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Monseigneur de la Marche durant la persécution religieuse
** Diocèse du Léon **

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Monseigneur de la Marche [Note : Jean-François de La Marche (né en 1729 à Ergué-Gabéric et mort à Londres en 1806) fut le dernier évêque comte du diocèse de Léon (Finistère), qu'il a dirigé depuis 1772 jusqu'à la suppression du siège en 1801 par le pape Pie VII. Il ne reconnut pas la constitution civile du clergé et la Révolution le contraint à s'exiler à Londres], loin de corps de son diocèse, y était toujours présent d'esprit. Si un penseur célèbre a pu dire que l'amitié a les bras assez longs pour atteindre les deux bouts de la terre, cela n'est-il pas vrai surtout de l'affection du pasteur des âmes pour son troupeau spirituel ?

Mgr Jean-François de La Marche, dernier évêque du Léon (Bretagne) de 1772 à 1802.

Mgr Jean-François de La Marche, dernier évêque du Léon (Bretagne) de 1772 à 1802.

Arraché violemment à ce troupeau dont, il garde la charge, malgré la distance qui l'en sépare, l'évêque de Léon songe jour et nuit à ses besoins ; il gémit sans cesse sur la dure nécessité qui l'en tient éloigné. Si, comme l'apôtre des nations, il peut se plaindre des persécutions de ses ennemis, des privations que lui impose son exil..., il peut dire aussi avec vérité qu'au dessus de ces épreuves extérieures, qui touchent seulement son corps, il en est d'autres plus cruelles pour lui, à savoir l'angoisse qui étreint, chaque jour, son cœur torturé par la pensée anxieuse de l'église qu'il a laissée derrière lui, livrée aux mains d'un mercenaire....

Que de fois, cette pensée le transporte-t-elle au milieu de ses bien-aimés diocésains et de ses prêtres aux prises avec la persécution ! Il les voit dans les prisons, errants, ou réfugiés comme lui sur une terre étrangère. Il compte leurs souffrances, il entend leurs gémissements, et le cri de faiblesse de quelques-uns qui se sentent submergés par les eaux de la tribulation arrive jusqu'à lui, comme un douloureux écho pour pénétrer et attrister son âme.

Alors, comme le grand apôtre écrivant aux chrétiens de Corinthe, il leur envoie à travers les mers des lettres pleines de tendresse compatissante, d'encouragement et de sages conseils.

« Lorsque des circonstances qui vous sont connues, nos très-chers frères, leur écrit-il, le 20 Août 1791, nous forcèrent de nous éloigner de vous, l'espoir de communiquer avec notre clergé, et par lui avec les peuples de notre diocèse, détermina notre retraite, et fut le seul adoucissement à nos peines....

Nous souhaitions d'apprendre vos combats et vos triomphes, la situation de chacun de vous, l'état de chaque église particulière... Nous désirions des informations détaillées sur des objets si dignes de notre sollitude pastorale, lorsque nous avons appris que plusieurs de nos chers coopérateurs venaient de se réfugier sur une île étrangère ».

Que va faire le bon et tendre pasteur ? Il veut, à tout prix, savoir des nouvelles de son troupeau : il affrontera les périls de l'océan pour aller rejoindre les prêtres qui viennent de Léon.

« Nous nous sommes, continue-t-il, senti pressé du désir d'aller jusqu'à eux. Après avoir été menacé par des vents contraires d'aborder au rivage qu'autrefois nous n'aurions revu qu'avec une douce émotion ; après une navigation longue et difficile, nous avons débarqué sur une terre hospitalière qui avait ouvert un asile à nos frères. Nous avons eu la satisfaction de les embrasser. C'est la plus sensible que nous ayons goûtée depuis notre éloignement : elle a duré bien peu. Nous avons entendu le récit des dangers auxquels venaient d'échapper et de la violence qui les avait réduits à s'y exposer. Nous avons su de quelle main partaient les coups redoublés qui accablaient les ministres fidèles ; que l'évêque, dit du Finistère (hélas ! il y a si peu de temps que nous le comptions au nombre de nos coopérateurs) cherchant à propager le schisme, usurpant sur notre territoire une juridiction qui n'appartient qu'à nous seul…. instituait de faux pasteurs .. ; que déjà plusieurs intrus avaient été installés à force ouverte ; que les pasteurs légitimes étaient poursuivis par des outrages et des calomnies ; que, sans respect pour l'âge, sans égard pour les infirmités, plusieurs avaient été arrachés de nuit, à main armée, du milieu de leur troupeau, et traînés indignement dans les prisons, etc. etc.

Tel est le récit qui tour à tour a pénétré notre âme de douleur et d'admiration. ».

Puis, l'évêque exilé, à l'aspect des ruines que la Révolution a entassées dans son diocèse, s'écrie avec un sentiment de douleur inénarrable : « En voyant ce qu'est aujourd'hui notre diocèse, nous nous sommes rappelé ce qu'il fut, et les larmes ont coulé de nos yeux ». Il se demande ensuite pourquoi il est persécuté, lui, ses prêtres, ses maisons religieuses et les catholiques fidèles.

Parce qu'il a maintenu et affirmé, avec eux, les vrais principes de l'Église.

Parlant de leurs persécuteurs, il prêche à ses diocésains le pardon et l'oubli des injures : « Leur fanatisme les aveugle, dit-il ; ils ignorent ce qu'ils font. Mais, nous savons ce que la charité nous commande : nous savons qu'elle nous ordonne de leur pardonner, de les bénir, de prier pour eux : quel mérite aurions-nous à chérir ceux qui nous aiment ? Les pécheurs font-ils autrement ? Mais aimer nos ennemis, faire du bien à qui nous fait du mal, bénir ceux qui nous maudissent, et prier pour ceux qui nous calomnient, telle est notre loi, tel est le précepte de notre divin législateur. Endurons, s'il le faut, la faim, la soif, la nudité ; au milieu des plus indignes traitements, ne faisons point entendre de reproches, ne laissons pas échapper de murmures... ».

Qui n'admirera ces paroles respirant la charité de Jésus-Christ ? Qu'il y a loin de ce langage plein de douceur à celui des prélats intrus dont nous avons, dans le cours de cet ouvrage, cité cà et là les déclamations violentes contre les évêques, les prêtres et les fidèles en communion avec l'Église !

Est-ce bien là le langage d'un séditieux, d'un excitateur à la révolte ?

N'est-ce pas plutôt celui de l'homme de la paix [Note : Homo puis meæ. — Ps. XI. 10] et de la concorde ?

Ce que fit l'évêque de Léon, dès les premiers mois de son exil en Angleterre, il le continua jusqu'à la fin : il ne cessa d'exhorter les fidèles et les prêtres restés dans leur pays à persévérer dans ces sentiments d'attachement à leur devoir, d'amour de la paix et de leurs persécuteurs.

Étendant sa sollicitude pastorale sur ses prêtres dispersés au loin, il trouvait moyen de correspondre avec plusieurs d'entre eux, pour les consoler au milieu de leurs peines et les affermir dans le bien.

Comme les prêtres français qui se réfugiaient en Angleterre se multipliaient chaque jour, il proposa en leur faveur une souscription qui fut accueillie avec sympathie. Patronée par le célébre Burke, lord Arundel et le marquis de Buckingham, la proposition fut soumise à one réunion de riches seigneurs anglais, à laquelle assista l'évêque anglican lui-même. Le prélat breton y exposa le dénûment de ses compatriotes avec une telle éloquence, que des secours abondants furent versés entre ses mains et que plusieurs Anglais leur ouvrirent dans leurs maisons une généreuse hospitalité. Madame Silburne, la pieuse hôtesse de Monseigneur de La Marche, en recueillit successivement chez elle un assez grand nombre.

Vivement touçhé d'une aussi grande charité, l'évêque de Léon adressa, le 30 Décembre 1792, aux prêtres français retirés en Angleterre, une lettre où, après avoir rendu hommage à l'insigne générosité de leurs bienfaiteurs, il exprime, dans les termes les plus émouvants, la reconnaissance dont son cœur est pénétré...

Le zèle de Monseigneur de La Marche à s'occuper de ces œuvres de charité lui valut, le 2 Septembre 1793, un bref de félicitation du Pape Pie VI ; il avait reçu, quelques mois auparavant, le 2 Février, de Louis XVIII, alors Monsieur, une lettre fort élogieuse.

La persécution ayant porté à plusieurs milliers le nombre des prêtres et des émigrés qui étaient venus demander un asile à l'Angleterre, les secours particuliers ne suffirent plus : c'était le cas de dire, comme Notre Seigneur Jésus-Christ, à la vue de la foule qu'il avait à nourrir avec quelques pains : Qu'est-ce que cela pour cette multitude : « Quid haec inter tantos ? ».

Il fallut alors aviser à augmenter les ressources ; on sollicita à cet effet du parlement, en faveur des proscrits, un secours annuel qui fut voté à l'unanimité. Puis, comme la répartition de ce secours demandait à être faite avec ordre et intelligence, l'évêque de Léon fut chargé de ce soin. En outre, il était le dépositaire et le distributeur des aumônes considérables que beaucoup d'Anglais compatissants lui remettaient.

On accorda, sur sa demande, aux prêtres francais le château de Winchester, où on en logea jusqu'à huit cents.

C'est lui encore qui veilla et pourvut aux besoins de nos prisonniers de guerre qui remplissaient les prisons de l'Angleterre. Non content de venir en aide à leur indigence corporelle qui était complète, il voulut aussi soulager leur misère spirituelle qui, chez la plupart, était aussi lamentable. On sait combien la Révolution avait atteint les âmes en France !

Pour refaire en quelque sorte l'âme de ces prisonniers, Il entreprit, avec le concours des prêtres exilés, de leur donner une mission qui fut féconde en fruits de salut.

La charité, dont le grand cœur de Monseigneur de La Marche était rempli, ne se borna pas aux prêtres qui, comme lui, vivaient à l'abri du drapeau anglais, elle s'étendit jusqu'aux prêtres déportés à la Guyane ; par ses soins, ces confesseurs de la foi furent également secourus et assistés.

Sur cette figure épiscopale, d'ailleurs si vénérable et si belle, une ombre cependant vint s'asseoir.

Après la signature du Concordat, le 15 Juillet 1801, Pie VII, forcé par la nécessité des temps, avait demandé à tous les évêques de France la démission de leurs sièges : ainsi l'exigaient, leur déclarait-il, la conservation de l'unité et le rétablissement de la religion catholique dans ce pays. Il ajoutait qu'il n'avait rien omis pour leur épargner ce sacrifice, et il les conjurait à plusieurs reprises de céder à ses instances.

Le bref Tam multa qui contenait cette demande fut adressé à tous les évêques intéressés, avec prière d'y répondre dans dix jours, au plus tard.

Sur quatre-vingt-un évêques, quarante-cinq y accédèrent et donnèrent leur démission. Les trente-six autres ne crurent pas devoir suivre cet exemple. « Ce n'est pas pourtant, que la plupart de ces derniers refusassent positivement de se démettre : la réponse de presque tous fut plutôt dilatoire que négative » [Note : Mémoires pour servir à l'Histoire ecclésiastique. T. III. p. 410].

Les prélats réfugiés en Angleterre furent surtout opposés à la suppression de leurs sièges : sur dix-huit qu'ils y étaint, cinq seulement s'inclinèrent devant la volonté du Souverain Pontife.

Imbu des erreurs de l'église gallicane greffées sur les préjugés parlementaires de sa première éducation ; aveugle par un attachement excessif à son siège, Monseigneur de La Marche, après beaucoup d'hésitations, paraît-il, se rangea de l'avis du plus grand nombre, pour supplier le Vicaire de Jésus-Christ de surseoir à la suppression des évêchés : il signa leurs réclamations contre le Concordat.

« Il adressa de plus, dit M. l'abbé Tresvaux, en son propre nom, le 15 Mars 1803, une lettre au Pape. Du reste, nous savons que, peu avant de mourir, il déclara qu'il était loin de partager l'exagération de plusieurs antagonistes du Concordat de 1801 ».

Nous pouvons ajouter qu'il ne chercha jamais à créer des difficultés ni à Mgr André ni à Mgr Dombideau de Crouseilhes qu'il vit, non sans peine, il est vrai, placés à la tête des diocèses de Quimper et de Léon réunis.

L'arrivée de ces deux évêques à Saint-Pol fut un vrai triomphe auquel les intimes amis du prélat émigré contribuèrent eux-mêmes, avec la piété la plus filiale et la soumission la plus sincère.

Au reste, il n'y eut jamais à Saint-Pol ni dans aucune paroisse de l'ancien diocèse de Léon, où Mgr de La Marche était fort aimé et regretté, aucun partisan de la petite église : c'est donc que l'évêque de Léon ne l'avait pas propagée.

Tombé gravement malade, il fut visité, deux fois, sur son lit de douleur, par Monsieur, frère du roi.

Ce prince, qui professait la plus grande vénération pour l'évêque mourant, voulut recevoir sa bénédiction.

Monseigneur de La Marche mourut à Londres, le 25 Novembre 1806 laissant à peine de quoi subvenir aux frais de ses funérailles. Il avait expressément recommandé qu'on l'enterrât sans pompe et sans qu'aucun décor extérieur rappelât sa dignité épiscopale. Son épitaphe qu'il rédigea lui-même, ne mentionnait aucun de ses titres.

Il fut inhumé dans le cimetière de Saint-Pancrace, à Londres, auprès de son ami, Monseigneur Le Mintier, ancien évêque de Tréguier. M. du Châtellier, devenu plus tard évêque d'Evreux, fit son oraison funèbre, le 27 Janvier 1807, dans la chapelle française de Conway-Street. Ce discours; que nous n'avons pu nous procurer, fut imprimé à Londres.

Les restes du dernier évêque de Léon ont été transportés du cimetière Saint-Pancrace à Saint-Pol, par les soins de Monseigneur René-Nicolas Sergent, évêque de Quimper.

Ce prélat envoya, à cette fin, à Londres, un prêtre breton, attaché depuis de longues années à l'armée Anglaise, en qualité de chapelain.

M. l'abbé Joseph Mahé, après avoir recueilli ces restes précieux, les accompagna lui-même à Saint-Pol, et le 21 Septembre 1866, ils furent inhumés avec une grande solennité dans la cathédrale de cette ville, avec l'assistance d'un clergé nombreux, présidé par Monseigneur Sergent.

(abbé Joseph-Marie Téphany).

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