Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

L'ANCIENNE MUNICIPALITE DE GARLAN EN 1791-1793.

  Retour page d'accueil       Retour page "Ville de Garlan"  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Les archives municipales de cette époque ont été malheureusement détruites ou dispersées et nous n'avons pu consulter qu'un lambeau de registre relatant les délibérations du conseil général de septembre 1791 à octobre 1793. Ce document n'est d'ailleurs pas à la mairie ; il se trouve, en 1909, en la possession d'un particulier. Voici ce qu'il nous a appris sur les événements survenus alors à Garlan.

Ville de Garlan (Bretagne).

M. Derrien et son vicaire M. François Lazou, refusèrent le serment. Cependant ils ne furent pas remplacés à l'assemblée électorale du district de Morlaix, tenue le 27 mars 1791, et ils restèrent en fonctions sans être inquiétés jusqu'au mois de décembre. Le 2 novembre, M. Rodolphe Tallien, procureur de la commune, se plaint de leur refus formel de chanter un Te Deum, le 16 octobre précédent, pour la solennité de l'acceptation de la Constitution.

Le dimanche 11 décembre, M. Rohan, maire, demande au recteur d'annoncer pour le lendemain la fête gardée de Saint-Corentin, décrétée par Expilly dans tout le département du Finistère. Mais M. Derrien déclare publiquement, au prône de la grand'messe, avec « des propos indécents et des insultes à la Constitution », qu'il ne reconnaît point l'autorité de l'évêque intrus et ne la reconnaîtra jamais. Le maire doit lui-même, à la sortie de l'église, annoncer la fête, puis il réunit le corps municipal pour délibérer sur les suites que comporte l'incident. On décide l'arrestation du recteur et sa conduite devant le Directoire du district de Morlaix, sous l'escorte de trois officiers municipaux chargés de dénoncer « son incivisme et son refus d'obéir à la loi ». En même temps est mené à Morlaix, « sous bonne et sûre escorte ». Jacques-Louis Le Blonsart, du Bois de la Roche, surpris dans l'église au moment où il s'efforçait, armé d'un ciseau et d'un marteau, d'enlever la pierre sacrée de l'autel de la chapelle de Saint-Laurent, « sous prétexte qu'il en étoit le seigneur », et où il « décrioit par des propos incendiaires, devant un peuple crédule, la Constitution françoise ».

Le district de Morlaix condamna ce dernier à quelques jours de détention, et à faire amende honorable sous forme de déclaration consignée au registre, par laquelle il exprime son repentir et promet d'agir désormais « avec plus de retenue et de circonspection ». Quant à M. Derrien, jugé de bonne prise, on l'emprisonna au château de Brest, ainsi que son vicaire M. Lazou. Tous deux furent déportés en Espagne. M. Lazou, revenu d'exil, se vit arrêter de nouveau, le 29 messidor an VI, dans une ferme de la commune de Plougasnou.

Les registres de l'état civil sont signés, en janvier 1792, par M. Lhermit, curé de Guimaëc, provisoirement à Garlan, puis par M. Jean-François Pelleter, ex-dominicain de Morlaix. aussi provisoirement à Morlaix, l'un et l'autre insermentés. Le 16 mars 1792, le maire annonçait, en ces termes pompeux, au conseil général de la commune, la prochaine venue à Garlan de M. François-Marie Laviec, ancien moine récollet du couvent de Cuburien, qu'il avait quitté le 15 mai 1790 pour se retirer chez ses parents, au manoir de Kervanon, en Plouigneau.

« Le ciel, toujours propice à nos vœux, vient de mettre le comble à notre bonheur en aidant à notre recherche d'un prêtre constitutionnel. Il s'est trouvé, ce ministre qui va donner une nouvelle splendeur à notre religion abandonnée dans notre canton par des perfides qui, par une conduite tant impolitique qu'immorale, ont laissé depuis longtemps le plus saint ministère voguer à la merci des opinions diverses qui divisent aujourd'hui les Français. Cette paix que nous avons perdue va sans doute retourner dans nos hameaux avec le ministre désiré, qui obtient d'avance l'unanimité de notre confiance ». Sur sa proposition, le conseil « considérant que l'unique auberge du bourg est tenue par des personnes d'une opinion bien opposée à celle des vrais amis de la Constitution, que les meubles et effets mobiliers du ci-devant curé de Garlan occupent actuellement les appartements du presbytère, que ce curé est détenu au château de Brest pour cause de trop de franchise dans une façon de penser nuisible à la chose publique », arrête de prier le district de Morlaix de l'autoriser à réunir dans une seule pièce tout le mobilier de M. Derrien, de manière à permettre à M. Laviec d'occuper le reste du presbytère, dont la salle basse servait déjà depuis le 15 janvier, de local pour les réunions du conseil, tenues auparavant à l'église.

La paroisse de Garlan, supprimée après l'arrestation du recteur, avait été rattachée, à titre de trêve ou de succursale, à celle de Plouézoc'h, devenue chef-lieu de canton. Dans une lettre adressée au District de Morlaix, le 13 avril 1792, M. Morvan, curé de Plouézoc'h, déclare qu'il a choisi pour son vicaire à Garlan le sieur Laviec, prêtre assermenté, que ce dernier « y exerce les fonctions de son ministère depuis le 18 mars, au grand applaudissement de la saine partie de la succursale et qu'il désire se fixer parmy ce peuple auquel il est très attaché et dont il a mérité la confiance ».

Trois jours après, le 16 avril, M. Laviec rétractait par écrit son serment et quittait Garlan. Il fut arrêté à Pontivy, conduit à Morlaix et emprisonné le 12 mai au château de Brest. Il dut être déporté ou demeuré malade à l'hôpital de Brest (voir la liste de Mr. Boissière). En l'an VIII (1799) on le retrouve notifiant à l'administration municipale de Plouézoc'h son intention de résider dans cette commune pour y exercer le culte.

Son successeur à Garlan fut le citoyen François Martin, installé le 21 avril selon certificat de M. Morvan, approuvé par la municipalité le 23. Il loua le pourpris du presbytère et acheta une des vaches de M. Derrien, lors de la vente à l'encan qui se fit du mobilier de l'ancien recteur. A sa suggestion, le conseil général prit, le 28 mai, une délibération sollicitant les administrateurs du district de vouloir bien échanger la vieille croix d'argent, le soleil, le calice et l'ostensoir, tous en mauvais état, contre d'autres plus convenables provenant des églises supprimées. Déjà, le 27 février précédent, le maire s'était rendu à Morlaix, chargé d'un paquet d'ornements d'église hors d'usage, pour demander qu'on les remplaçât. Cette démarche ne semble pas avoir eu de succès, mais c'était, il faut le reconnaître, un ingénieux moyen de renouveler à peu de frais le trésor du « temple constitutionnel ».

Le 20 mai 1792, le maire, escorté des officiers municipaux et des notables, se rend au château du Bois de la Roche « pour désarmer M. du Bois de la Roche » auquel on prend « un fusil à deux coups, un fusil à un coup en fort mauvais état et une vieille épée sans fourreau ».

Le 19 août, M. Martin, nommé curé de Lanhouarneau, est remplacé par le sieur François-Marie Le Réguer, natif de Quimperlé, qui cumule avec ses fonctions vicariales celles d'officier de l'état-civil et de secrétaire de la Société Républicaine siégant au manoir de Kerohant, sous la présidence de l'instituteur, Rodolphe Taillen, ex-procureur de la commune et ex-administrateur (en 1791-1792) du département du Finistère.

Le conseil général arrête, le 10 mars 1793, de planter un arbre de la Liberté et d'acheter deux guidons pour la garde nationale. Le 19 juin, il entend donner lecture d'une lettre « écrite en langue bretonne », signée des citoyens Taillen et Réguer, par laquelle la Société Républicaine réclame l'arrestation « du nommé Jacques Blonsart, dit Bois de la Roche », et, le 30 juin, il établit la liste des gens suspects de la commune, mis en surveillance par ordre du District de Morlaix. Ces dangereux aristocrates étaient « Denise Prigent, cy-devant servante de Lazou, prêtre déporté, demeurant section du Rascoet ; Louis Le Hir (sans doute l'aubergiste du bourg) et sa famille en entier ; Marie Cars, servante de M. Derrien, curé déporté ; Joseph Motez, jardinier au ci-devant château de Kervolongar ; Louise Le Moal, servante chez Philippe Lazou ; Yves-Louis Le Blonsart du Bois de la Roche ; .Jacques Le Blonsart et sa mère, idem ».

Le procureur de la commune, Jean-Louis Le Cars, est également dénoncé, ce même jour, par Alain Laour, officier municipal, pour avoir dit, à l'auberge, qu'il ne permettrait jamais à ses enfants d'assister aux offices du prêtre jureur, et, qu'il blâmait l'arrestation de Jacques Le Blonsart du Bois de la Roche. A la séance du 28 juillet suivant, on accuse de nouveau Le Cars de mettre des entraves à toutes les affaires municipales, de protéger ouvertement les gens suspects, de ne pas avoir publié la Constitution, parce qu'il la désapprouve, « en un mot, d'être un mauvais citoyen dans toute la force du ferme ». Le conseil déclare qu'il ne prétend pas persécuter Le Cars au sujet de ses opinions religieuses, mais qu'après lui avoir accordé sa confiance, il s'estime libre de la lui retirer, et décide de le faire dénoncer au Directoire du district par deux officiers municipaux.

Le 4 août, le citoyen Sylvestre Denis, commissaire du district, arrive à Garlan et fait procéder à un vote des citoyens actifs « pour savoir si le citoyen Le Cars avait perdu leur confiance ». Cent vingt voix contre douze répondent affirmativement. Mais Le Cars ne se tient pas pour battu ; il persiste à conserver sa charge de procureur de la commune et à assister aux séances de la municipalité, en tenant énergiquement tête à ses adversaires, en disant qu'il conserverait toujours « son respect » à la famille Le Blonsart du Bois de la Roche, et en troublant l'ordre au point de rendre toute délibération impossible. Le conseil arrête enfin de porter plainte contre lui au département ou à la Convention ; nous ne connaissons pas les suites de cette démarche.

Le 29 septembre, l'assemblée municipale demande au district de Morlaix « une bonne cloche à la place de la cloche. fendue, un ornement complet fond blanc pour les jours de solennité, un voile pour porter le Saint-Sacrement en procession, quelques aubes, amicts et ceintures, six chandelliers pour le maître-autel, quelques nappes pour couvrir les autels, un ornement propre en noir et un soleil ».

Ici se termine le registre incomplet où nous avons puisé les détails qui précèdent. Nous savons seulement que le citoyen vicaire Le Réguer finit par renoncer au sacerdoce et par déposer ses lettres de prêtrise, le 11 vendémiaire an II, au Directoire du district de Morlaix. L'ex-dominicain Pelleter n'avait pas quitté la commune et s'y était tenu caché pendant toute la Terreur, continuant à exercer le ministère sacré à travers mille périls. Le 14 germinal an IV, il se présente au bureau municipal de Morlaix et y fait la déclaration de résidence exigée par la loi, mais doit bientôt regagner sa retraite, après le décret du 7 vendémiaire suivant.

L'ancien recteur, M. Derrien, revint à Garlan vers l'époque du Concordat, mais il ne reprit pas la direction de la paroisse et la laissa confier à un nouveau pasteur, se contentant lui-même du titre de prêtre habitué. Il passa ses dernières années entouré de la vénération due à ses épreuves et à ses vertus. Un de ces successeurs a laissé également une mémoire respectée. C'est M. Charles-Félix Le Gac de Lansalut, ancien et dernier chanoine de la collégiale du Mur à Morlaix, chanoine de Quimper et de Meaux, recteur de Garlan, décédé à Morlaix le 19 mai 1846, à l'âge de 72 ans.

(L. Le Guennec).

© Copyright - Tous droits réservés.