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HISTOIRE DE LA TERRE OU BARONNIE DE FOUGERES

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De l'étendue de la terre de Fougères. — Des droits qu'elle donnait à son possesseur. — Étymologie du nom de Fougères.

La terre ou baronnie de Fougères se composa, dès le principe, de tout le territoire compris dans le Vendelais, le Coglais, le Désert et les châtellenies d'Antrain et de Bâzouges (Voir Vendel, Cogles, Louvigné, Antrain et Bazouges).

Elle avait, comme on voit, une étendue beaucoup plus considérable que l'arrondissement qui l'a remplacée, puisqu'à l'exception de quelques communes du canton de Saint-Aubin-du-Cormier, elle comprenait toutes celles qui font aujourd'hui partie de notre arrondissement, et, en outre, un grand nombre qui sont entrées dans la formation des arrondissements de Vitré et de Saint-Malo.

La baronnie de Fougères étant une des plus anciennes et des plus considérables de la province, donnait à son possesseur le droit d'assister aux conseils du duc, comme membre de son Parlement [Note : Voir D. Morice, tome III, col. 579, 583, 597, 632, 697, 698, 700, 706, 707, 710, etc. Le titre de baron n'avait pas à cette époque la signification que nous lui attachons aujourd'hui ; c'était un adjectif vague et indéfini, qui ne correspondait à aucun degré de la hiérarchie nobiliaire, une qualité indéterminée que l'on donnait à tous les seigneurs, depuis le duc jusqu'aux simples chevaliers. Il paraît néanmoins que, dans le principe, il indiquait une position éminente immédiatement inférieure à celle du souverain : c'est dans ce sens que l'on disait des comtes de Champagne, des ducs de Bourgogne, etc., qu'ils étaient les barons du roi de France ; mais bientôt les grands vassaux, à l'imitation de leurs maîtres, créèrent dans leurs domaines des apanages plus considérables, qui donnèrent à leurs possesseurs le titre de baron, et leur exemple ayant trouvé des imitateurs dans tous les degrés de l'échelle féodale, il n'y eut pas jusqu'au plus petit seigneur de hautbert qui ne pût, avec raison, se dire le baron du seigneur dont il était le vassal immédiat. Les actes émanés des seigneurs de Fougères ne nous permettent pas de douter qu'ils n'aient eu dans leurs domaines quelques vassaux plus puissants auxquels ce titre était spécialement affecté. « Henry, mon père, dit Raoul II, dans la charte de fondation de Rillé, sentant sa fin approcher, appela auprès de lui tous les clercs de sa terre, ses fils et la plus grande partie de ses barons, des bourgeois et des paysans, etc. » (D. Morice, tome III, col. 607). Une transaction entre Raoul Ier et les religieux de Marmoutiers donne la qualité de barons à Mein de Poilley ; à Hamelin, fils de Pinel, seigneur de Vendel ; à Richard, fils d'Hamon, et à Payen d'Iné (D. Morice, tome III, col. 489, 605, 623, etc.). Ce ne fut que vers la fin du XIVème siècle que l'on restreignit le titre de baron aux seuls conseillers du duc, aux titulaires des neuf grandes seigneuries (Fougères était du nombre), qui avaient été censés faire toujours partie du Parlement].

Il suffit de jeter un coup d'oeil sur nos annales pour se convaincre de la vérité de notre assertion. Du XIème au XIIIème siècle, nous rencontrons peu d'actes émanés de nos souverains dans lesquels le concours des seigneurs de Fougères ne soit clairement exprimé. Nous bornant à une seule citation, nous rappellerons l'Assise du comte Geoffroy, dans laquelle Raoul II figure, en première ligne, comme témoin de cette célèbre constitution. Et remarquons le ici en passant, cette circonstance n'est pas la seule dans laquelle le seigneur de Fougères, en concurrence avec les autres barons de la province, semble avoir eu sur eux cette prérogative d'honneur. Cependant nous croyons qu'il y aurait plus que de la témérité à avancer, avec l'auteur de l'article Fougères, dans le Dictionnaire d'Ogée, que cette terre conférait à son possesseur le titre de premier pair ou premier baron de Bretagne, et le droit de présider la noblesse aux Etats de la province.

Il est bien certain, d'abord, que les historiens antérieurs au XVème siècle ne nous ont laissé aucun renseignement sur le rang que les barons pouvaient tenir entre eux avant cette époque, et les documents que l'on invoquerait, à l'appui d'un système sur leur hiérarchie, ne sont ni assez nombreux, ni assez explicites, pour qu'on en puisse déduire aucune conséquence.

L'auteur cite, il est vrai, une charte d'Alain-le-Long, qui donne la préséance au seigneur de Fougères ; mais la saine critique a depuis longtemps fait justice de cette pièce, évidemment apocryphe.

On rechercherait encore aussi inutilement ces prétendues ordonnances dont parle le même auteur, et qui, selon lui, établirent l'alternative entre le seigneur de Fougères et celui de Vitré. Un vers latin, fait exprès pour la circonstance, et produit par le duc de Rohan, à l'occasion de ses débats avec le seigneur de Vitré, dans une tirade qui devait consacrer l'ordre établi entre les barons : Vitrus cum Filetro alternantur ambo.

Ce vers seul est le seul titre sur lequel on puisse fonder une prérogative qui n'est d'ailleurs confirmée par aucun témoignage.

On doit porter le même jugement sur le droit de présider la noblesse, que le même auteur attribue au seigneur de Fougères.

En effet, jusqu'au commencement du XIVème siècle, le Parlement de Bretagne, composé uniquement des neuf prélats et des neufs barons de la province, ne dut avoir d'autre président que le duc lui-même. Il en dut être ainsi jusqu'en 1309, que le duc, ayant appelé pour la première fois les députés des villes, donna sans doute plus d'extension à l'ordre de la noblesse et du clergé. Alors seulement chaque ordre, devenu trop nombreux pour se réunir dans le même local et ayant des intérêts particuliers et souvent opposés, dut se réunir séparément et avoir un président pour régler ses délibérations et maintenir l'ordre pendant les séances ; mais l'honneur de présider la noblesse ne put être attaché à la baronnie de Fougères, qui venait d'être confisquée par le roi de France, et qui, par conséquent, ne relevait plus que d'une manière nominale du duc de Bretagne, puisqu'elle était au pouvoir d'un prince dont il était lui-même le vassal.

Le nom de Fougères, donné à la ville et à la baronnie dont nous entreprenons d'écrire l'histoire, a été expliqué de diverses manières par les auteurs qui ont voulu rechercher son origine ou son étymologie.

Robert Cenalis ou Cenau, évêque d'Avranches, le fait venir de la grande abondance de fougères qui croissent dans les environs : Filiceriœ, dit-il, à filicetis.

Cet auteur voit donc tout simplement un mot français dans le nom de Fougères ; c'est-à-dire un mot qui a sa signification propre et qui n'a point été formé exprès pour notre pays, auquel il a été seulement appliqué, par extension, d'après une de ses productions naturelles.

D'autres, au contraire, ont voulu que le nom de Fougères fut un nom factice, dérivé de la langue celtique, un nom qui aurait emprunté à cette langue tous les éléments de sa formation, et qui, par conséquent, n'aurait aucun sens dans notre idiome national, auquel il serait parfaitement étranger. 

Le savant auteur de l'Histoire ecclésiastique de Bretagne, l'abbé Déric, est du nombre de ces derniers. Suivant lui, Fougères viendrait de faow, hêtre, dont, par crase, on aurait fait fou, et de ger, rivière. Ce nom, par conséquent, indiquerait une ville située dans un territoire planté de hêtres et arrosé par une rivière [Note : La ville de Fougères repose sur un sol schisteux, et l'on sait que le hêtre est essentiellement l'arbre des terrains granitiques].

Nous ne nous arrêterons pas à démontrer tout ce qu'il y a de vague et d'invraisemblable dans une pareille explication. Nous n'insisterons pas davantage sur l'étymologie donnée par M. Troprée, dans la nouvelle édition du Dictionnaire d'Ogée : Faoul Kaër [Note : M. Troprée, voulant justifier son étymologie, invoque à l'appui le nom d'une rue de la ville, appelée encore en 1846 le Faux Ker-Alix ; et qui, dit-il, aura été Foul-Ker-Alix, ce dernier nom, ajouté en l'honneur d'Alix, fille d'Henry Ier, baron de Fougères. Il ne manque à M. Troprée qu'une autorité pour appuyer sa supposition, et nous avons des preuves incontestables qu'il ne la trouvera pas. Le nom de Fos-Quérally, car c'est ainsi qu'on doit l'écrire, est tout récent et ne remonte pas au-delà de la fin du XVIIème siècle : c'est celui d'un afféagiste qui fit bâtir une partie des maisons qui subsistent encore en 1846, et donna son nom à la rue qui s'était élevée par ses soins], la ville du fond, est aussi inadmissible que le faow, ger, de l'abbé Déric.

En effet, pour que nous pussions admettre la supposition de l'un ou l'autre de ces archéologues, il faudrait qu'en remontant le cours des siècles jusqu'au berceau de notre ville, ce nom de Fougères ou son identique se présentât toujours à nous, soit dans sa forme actuelle, soit dans la forme transitoire qu'on lui suppose, ou au moins dans une forme qui s'en rapprochât d'une manière sensible. — Or, nous avons beau fouiller dans nos annales, compulser tous les documents de notre histoire, suivre pour ainsi dire pas à pas, pendant quatre siècles, la filiation grammaticale de ce nom de Fougères, nous ne trouvons dans sa constitution aucun des éléments, aucuns des caractères qu'on lui attribue.

Si nous fouillons dans les Annales de Bretagne, dans ce magnifique trésor où la patience et l'érudition des bénédictins ont rassemblé tant de richesses, nous voyons que notre ville fut d'abord désignée sous les noms de Fulgerium, Castrum-Felicense, Filgeriœ ou Fulgeriœ, puis sous ceux de Fougières, Foulgères, et enfin Fougères, qui parait avoir prévalu seulement depuis la fin du XVIème siècle.

Or, ce nom de Fougères est-il autre chose que la traduction française des noms latins qui servaient auparavant à désigner notre ville ; et ces noms latins eux-mêmes, que sont-ils, s'ils ne sont pas des formes diverses du mot Fulgerium ou Fulgeria, employé dans la basse latinité pour désigner la plante à laquelle nous donnons le nom de fougère ?

Si l'on prétendait maintenant que ces expressions elles-mêmes sont factices et composées de radicaux celtiques, revêtus d'une forme latine, nous en appellerions au témoignage de l'histoire, et en démontrant que plusieurs siècles s'étaient écoulés depuis que la langue celtique avait cessé d'être celle de nos pères, à l'époque où fut fondée la ville de Fougères, nous démontrerions toute la futilité d'une pareille prétention. Il serait, en effet, absurde de supposer qu'un nom a été emprunté à une langue étrangère au peuple qui l'a imposé, lorsque surtout tous ses caractères semblent le rattacher à celle que parlait alors ce peuple.

Mais essayons, s'il est possible, de découvrir la raison d'une dénomination dont nous connaissons maintenant le véritable sens, et voyons si elle ne serait pas comme un anneau symbolique qui relierait la baronnie de Fougères au comté de Rennes.

L'acte de fondation du prieuré de Saint-Sauveur-des-Landes ne permet pas de douter qu'à la fin du Xème siècle, le nom de Rhedonensis ne s'appliquât encore à tout le comté de Rennes : notre pays était donc, par conséquent, Rhedonensis, si je puis m'exprimer ainsi, avant d'être Fulgeriensis ou Felicensis. Si donc il existe un rapport entre ces deux dénominations, et que nous soyons assez heureux pour le découvrir, la difficulté qui nous arrête aura reçu une solution aussi complète que satisfaisante.

Recherchons donc quel est le véritable sens de ce mot Rhedonensis, mot évidemment celtique, préexistant à la conquête des Gaules par les Romains, et revêtu seulement d'une draperie latine, mais trop transparente pour ne pas laisser apercevoir son origine étrangère.

Bien que des autorités imposantes aient pensé que ce mot venait de red, marche ou course précipitée, nous ne saurions nous ranger à leur opinion. Il n'est guère dans les usages d'un peuple encore voisin de l'état de nature, d'aller emprunter ses dénominations aux arts de la guerre ou d'une civilisation à laquelle il n'est pas initié : chez lui, l'expression locale est presque toujours topographique, et rappelle la situation des lieux, leurs accidents ou leurs productions. Nous aimons mieux croire, avec M. Michelet (Histoire de France, t. II, p. 1), que Rennes veut dire aussi fougère.

Ce nom de Rhedones, nom du premier peuple qui occupa notre territoire, est évidemment le Raden, Reden ou Rhedyn des anciens Celtes.

L'un et l'autre, soit qu'on écrive Redones ou Rhedones, nous présentent des éléments si semblables, des caractères si rapprochés, qu'ils paraissent être identiquement les mêmes, soit qu'on les parle, soit qu'on les écrive.

Nous retrouvons en effet dans l'un et dans l'autre les mêmes consonnes, c'est-à-dire tout ce qu'il y a de vital et de permanent dans l'expression. Les voyelles, il est vrai, ont subi quelque altération ; mais n'oublions pas que dans toutes les langues, ces lettres constituent ce que l'on peut appeler l'élément périssable de la langue : elles se corrompent par la prononciation, et finissent quelquefois par disparaître entièrement, tandis que les consonnes survivent et persistent, comme le squelette, par rapport aux chairs qui le recouvrent.

Mais ce Raden, Reden ou Rhedyn a précisément la même signification que notre mot Fougères. Ainsi, pour nous, les noms de Rhedones, Fulgeriae et ses diverses modifications, tant latines que françaises, ne sont qu'un seul et même nom sous des formes différentes.

Lorsque les Celtes vinrent s'établir dans nos contrées, leurs regards furent singulièrement frappés de la prodigieuse quantité de fougère que produisait le sol de notre territoire, et la tribu qui s'y fixa lui donna un nom qui se rattachait à l'idée de cette production.

Plus tard les peuples qui leur succédèrent, soit qu'ils cédassent aux mêmes impressions, soit qu'ils voulussent perpétuer le souvenir des anciennes traditions, reproduisirent cette même idée dans les noms qu'ils imposèrent aux établissements dont ils étaient les fondateurs : de là ces noms de Fougères, Fougeray, Fougerolles, Renac, Radenac, etc., que portent différentes paroisses dans nos contrées.

Le seigneur de Fougères fut comme le fils aîné de la vieille cité celtique, qui, en se séparant de sa mère et venant prendre rang dans la société féodale, ne voulut pas rejeter un nom consacré par le temps et par de glorieux souvenirs ; mais pour se conformer aux exigences de la société dans laquelle il entrait, il le rajeunit en lui donnant la forme nouvelle que comportait le génie de sa langue.

Telle est, selon nous, l'opinion la plus probable que l'on puisse émettre sur l'origine et le véritable sens du nom de Fougères ; et la preuve la plus convaincante que, dès le principe, on lui donnait le sens que nous lui attribuons aujourd'hui, c'est qu'au XIIème siècle, lorsque le seigneur de Fougères eut à se créer un écusson et une bannière, il n'alla pas chercher pour leur décoration d'autres attributs que ceux qu'exprimait le nom de sa ville et de sa baronnie : Trois branches de fougère de simple mises en pal sur un fond d'or, devinrent le signe distinctif de sa maison, et ces armes parlantes, après avoir été celles de sa famille, sont encore aujourd'hui celles de la ville de Fougères (L. Maupillé et A. Bertin, 1846).

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