiens accourus de toutes parts ce jour-là dans ce coin désert de la Provence.

Rien de plus grandiose du reste que le pèlerinage fait aux Saintes-Maries le jour de leur fête : le 25 mai dernier (1888) plus de dix mille personnes venaient encore, — nous assurait le vénérable curé du lieu, — honorer ces saintes reliques ; et lorsque les châsses furent descendues de la chapelle supérieure dans la nef, ce fut une explosion de ces pieuses clameurs dont les Provençaux semblent en France avoir le privilège ; mais l'enthousiasme fut à son comble quand on porta processionnellement les statues des Saintes Maries, assises dans une barque comme à leur arrivée jadis, et quand déposant cette barque sur le rivage on se persuada bien que les flots se retiraient devant elle, pour témoigner que la volonté divine est de voir à jamais les reliques des Saintes honorées en ce lieu béni.

Ne croyez pas toutefois que le peuple de Provence ait seul en honneur le sanctuaire des Saintes-Maries. Lorque dernièrement nous eûmes nous-même le bonheur de nous agenouiller devant ces précieuses reliques on nous rappela le fait suivant par lequel nous voulons terminer cet article.

C'était vers le milieu du XIVème siècle : Pierre, évêque de Saint-Paul-de-Léon, vivait retiré, — très probablement démissionnaire, — à Lonjumeau, près de Paris. Appelé par les historiens de son temps tantôt Pierre de Nantes, tantôt Pierre de Guémené, il semble que ce prélat, originaire certainement du diocèse de Nantes, était né à Guémené-Penfao, tout près des frontières de notre diocèse. Il était doyen de Châteaubriant lorsqu'en 1328 il fut nommé évêque de Léon ; il est vraisemblable qu'il abdiqua l'épiscopat vers 1340, mais il vivait encore en 1357.

Pendant bien des années cet évêque fut tourmenté d'une cruelle goutte et privé de l'usage de presque tous ses membres, sans pouvoir même changer de position dans son lit qu'il était contraint de garder continuellement. Ce mal ayant encore augmenté, et les médecins déclarant que le malade touchait à sa fin, il eut recours dans cette extrémité aux Saintes Maries, fit vœu d'aller visiter leur église, si, par leur intercession, il obtenait la grâce de pouvoir s'y transporter, et sur le champ composa une hymne en leur honneur. Cette hymne était à peine achevée qu'il s'endormit d'un profond sommeil. Mais vers le milieu de la nuit étant à demi éveillé il crut voir les Saintes Maries qui firent des onctions sur son mal et l'assurèrent qu'il était guéri. A son réveil il le fut en effet, et dans l'excès de sa joie, après avoir raconté sur le champ aux personnes qui composaient sa maison, sa vision et le miracle, il se leva plein de vigueur et se mit en chemin pour Notre-Dame de la Mer. Il y arriva heureusement, fit le récit de sa guérison et offrit de riches présents en l'honneur des Saintes.

Ce miracle et ce pèlerinage nous sont attestés par plusieurs contemporains de l'évêque de Léon ; l'un d'entre eux, religieux au couvent des Carmes de Paris, était breton comme ce prélat : il se nommait Jean Fillous, dit Jean de Venette, probablement du nom de son village natal ; il connaissait particulièrement l'évêque qui l'admettait souvent à sa table, car voici comment il s'exprime dans son naïf langage : ... Plusieurs fois le visitay - Et de son pain souvent goutay ; - Aussi fis-je puis à Paris - Depuis qu'il fut du tout guéri (Ms. de la Bibliothèque Nationale).

Un autre auteur nous apprend au siècle suivant que la guérison de l'évêque breton était devenue populaire en Provence : on la racontait souvent aux Saintes-Maries, et les prieurs, chargés de la garde des reliques, avaient coutume d’en faire le récit aux pèlerins pour qu'eux-mêmes le racontassent à leur tour.

Mais la reconnaissance de l'évêque de Léon envers les Saintes Maries ne se borna pas à son pèlerinage ; il fonda encore trois chapellenies sous leur vocable, dont l'une en la cathédrale de Nantes ; puis il composa en l'honneur de ces Saintes un office propre qu'il se fit un devoir de réciter tous les jours de sa vie et qu'il faisait célébrer solennellement chaque année le 25 mai dans les chapelles bâties par lui ; enfin il fit graver sur une table l'hymne qu'il avait composée en prononçant son vœu et la plaça à Paris dans l'église des Carmes, comme un monument de sa reconnaissance et de sa piété envers ses chères saintes (C. f. Monuments inédits sur l'apostolat de Ste Marie-Madeleine en Provence, par M. l'abbé Faillon).

Croyez bien, ami lecteur, qu'il est doux de retrouver à trois cents lieues du sol natal ce persistant et pieux souvenir de la dévotion des Bretons envers les Saintes Maries. Cela nous y rappela que suivant l'ancienne liturgie de Rennes, antérieurement à saint Pie V, on célébrait dans notre diocèse la fête des saintes Sœurs le 25 mai, et qu'une de nos plus vieilles paroisses, Cornuz, signalée dès le VIIème siècle, porta longtemps le nom des Trois-Maries.

(abbé Guillotin de Corson).

© Copyright - Tous droits réservés.