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Victimes ayant caché des prêtres proscrits, ou défendu les droits de l'Eglise
** Diocèse du Léon **

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Si quelques prêtres et plusieurs laïques du diocèse de Quimper eurent l'honneur de verser leur sang pour la foi, pendant la Terreur, il s'en trouva un plus grand nombre dans le diocèse de Léon qui méritèrent cet honneur.

Nous allons faire passer sous les yeux de nos lecteurs cette liste glorieuse [Note : Il n'entrait pas dans le plan de notre étude de parler des personnes qui furent persécutées pour des motifs purement politiques : nous ne signalons donc ici, sans prétendre les nommer toutes, que celles qui furent victimes de leur zèle à cacher les prêtres proscrits, ou à défendre les droits de l'Eglise]. Nous y joindrons les noms des personnes qui, sans périr sur l'échafaud, payèrent par d'autres peines leur dévouement au clergé fidèle.

M. Jean Drevès, natif de Ploumoguer, âgé de 50 ans, vicaire à Saint-Sauveur de Brest, revenait un jour de faire un baptême dans sa paroisse natale, lorsqu'il fut arrêté par des gendarmes. Conduit, les mains liées derrière le clos, jusqu'à Brest, il fut emprisonné pendant trois ou quatre mois, au bout desquels il fut condamné à mort et exécuté, le 25 Mars 1794.

Trois individus furent accusés de l'avoir caché dans leurs maisons. Ils s'appelaient Yves Aupier, François Colleau et Pierre Drevès, frère du prêtre. Les deux premiers furent acquittés et mis immédiatement en liberté. Quand à Pierre Drevès, il fut maintenu sous les verrous du château de Brest jusqu'au 24 Juin, époque à laquelle il comparut derechef, pour être acquitté, cette fois.

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M. Jean Habasque, recteur de Kerlouan, àgé de 42 ans, fut arrêté à onze heures du soir, le 29 Mars 1794, dans sa paroisse, chez François Le Gac, cultivateur.

Il y était couché dans un lit clos, au moment où les agents révolutionnaires vinrent à l'improviste visiter la maison de cet excellent catholique, soupçonné de recéler des prêtres non-assermentés. Conduit à Brest, M. Habasque est condamné à mort quinze jours après, c'est-à-dire le 13 Avril.

L'accusateur public, Donzé-Verteuil, ayant dans son réquisitoire signalé le district de Lesneven comme le rendez-vous des prêtres réfractaires et le lieu où se distillait le poison de leurs fausses doctrines, il fut décidé qu'il serait exécuté, dans les vingt-quatre heures, sur la place du champ de foire de cette ville.

La nuit où M. Habasque fut saisi chez son paroissien, François Le Gac, fut également surpris chez Guillaume Abautret, sur le territoire de Kerlouan, M. Guillaume Peton, prêtre habitué du district de Lesneven, âgé de 41 ans. Il partagea jusqu'à la fin le sort de son compagnon d'arrestation : ils furent menés ensemble à Brest et condamnés, le même jour, à périr sur le même échafaud.

Le 13 Avril 1794, vers midi, on vit arriver à Lesneven, avec grand appareil militaire, le tombereau sur lequel étaient les deux pauvres prêtres, les mains liées et les pieds garrottés. Des deux côtés de la sinistre charrette, se tenaient les bourreaux ; l'instrument du supplice suivait... La guillotine est dressée au lieu désigné, en présence du troisième bataillon de volontaires de Paris qui, sous les armes depuis le matin, contenait la population émue.

Sur l'ordre de Ance, l'exécuteur des hautes œuvres, les deux victimes montent l'une après l'autre sur l'échafaud, et quelques instants après leurs têtes tombent, sous les regards épouvantés d'un peuple immense.

Pour que cette exécution eut du retentissement dans tout le pays et y semât la terreur, on avait forcé, outre les gardes nationaux, tous les hommes sans armes de la ville à y assister.

Les corps de MM. Habasque et Peton furent enterrés dans le cimetière de Lesneven. La foule ne cessa, pendant plusieurs jours, d'aller s'agenouiller sur la terre qui recouvrait leur dépouille mortelle : on les vénérait comme des martyrs de la foi.

François Le Gac, recéleur du recteur de Kerlouan, fut condamné à la déportation, ainsi qu'un de ses fils.

On avait trouvé chez eux un sac renfermant un calice, avec sa patène, des hosties et des huiles saintes. Comme il avait soixante-dix-huit ans, la peine de François Le Gac fut remplacée par la réclusion.

Guillaume Abautret, qui avait recueilli chez lui M. Peton, fut condamné à la déportation.

On avait saisi dans sa maison, un calice et une patène, une pierre sacrée et une soutane.

Ces objets avaient été produits au tribunal comme pièces de conviction, témoignant contre le civisme des accusés.

Gabriel Courbant, habitant de Kerlouan, vit sa maison envahie, la même nuit du 29 Mars 1794, par les agents du district : il eut le temps, avant de leur ouvrir la porte, de faire évader le prêtre qui était aussi caché chez lui.

Mais les limiers de la nation constatèrent que le lit où était couché ce prêtre était encore chaud ; de plus ils trouvèrent près de ce lit un sac renfermant un calice et d'autres objets servant au culte. Convaincu par là de recel de prêtres insermentés, Gabriel Gourhant fut traduit, avec François Le Gac et Guillaume Abautret, à la barre du redoutable tribunal de Brest, le 24 Germinal an II, (13 Avril 1794).

Comme il était plus que septuagénaire, il ne fat condamné qu'à la réclusion.

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M. Jean-Marie Branellec, vicaire au Minihy de Saint-Pol, né à Guissény, âgé de 37 ans, versa aussi son sang pour la foi, le Jeudi Saint, 1 7 Avril 1794. Madame veuve Le Guen, de Saint-Pol, qui l'avait recueilli dans sa maison, fut condamnée à la déportation.

M. Branellec composa, peu de jours avant sa mort, un cantique breton, intitulé : Derniers sentiments de M. Branellec. Ce sont les adieux du confesseur de la foi à la vie mortelle qu'il va quitter pour une vie meilleure.

Le prisonnier commence par déplorer les maux causés à son pays par le schisme constitutionnel. Il exprime la résolution où il est de mourir plutôt que d'y adhérer. Il dit que, comme celui d'Abel, son sang criera vengeance contre l'impiété et la cruauté de ceux qui l'auront versé. Il voudrait vivre pour leur épargner ce crime et ce châtiment ; mais il se soumet à la volonté de Dieu, en ajoutant ces belles paroles : « Je meurs dans le sein de l'Eglise ; mon corps périra, mais ma foi triomphera ». Il exhorte ensuite ses confrères à faire tout ce qui dépendra d'eux pour soutenir l'Église catholique en France, à braver tous les périls, la mort même pour sauver les âmes, sûrs qu'ils sont de gagner ainsi l'éternelle récompense. Il est persuadé que les prêtres récemment immolés pour Jésus-Christ sont déjà en possession de cette récompense : il prie ce Divin Sauveur de l'assister, afin qu'il ait la force de sacrifier sa vie pour lui et d'obtenir par ce sacrifice le même bonheur. A la fin de ce cantique, son àme est transportée de joie : son exil est terminé ; il voit les cieux ouverts ; il y va posséder Jésus pour toujours.

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Au mois de Juin 1794, MM. Tanguy Jacob et Chapalin, portèrent leur tête sacerdotale sur cette guillotine de Brest, altérée du sang des prêtres et dé ceux qui osaient leur montrer du dévouement. M. Jacob, originaire de Saint-Pabu, était âgé de 53 ans ; caché aux environs de Brest, il fut saisi à Plouguin, en même temps que M. Chapalin, prêtre de cette paroisse.

Conduits à Brest les deux prêtres furent condamnés à mort et exécutés ensemble. [Note : Voir M. Tresvaux, T. II, p. 5]

La sœur de M. Chapalin, chez laquelle on les avait arrêtés, partagea leur sort et subit le même supplice.

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M. Augustin Clech, âgé de 56 ans, né à Plestin, au diocèse de Tréguier, y exerçait les fonctions de vicaire, lorsqu'on lui demanda le serment qu'il refusa.

Réfugié à Morlaix, il y fut arrêté, conduit à Brest et exécuté avec trois femmes de cette ville : Anne Levron, âgée de 25 ans, marchande, Anne et Anastasie Leblanc, tricoteuses, la première âgée de 80 ans, la seconde de 38 ans. Elles étaient coupables d'avoir donné asile au pauvre prêtre proscrit.

Qu'il fut horrible de voir une femme de quatre-vingts ans, brisée par l'âge et les fatigues d'une longue route, gravir péniblement les degrés de la guillotine, appuyée sur le bras de ses deux jeunes compagnes, et livrer sa tête au bourreau, pour avoir exercé l'hospitalité à l'égard d'un ministre de Jésus-Christ ! Mais si ce spectacle fut horrible pour la terre, il fut beau pour le ciel : en montant à l'échafaud, l'héroïque octogénaire montait au séjour des élus.

Jésus l'y attendait, ainsi que ses compagnes, pour leur donner la récompense promise à ceux qui le reçoivent dans la personne des pauvres sans asile : « J'étais errant, et vous m'avez recueilli ».

L'exécution de ces quatre victimes eut lieu le 31 Juin 1794.

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Le 12 Thermidor, (30 Juillet 1794), le père Yves Mével, capucin, né à Roscoff, âgé de 65 ans, fut condamné à la peine de mort.

Voici, d'après le réquisitoire de Donzé-Verteuil, quelques détails sur l'arrestation de ce bon religieux.

« Par procès-verbal dressé le 19 Messidor par le juge de paix de Morlaix, il résulte qu'Yves Mével, prêtre non sermenté, natif de Roscoff, ci-devant capucin, connu sous le nom de Joseph de Roscoff, a été trouvé sur le territoire de la République, dans une maison du quartier de Dossen, à Morlaix, occupée par les veuves Ruvilly Le Saux et Démaret Le Coant, sa sœur.

Cet ex-capucin habitait depuis trois mois et demi une mansarde dans laquelle était dressé un autel pour servir aux prétendus services de son culte, tout l'attirail nécessaire à son charlatanisme, [Note : On frémit à la pensée que c'est un prêtre et un ancien religieux qui tient cet horrible langage à l'endroit des mystères de la Religion catholique ! On n'a pas oublié que l'accusateur, Donzé-Verteuil, avait cette double qualité] et saisi en même temps que lui, et consistant en un missel, un calice, avec sa patène, une chassuble, une robe de capucin, une boîte dans laquelle se trouvait ce qu'on appelle des hosties, ainsi que plusieurs autres effets qu'il serait trop long de décrire. Dans le repaire de Mével se rendaient les superstitieux et criminels sectateurs d'un culte exercé par des ministres séditieux et rebelles ; là cet ennemi de la République et du bonheur du peuple s'efforçait par ses mensonges et ses impostures de les retenir sous l'étendard de la contre-révolution... ».

Le père Mével était atteint de douleurs de goutte très-aiguës, lorsqu'on le saisit. Il était si faible qu'on fut obligé de soutenir ses pas chancelants, pour le conduire à la prison : encore fallut-il, pendant le trajet, le faire reposer sur une pierre ; il faisait compassion à tous ceux qui le rencontraient.

Conduit à Brest, le lendemain du jour de son arrestation, il y fut traduit au tribunal révolutionnaire qui prononça contre lui la peine capitale. Il fut exécuté, le 30 Juillet 1794, cinq jours après son arrestation à Morlaix.

En même temps que le père Mével, furent arrêtées quatre femmes :

1° Julie Démaret, veuve Ruvily-Lesaulx, âgée de 66 ans, et originaire de Saint-Malo ;

2° Perrine-Eugénie Démaret Le Coant, âgée de 64 ans, née à Port-Louis, demeurant à Morlaix ; elle faisait partie du tiers-ordre de Saint-Dominique ;

3° Barbe Jago, veuve Andrieux, blanchisseuse, née et demeurant à Morlaix, âgée de 51 ans ;

4° Modeste-Émilie de Forsanz, âgée de 27 ans, née au château de Caslou, canton de Montauban (Ille-et-Vilaine).

Ces quatre personnes, saisies dans la maison de Julie Démaret, furent conduites à Brest et exécutées toutes ensemble, avec le père capucin.

On dit que Mademoiselle de Forsanz, qui était d'une beauté remarquable, aurait pu sauver sa tête, aux dépens de sa vertu : elle était de trop noble et trop vertueuse race, pour ne pas préférer la mort à une souillure ; elle périt courageusement sur l'échafaud, cueillant à la loi une double palme : celle de l'attachement à l'Église catholique, et celle de la sainte vertu pour lesquels elle sacrifiait sa vie, à un âge où ce sacrifice coûte encore davantage.

Quand elle entendit prononcer son arrêt, elle n'eut plus d'autre pensée que celle de l'éternité ; elle se jeta immédiatement aux pieds du vénérable père Joseph de Roscoff, lui demandant encore une fois l'absolution de ses péchés...

Pour que l'on puisse apprécier les motifs sur lesquels on basa la condamnation de ces pieuses femmes, nous citerons un extrait du réquisitoire de Donzé-Verteuil contre l'une d'entre elles, Marie-Yvonne Jago.

On y verra de plus quel supplice anticipé elles durent souffrir, en entendant la lecture de ce réquisitoire « où, dit M. Le Vot, l'ancien prêtre s'était attaché dans les passages suivants (on a déjà vu celui qui a rapport au père Mével), à vomir sa bave immonde sur cette religion qu'il avait désertée ».

« On avait aussi trouvé, lisons-nous dans ce réquisitoire, chez Marie-Yvonne Jago divers objets servant à l'exercice du culte, et des vêtements appartenant à la veuve Dubreignon, des lettres de l'émigré La Reignière, des imprimés et manuscrits incendiaires respirant le fanatisme le plus ridicule et le plus dangereux, entr'autres des bulles de cet Évêque de Rome qui a si longtemps abusé de notre crédule simplicité ; un catéchisme breton par lequel on s'efforce de montrer aux cultivateurs qu'ils ne doivent avoir confiance que dans les prêtres réfractaires ; un manuscrit ayant pour titre : Adresse aux vierges chrétiennes et religieuses de France, par lequel on engage ces victimes du fanatisme à ne pas rompre les liens qui les rendent nulles pour la société ; une diatribe abominable contre les prêtres assermentés. A ces extravagantes productions se trouve jointe une chanson contre-révolutionnnaire adressée aux infâmes frères de Capet ».

On avait arrêté à Morlaix et conduit à Brest, avec ces cinq innocentes victimes, huit autres pauvres femmes, accusées comme elles d'avoir donné asile au père Joseph...

Le sanguinaire tribunal fut plus indulgent pour ces dernières : il ne les condamna qu'à la peine de la réclusion pendant plusieurs années.

Voici leurs noms :

1° Catherine-Emmanuelle-Marie-Josèphe-Ignace Le Grand, veuve Thépault Dubreignon, âgée de 37 ans, née au Mexique, demeurant à Morlaix ;

2° Marie Le Guen, veuve La Reignière, âgée de 62 ans, née à Landivisiau, demeurant à Morlaix ;

3° Marie-Françoise Kerguvelin, veuve de Grainville, âgée de 63 ans ; née à Landerneau, demeurant à Morlaix ;

4° Marie-Louise Duparc, âgée de 22 ans, née et demeurant à Morlaix ;

5° Louise Bourhis, femme d'Azevise Dubourg, âgée de 43 ans, née et demeurant à Morlaix ;

6° Marie-Françoise Jago, blanchisseuse, âgée de 42 ans, née et demeurant à Morlaix ;

7° Marie-Yvonne Jago, veuve Andrieux, née et demeurant à Morlaix ;

8° Barbe Jago, âgée de 51 ans, lingère et blanchisseuse, née et demeurant à Morlaix.

A cette liste, il faut joindre le nom d'Azevise Dubourg, àgé de 65 ans, né à Auray, demeurant à Morlaix ; c'était le mari de Louise Bourhis.

Madame veuve La Reignière ; Madame veuve de Grainville ; Madame Dubourg ; Marie-Louise Duparc ; Marie-Françoise et Marie-Yvonne Jago furent condamnées à quatre ans de réclusion dans une maison de force, et à six heures d'exposition sur le marché de Brest. Azevise Dubourg et Madame veuve Thépault Dubreignon furent acquittés ; mais cette dernière ayant eu une correspondance avec les émigrés fut regardée comme suspecte, bien que cette correspondance ne contint rien de criminel : cela suffit pour que les juges décidassent qu'elle serait renfermée jusqu'à la paix.

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Le 13 Thermidor, (le 31 Juillet,) c'est-à-dire le lendemain de ce jugement, parut à la barre du tribunal de Brest, Mademoiselle Marie-Barbe-Jacobe de Kerjégu âgée de 61 ans, née à Lannion, demeurant à Morlaix. Un des griefs articulés contre elle était que, dans une lettre, « elle avait osé parler de religion, s'écrier et se lamenter contre la persécution que l'on exerçait contre les prêtres réfractaires dans le canton de Lesneven, qui jusqu'alors avait été comme l'arche sainte entourée des eaux du déluge ».

Elle fut condamnée à mort et exécutée, en même temps que le père du général Moreau. Ce dernier n'était coupable d'aucun autre crime que de celui d'avoir adressé à un émigré, M. Barbier de Lescoët, le montant de ses recettes.

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Mademoiselle Anne Pichot-Kerdizien [Note : Mademoiselle Pichot-Kerdizien, appartenant par son domicile au diocèse de Quimper, doit être comptée au nombre des personnes de ce diocèse victimes de la Révolution], née à Brest (Recouvrance), était âgée de 30 ans ; elle habitait dans la commune de Quimerc'h, près du Faou, chez son oncle, M. Pichot-Kerguiziou, ancien inspecteur de la forêt du Cranou. Adonnée aux œuvres de piété et de charité, elle était la providence des laboureurs et des bûcherons au milieu desquels elle vivait.

Bonne, douce et aimable pour tous, elle était chérie des habitants de Quimerc'h, dont elle partageait les peines comme les joies, avec une simplicité affectueuse qui lui gagnait tous les cœurs. Uniquement occupée à servir Dieu, les pauvres, les malades et à obliger tout le monde, Mademoiselle Pichot ne se mêlait à la Révolution que pour gémir des ruines qu'elle amassait dans son pays et de la persécution qu'elle exerçait contre l'Église romaine et ses ministres dévoués.

Ce fut assez pour la rendre suspecte à la Nation, et la faire arrêter et condamner à la peine capitale. Gémir sur l'arrestation des prêtres fidèles, regretter de ne pouvoir plus recourir à leur ministère, ni assister au saint sacrifice de la messe..., verser des larmes sur leur sort et sur les scandales des intrus...., prémunir contre la séduction de ces derniers les villageois qui l'entouraient, n'était-ce pas alors le plus grand crime, celui qui méritait la mort ?

Il n'en fallut pas davantage au tribunal de Brest pour appliquer cette peine à Mademoiselle Pichot.

Voici quelques fragments du réquisitoire de l'accusateur public contre cette innocente victime :

« Anne Pichot est accusée d'avoir en sa possession... un écrit, en vers, divisé en actes de foi, d'espérance et de charité, où l’on dit que tout évêque et prêtre non avoués de celui de Rome sont des intrus, des apostats, des judas, où l’on désire que Dieu apaise la rage des démocrates … — Un autre écrit intitulé : « Cantiques à chanter à la bénédiction du Saint-Sacrement ; — prières pour le Roi et son peuple, etc .....

D'avoir, dans le mois de Nivôse et les mois précédents, débité publiquement, dans l'église de Quimerc’h, aux cultivateurs de cette commune, qu'elle y rassemblait les jours de dimanche, un sermon dont le manuscrit de sa propre main s'est trouvé en sa possession, sermon qui a pour but de prouver qu'il faut regarder non comme ministres de l'Église, mais comme voleurs et larrons, qui ne sont point entrés par la porte, tous ceux qui sont appelés ou institués par le peuple, par les puissances séculières ou par les magistrats...

D'avoir entretenu des intelligences avec les prêtres réfractaires et leurs agents ou protecteurs ; ... ».

Condamnée à périr sur l'échafaud, Melle Pichot fut exécutée, au sortir de l'audience c'était le 31 Mars 1794.

En allant au lieu du supplice, il paraît que son visage était baigné de larmes ; elle pleurait abondamment, mais son âme resta forte jusqu'à son dernier soupir, unie qu'elle était à celle de Jésus marchant au Calvaire.

Ayant aperçu dans la rue une personne du Faou, elle la supplia de prier pour elle en ce moment suprême, ajoutant : Bientôt je vais prier moi-même pour vous.

Glorieuse mort, nous écrierons nous, après ce récit ! Heureux les morts qui meurent dans le Seigneur, car leurs œuvres les suivent !

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Jacques Penguilly, cultivateur, âgé de 60 ans, né à Plouvien, demeurant au Cosquer-Bian, commune de Landerneau, fut condamné à la déportation, le 15 Juin 1794.

Ce brave cultivateur avait recueilli sous son toit, pendant huit ou neuf jours, vers les fêtes de Noël, M. Le Grall, recteur de Lanhouarneau, mort au château de Brest, pendant sa détention. Ce prêtre fidèle avait été trouvé, au moment de son arrestation, muni des saintes espèces et des saintes huiles.

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Dans la nuit du 7 au 8 Septembre 1794, M. Le Gall, recteur de Plouénan, fut arrêté chez la veuve Le Saint, riche fermière de sa paroisse, dont la maison était ouverte à tous les prêtres proscrits : avec lui fut saisi aussi M. Corrigou, ancien aumônier des Ursulines de Saint-Pol, caché comme lui dans cette maison.

Dénoncé par un cordonnier auquel il avait recommandé une nouvelle chaussure, et averti qu'on le recherchait, M. Le Gall ne voulut croire ni à la trahison, ni au péril qu'on lui signalait. Ce péril étant devenu pressant, il se hâta de se mettre à l'abri, en se réfugiant dans sa cachette habituelle. Mais, cette fois, il ne put s'y dérober aux perquisitions des émissaires du district ; le cordonnier leur en avait livré le secret [Note : M. Le Goff, mort plus tard curé de Saint-Pol, venait de quitter la maison, moins de deux heures avant cette visite].

La veuve Le Saint vivait avec une sœur de son mari, qui était religieuse. Voyant les deux prêtres arrêtés, poussée par un dévouement dont notre pays fournit alors plusieurs exemples, cette dernière, nommée Anne Le Saint, voulut sauver sa belle-sœur, mère de plusieurs enfants. Elle déclara que c'était elle qui avait hébergé les proscrits ; qu'elle était seule responsable des conséquences de l'arrestation...

Cette femme héroïque fut conduite à Quimper avec MM. Le Gall et Corrigou. Condamnés ensemble à la mort, ils furent exécutés tous les trois, le 16 Septembre 1794.

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A ces noms nous ne devons pas omettre d'ajouter celui de M. Claude de La Porte, ancien vicaire de Saint-Louis de Brest, massacré dans la chapelle des Carmes, à Paris, le lendemain de la néfaste journée du 10 Août 1792.

(abbé Joseph-Marie Téphany).

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