Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

FRAIS DE LA DEDICACE D'UNE CHAPELLE EN L'EGLISE SAINT-SULPICE

  Retour page d'accueil       Retour " Eglise de Saint-Sulpice de Fougères "   

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

FRAIS DE LA DÉDICACE D'UNE CHAPELLE EN 1410 ; MENU ET FRAIS D'UN DÎNER D'APPARAT A LA MÊME ÉPOQUE. — La fondation de la paroisse de Saint-Sulpice de Fougères se confond avec celle de la ville elle-même. A la fin du XIème siècle (1074 ou 1075), Raoul, premier seigneur de Fougères, la donna à Marmoutier avec l'église de la Trinité, que sa mère avait fait construire sur la place même du marché.

Les religieux possédèrent les deux églises séparées pendant environ quatre-vingts ans ; mais la population de la paroisse tendait à prendre un considérable accroissement, et il était facile de prévoir que bientôt la petite église de Saint-Sulpice, construite dans une île fort étroite, ne serait plus en rapport avec elle. Les religieux profitèrent habilement de cette circonstance, et faisant ressortir aux yeux d'Alain, alors évêque de Rennes, tous les avantages que présentait l'église de leur prieuré, vaste et spacieux édifice détruit à la fin du siècle dernier, ils obtinrent de lui, en 1155, une ordonnance qui lui transférait tous les droits et les prérogatives de la paroisse, dont elle dépouillait l'église de Saint-Sulpice.

Les paroissiens, sincèrement attachés à leur église, protestèrent de tout leur pouvoir contre cette mesure, à laquelle ils refusèrent constamment de se soumettre, et afin de couper court au prétexte qui l'avait motivée, ils songèrent dès lors à reconstruire leur église et à la mettre dans des proportions convenables avec la population.

Plus de deux siècles s'écoulèrent avant que les ressources de la paroisse leur permissent d'accomplir ce religieux et patriotique dessein : cependant ils ne l'abandonnèrent jamais, et il semble que chaque génération, en disparaissant, léguait à sa suivante le zèle impatient qui l'animait pour son exécution. Enfin, dans les premières années du XVème siècle, par l’ordinacion de la plus saene partie des parouaesiens, ils obtinrent de l'official de Rennes de esgailler et asseoir une taillée qui fut répartie sur trois années et qui produisit, autant qu'il a été possible de m'en rendre compte, la somme de deux cent cinquante livres, seize sous, six deniers. Ce fut avec cette somme et un budget, comme nous dirions aujourd'hui, qui pouvait s'élever en recette à la somme de cinquante-cinq à soixante livres, qu'ils entreprirent la grande oeuvre de la reconstruction de la nef qui existe encore aujourd'hui.

La première travée de la nef septentrionale fut terminée an commencement de l'année 1410, et la chapelle qu'elle renferme fut consacrée, sous l'invocation de Notre-Dame, par Monseigneur l'évêque de Rennes lui-même, le 8 mars de la même année.

Voici le détail des frais de cette cérémonie tels qu'ils nous ont été transmis par les trésoriers de l'époque, Pierrot Garnier, Michel Bonniays et Macé Le Duc :

Mise et descharge fete par les diz thesoriers pour la dedicacion de la chapelle Notre-Dame laquelle dedicacion fut fete par Monseigneur de Rennes et ses gens le VIIIe jour de mars mil IIIIcc et deiz. — P°.

Et Monseigneur de Rennes pour sa paie et salaire du dit jour pour sacrer la dicte chappelle, XI l. XII s. VI d.

Et maistre Pierre Bretin official de chambre doud. Monseigneur de Rennes pour avoir aidé a faire la dicte dedicacion pour sa paie et salaire de ce, X s.

Item au barbier de Monseigneur pour don a li fet, II s. VI d.

Item au queu de mondi seigneur pour don a li fet, III s. VI d.

Item pour despense fete par Roland de la Chappelle et Raoulin Doreuge pour aulcun présent de vin fet par les dessusdiz ou nom des thesoriers à Monseigneur de Rennes et ses gens pour le requerire et prier de faire et avancier la dicte dedicacion par plusieurs foiz et journées en despense, LIIII s. VII d.

Item pour XIII clouz crochuz qui furent mis contre les mazières pour mectre les cyergeoz (sic), VIII d.

Item pour treze cyergeoz qui furent mis esdiz clouz pour fere la dicte dedicacion comme dict est, VI s. VI d.

Item à Geffroy Avisart peintre pour avoir fet XIII crouez enviz la dicte chappelle pour et à cause de la dicte dedicacion, X s.

Item à Pierrot Bouteiller maczon pour avoir fet V crouez sur la pierre de lautel devant Notre-Dame pour la dicte dedicacion, XII d.

Item pour IIII onces dencens mises sur les dictes V crouez pour la dicte dedicacion, III s. IIII d.

Item pour deus potz de vin et deus pains qui furent portez a liglese aux chantres qui aiderent a fere la dicte dedicacion, III s. IIII d.

Item pour un pot de vin a fere lesve gregoryenne, XII d.

Item au chappelain de Monseigneur de Rennes pour sa paie et salaire de la dicte dedicacion, V s.

Item pour le sablon qui fut mis entre les murs de la dicte chappelle pour et à cause de la dicte dedicacion, III s.

Item a celi qui eseript la quietance de la dicte dedicacion, XXII d.

Somme XVI l. XVII s. IX d.

La joie des habitants de Saint-Sulpice ne fut pas de longue durée ; un incident qu'ils auraient dû prévoir vint en arrêter le cours et leur donner de nouveaux embarras. L'île, dans laquelle s'élevait leur église, quelque petite qu'elle fût, ne leur appartenait pas encore tout entière. Elle renfermait un courtil attenant au cimetière, et dont l'acquisition devenait indispensable pour suppléer au terrain que l'on prenait à celui-ci pour l'agrandissement de l'église ; mais ce courtil appartenait aux religieux de Marmoutier, et il y avait à craindre qu'en refusant de traiter avec la paroisse ils ne vinssent rendre inutiles tous les efforts et tous les sacrifices que l'on s'était imposés. L'un des trésoriers fut chargé d'aller porter à Marmoutier la très-humble requête de la paroisse ; mais ce voyage, qui coûta cinquante sous, six deniers, tant pour la dépense de l'homme que celle du cheval et le louage de celui-ci, fut sans aucun résultat.

Peu de temps après le prieur de la Trinité fit un voyage à Fougères, accompagné du prieur de Bonnières. Les trésoriers pensèrent que le moment était décisif et que le succès de leur entreprise dépendait entièrement des dispositions du prieur. Sans doute qu'ils ne négligèrent rien pour se le rendre favorable, et qu'ils lui firent bien des politesses dont ils n'ont pas jugé à propos de nous transmettre les détails ; mais ils employèrent un moyen qui prouve que si les fabriciens de Saint-Sulpice n'avaient pas devancé leur siècle en matière de sollicitation, du moins ils ne seraient pas déplacés dans le nôtre, où ils rencontreraient de nombreux imitateurs. Ce moyen fut de traiter le prieur et son collègue.

Les trésoriers nous ont conservé non-seulement le menu du diner qu'ils leur donnèrent, mais encore le prix des différents mets qu'ils leur servirent. Il n'est pas sans intérêt de voir de quelle manière nos ancêtres les bourgeois de Fougères du XVème siècle traitaient les personnages dont ils cherchaient à capter la faveur, et en quoi consistait un dîner d'apparat à cette époque. Du reste, laissons parler nos trésoriers eux-mêmes ; la naïveté de leur langage est tout à fait en harmonie avec la simplicité des moeurs dont nous nous plaisons à évoquer les souvenirs.

Le chapitre auquel nous empruntons le passage que nous donnons, plus bas est intitulé : Mise faicte par lesdiz thésorierz a cause et pour raeson de laquett dou courtil qui fut acquit dou prieur de la Trinité de Fougières pour laugmentacion dou cymetère de Saint Sulpice.

Après l'énumération de diverses dépenses concernant la rédaction d'une supplique à l'abbé de Marmoutier, et les dépenses de Pierrot Garnier qui alla la présenter à l'abbaye même, le comptable poursuit ainsi :

Item revindrent à Fougières les diz prieurs de la Trinité et de Bonnyère et par le conseil avis et assentement de la maire partie des paroissiens lour fut donne un digner au dit lieu de la Trinité a eulx et plusieurs autres pour et a cause de lour supplier encore pour ledit courtil.

Pour ceul digner de chers Jahan Hochard VI potz de vin blanc valant, VII s.

De chers Pierrot Garnier XVIII potz de vin val. XXI s.

Item doud. Pierrot III douzaines de pain val. VI s.

De chers Tebaud Poitrine VI pains val. XII d.

Item pour un chastre gras qui fut prins chers Roland de la Chappelle pour le di digner de ce, XX s.

Pour un chevrel achate de Hamelot, de VI s. VIII d.

Pour un autre chevrel achate de Perrin Maheult, III s.

Pour VI chappons achetez de Colin Berthelot, VI s. VI d.

Pour X pouleaux achetez de Colin Dubreil, V s.

Pour trais ouaysons, II s. VI d.

Pour chez (sic) (chair) sallée, VII s. VI d.

Pour deus quartiers de veau, III s. IIII d.

Pour espices et pour saffren, III s. IIII d.

Item pour IIII potz de vin blanc pour le souper, IIII s. VIII d.

Item au cou (cuisinier) don prieur qui aparailla le digner pour sa paie, X s.

Pour busche et pour charbon pour aparailler la viande, V s.

Le prieur de la Trinité fut-il sensible aux procédés des trésoriers ? Nous serions portés à le croire ; car Pierrot Garnier étant retourné à Marmoutier, chargé d'une nouvelle supplique, rapporta le consentement du chapitre à l'aliénation du courtil. Aux fêtes de la Pentecôte, son collègue Michel Bonniays fit le voyage de Bruz pour obtenir de Monseigneur l'évêque de Rennes son autorisation : preuve évidente que dès lors l'action des fabriques n'était pas entièrement libre, et que leurs opérations financières étaient soumises à certaines formalités protectrices, comme elles le sont encore aujourd'hui.

Le mardi après la Saint-Luc, Pierrot Garnier, muni du consentement du chapitre et de l'acquiescement de l'évêque, partit pour Angers, où se trouvait le prieur de la Trinité, afin d'avoir la ratification du contrat ; mais le prieur refusa de la donner, sous prétexte que les trésoriers et les paroissiens avaient déprécié et destourbé le courtil. Pierrot Garnier revint donc encore une fois à Fougères, sans être beaucoup plus avancé qu'à son premier voyage ; enfin il retourna une seconde fois à Angers avec des lettres du capitaine, du curé de Saint-Sulpice et de Roland de la Chapelle, qui attestaient qu'ils avaient assisté au contrat et que tout s'était passé avec la plus grande bonne foi et la plus grande équité, et il fut assez heureux pour rapporter son contrat en règle.

La dépense occasionnée à la fabrique pour l'acquisition de ce courtil, tant en frais de voyage qu'en présents, dîners, frais de chancellerie et autres, s'éleva à la somme de XXVIII liv. XIX s. IX d., somme considérable, si on pense qu'en cette année-là le prix de l'hectolitre de seigle valait à Fougères environ VI s. VIII d., et la journée d'homme XX d. (Léon Maupillé).

 © Copyright - Tous droits réservés.