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FOLGOAT : LA BELLE PERIODE (1422-1681).

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Dès le début du XVème siècle, les dons qui affluent au nouveau sanctuaire attestent la piété des fidèles à son égard. Avant même que l'église ne fût achevée, paysans, bourgeois, seigneurs manifestèrent leur dévotion en lui offrant, les uns des vases où ornements précieux, les autres des champs, des parcs, des prairies, d'autres enfin leur protection officielle. Les Archives de l'Évêché conservent des documents authentiques de donation qui remontent à l’année 1410, et rien ne prouve qu'il n'y en eût pas d'autres antérieurs qui sont aujourd'hui perdus. Nous n'avons pas l'intention de donner ici une liste complète de ces documents ; ceux qui désirent la connaître liront avec intérêt l'histoire du Folgoat, que Monsieur de Kerdanet a introduite dans la Vie des Saints de Bretagne (1837) et à laquelle doit recourir tout historien du Folgoat. Ici, nous nous bornons à publier les détails caractéristiques, particulièrement les manifestations de la piété des princes, ducs, seigneurs et fidèles de Bretagne à l'égard de Notre-Dame du Folgoat.

En 1422, la Bretagne tout entière s'intéresse au Folgoat. Le 10 Juillet, le duc Jean V publie ses premières lettres-patentes par lesquelles, de l'agrément des trois états de son duché assemblés à Vannes, il érige cette chapelle en église collégiale, et y fonde quatre chapelains, leur assignant une somme annuelle de 80 livres. Il fonde, en outre, dans la même chapelle, pour tous les jours de l'année, deux messes, l'une à haute et l'autre à basse voix avec matines et heures canoniales, à l'instar de l'église cathédrale de Léon.

Le 9 Janvier 1423, se trouvant à Saint-Brieuc, il confirme ces dispositions par ses deuxièmes lettres-patentes. Et, pour perpétuer la mémoire de la fondation de son collège, il fait placer sur le grand portail de l'église une inscription, qui subsiste encore en partie, et, plus bas, une petite statue qui le représentait dédiant et consacrant son vœu à la Sainte Vierge.

Jusqu'à la fin de sa vie, Jean V se préoccupa d'assurer l'avenir de sa fondation. Quatre autres fois il publia des lettres-patentes pour la confirmer et pour préciser certains détails.

Les quatrièmes lettres-patentes sont datées du Folgoat où le duc se trouvait lui-même le 27 Avril 1426. Il put ainsi, sur place, se rendre compte des besoins de la collégiale. Les 80 livres qu'il avait affectées aux chapelains devaient être prélevées sur les dîmes de la paroisse de Plounéour-Trez et sur les revenus de la châtellenie de Lesneven. Comme la perception donnait lieu à des contestations, le duc précise ses volontés en faveur des chapelains, et ordonne à ses agents de les traiter avec bienveillance.

Le lendemain, 28 Avril, par cinquièmes lettres-patentes, il augmente le personnel de la collégiale, et donne à Jean de Kergoal, le principal chapelain, le titre plus flatteur de « doyen » de la Chapelle. De plus, pour augmenter l'éclat des cérémonies, il affecte 40 livres à l'entretien de trois choristes et d'un sacristain. Enfin il retient pour lui-même et pour ses successeurs la présentation du doyen, à qui il attribue le choix des trois choristes et du sacristain.

Chaque jour, les pélerins venaient nombreux au Folgoat et y faisaient des offrandes. Or, conformément aux principes du droit canonique, les oblations appartenaient de droit aux curés dans l'étendue de leur cure, même celles qui se faisaient dans les chapelles particulières ; par conséquent les offrandes du Folgoat appartenaient au recteur de la paroisse. d'Elestrec, en sa qualité de pasteur du ressort, ce qui était une perte réelle pour la chapelle.

Jean V, pour affranchir ses chanoines de ce droit si gênant, avait établi que le privilège des recteurs d'Elestrec sur les offrandes se réduirait à l'avenir à une rente fixe de dix francs.

Mais cette décision était un abus de pouvoir, un empiétement de l'autorité séculière sur la puissance ecclésiastique ; des difficultés pouvaient surgir dans l'avenir. Pour les éviter, le doyen de Kergoal fit un contrat avec Yves Kerentel, recteur d'Elestrec : le recteur, tant pour lui que pour ses successeurs, se contentait de l'abonnement que le duc avait réglé ; moyennant la rente de dix francs, il cédait tous ses droits aux oblations, pourvu que cette rente lui fût payée, tous les ans, le dimanche après la fête de l'Assomption. En son nom et en celui de ses successeurs, le doyen Jean de Kergoal acceptait toutes ces conditions, et s'obligeait à les remplir de point en point, « sous le gage et l'hypothèque de tous les biens meubles et immeubles du doyenné et de l'Eglise ».

Ce contrat fut aussitôt confirmé par décret de l'Ordinaire et reçut la sanction du pape Martin V.

Le 7 Septembre 1432, Jean V publie ses sixièmes lettres-patentes, par lesquelles « il exempte à perpétuité les hostelleries, cabarets et autres dépendances de l'église de tous impôts et subsides tant sur les vins et liqueurs que sur les denrées et marchandises vendues en ces mêmes lieux, sous peine, pour les fermiers qui réclameraient de pareils droits, de subir une amende de cinq cents écus et même la contrainte par corps ».

Ces lettres-patentes manifestent le désir de Jean V d'assurer l'avenir matériel de la collégiale, et d'attirer les pèlerins au Folgoat. Elles prouvent aussi que ce lieu, désert quelques années auparavant est déjà très fréquenté, puisque des hôtelleries et cabarets sont bâtis pour recevoir les pèlerins.

Le Père Cyrille raconte que Jean V vint au Folgoat en Décembre 1434. Tout devait marcher à souhait, puisqu'il ne publie pas d'autres lettres : le doyen, qui avait toute sa confiance et sa sympathie, n'aurait pas manqué d'en provoquer s'il avait désiré quelques nouvelles faveurs.

Le duc Jean V qui avait tant fait pour le culte de Notre-Dame du Folgoat mourut le 28 Août 1442, au manoir de la Touche, près de Nantes. Nous nous sommes attardé à dessein, à raconter en détail ses ordonnances concernant le Folgoat : ce grand serviteur de Notre-Dame méritait cette mention spéciale, car c'est à lui qu'est dû en grande partie l'essor que prit le sanctuaire dès le XVème siècle.

Ses fils François et Pierre qui lui succédèrent tour à tour et son frère Arthur, comte de Richemont, continuèrent ses faveurs : Pierre fit un don perpétuel de trente écus d'or, moyennant une messe à notes (une messe chantée) tous les Samedis ; François confirma les lettres-patentes de 1432 pour l'exemption entière de l'impôt sur les boissons, les marchandises et autres denrées qui se vendaient au Folgoat ; Arthur augmenta la fondation de la collégiale de deux chanoines, auxquels il attribua 50 livres de rentes annuelles.

L'église avait donc six chanoines, trois choristes et un sacristain : ce qui prouve encore le développement du culte de Notre-Dame du Folgoat.

Parmi tous les princes, ducs et seigneurs qui ont aimé le Folgoat, la reine Anne s'est signalée par sa fervente dévotion. En 1499, elle y vint en pélerinage pour demander à Dieu, par l'intercession de Notre-Dame, de lui accorder des enfants de Louis XII, roi de France, son second mari. A cette époque, elle fonda pour le mardi de chaque semaine une messe chantée avec diacre et sous-diacre, à laquelle elle affecta une rente de 142 livres ; elle fit achever l'église et le dôme de la petite tour, et le porche des apôtres, qui porte encore dans sa voûte les armoiries d'Anne et de Louis XII ; elle consigna une rente pour l'entretien d'un sacristain et de trois enfants de chœur, de sorte que l'Eglise du Folgoat avait les six chanoines fondés par Jean V et Arthur, deux sacristains et six choristes.

Dans la suite, elle envoyait tous les ans au sanctuaire des offrandes, des joyaux, des ornements en soie, en drap d'or et autres objets précieux, de telle sorte, dit le Père Cyrille, qu'on peut affirmer qu'après le duc Jean V, personne n'a laissé dans ce royal collège plus de marques d'affection.

En 1505, Anne fit en Bretagne un nouveau voyage dont Alain Bouchard, un historien du temps, nous a laissé le récit. Elle y vint pour accomplir un voeu qu'elle avait fait à Notre-Dame du Folgoat. Cette fois, encore, elle combla de dons son église de prédilection : elle offrit une magnifique croix d'argent et calice en or ; elle chargea les Carmes de Saint-Pol-de-Léon d'y venir chanter tous les ans, au grand autel, une messe solennelle, le jour de l'Assomption, en présence du doyen, des chanoines et de tous les suppôts de la collégiale, pour tous les feus rois, reines, ducs, duchesses, princes, princesses, seigneurs et dames de sa famille.

Pendant ce voyage, elle visita plusieurs villes de la Bretagne : Nantes, Vannes, Hennebont, Quimper, Brest, Saint-Pol-de-Léon, Morlaix, Tréguier, Guingamp, Lamballe, Dinan. La plupart de ces villes conservent encore pieusement sous le nom de maisons de la reine Anne les maisons où elle descendit lors de son passage.

Elle alla à Brest visiter son château. La tour qu'elle habita pendant son séjour a conservé le nom de « tour d'Anne de Bretagne ». Elle visita deux fois la grande nef, nommée la Cordelière, qu'elle avait fait construire de ses deniers, et elle était émerveillée, dit Bouchard, de voir un tel vaisseau.

Partout elle fut reçue avec enthousiasme. Les seigneurs, les bourgeois, les paysans venaient en foule saluer leur bonne duchesse partout où elle passait. La réception de Morlaix, au dire de Bouchard, fut particulièrement brillante : « Elle y fut reçue, dit-il, en grande révérence. Si vous eussiez veu les joyes, esbatements et dances pour l'honneur de ladite dame, c'estaient merveilles et semblait estre ung petit paradis ».

Sa fille, Claude de France, vint aussi au Folgoat et y conduisit son époux François Ier.

Jusqu'à Henri II, la collégiale du Folgoat n'avait aucune espèce de constitution. A la sollicitation du doyen Jean Postel, Henri II voulut lui en donner une, et il le fit par lettre-patentes du 9 juillet 1553 « pour la singulière dévotion qu'il avait à l'honneur de Notre-Dame et pour que l'église du Folgoat fût bien policée, régie et gouvernée ».

Les statuts, qui contiennent vingt-huit articles, furent confirmés et bénis par Christophe de Chauvigné, évêque de Léon, le 2 Septembre, et décrétés en la juridiction de Lesneven le 17 Octobre 1553. En voici quelques-uns :

L'article 1er prescrit au doyen et aux chanoines une résidence absolue, afin que le service de l'église ne perde rien de la dignité qu'il doit avoir.

L'article VI prescrit au doyen d'appliquer le produit des dons et des offrandes à l'entretien et à l'ornement de l'église et du culte, de manière à ce que tout y soit digne de la majesté du lieu, d'un temple aussi célèbre et aussi saint que l'est celui du Folgoat.

L'article XXIII lui prescrit d'être intègre et désintéressé.

Les articles XXIV et XXV lui donnent une souveraine puissance sur les étrangers, les voyageurs, les pèlerins et les marchands affluants au Folgoat. (Remarquez ce mot qui indique la notoriété du sanctuaire). Les hôteliers, cabaretiers et autres débitants du même lieu lui doivent une entière soumission. Défense est faite à tous les marchands de tenir boutique ou d'étaler des marchandises aux foires du Folgoat sans la permission du doyen, ou d'enlever les marchandises de la place sans en avoir payé les droits, sous peine de confiscation.

Aux termes de l'article XI, est établie au Folgoat une confrérie des deux sexes : c'était une société de prières mutuelles. Les associés versaient de minimes cotisations qui étaient employées à faire célébrer des messes pour les défunts ; autant que possible, ils devaient assister aux obsèques des confrères qui venaient à mourir : enfin, ils étaient invités à assister à un banquet qui avait lieu chaque année, le 8 Septembre, fête de la Nativité de la Sainte Vierge.

Les statuts de cette confrérie contiennent une particularité curieuse : le roi Henri réservait à lui et à ses successeurs le privilège d'être le premier membre de l'association ; comme il était vraisemblable que le roi ne pouvait pas assister aux réunions, il devait être remplacé par un confrère élu par les assistants, qui recevait le titre de roi de la confrérie du Folgoat. Le roi occupait naturellement la première place dans toutes les assemblées ; il n'avait d'autre charge que d'offrir le pain bénit le jour de la fête patronale.

Anne d'Autriche, suivant la tradition des ducs de Bretagne et des souverains de France, eut une particulière dévotion à Notre-Dame du Folgoat. En 1637, elle se voua à Elle pour obtenir, par son intercession, un héritier au trône de France : l'année suivante, elle mit au monde celui qui devait être Louis XIV.

Elle mourut à Paris le 20 Janvier 1666, se recommandant aux bonnes prières de Notre-Dame du Folgoat. Le 29 Octobre suivant, les chanoines reçurent de Messire Estienne Jehannot, trésorier de la feue reine mère, la somme de 360 livres pour la fondation de six messes basses à perpétuité. Ces messes devaient être dites le 20 Janvier, jour anniversaire de sa mort, et le lendemain des fêtes de la Purification, de l'Annonciation, de l'Assomption, de la Nativité et de la Conception de la Sainte Vierge.

Après elle, les souverains de France se désintéressèrent du Folgoat, et, ainsi que nous le verrons plus loin, Louis XIV affecta à d'autres buts les bénéfices de la collégiale.

Parmi les grands personnages qui furent particulièrement dévôts à Notre-Dame du Folgoat, nous ne citerons que trois, pour ne pas allonger démesurément cet ouvrage : le cardinal de Coëtivy, René de Rieux, seigneur de Sourdéac, et le duc de Mercœur.

Le cardinal de Coëtivy était né en Bretagne, dans le diocèse de Léon, à quelques kilomètres du Folgoat. Dans la première moitié du XVème siècle, il fut successivement évêque de Dol et de Cornouaille, archevêque d'Avignon, cardinal-prêtre du titre de Sainte Praxède, Légat a latere du Saint-Siège en France et en Bretagne. Il aimait tant Notre-Dame du Folgoat, que, lorsqu'il venait dans son pays natal, il descendait chez ses parents à Penmarch pour en être plus près. Il contribua beaucoup à l'embellissement du sanctuaire : un des autels, le plus simple, mais aussi le plus élégant porte son nom ; il fit faire une belle croix que l'on plaça près du porche de l'évêque Alain ; le socle seul subsiste encore : au pied de la croix qui remplace celle qu'il avait fait ériger, le cardinal est représenté à genoux, les mains jointes.

Il aurait voulu être enterré au Folgoat ; et, à son dernier voyage en Italie, il avait commandé un tombeau magnifique, avec l'intention de le faire porter en cette église pour lui servir de sépulcre. Mais il mourut à Rome en 1477 et fut enterré dans l'église de Sainte-Praxède.

On raconte de lui un trait qui mérite d'être retenu. Au conclave qui suivi la mort de Nicolas V, en 1545, de nombreux cardinaux voulaient nommer pape le patriarche grec de Nicée, le célèbre Bessarion. Coëtivy s'opposa vivement à cette élection : il la regardait comme injurieuse pour l'Eglise Latine, qui, disait-il, renfermait dans son sein assez de sujets dignes de la tiare, sans qu'on eût besoin de l'Eglise Grecque.

René de Rieux, seigneur de Sourdéac, lieutenant-général des armées du roi, gouverneur de la ville et du château de Brest au nom de Henri IV, fut un grand dévôt de Notre-Dame du Folgoat.

En 1592, il fit don au sanctuaire d'une statue de la Sainte Vierge « en bon et fin argent du poids de 13 marcs » qu'il avait fait faire à Brest, et d'un grand tableau enrichi d'or et de peintures représentant la Sainte Vierge, à charge pour les chanoines et leurs successeurs de prier pour lui, pour sa femme et ses enfants à toutes les fêtes de Notre-Dame, de chanter ce jour-là le Nunc Dimittis et le Salve Regina, et, le jour de la Toussaint un Libera et un De Profundis pour son frère et tous leurs parents et amis trépassés.

En 1595, il fonde une messe chantée de tous les dimanches pendant sa vie, et il détermine minutieusement les diverses cérémonies à accomplir : la messe serait célébrée à 9 heures au grand autel. Un quart d'heure avant la messe, on sonnerait la cloche ; avant de la commencer, un enfant de chœur proclamerait, en bas-breton, à la porte de l'église que la messe fondée par monseigneur de Sourdéac, lieutenant-général pour le roi en Bretagne, allait commencer, et il ajouterait : Priez Dieu pour lui. La messe du Saint-Esprit, célébrée avec diacre et sous-diacre serait précédée du Veni Creator. Un tapis de velours violet serait étendu pour lui, sa femme et ses enfants, et, à l'évangile, on leur porterait le livre à baiser... etc.

En 1606, il fit don à l'église d'une chapelle composée d'une croix d'autel, de deux chandeliers et de deux burettes, le tout en argent. En reconnaissance de tous ces dons, les chapelains l'autorisèrent à mettre ses armes sur la rosace principale.

Le 26 Mai 1616, le cœur de feue dame Suzanne de Saint Melaine, dame de Sourdéac, fut transporté dans l'église du Folgoat pour y être inhumé, suivant ses dernières intentions. Il fut transporté en grande pompe et cortège près du marchepied de l'autel où il demeura pendant la célébration de la messe ; ensuite, on l'ensevelit dans le chœur.

René de Rieux mourut le 4 Novembre 1628. Il avait longuement et victorieusement défendu la cause d'Henri IV contre la Ligue en Bretagne. Son adversaire, le duc de Mercœur, qui voulait profiter des troubles de la Ligue pour rétablir l'indépendance complète de la Bretagne à son profit, fut, lui aussi, un très pieux dévôt de Notre-Dame du Folgoat. Le 3 Mars 1593, il prit l'église, et son vénérable doyen sous sa sauvegarde spéciale ; et, « afin que nul ne l'ignorât, il permit qu'on fixât, aux portes et avenues des propriétés de la collégiale, les panonceaux de ses armoiries, voulant, s'il se trouvait quelqu'un assez téméraire pour contrevenir à sa présente intention, qu'il fût puni sur-le-champ par son prévôt de camp si rigoureusement que le châtiment pût servir d’exemple aux autres ».

Tous les grands Seigneurs de Bretagne eurent une particulière dévotion à Notre-Dame du Folgoat ; tous firent au sanctuaire des dons somptueux : de vitraux, de lampes, d'autels, de chapellenies, de prébendes, et considérèrent comme un honneur insigne de pouvoir graver leurs armes sur les écussons des murailles. La plupart de ces écussons ont été martelés par haine pendant la révolution. On y voyait les armes des princes de Léon et de Rohan, des seigneurs du Penhoët, de Rosmadec, du Châtel, de Carman, de Penmarc'h, de Coëtjunval, de Guicquelleau, de Mezléan, de Kergoff-Lescoët, de Kerno, de, Poulpry, de Rieux.

Bourgeois et paysans rivalisaient de zèle avec les Seigneurs par leur piété au Folgoat : ils faisaient des fondations de messes, des dons de champs, de parcs, de prairies, etc. Si bien que, au XVIIème siècle, ainsi que l'attestent les aveux des doyens qui se sont succédés, l'église du Folgoat était très riche.

Quand le doyen Cupif [Note : Le doyen Cupif remplaça en 1637 sur le siège de Léon l'évêque de Rieux, victime des vengeances de Richelieu. Il avait été très actif pendant son séjour au Folgoat. C'est à lui que le Père Cyrille Pennec dédie son Dévot pèlerinage du Folgoat. Faisant allusion à l'activité qu'il déploya dans la réparation de la chapelle sur laquelle la foudre s'était abattue en 1633, le P. Cyrille lui adressa dans sa préface ce compliment plein de saveur : « Le grand soin, Monsieur, que votre piété a porté à l'ornement de ce beau temple, à réparer les furieux débris que le tonnerre y a causés, fait voir que vous n'êtes pas de la catégorie de ceux, qui veulent habiter dans des palais et prier dans des étables... »] prit la direction de la collégiale en 1635, il fit un aveu au roi, selon la coutume, c'est-à-dire qu'il rédigea un état des biens et de l'organisation de la collégiale. A la place du bois où vivait Salaün, un grand enclos de murailles contenait, outre la Sainte Chapelle, des cours, des fontaines, des viviers ; la grande maison appelée l'hôtel de Notre-Dame, consistant en un grand corps de logis, y compris l'hôtel de la reine Anne, dans lequel le doyen devait tenir hôtellerie pour les pèlerins, exempts de tous impôts, avec ses dépendances : écuries et cabarets ; cette maison était noble et franche, et en outre, à l'Est, près de la fontaine miraculeuse, deux petites maisons servaient de logement au sacriste, au maître de la psalette et aux enfants de chœur ; enfin, la grande maison du doyen, qui donnait à l'Est sur l'église et à l'Ouest sur la place de la foire.

Deux portes monumentales donnaient entrée dans l'enclos : l'une celle de l'Est s'appelait porte Léon ; celle de l'Ouest, qui donnait sur la grande place de la foire, s'appelait porte au Duc. Autour de cette place, qui avait une superficie de près d'un hectare, étaient rangées les maisons, vulgairement appelées les « tynelles » du Folgoat, au nombre de dix, avec leurs galeries, caves, cabarets, cours et jardins, dans lesquelles le doyen permettait à certains jours de l'année, de débiter du vin, et de nourrir et loger les pèlerins.

Toutes les avenues du Folgoat étaient plantées de grands arbres sur les chemins de Penmarch, de Lesneven, de Landerneau et de Landivisiau.

Trois grandes foires par an se tenaient au Folgoat : la grande foire qui commençait par la vente des chevaux, le lendemain de la décollation de Saint Jean, et continuait jusqu'au 12 Septembre pour toutes autres sortes de denrées, bestiaux et marchandises ; et les deux autres qui se tenaient le premier mercredi après la fête de Pâques et le 25 Octobre.

Pour le service spirituel, le clergé se composait du doyen, de trois chapelains, d'un sacristain, d'un organiste, d'un maître de psalette, tous chanoines, huit par conséquent, de six enfants de chœur et d'autres petits officiers et suppôts nécessaires pour le service de l'église ; le tout d'ancienne fondation ducale, augmentée depuis, de trois autres chapelains fondés par le feu doyen de Poulpry et d'un quatrième chapelain de la création d'un ancien sacristain Rolland Herry. Douze prêtres, par conséquent, étaient attachés au service du sanctuaire, ce qui prouve l'intensité de la vie religieuse et l'importance des pèlerinages au Folgoat.

Les chapelains, du reste, étaient bien occupés : outre qu'ils devaient desservir de nombreuses messes chantées avec diacre et sous-diacre, ou basses (au XVIIIème siècle, on évalue à 1.400 le nombre des messes basses à desservir), ils devaient s'occuper des pèlerins qui venaient nombreux, soit en particulier, soit en groupes, à en juger par le nombre des hôtelleries et des cabarets. Tous les jours il y avait des pèlerins individuels ; mais, à certains jours, particulièrement aux fêtes de la Sainte Vierge, il y avait foule.

C'est au Folgoat que se réunissent le 8 Août 1594 les habitants de l'évêché de Léon, dégoûtés de la Ligue et des Ligueurs, pour adresser au gouverneur de Brest, René de Rieux, seigneur de Sourdéac, leur soumission au roi Henri IV. Ils déclarent « qu'ils n'ont jamais eu l'intention de se séparer de l'État et de la Couronne de France ; que s'ils ont fait difficulté de reconnaître l'autorité de Sa Majesté, c'était dans la crainte de tomber sous la domination de l'hérésie ; que, puisque le roi avait embrassé la religion catholique, ils se réduisaient volontiers à son obéissance ».

Les Bretons avaient choisi le Folgoat pour leur réunion avec leurs adversaires ; c'est aux pieds de la Sainte Vierge qu'ils voulaient donner le baiser de la réconciliation à ceux qu'ils avaient combattus, et le traité de paix est une profession de foi catholique. Royalistes et Ligueurs avaient pris le sanctuaire sous leur protection pendant la lutte ; c'est à l'ombre du même sanctuaire qu'ils déposent les armes. Ils choisissent le Folgoat, parce que nul sanctuaire n'était plus vénéré en Bretagne.

De grands pélerinages avaient lieu au Folgoat à certains jours, particulièrement aux fêtes de la Sainte Vierge. En 1518, Rolland de Neufville, évêque de Léon, institua la procession générale des églises de son diocèse à Notre-Dame du Folgoat, le 15 Août de chaque année. L'évêque ne faisait sans doute que donner une consécration solennelle à une coutume déjà établie, et donner une plus grande splendeur à ce pélerinage qui existait depuis qu'Anne de Bretagne avait chargé les Carmes de Saint-Pol-de-Léon de venir chanter une grand'messe ce jour-là au Folgoat.

C'est à la Vierge du Folgoat que l'on a recours dans les cas désespérés, dans les calamités publiques. Un jour, au commencement du XVIème siècle, les habitants de Lesneven virent défiler dans les rues de leur ville une longue procession de fidèles de Morlaix : hommes, femmes, enfants, graves et recueillis, venaient en foule, pour accomplir un vœu et remercier Notre-Dame du Folgoat qui les avait délivrés d'une maladie contagieuse, de la peste sans doute. « Ils prirent le chemin de ce sacré pourpris, dit le P. Cyrille clans son langage naïf et fleuri, pour y offrir à ce beau lys des vallées, à cette fleur des champs, un portrait en cire de leur ville, avec une aumône notable qu'ils lui firent ». Ils avaient bien chez eux Notre-Dame du Mur ; mais c'est Notre-Dame du Folgoat qui avait la réputation d'accomplir les plus grands miracles, et c'est à elle qu'ils s'étaient adressés.

Cent ans plus tard, les habitants de Plouescat étaient victimes du même fléau. La maladie, commencée le 24 Août 1626, durait encore le 4 Avril 1627. La ville, dit une complainte du temps écrite en vers breton, était devenue déserte ; l'herbe avait poussé sur les places publiques ; on aurait pu la faucher sur celle du marché. Des monceaux de cadavres remplissaient l'église, le cimetière, et le terrible fléau avait tellement moissonné toute la population, qu'on n'aurait pu trouver, dans le canton, un seul pasteur de brebis.

Les habitants de Plouescat se vouèrent à Notre-Dame du Folgoat et lui promirent de se rendre en pélerinage à son sanctuaire, s'ils étaient débarrassés de la peste ; à partir de ce jour, la peste disparut du pays.

Tous les anciens auteurs qui ont écrit l'histoire de Notre-Dame du Folgoat attestent que ce sanctuaire était le plus vénéré des sanctuaires de la Sainte Vierge en Bretagne, parce que c'est là surtout qu'elle aimait à répandre ses faveurs sur ses fidèles dévôts et à faire des miracles. Nous n'avons pas malheureusement de relations constatant ces miracles, sauf celles qui concernent la guérison de la peste à Morlaix et à Plouescat. Mais nous avons au moins l'attestation des auteurs qui ont eu entre les mains des témoignages authentiques, et qui sont unanimes pour dire que la Sainte Vierge en faisait de nombreux : miracles de bienfaits surtout dans l'ordre spirituel, mais aussi dans l'ordre temporel, faveurs de toutes sortes étaient distribués par elle à ses fidèles pèlerins. Dans la préface de son opuscule, le Père Cyrille, après avoir cité les nombreuses églises et chapelles construites sous le vocable de Marie dans le diocèse de Léon, ajoute : « Mais entre toutes, c'est au Folgoat où l'Impératrice des Anges se plaît à donner le plus souvent des preuves manifestes du crédit et du pouvoir qu'elle a auprès de Dieu. Le grand peuple que nous voyons y accourir de divers endroits de la Bretagne en toutes les saisons de l'année, et principalement aux sept grandes fêtes de Notre-Dame, nous peut témoigner de la sainteté de ce lieu : c'est là où la Mère de Bonté verse sur les cœurs le miel de ses bénignes faveurs, et où elle a toujours l’œil ouvert sur les nécessités de ceux qui le réclament ».

Les historiens Benoît et Pascal Robin, à qui l'évêque de Léon, Rolland de Neufville, avaient communiqué vers 1562 le récit de Langoueznou, écrivent aussi que, « en l'église du Folgoat, par permission de Dieu, se sont faits infinis et grands miracles, à la vue de tous les habitants et pèlerins y allant incessamment en voyage par dévotte et chrestienne affection et vrai zèle catholique, imitant et suivant la trace très salutaire de leurs prédécesseurs ».

Mêmes affirmations dans le récit de l'abbé Jean Guillerm, vicaire général de Monseigneur de Rieux, qui écrivait au début du XVIIème siècle : « Là, tous les jours, Dieu continue d'opérer infinies grâces et vertus en l'endroit de ceux qui y prient et réclament sa sainte Mère ».

(A. Guillermit).

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