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LA COLONNE DE JUSTICE DE TRÉGRANTEUR.

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Trégranteur est le siège d'une ancienne trêve de la paroisse de Guégon. Au centre du village, l'église, d'un intéressant caractère archaïque, assise sur un terre-plein, domine la petite agglomération des vivants et protège ceux qui se sont groupés autour d'elle pour dormir leur dernier sommeil.

Eglise de Trégranteur (Bretagne).

En face de l'église et séparé seulement du cimetière par un passage qui dessert quelques habitations, s'élève l'ancien auditoire de la seigneurie, qui porte la date de 1682.

La seigneurie de Trégranteur (anciennement Trégaranteuc) était une haute justice sous le comté de Porhoët ; son fief s'étendait à plusieurs paroisses des environs. Tout d'abord aux mains des Trégranteur, à partir du milieu du XVIème siècle, elle passe aux Quelen du Broutay, puis aux Bonin de la Villebouquais [Note : Une seigneurie du Porhoët. Trégranteur ; les seigneurs et le domaine, par le Vte Hervé du Halgouët, Rennes, Simon, 1907].

Dans l'enceinte du cimetière, face au portail occidental à double baie qui constitue l'entrée principale de l'église, à trois ou quatre mètres à peine de ce portail, s'est dressée jusqu'à nos jours une colonne digne d'éveiller la curiosité des érudits [Note :  Il y a plusieurs années, la colonne armoriée a été déplacée et dressée dans une autre partie du cimetière].

Construite en bel appareil de granit, ayant dans ses dimensions 3m, 50 de hauteur et 1 m, 70 de circonférence, elle est couronnée par un chapiteau qui porte l'écusson des Trégranteur, dont les armes, encore visibles, sont : d'azur à trois pals d'argent. Sans style très apparent, on peut la faire remonter à la fin du XVème ou au commencement du XVIème siècle. Nulle part, en Bretagne du moins, nous n'avons eu connaissance d'un monument seigneurial qui se rapproche de la colonne en question, et les archives de la seigneurie, conservées au château actuel de Trégranteur, ne laissent rien deviner de son objet. Il importe cependant de rechercher quelle a pu être sa destination.

L'appellation que la tradition a conservée à la colonne de Trégranteur doit, avant toute autre considération, retenir l'attention. Communément, les habitants du village la désignent sous le nom de « colonne de la justice ».

Son voisinage de l'auditoire pourrait la faire considérer comme un insigne utile de la juridiction seigneuriale ; toutefois, il n'est pas possible d'établir un rapprochement entre la colonne armoriée de Trégranteur et les attributs ordinaires des juridictions. Le « pilori » était un poteau de bois auquel était fixé le carcan ; son usage tombait en désuétude à l'époque où fut édifiée la colonne. Quant aux « piliers de justice » ou patibulaires, ils avaient toujours leur emplacement hors des lieux habités, sur une éminence, ou sur une lande découverte, comme cela se présente à Trégranteur même. Il faut voir plutôt dans la colonne un insigne destiné à rappeler la suprématie du seigneur là où se réunissait le général de la paroisse et où se promulguaient les décisions de la justice, devant l'assemblée des vassaux réunis à l'issue de la messe dominicale.

Colonne de justice de Trégranteur (Bretagne).

Avec plus de précision, nous pensons qu'une colonne de justice du genre de celle que nous étudions, devait être spécialement réservée aux hautes justices. Une consultation d'avocats du Parlement de Paris, de la fin du XVIème siècle, relative aux prérogatives des hauts justiciers et aux prétentions des seigneurs supérieurs, parle d'un droit immédiat pour le haut justicier d'établir « un poteau avec ses armes sur le territoire de sa juridiction ». « Jamais les seigneurs supérieurs, y est-il dit, n'ont estably, ny prétendu establir de poteaux avec leurs armes sous prétexte de droit de mouvance et de ressort ; ils peuvent en establir dans les territoires où ils sont hauts justiciers, mais non pas dans le territoire de la haute justice qui relève d'eux » (Consultation du 4 août 1699. Bibliothèque de Nantes, m. fr. 1729). En tenant compte de cette différence qu'une colonne de maçonnerie a remplacé, à Trégranteur, le poteau dont il est question dans le document écrit, nous croyons que ce texte apporte une explication suffisante.

Cet attribut de la haute justice rappelle en quelque sorte, et dans une certaine mesure, la verge ou le bâton armorié, insigne de l'autorité seigneuriale mis entre les mains du sergent de la juridiction, pour l'exercice de ses fonctions, et sans lequel l'officier seigneurial ne peut procéder à aucun acte juridique ou féodal.

Le château de Trégranteur (Bretagne).

Puisque les avocats du Parlement de Paris parlent du poteau armorié comme d'une prérogative communément admise, il faut supposer que cet insigne des hautes justices était moins rare dans le reste de la France qu'en Bretagne. Peut-être même les Trégranteur qui, sans doute, à l'exemple d'un grand nombre de représentants de la noblesse bretonne, avaient mis leur épée au service de la France pour guerroyer au delà des Alpes, s'étaient-ils inspirés de ce qu'ils avaient vu en Italie. Dans une fresque de Pinturicchio, des premières années du XVIème siècle, représentant la rencontre de Frédéric III ét d'Éléonore de Portugal, et faisant partie de la magnifique collection de la bibliothèque de la cathédrale de Sienne, il nous souvient avoir observé, au centre de cette scène, une élégante colonne de marbre dont le chapiteau supporte un double écusson et qui assurément pourrait être rapprochée de la colonne qui fait l'objet de cette notice.

(Hervé du HALGOUET).

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