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LE CHATEAU DU BOIS DE LA ROCHE A GARLAN ET LA FAMILLE LE BLONSART.

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Quittons maintenant le bourg, et commençons notre excursion dans la commune en suivant la route de Morlaix que nous abandonnons bientôt pour descendre vers la rivièrà du Dourdu par le joli chemin vert de Mezoumanac'h. Au carrefour, nous croisons la voie romaine de Brest à Cherbourg, vieille sente broussailleuse, rétrécie et creusée, qui fut jadis la grande artère du pèlerinage national des Sept-Saints de Bretagne, le Tro-Breiz. A cinq cent mètres à l'Est, elle borde encore une motte d'environ cinq mètres de hauteur, dite Tosser ar C’han (la butte du combat ?) qui, d'après la tradition locale, fut élevée lors du déluge et surmontée d'une haute tour où se réfugièrent vainement un puissant chef du pays et sa famille, puis elle va franchir le Dourdu au vieux moulin gothique de Kerohant, et côtoie le cours d'eau jusqu'au hameau de Kermouster, groupé autour des ruines de la chapelle de Saint-Mélar, où elle aborde les pentes montueuses et dénudées du plateau de Lanmeur.

Mezoumanac'h (Meas en Manach, dans les réformations de 1427 et de 1481) était une métairie noble appartenant aux seigneurs de Boiséon. En 1481, elle était tenue par Allain Le Jeune, partable, qui payait 14 paresarts [Note : Ou quartiers, mesure qui équivaut à présent à l'hectolitre. On prononce en breton : palevartz] froment de rente annuelle, et manœuvrait 13 arpents de terre. Le compte du domaine de Boiséon que nous avons déjà cité, contient cet article pour l'année 1599 : « Suplye ledit comptable avoir allocation et descharge de la somme de neuff livres tournoys par il froyé en ladite année 1599 par les mains de Tugdoal Pappe, tant aux repparations des couvertures, portes et fenestres en la mestairye de Mesoumanach, en laquelle Pappe demeure, que pour avoir fait esmonder, mettre en fagotz et mulons les esmondes de la rabine de ladite mestairye, pour faire rendre au chasteau de Morlaix, Messieurs les enffentz y estant lors ».

Ville de Garlan (Bretagne) : manoir du Bois de la Roche.

Nous traversons le Dourdu sur un pont rustique formé de quatre grosses pierres, près du moulin du Bois de la Roche, en un site charmant. Le vieux moulin seigneurial reflète ses pignons tapissés de lierre dans un calme petit étang encadré d'humides prairies et dominé par une sorte de falaise rocheuse, taillée presqu'à pic, que couronnent les murailles grisâtres et les grands toits moussus du château. Le Bois de la Roche est un long édifice du dix-septième siècle, sans caractère architectural, converti depuis longtemps en ferme. Au devant règne une cour immense, bordée à gauche par une esplanade qui a perdu ses ombrages, mais a conservé son nom de l'Allée de Madame. A l'angle du jardin existe la chapelle, modeste oratoire abritant une seule statue, une belle Vierge-Mère du temps de Louis XIV. Le colombier se dresse encore, malgré ses brèches et ses lézardes, dans un champ au Sud de l'habitation. Le versant Nord de la colline est couvert d'un bois touffu de sapins, qui descend jusqu'à la chapelle croulante de Saint-Hubert, en bordure de l'ancienne route de Morlaix à Lanmeur.

La réformation de 1427 attribue le Bois de la Roche au seigneur de Lescoulouarn, Eon Foucault, capitaine de Concarneau en 1413, chevalier en 1420 dans l'armée levée contre les Penthièvre. En 1481, ce lieu appartenait à Jeanne Foucault, dame de Lescoulouarn, l'Armorique, le Bois de la Roche, veuve en premières noces de Jean de Langueouez, seigneur dudit lieu, et remariée à Guillaume de Penhoët, seigneur de la Marche. Il passa ensuite, par alliance, aux Talhouët, et fut vendu, vers 1544, par Jacques de Guengat et Marie-Jeanne de Talhouët, sa femme, seigneur et dame de Langueouez, à un marchand morlaisien nommé François Le Blonsart.

La famille Le Blonsart se prétendait de vieille noblesse, et citait, comme preuve, un vitrail de 1503 dans l'église de Saint-Melaine de Morlaix, où se voyait la représentation de Yvon Le Blonsart « armé, botté, espronné, avecq sa cotte d'armes portant son escu qui est d'argent à une face échiquetée de sable avecq un besan en juveigneurie escartelé avecq les alliances de sa mère (Gilette de Coëtquis) et de sa femme (Tiphaine Le Borgne) ... et ledit Yvon ne pouvoit passer pour un roturier, encor moins pour un marchand, puisqu'on le peint avecq une cotte d'armes, son espée au costé, qui n'est point l'habit d'un marchand ny d'un païsan, mais d'un gentilhomme et d'un escuier » [Note : Factum de 1640. (Archives de la famille Le Blonsart du Bois de la Roche)]. Cet argument manque quelque peu de solidité, car le donateur d'une autre verrière qui orne encore l'une des fenêtres de l'ancienne église des Récollets de Cuburien, près de Morlaix, était un certain Jean Le Barbu, sieur de Bigodou, riche négociant du seizième siècle, que des comptes de l'époque nous montrent exportant des toiles en Espagne et ouvrant lui-même boutique à Séville ; et pourtant il apparaît, agenouillé au bas du vitrail, avec un harnais complet de combat et armé de pied en cap, casque à plumet rouge, brassards, cuissards et corselet d'acier blasonné de ses armoiries. Du reste, Jean Le Barbu avait le droit de se faire peindre en ce belliqueux appareil, et l'antique lignée à laquelle il se rattachait comptait parmi ses illustrations, en même temps que des chanceliers de Bretagne et des évêques de Nantes, de Vannes, de Léon, maints preux écuyers et chevaliers. Son cas était celui d'Yvon Le Blonsart et d'une foule d'autres cadets de famille, qui. attirés par l'appât d'un gain facile et la perspective d'une fortune promptement édifiée, laissaient « leur noblesse dormir » et accouraient à Morlaix se livrer au négoce, surtout à ce commerce de toiles avec l'Espagne, qui donnait lieu à des transactions si importantes qu'on a pu en évaluer le montant annuel à une trentaine de millions pour la période antérieure à la Ligue. Les plus chanceux entassaient rapidement dans leurs coffres ducats d'or, écus soleil, écus couronnés; grands portugalois ; puis, lorsqu'ils jugeaient leur richesse suffisante, ils faisaient au greffe royal une déclaration de vouloir désormais « vivre noblement », et s'en allaient mener dans quelque manoir rural acquis à beaux deniers comptants, une existence heureuse et tranquille de gentilshommes aisés.

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Les titres de la famille Le Blonsart désignent Olivier Le Blonsart, époux en 1459 de Gilette de Coatquis, comme le premier auteur connu de cette maison. Sou fils aîné Olivier Le Blonsart, sieur des Isles en Guimaëc et de Kersabiec en Plounévez-Lochrist, épousa Anne Doudron, et fut père de Jean, archer en brigandine aux montres de 1479-1503 en l'évêché de Léon, marié à Marguerite Keraudy, desquels issut François Le Blonsart, sieur des Isles et de Kersabiec, allié à Fiacre de Kergus. Leur fils Jean, époux en 1530 de Marguerite de Kerzéan, ne laissa que deux filles dont l'aînée, Plézou Le Blonsart, dame de Kersabiec, se maria dans la famille de Kerouzéré.

Yvon Le Blonsart, second fils d'Olivier et de Gilette de Coatquis, épousa Tiphaine Le Borgne. En 1501, son neveu Jean Le Blonsart, sieur de Kersabiec, lui céda le droit qu'il avait en la chapelle de Saint-Isidore, qu'on bâtissait dans l'église de Saint-Melaine de Morlaix, alors en construction, et Yvon Le Blonsart la décora d'une verrière coloriée où il fit placer son effigie, celle de sa femme et de ses enfants. L'aîné de ceux-ci, Jean Le Blonsart, eut de sa première femme Marie Morice Yvon Le Blonsart, sieur de Coatsech et de Kerilly, marié à Adelice de la Rive, et père de Marie Le Blonsart, qui épousa Jean de Trogoff, sieur de Coëtmenguy en Ploujean. Le cadet, Nicolas Le Blonsart, vivant en 1513, époux de Françoise Le Noblet, laissa deux fils, François, auteur de la branche du Bois de la Roche et Jean, auteur de la branche de Kertanguy.

François Le Blonsart amassa en commerçant une assez grosse fortune, qui lui permit d'acquérir le manoir du Bois de la Roche des seigneur et dame de Langueouez (acte d'appropriement du 14 janvier 1546 dans sept convenants dudit lieu). Il « quitta le trafic » en 1554 et se retira dans ses terres avec sa femme Sylvaine Lhonoré, dame de Kerlaouénan, qu'il avait épousée par contrat du 12 décembre 1545. Son fils aîné François, auquel il fit suivre la carrière des armes, fut tué sous Henri III au siège d'une place forte, n'ayant eu de son mariage avec Jeanne Le Bihan, qu'un fils et une fille morts tous deux sans alliance avant 1586. Son second fils Yves, seigneur du Bois de la Roche et de Kerlaouénan, continua la filiation et épousa Périne Bidégan, dont neuf enfants baptisés à Garlan et à Saint-Mathieu de Morlaix de 1588 à 1610.

A l'époque de la Ligue, Yves Le Blonsart était lieutenant de la paroisse de Garlan. Il vécut jusqu'en 1632, et succomba à une terrible épidémie de peste qui anéantit sa famille presque toute entière. Cette lugubre série de décès débuta par la mort de cinq de ses enfants ; Suzanne Le Blonsart, dame de Poulrant décédée le 26 octobre 1631 ; Marguerite, dame de Tierglas, le 19 novembre ; Gilles, sieur de Pratmeur, le 5 décembre ; Yves, sieur de Penanguern, le 6 janvier 1632 ; Denise, dame de Mesdon, enterrée le 14 janvier dans la chapelle de Saint-Hubert. Quatre jours après, le père et la mère, Yves Le Blonsart, et Périne Bidégan, seigneur et dame du Bois de la Roche, étaient emportés ensemble, le 18 janvier, et le fléau qui s'acharnait à dépeupler leur manoir fit encore une dernière victime en la personne de Guillaume Le Blonsart, sieur du Prajou, mort le 23 janvier. Deux des enfants, François et Périne, échappèrent seuls à la contagion.

François Le Blonsart, seigneur du Bois de la Roche, Kervennou, Kerphélippe, etc., épousa : 1° en 1632 Françoise du Largez, fille de Vincent du Largez, seigneur de Kerancrec'h, Kerdelahaye, et de Marie de la Boissière ; 2° en 1662 Françoise de Kerret, dame de Kerdeniou. En 1640, il eut à soutenir, de concert avec son cousin François Le Blonsart de Kertanguy, un curieux procès contre François de Kermabon, seigneur de Kerprigent, qui revendiquait, comme représentant la branche aînée des Le Blonsart, sa part des prééminences de la chapelle de Saint-Isidore, en l'église de Saint-Melaine, et le droit d'apposer son écusson au plus haut soufflet de la vitre. En 1666, François Le Blonsart fournit un cavalier à la 8ème compagnie de l'arrière-ban de l'évêché de Tréguier, chargée d'occuper le poste de la pointe de Locquirec (Archives des Côtes-du-Nord. C. 7), et fut maintenu ainsi que son fils aîné Gabriel-René, issu du premier lit, en qualité d'écuyers d'extraction, par arrêt do la Chambre de la Réformation, rendu le 22 juillet 1670. Son acte de décès, en date du 20 décembre 1672, le qualifie de « capitaine de l'infanterie de la paroisse de Garlan ».

De son premier mariage issut Yves Le Blonsart, seigneur du Bois de la Roche, le Plessis, Kerphélippe, Goashalec, marié en 1657 à Jeanne-Louise de Lestel, fille de feu Jacques de Lestel et de Marie Cocenneuc, seigneur et dame de la Boulle, Kerlevenez. Il mourut en 1681, laissant un seul fils, Gabriel-René Le Blonsart, seigneur du Bois de la Roche, qui avait épousé en 1675 Constance-Françoise du Drézit, fille de Claude du Drézit, seigneur de Ponthuet, cornette de la cavalerie de l'arrière-ban de l'évêché de Tréguier dans le quartier de Lannion et de feue dame Françoise Gargian, dame de la Villeneuve, Kerguiniou. Il est ainsi mentionné dans le rôle de la capitation de 1703 (Archives de M. de Bergevin) pour la paroisse de Guarlan. : « Le sieur du Bois de la Roche Blonssart, quarante livres. Un vallet et une servante trois livres. Nota qu'il déclare un domestique de moins ».

Gabriel-René Le Blonsart décéda en 1720. Son fils aîné, Messire Yves Le Blonsart, seigneur du Bois de la Roche, né en 1692, fut marié : 1° en 1721, à Louise-Lucrèce de l'Estang, fille d'écuyer Yves de l'Estang, seigneur de Kerogon et de Guyonne-Perrine Morice ; 2° en 1734, à Françoise-Arthure de Kerémar, fille d'écuyer Mathurin-François de Kerémar et de Marie Landois. Sa première femme lui donna plusieurs enfants, entre autres Messire Yves-Louis Le Blonsart, chef de nom et d'armes, chevalier, seigneur du Bois de la Roche, époux en 1758 de Marthe-Julie Le Naigre de la Pancherie, et François-Marie Le Blonsart, chevalier du Bois de la Roche, allié à Marie-Jeanne-Hyacinthe du Parc de Kerret.

Ce dernier, emprisonné à Morlaix pendant la Terreur, mourut à l'hôpital le 25 ventôse an II, à l'âge de 67 ans, il n'avait qu'une fille, Jeanne-Louise Le Blonsart, mariée en 1793 à son cousin-germain Hubert-Jean Le Blonsart du Bois de la Roche, sous-lieutenant au régiment de Penthièvre en 1784, second fils de Yves-Louis et de Marthe-Julie Le Naigre. La famille Le Blonsart semble n'avoir pas émigré lors de la Révolution, mais elle fut plus d'une fois inquiétée et molestée par les autorités de Garlan, qui en voulaient surtout au fils aîné Jacques-Louis, jeune homme hardi et vif, quelque peu cerveau brûlé, chasseur et buveur intrépide, grand coureur de pardons, de luttes, d'aires neuves, fort populaire d'ailleurs dans le pays. Le conseil général essaya de se débarrasser de lui en l'enrôlant d'office, le 19 août 1792, parmi le contingent de 478 hommes dont le département avait ordonné la levée dans le district de Morlaix, et en lui adjoignant cinq autres pauvres diables, tous suspects de tiédeur envers la Constitution. Jacques Le Blonsart ne se souciait point d'aller aux frontières combattre pour un régime qui n'avait pas ses sympathies ; aussi refusa-t-il de marcher et continua-t-il de faire le désespoir de la municipalité, qui se décida enfin, le 19 juin 1793, à le mettre en état d'arrestation et, à l'envoyer en prison à Morlaix ; le 30 suivant, sa famille était mise en surveillance. Nous ignorons ce qu'il advint de lui.

En 1806, les Le Blonsart résidaient encore à leur château du Bois de la Roche, qu'ils paraissent avoir aliéné peu de temps après, car Mme Le Blonsart, née Le Naigre, mourut en 1810 à la maison de Mezoumanac'h, en Garlan, où elle habitait. Acquise par les de Cillart, la propriété du Bois de la Roche a depuis, été vendue aux de Forsanz. La famille Le Blonsart du Bois de la Roche est vers 1909 très honorablement représentée par les descendants de Jean-Marie Le Blonsart, fils d'Hubert-Jean et de Jeanne-Louise Le Blonsart, et de sa femme Françoise-Emilie Le Jeune.

(L. Le Guennec).

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