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PERSÉCUTION CONTRE LES RELIGIEUSES
** URSULINES DE QUIMPERLÉ ET DU FAOUET **

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Les Ursulines de Quimperlé et du Faouët triomphèrent également sans se démentir, un seul instant, des exécuteurs serviles des ordres et décrets de l'Assemblée constituante.

Quel consolant spectacle que celui de ces vierges du cloître, victorieuses, avec la grâce de Dieu, de toutes les persécutions !

Nous pouvons donner sur la persécution exercée contre les Ursulines de Quimperlé quelques détails qui ne manquent pas d'intérêt.

Au mois de Février 1790, on leur réclama l'inventaire de tout leur mobilier, avec un état détaillé et circonstancié de tous leurs revenus.

Assurées qu'elles pouvaient fournir ces renseignements sans blesser leur conscience, elles les remirent, quelques jours après, aux délégués de l'administration qui les avaient demandés. Dans le courant du mois de Mars, la municipalité vint signifier à ces Dames le décret qui défendait aux congrégations religieuses d'admettre dorénavant aucun sujet à la profession; il leur fut même enjoint de renvoyer leurs novices.

Le monastère des Ursulines de Quimperlé était renommé alors, comme il l'est encore aujourd'hui, par l'union et la charité qui règnent entre les divers membres de la communauté ; s'aimant comme des sœurs, elles goûtaient combien il est doux et agréable à des sœurs d'habiter ensemble [Note : Ecce quam bonum et quam jucundum habitare fratres in unum. (Ps. 132, 1)] ; d'ailleurs ces sentiments, qui font la gloire et le bonheur des maisons religieuses, naissaient et croissaient pour ainsi dire tout naturellement, comme des fleurs dans un sol heureux, dans cette maison dont le site gracieux et les riantes dépendances semblent faits pour les produire et les développer. Placé au sommet de l'une des collines qui dominent la ville basse de Quimperlé et la fraiche vallée de l'Isole et de l'Ellé, entouré de magnifiques jardins, de riches prairies et d'un bois spacieux, le couvent des Ursulines est une des plus agréables et des plus saines résidences que l'on puisse désirer pour des religieuses cloîtrées, institutrices de la jeunesse. Sans sortir de leur enclos, elles peuvent respirer elles-mêmes et faire respirer à leurs élèves, l'air pur des champs, prendre un exercice nécessaire à leur santé, récréer leur vue, reposer leur esprit et élever leur âme, au spectacle du paysage le plus ravissant.

Étroitement unies entre elles, fortement attachées à ce coin de terre béni où coulaient pour elles le lait et le miel des douces et tranquilles consolations que donne la religion, on comprend quelles furent leurs angoisses et leurs larmes, à la pensée qu'il leur faudrait bientôt se séparer et quitter leur demeure bien-aimée. Les jeunes novices surtout étaient inconsolables; elles voyaient leur vocation religieuse entravée, et peut-être brisée à tout jamais ; elles se voyaient rejetées au milieu de ce monde mauvais dont elles avaient fui les périls... L'âme débordant de chagrin, toutes alors allaient se prosterner devant les saints autels, et suppliaient Jésus, avec des gémissements inénarrables, de leur épargner cet incomparable chagrin.

Il entrait cependant dans les desseins de Dieu qu'elles boiraient aussi jusqu'à la lie la coupe des amertumes qu'elles entrevoyaient et redoutaient.

Le 10 Mai 1790, le maire, accompagné de plusieurs officiers municipaux, se rendit au monastère pour leur demander si elles étaient dans l'intention d'y demeurer, ou de profiter de la liberté qui leur était accordée d'en sortir, pour vivre dans le monde, avec la pension qui leur serait fixée. Toutes les religieuses, au nombre de 32, adhérèrent à la déclaration suivante faite par leur supérieure, la mère Pélagie le Mavyc : « Sœur Pélagie, âgée de 60 ans, déclare vouloir rester dans le cloître et ne vouloir en sortir ».

Le lendemain de cette visite, le triennat de cette vraie supérieure expirait. Elle fut confirmée, pour la cinquième fois, dans sa charge par les suffrages de ses sœurs. M. l'abbé Hervé, recteur de Guiscriff, présida l'élection.

L'armée qu'un premier effort n'a pu ébranler cède quelquefois à un second ou à un troisième. N'ayant pu, une première fois, entamer la fermeté des filles de sainte Ursule, la municipalité revint à la charge. Appelées toutes au grand parloir de la communauté et interrogées sur leurs dispositions présentes, elles répondirent avec une énergie digne de leur héroïque fondatrice, qu'elles voulaient rester attachées à leurs vœux religieux jusqu'à la mort, et que la force seule pourrait les contraindre à abandonner leur sainte demeure.

Il y avait alors dans le monastère deux religieuses, doublement sœurs, par les liens du sang et ceux que forme la religion, les mères Constance et Mélanie Gouyguet de Bocozel, âgées l'une de 89 et l'autre de 84 ans. L'aînée avait déjà célébré 74 fois, et la cadette 68 fois l'anniversaire de son entrée dans le cloître... Elles demandèrent, à genoux, le visage baigné de larmes, la grâce de mourir plutôt que d'être forcées de franchir le seuil sacré de leur asile. Leur fervente prière fut exaucée ; elles eurent le bonheur de quitter toutes les deux, avant la dispersion de la communauté, leur enveloppe mortelle pour aller se reposer dans les tabernacles éternels.

Attaquées, mais non vaincues sur ce premier chef, les Ursulines de Quimperlé furent aussi fermes et unanimes à refuser le serment qu'on vint, à diverses reprises, les solliciter de prêter. Héritières d'un grand nom, d'un nom qui signifie : force jusqu'au martyre, puisque sainte Ursule donna sa vie pour garder la chasteté ; ayant devant les yeux les exemples de constance dans le devoir de toutes les vertueuses vierges qui avaient illustré leur congrégation ; sachant qu'il est honteux de posséder une origine et des traditions glorieuses si on ne les honore point par une noble conduite, elles déclarèrent qu'elles étaient prêtes à verser leur sang, plutôt que de se départir de leurs engagements vis-à-vis de Dieu, de la sainte Église et de leur règle... « Nous ne ferons jamais, s'écrièrent-elles toutes ensemble, notre vie plus précieuse que nous-mêmes, — que celle de notre glorieuse fondatrice, — que celle de nos devancières dans la carrière ».

Après toutes ces visites, la communauté jouit, pendant quelque temps, d'une tranquillité passagère, qui permit aux Ursulines de maintenir leur pensionnat : elles avaient encore une quarantaine d'élèves internes, au mois de Mai 1792.

Le 5 Juin de cette année, l'inspecteur et le receveur de l'enregistrement vinrent inspecter l'enclos ; ils reconnurent qu'il contenait 30 journaux de terre d'une valeur de 300 livres, eu égard aux dépenses de culture et d'engrais; Ils consentirent à la mère Pélagie, pour 3, 6 ou 9 ans, du 1er Janvier 1792, un bail à ferme de ces terrains et de deux prairies, moyennant la somme de 360 livres. Singulier contrat ! C'est ainsi que procédait alors la Nation : elle s'emparait des biens des communautés, et les louait aux religieuses mêmes qu'elle avait dépossédées. Les Ursulines de Quimperlé durent souscrire à ces iniques conditions, heureuses si elles avaient pu, à ce prix, rester dans leur monastère...

Le 28 Septembre 1792 on les expulsa, malgré leurs protestations, leurs supplications et leurs larmes, de la maison à laquelle les attachaient si énergiquement et leurs vœux et les sentiments naturels de leur cœur. Qu'il fut dur l'instant où il leur fallut d'abord se dépouiller de l'habit sacré dont elles avaient été revêtues, en face des saints autels, le jour de leurs fiançailles et de leurs noces spirituelles avec Jésus, en signe de leur alliance avec l'époux divin de leurs âmes ! En faisant leur profession religieuse, elles avaient cru se séparer pour toujours d'un monde loin duquel elles voulaient vivre, et mourir, et voilà que, par la plus cruelle violence, elles sont contraintes d'y rentrer.

Qu'ils furent déchirants les adieux qu'elles firent ensuite à leur chère solitude, — à ce sanctuaire témoin de leurs engagements solennels, — à ce tabernacle devant lequel elles aimaient à prier et à répandre aux pieds de leur Sauveur, comme un parfum, leurs joies et leurs peines, leurs craintes et leurs espérances !

Quelle ne fut pas leur douleur, lorsqu'elles voulurent, au moment de sortir, visiter la chapelle du jardin, pour demander à Notre-Dame de Grand-Pouvoir de les bénir et de les protéger ! Agenouillées, toutes ensemble, devant l'image de la Madone vénérée de cet oratoire, elles la couvrirent, en sanglotant, de leurs baisers et de leurs larmes ! Leur affliction fut au comble quand, après avoir quitté ces lieux, qui leur rappelaient tant et de si précieux souvenirs, elles se séparèrent les unes des autres...

Cette séparation fut si touchante, par les marques d'affection qu'elles se donnèrent, les paroles d'encouragement mutuel qu'elles s'adressèrent, que les agents révolutionnaires, chargés d'exécuter les ordres de la municipalité, ne purent eux-mêmes rester insensibles à ce spectacle attendrissant. Plusieurs d'entre elles se quittaient pour ne plus se revoir ici-bas ; elles se dispersaient, pour aller soit dans leurs familles respectives, soit ailleurs, ne sachant pas s'il leur serait donné de se réunir jamais sous le toit d'où on les chassait.

Au reste, si la douleur dont le cœur de ces vertueuses filles de sainte Ursule était rempli se traduisait par ces marques extérieures, comme la tristesse de Jésus dans son agonie se montra par la sueur de sang qui se répandit sur tout son corps, leur âme était résignée et soumise à la volonté de Dieu, comme celle de leur divin Sauveur. Comme lui, elles avaient demandé au Seigneur d'écarter loin d'elles cette heure d'angoisses ; comme lui aussi, elles avaient ajouté : « Cependant, que votre volonté soit faite, et non la nôtre ! »

Une vraie religieuse peut-elle d'ailleurs ne pas accepter avec soumission les épreuves que le Ciel lui envoie ? Peut-elle refuser de marcher courageusement dans la voie où N. S. J.-C. est entré, le premier, en disant à ses disciples : « Suivez-moi ! » La croix qu'elles avaient portée jusque-là sur leur poitrine ne leur prêchait-elle pas, chaque jour, le sacrifice et le renoncement à tout ?

Autant la municipalité de Quimperlé, lors de sa première visite au couvent des Ursulines, s'était relativement comportée vis-à-vis de ces dames avec égards et convenance, autant, paraît-il, fut-elle dure et impitoyable, au moment de leur expulsion. Nous en trouvons le témoignage dans l'histoire de la ville de Quimperlé par M. Daniel, comme aussi celui de la douceur et de la patience inaltérables de la supérieure du couvent.

« Lorsque le gouvernement révolutionnaire s'empara, dit-il, des Ursulines, ses agents traitèrent les religieuses avec peu d'égards. Le président du district, M. Cambry, homme honorable, fit son possible pour adoucir des mesures qu'il ne pouvait empêcher. Voici comment il parle de cet évènement : Je n'aperçois, je ne salue qu'avec respect cette religieuse, la supérieurs, mère Pélagie Le Mavyc. Quelle douceur ! quelle résignation ! quelle patience ! Elle fut enfermée, persécutée, mais jamais un reproche, une plainte, un propos méprisant n'attaqua la Révolution qui l'arrachait de sa retraite, à ses vœux, au serment qu'elle avait fait à l'Éternel ; elle ne demanda point au Ciel le sang de ses persécuteurs. Tous les raisonnements de la philosophie ne pouvaient rien sur sa raison, dont elle avait, depuis longtemps, fait le sacrifice à la foi. — Je n'ai pas les lumières qui jugent, disait-elle, mais je tiens aux principes, à la croyance, qui ne prêchent que la douceur, la charité, et qui m'offrent pour récompense, après les peines de la vie, les délices d'un autre monde, dans un foyer d'amour et de bonheur inénarrable ».

Avant de se séparer, les Ursulines emportèrent avec elles les objets que la Nation accordait à chaque religieuse. Grâce à leur attachement pour leur maison et au soin qu'elles prirent de les conserver, elles purent, à leur rentrée, y reporter ces objets dont plusieurs sont aujourd'hui gardés avec respect comme de précieux souvenirs des persécutions qu'elles eurent à subir et des témoins de leur fermeté religieuse.

La Mère Eugénie Le Guével, retirée à Lorient, morte dans sa communauté, en 1837, avait déposé dans la paillasse de son lit une chasuble en damas vert. Elle se trouvait dans sa cellule, au moment où les farouches républicains y entrèrent. S'approchant du lit, ils le percèrent de leurs sabres, sans toucher à cet ornement qui fut ainsi providentiellement préservé.

Quelques-unes des religieuses vécurent dans leurs familles qu'elles édifièrent par la régularité de leur vie et embaumèrent du parfum de leur piété. D'autres se réunirent, dès qu'elles le purent prudemment, afin d'accomplir ensemble les devoirs de leur vocation. Quoiqu'elles fussent éloignées de leur supérieure, elles trouvaient les moyens de se mettre en rapport avec elle, pour n'agir que par obéissance.

Les colombes poursuivies par les vautours quittent les vallées et se réfugient au sommet des montagnes où elles se tiennent toutes tremblantes, parce qu'elles ne se croient pas à l'abri des serres de leur ennemi, même dans ce lieu élevé [Note : Et erunt in montibus quasi columbæ convallium omnes trepidi. (Ezech. chap. VII, 16)] ; semblables à ces oiseaux inoffensifs, ces pieuses filles chassées de leur paisible demeure, passèrent ainsi quelques années, en proie aux angoisses qu'entretenaient continuellement leur titre de religieuse et l'état des esprits. Le régime de la Terreur ayant disparu et l'horizon commençant un peu à s'éclaircir, elles arrivèrent à Quimperlé, afin d'attendre le moment où leur arche sainte se rouvrirait pour les recevoir. Quelle ne fut pas leur douleur, en voyant leur monastère profané ! La maison et l'enclos ayant été vendus nationalement, le 8 Avril 1793, la chapelle avait été transformée en un magasin à fourrage, le réfectoire en une salle de spectacle et le grand parloir en une salle de danse. Elles se réunirent, près de la ville basse, au Gorréquer, où elles ouvrirent une école, pour être, autant que possible, fidèles à une de leurs principales obligations : l'instruction et l'éducation de l'enfance et de la jeunesse. Elles avaient la consolation d'apercevoir de cette nouvelle résidence leur chère montagne, et leurs cœurs, encore plus que leurs yeux, se tournaient souvent vers leur monastère, demandant à Dieu avec ferveur la grâce d'y rentrer, au plus tôt : ce qui n'eut lieu que le 6 Octobre 1803.

Lorsque cet heureux événement vint les réjouir, les Ursulines écrivirent sur leur registre : « Nous sommes sorties de notre communauté, à ce obligées par la force des autorités constituées, le 28 Septembre 1792, nous avons eu le bonheur d'y rentrer, le 6 Octobre 1803, par la miséricorde de Dieu et la générosité de M. et de Mme Mancel ».

M. et Mme Mancel avaient racheté les édifices et l'enclos du premier acquéreur ; ils les cédèrent aux religieuses.

Sorties au nombre de vingt-neuf, en 1792, ces Dames ne se trouvèrent qu'à quatorze, à leur rentrée ; la quinzième, la Mère Marie-Sainte du Couëdic, malade à l'hospice, rejoignit peu après ses compagnes, que la mort avait réduites à ce petit nombre.

La Mère Pélagie Le Mavyc, supérieure au moment de la dispersion de la communauté, en 1792, reprit après sa réunion, le 6 Octobre 1803, les fonctions de sa charge qu'elle continua jusqu'au 17 Décembre de la même année. Monseigneur Claude André lui accorda, sur sa prière, d'être remplacée par une autre supérieure, dont il approuva l'élection par une lettre du 26 Décembre.

Les Ursulines de Quimperlé avaient pour aumônier, pendant la Révolution, M. Sébastien La Tour, ancien religieux de la Compagnie de Jésus. Entré au service de la communauté, au mois de Décembre 1774, à l'âge de 43 ans, il y resta jusqu'en 1792. Attaché à tous ses devoirs de prêtre, M. La Tour donna à ses religieuses l'exemple de la fidélité à la sainte Église. Ayant constamment refusé le serment, il fut, pour sa belle conduite, en butte à toutes les vexations qui étaient, à cette époque, le pain quotidien des prêtres fidèles. Renfermé au Château du Taureau, il fut plus tard transporté en Wesphalie.

En 1806, la Mère Marie-Reine Cohon de la Chauvinaye, professe des Ursulines de Rennes, vint se joindre, avec la Mère Victoire de la Haye du Cartier, aux Ursulines de Quimperlé.

En 1807, on agrégea à la même communauté les Mères Mélanie et Élisabeth de Kervégant, Sainte-Reine Pasco et Pélagie Mounier, Ursulines professes de Quintin ; La Mère Jeanne-Michelle du Plessix du Colombier, professe de Lesneven ; les Ursulines d'Hennebont.

Une des dernières Ursulines de Pont-Croix, Mère Saint-Joachim, (Marie-Anne Larbre de l'Épine) vint aussi, en 1808, se joindre à ces religieuses.

Au reste, le couvent des Ursulines de Quimperlé ayant été un des premiers à se rétablir, ces Dames furent heureuses d'offrir un asile à leurs sœurs de différentes maisons, qui vinrent frapper à leur porte.

(abbé Joseph-Marie Téphany).

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