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LA CHÂSSE DE SAINT GOLVEN ou GOULVEN

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Dans les catalogues des évêques de Rennes, il existe, à la fin du VIème siècle et au commencement du VIIème, une lacune d'une soixantaine d'années. Bertrand d'Argentré, dressant une liste de nos prélats pour son Histoire de Bretagne, chercha à combler en partie ce vide et prétendit que saint Golven, évêque de Saint-Paul-de-Léon, était devenu à cette époque évêque de Rennes ; voici comme il s'exprime : « Saint Golven, dit-il, fut premièrement successeur à l'évesché de Léon à Saint-Paul, et depuis fut évêque de Rennes. Il était natif du pays de Léon, et, ayant quelque temps administré sa charge, il la quitta pour suivre une vie plus austère, se retirant près le bourg de Saint-Didier, à quatre lieues de Rennes, en un lieu appelé la Motte-Mérioul, duquel il fit son ermitage ; il mourut le premier jour de juillet l'an 600 de notre salut, et fut apporté son corps en l'église Saint-Melaine, près de Rennes ».

Il est très-vrai, — comme nous l'avons déjà dit à nos lecteurs (Voir la Semaine religieuse de Rennes du 14 août 1874), — que l'on montre encore aujourd'hui, près du village de la Motte, en la paroisse de Saint-Didier, le jardin, le puits et le four possédés, d'après une tradition constante et séculaire, par le saint évêque Golven. Tout prouve donc qu'il est venu du Léon terminer sa vie dans cette solitude. Il est également certain que le corps de saint Golven, conservé tout entier à Rennes, d'abord dans l'église abbatiale de Saint-Melaine, puis dans l'église cathédrale de Saint-Pierre, a toujours été durant le moyen-âge un objet de vénération particulière pour le peuple de Rennes ; on le portait dans toutes les processions générales des Rogations, et c'était aux neuf recteurs de Rennes qu'incombait la glorieuse charge de soutenir ces saintes reliques.

La fête de saint Golven était célébrée avec solennité dans la cathédrale : « Elle est double de distribution et de sonnerie, et l'on doit mettre la châsse du saint sur le grant autel ès quatre heures principales, » chantées par le Chapitre, nous dit le Livre des Usages, en 1415, « on doit apparoir (c'est-à-dire exposer) icelui jour les autres reliques de l'église : il y a procession après Vespres devant l'image (du Saint évêque) pour la devocion du peuple, » de plus, « les enfans serviteurs du cueur y doivent à matines chappeaulx d'osier blanc aux seigneurs (c'est-à-dire aux chanoines) et aux gens du cueur » [Note : Nous reparlerons plus tard de ce devoir assez singulier au premier abord, de chapeaux d'osier blanc offerts à certaines fêtes, pendant l'été, aux chanoines de Rennes par le bas-chœur de la Cathédrale]. Enfin, ce jour-là, en signe de réjouissance, le Chapitre de Rennes offrait une collation de cerises et de vin à, tous ceux qui ont chanté l'office de saint Golven. « Et est à scavoir que, après les leczons de matines, l'on fait potacion avec des cerises, et à chacun son plat de cerises, son pot de vin, etc. » (Livre des usages de l'Eglise de Rennes - Archives du Chapitre).

Nous allons voir dans ce qui suit avec quel soin l'on conservait le corps du bienheureux prélat, mais nous verrons aussi que rien, dans les traditions rennaises ni dans le culte spécial qu'on lui rendait, ne prouve que nos ancêtres aient regardé ce saint comme ayant été l'un de nos évêques. Malgré l'autorité de d'Argentré, il n'est pas possible d'admettre son sentiment sur saint Golven, lorsque l'on retrouve tant d'honneurs décernés par Rennes à ce pontife vénéré comme évêque de Léon, sans qu'il soit fait mention de son épiscopat parmi nous.

Il est difficile de savoir à quelle époque les bénédictins de Saint-Melaine consentirent a se dessaisir en faveur de la Cathédrale de Rennes, d'une partie du corps précieux de saint Golven déposé dans leur église abbatiale ; il semble que ce dut être avant 1244. Lorsque le Chapitre de Saint-Pierre fit faire une nouvelle chasse en 1743 pour renfermer ces reliques, on trouva dans l'ancienne châsse trois petits parchemins dont le plus ancien contenait ces mots : Ici est renfermé le corps entier hic continetur totum corpus de saint Golven, évêque de Léon, excepté la tête que vénérable père en Dieu, Jean, évêque de Rennes, a placée dans un vase d'argent artistement fabriqué, à ses propres dépens, l'an de l'Incarnation du Seigneur 1244. Ce prélat était Jean Gicquel qui gouverna l'église de Rennes de 1239 à 1258 ; Joinville nous apprend qu'il se croisa à, l'exemple de quelques évêques, fit le voyage de Terre-Sainte avec saint Louis et s'y distingua par sa vaillance et sa piété. Il n'est point dit dans ce titre à quelle église appartenait alors le corps du saint évêque Golven ; mais en signalant la division de ces reliques dont le chef recevait un honneur particulier de la part de Mgr Jean Gicquel, on semble indiquer qu'elles se trouvaient déjà à la Cathédrale, et si le corps était tout entier dès lors en la possession du Chapitre, il est croyable que les moines de Saint-Melaine ne tardèrent pas à recouvrer quelques parties de ce pieux trésor.

Le deuxième parchemin nous apprend, en effet, que, moins de cent après, Guillaume Ouvrouin, évêque de Rennes, transféra dans une nouvelle châsse les saintes reliques du très saint confesseur l'évêque de Léon Golven iste sancte reliquie sanctissimi confessoris episcopi Leonensis Golvenni ; il n'est plus ici question du corps entier de saint Golven. Cette translation se fit très-solennellement, le 23 août 1336, par les mains de Pierre Frétault, archevêque de Tours et de notre évêque Guillaume Ouvrouin, en présence de Nicolas de Tréal, abbé de Saint-Melaine et de Constance de Pontblanc, abbesse de Saint-Georges. A cette époque, l'abbaye de Saint-Melaine était probablement rentrée en possession d'une partie des reliques du bienheureux, reliques qu'elle honorait au XVIIème siècle au rapport du P. A. Le Grand et de Dom Lobineau.

Au XVIème siècle, le bienheureux Yves Mahyeuc, natif du pays de Léon, étant évêque de Rennes, fut sollicité par ses compatriotes de leur accorder quelques portions du corps de saint Golven, l'apôtre avec saint Pol de leur pays commun. Le bon prélat ne put les refuser, et, en considération du culte que recevait saint Golven dans la paroisse qui portait alors son nom, mais qu'on appelle maintenant Goulven, le premier juillet 1533, il tira de la châsse que possédait la cathédrale de Rennes un ossement de la partie inférieure du bras, et il le remit aux paroissiens de Saint-Goulven. Cette translation se fit en présence des chanoines de Rennes, Hervé Mahyeuc, scholastique, Hervé Colson, Georges du Tertre, Jean Jamois, Pierre de la Beude, Guillaume Agaice, etc. Tous ces détails nous sont donnés par le troisième des parchemins dont nous avons parlé en commençant [Note : La teneur de ces parchemins est relatée dans les registres de délibérations du Chapitre en 1743 (Archiv. départ. d'Ille-et-Vilaine)].

En 1743, le Chapitre de Rennes crut devoir changer la châsse en bois couverte de feuilles d'argent qui renfermait depuis 1336 les reliques de saint Golven ; il commanda une châsse nouvelle à un orfèvre nommé Cailleau, et lui remit pour la faire les débris de l'ancienne, trois croix pectorales d'or, le haut de la crosse de Mgr de Cornulier, une boîte d'argent en forme de ciboire, un vieux bâton de croix, deux bras de croix couverts de feuilles d'argent, deux boîtes d'argent dorées, l'une aux armes de Mgr Hennequin, l'autre à celles de M. de Francheville, etc., etc. A tous ces objets d'or ou d'argent le Chapitre joignit une somme de 600 livres formée par les offrandes de quelques pieux personnages, tels que M. Le Gault, chanoine théologal, qui donna 100 livres, M. de Guersans, vicaire-général, qui offrit 245 livres, M. Vivier, recteur d'Ossé, ci-devant sacriste de la Cathédrale, qui envoya 50 livres, etc. ; enfin les chanoines en corps prélevèrent sur leur manse capitulaire la somme de 204 l. 17 s. pour le même objet.

Avec tout cela le sieur Cailleau fit une châsse digne du précieux dépôt qu'elle devait renfermer, et le Chapitre fixa au jeudi 16 mai 1743 la translation des ossements de saint Golven et de saint Hervé dans ce nouveau reliquaire. Lorsqu'on ouvrit, en effet, la vieille châsse pour en extraire les corps saints et la livrer elle-même à l'orfèvre, l'on y trouva, outre « le chef en deux parties de saint Golven et parties très-considérables des ossements de son corps » accompagnés des parchemins dont nous avons parlé, le chef de saint Hervé. Cette dernière relique était très-précieuse, car l'on sait avec quel respect était honorée dans la Cathédrale de Nantes la châsse du saint poète, ermite du Léon, aveuglené, et patron des chanteurs de Bretagne. Il ne semble pas toutefois que Rennes ait honoré saint Hervé avec autant de solennité que le faisait Nantes, où dans les grandes causes judiciaires la châsse de ce bienheureux était portée processionnellement devant les juges pour recevoir les serments solennels que l'on prêtait ailleurs sur le livre des Evangiles.

Au jour fixé, Jean-François de Guersans, chanoine, archidiacre et vicaire-général de Rennes, bénit la nouvelle châsse, et y déposa les reliques de saint Golven et de saint Hervé, et le dimanche suivant l'on célébra solennellement à la Cathédrale l'office de saint Golven : ce jour-là, et pendant les trois jours des Rogations qui suivirent, la châsse fut exposée à la vénératien des fidèles, et portée processionnellement le lundi à la chapelle de l'Hôpital-Général, le mardi à Saint-Melaine et le mercredi à Saint-Georges. A cette occasion, le Chapitre décida que la fête de saint Golven qui se célébrait jusqu'à ce jour au commencement de juillet, serait dorénavant solennisée ; sous le rit double de seconde classe, le cinquième dimanche après Pâques, veille des processions solennelles où l'on portait la châsse du saint, et que dans le cas où la Saint-Yves arriverait ce jour-là, cette dernière fête serait avancée et célébrée le 17 mai (Délibérations du Chapitre - Archives départementales).

C'est ainsi que le culte de saint Golven, honoré comme évêque de Léon, se perpétua à Rennes durant tout le moyen-âge et jusqu'à nos jours. Maintenant la châsse de ce bienheureux, que portaient sur leurs épaules les recteurs de Rennes avant la révolution, n'existe plus, mais les reliques qu'elle renfermait ont, en partie du moins, échappé à l'impiété des hommes de 93, et elles sont encore vénérées dans l'église métropolitaine de Rennes et dans l'ancienne église abbatiale de Saint-Melaine. Nul corps saint ne reçoit plus légitime hommage, et il n'est pas besoin de ranger saint Golven parmi nos évêques pour lui rendre les honneurs qu'il mérite.

(abbé Guillotin de Corson).

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