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Fête des Saintes Reliques.

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La fête des Saintes Reliques est annoncée dans le supplément au martyrologe romain pour le diocèse de Nantes, par les paroles suivantes : « Dimanche dans l'octave de tous les saints ; fête des martyrs et des autres saints dont les reliques sont honorées dans les églises de notre Diocèse ». Ces paroles nous font connaître l'objet de la fête des saintes reliques et nous montrent qu'il s'agit d'une solennité toute particulière à nos églises. Nous honorons en ce jour les martyrs et les autres saints dont nous avons le bonheur de posséder les ossements sacrés.

Le Concile de Trente a résumé en quelques mots la doctrine catholique sur l'invocation des saints et la vénération due à leurs reliques ; et il fait remarquer que son enseignement est confirmé par l'usage reçu dans l'Eglise, dès les temps primitifs de la religion chrétienne, par le consentement des saints Pères et par les décrets des Conciles. ll ordonne aux évêques, et à tous ceux qui ont la charge d'instruire les peuples, d'enseigner « que les corps sacrés des martyrs et des autres saints qui vivent avec Notre-Seigneur Jésus-Christ doivent être vénérés par les fidèles, parce qu'ils ont été les membres vivants de Jésus-Christ et le temple du Saint-Esprit ; qu'ils doivent être un jour ressuscités et glorifiés par ce même Esprit pour la vie éternelle ; que Dieu accorde beaucoup de bienfaits aux hommes par leur moyen ; » et il condamne de nouveau tous ceux qui prétendent qu'on ne doit pas vénérer les reliques des saints ; que c'est une pratique vaine d'honorer leur tombeau et d'aller y implorer leur secours.

Dès le temps des persécutions, nous voyons les fidèles recueillir avec respect et conserver avec un soin religieux les reliques des martyrs. On offrait le saint sacrifice de la messe sur leur tombeau ; et, conformément à cette pratique primitive, quand on consacre un autel, on y renferme quelques parcelles des ossements des martyrs et des autres saints. Il est juste en effet que ceux qui, durant leur vie, se sont offerts en sacrifice à Dieu, soit par l'effusion du sang, soit par les exercices de la pénitence chrétienne, demeurent unis à l'oblation de notre divine victime, comme ils sont associés à sa gloire durant l'éternité.

Après la paix donnée à l'Eglise, les fidèles continuèrent à visiter les tombeaux des martyrs et à les entourer de leur vénération. L'histoire ecclésiastique et les ouvrages des saints Pères nous offrent, à chaque page, les témoignages du culte rendu aux saintes reliques. Saint Jérôme a justifié avec éloquence cette pratique de l'Eglise contre les attaques des hérétiques de son temps, et il suffit de rappeler le passage du Concile de Trente que nous venons de citer, pour comprendre combien cette pratique est conforme aux principes de la foi. Nous honorons les reliques parce que les corps des saints, sanctifiés par le baptême et les autres sacrements, ont été les membres vivants de Jésus-Christ et le temple de l'Esprit-Saint. Nous les honorons, parce qu'après avoir été réduits en poussière dans le sépulcre, ils ressusciteront un jour glorieux pour la vie éternelle. Le sentiment naturel que Dieu a mis dans nos coeurs nous porte à vénérer les dépouilles terrestres de ses serviteurs. Ne conservons-nous pas avec respect et avec bonheur les objets qui ont appartenu aux personnes que nous avons aimées et vénérées durant leur vie ? N'entourons-nous pas leurs tombes et leurs restes mortels des témoignages de notre respect et de notre affection ? Mais plus que tous les autres, les saints qui sont la portion choisie de l'humanité, qui ont purifié et glorifié le monde par l'héroïsme de leurs vertus, méritent qu'on rende honneur à leurs ossements sacrés.

On trouve, dans l'histoire de chaque église particulière, des monuments précieux de la vénération due aux saintes reliques. Souvent des fêtes solennelles ont été instituées pour célébrer la mémoire des translations des martyrs et des confesseurs. L'Eglise de Nantes nous offre, dans ses annales, plusieurs témoignages éclatants de son respect religieux pour les restes sacrés de ses saints.

L'an 1002, le duc de Bretagne, Geoffroy, donna le corps de saint Hervé à l'évêque de Nantes qui portait le nom de ce saint. Les reliques, déposées dans une châsse d'argent enrichie de pierreries et ornée de ciselures qui rappelaient les principales actions du serviteur de Dieu, furent déposées dans la cathédrale de Nantes. L'Ordinaire de 1263 atteste qu'elles y étaient l'objet d'une vénération singulière, et le chapitre célébrait la fête de saint Hervé avec la plus grande solennité.

Une translation plus célèbre encore fut celle des reliques de saint Donatien et de saint Rogatien, en 1145. L'évêque de Nantes, Itérius, voulant accroître le culte rendu à nos saints Martyrs, résolut de transporter leurs corps dans l'église cathédrale. Ils étaient les princes et les patrons de la cité nantaise ; il était juste, disent les anciennes légendes, qu'ils fussent honorés dans la basilique du prince des apôtres. La translation se fit avec une grande pompe ; elle fut présidée par Albert, évêque d'Ostie, légat du Saint-Siége. Hugues, archevèque de Rouen, et plusieurs autres prélats y assistèrent. La cérémonie s'accomplit au milieu du clergé et du peuple de Nantes, assemblés pour rendre hommage à leurs saints patrons. Une fête fut instituée pour rappeler l'anniversaire de cette translation solennelle, et l'Eglise de Nantes la célèbre encore aujourd'hui sous le rit double mineur, le 16 octobre.

Notre époque n'a pas été moins privilégiée que les siècles précédents. Trois cérémonies magnifiques se sont accomplies de nos jours en l'honneur des Saints nantais : la translation des reliques de saint Hermeland, en 1848, celle des reliques de saint Emilien, en 1859, et le Triduum pour la béatification de Françoise d'Amboise, en 1866.

En 1848, lorsque le corps de saint Hermeland eut été rapporté de la ville de Loches, une octave solennellefut célébrée en son honneur, du 7 au 14 novembre. Les précieux ossements avaient été déposés dans la chapelle de la maison des Retraites. Le 7 novembre, le chapitre, le clergé de la ville et un grand nombre de prêtres du diocèse allèrent processionnellement chercher la châsse qui contenait le corps du saint abbé et la transportèrent dans la cathédrale. Pendant l'octave, le clergé des paroisses de la ville, les séminaires, les frères des écoles chrétiennes vinrent successivement faire une station devant les saintes reliques. Chaque soir, il y eut prédication et exercice en l'honneur de saint Hermeland.

Le mardi, 13 novembre, une messe solennelle fut chantée à la cathédrale avec l'assistance générale du clergé, en présence des reliques, que l'on rapporta ensuite processionnellement à la chapelle des Retraites, où elles furent partagées entre les églises qui avaient droit à obtenir quelques parcelles de ce précieux trésor.

La translation des reliques de saint Emilien, en 1859, fut plus solennelle encore. Mgr Jaquemet, en recevant les précieux restes de son prédécesseur que lui accordait Mgr l'évêque d'Autun, eut la pensée de rendre, à cette occasion, un magnifique hommage aux Saints de notre Eglise. Nous croyons utile de transcrire une partie du Mandement que le vénérable évêque publia à cette occasion :

« Nous ne faisons, nos très chers Frères, disait-il, en s'adressant aux fidèles, que nous conformer à la tradition des âges catholiques, en rendant un solennel hommage aux reliques de saint Émilien, au moment où nous les recevons dans ce diocèse. Il nous a semblé que nous ne devions pas les honorer seules, et qu'il fallait associer à la pompe triomphale du saint pontife les autres saints dont l'Église de Nantes possède les reliques. Ce sera dignement inaugurer cette fête que nous sommes autorisés à célébrer chaque année, en l'honneur des Martyrs et des autres Saints dont les restes précieux sont vénérés dans le diocèse. Nous espérons que le souvenir de la solennité avec laquelle nous la célèbrerons cette année vous la rendra chère à l'avenir, et qu'elle deviendra pour vous un de ces pieux anniversaires dont on salue le retour avec bonheur dans le cycle des fêtes de l'année chrétienne.

Sans doute, dans la suite des révolutions qui ont passé sur la France, l'Église de Nantes a perdu bien des richesses. Pendant plusieurs siècles, elle conserva avec amour un des clous qui avaient servi à crucifier saint Pierre, et que saint Clair, notre premier évêque, avait déposé au sein de la chrétienté naissante des Namnètes, comme un gage de leur inviolable fidélité à la chaire du prince des apôtres. Longtemps l'église cathédrale vénéra le chef de saint Clair et son anneau pastoral, les corps de saint Félix et de saint Hervé. Longtemps, elle garda le calice et la chasuble avec lesquels saint Gohard offrait le divin sacrifice, quand il tomba sous le glaive des barbares. Ah ! que ne nous est-il donné de consacrer encore le sang du Seigneur, aux jours des grandes solennités, dans ce calice porté par les mains d'un martyr !

Mais si nous avons beaucoup perdu, il nous reste pourtant encore, nos très chers Frères, des reliques précieuses de nos pères et de nos frères dans la foi. Nous possédons une partie des dépouilles mortelles de nos patrons, saint Donatien et saint Rogatien ; des solitaires de Besné, saint Friard et saint Secondel ; de l'illustre abbé d'Indre, saint Hermeland ; de saint Benoît de Massérac et de sa soeur Avénie. Ce sont toutes ces glorieuses reliques que nous voulons, dans la solennité prochaine, honorer avec celles de saint Émilien. Nous y joindrons celles des saints apôtres, des saints martyrs, et des autres saints que possède l'église cathédrale ; et, en présence de tous ces monuments sacrés, nous pourrons répéter avec attendrissement les paroles que l'Église chante dans l'office consacré aux saints qui ont été unis dans le combat et dans le triomphe : Ecce quam bonum et quam jucundum habitare fratres in unum ! Ah ! qu'il  est bon et délicieux pour des frères d'habiter ensemble ! ».

Conformément aux dispositions prises par Mgr Jaquemet, dans sa lettre pastorale du 20 octobre 1859, les reliques de saint Emilien. celles de saint Donatien et de saint Rogatien, de saint Hermeland, de saint Benoît de Massérac et de sainte Avénie, sa soeur, de saint Friard et de saint Secondel, furent réunies dans l'église de Saint-Nicolas. On y exposa en même temps le beau reliquaire de la cathédrale qui renferme quelques parcelles des ossements des douze apôtres. Après la messe pontificale, toutes ces saintes reliques furent portées processionnellement à la cathédrale, au milieu d'un immense concours de peuple. Cette translation avait quelque chose de profondément touchant. Durant les troubles révolutionnaires de la fin du dernier siècle, l'impiété avait profané et détruit une partie des ossements sacrés qui faisaient la richesse spirituelle de nos églises. C'était un triomphe nouveau que la population catholique du diocèse décernait à nos Saints ; elle réparait par cet hommage éclatant les profanations de la génération qui l'avait précédée. La foi de nos pères obtenait une nouvelle et admirable victoire.

Saint Emilien, au huitième siècle, avait offert le divin sacrifice dans la cathédrale de Nantes et fortifié par la communion les guerriers qu'il conduisait à la défense des pays chrétiens ravagés par l'invasion musulmane. Après 1134 ans écoulés, ses ossements étaient rapportés triomphalement dans cette même cathédrale et le peuple de Nantes, qui fut le sien, lui rendait un culte religieux à cet autel où il avait puisé la force d'aller combattre et mourir pour le salut de la chrétienté.

NN. SS. les évêques d'Amiens, de Luçon, d'Angoulême, de Blois, d'Angers, de Poitiers et de Bruges ; les RR. Pères abbés de Melleraie et de Fongombault, de l'ordre de Cîteaux, assistèrent aux cérémonies du Triduum. Le dernier jour, Mgr l'évêque de Poitiers, dans un admirable discours, digne du successeur de saint Hilaire, célébra les triomphes de la foi remportés par saint Emilien aux temps antiques et enseigna aux foules avides de la parole sainte comment les enfants de l'Eglise devaient défendre la foi dans les temps modernes.

Dieu semble, en effet, avoir répandu une grâce particulière de dévouement à l'Eglise, sur le diocèse de Nantes, durant ces fêtes célébrées en l'honneur de nos saints et du glorieux pontife mort en combattant pour le salut de la chrétienté. L'année suivante devaient commencer les luttes de l'Eglise dans les champs de Castelfidardo ; le diocèse de Nantes devait y donner les prémices de son sang pour la papauté, et il n'a cessé de le prodiguer depuis avec une générosité qui ne s'est pas lassée. Ainsi le vieux sang nantais, versé au huitième siècle, devint la semence des nouveaux défenseurs de l'Eglise.

Au milieu même des fêtes pour la translation des reliques de saint Emilien, on s'était souvenu d'une sainte chère à la Bretagne et au diocèse de Nantes, la bienheureuse Françoise d'Amboise. Depuis sa mort, précieuse devant Dieu, au monastère des Couëts, en 1485, elle n'avait cessé d'ètre honorée par les religieuses de cette maison et les fidèles qui venaient en pèlerinage à son tombeau. Les générations qui s'étaient succédé sur le sol breton avaient nourri l'espoir de voir le Saint-Siége décerner les honneurs des saints à la bonne duchesse. La Révolution avait détruit le couvent des Couëts, brisé le tombeau de la servante de Dieu, mais une partie de ses ossements avait été sauvée et, au moment où l'Eglise de Nantes saluait, pour ainsi parler, le retour de son pontife Emilien, Mgr Jaquemet achevait les enquêtes commencées depuis une vingtaine d'années pour constater l'authenticité des reliques de la bienheureuse Françoise et le culte immémorial dont elle était l'objet.

Quatre ans plus tard, la cause était introduite près du Saint-Siége ; elle réussit plus vite qu'on n'aurait osé l'espérer. Le 11 février 1863, les mémoires pour la confirmation du culte de la sainte duchesse étaient déposés entre les mains du Souverain-Pontife ; le 16 juillet de la même année, en la fête de Notre-Dame-du-Mont-Carmel, Pie IX approuvait le décret de la sacrée Congrégation des Rites qui confirmait le culte immémorial rendu à la bienheureuse Françoise d'Amboise. Le 27 septembre de l'année suivante, un nouveau décret de la sacrée Congrégation des Rites permit de célébrer la messe et l'office de la Bienheureuse sous le rit double mineur, dans le diocèse de Nantes et dans l'ordre des Carmes. La fête était fixée au 5 novembre.

Mgr Jaquemet résolut d'inaugurer le culte de la sainte duchesse de Bretagne par une fête vraiment catholique et nationale. Le mandement qu'il publia à cette occasion est une page vraiment trop belle de notre histoire religieuse bretonne pour que nous n'en transcrivions pas une partie. Après avoir brièvement rappelé les faits principaux de la vie de Françoise, le vénérable évêque continue ainsi :

« En repassant avec vous ces souvenirs, nos très chers Frères, notre coeur éprouve les secrets tressaillements que nous font ressentir les souvenirs intimes de la famille. Ce n'est pas d'une étrangère que nous vous parlons ; les faits que nous vous racontons ne se sont pas passés dans des régions éloignées. La bienheureuse Françoise a été la souveraine de vos pères ; elle a vécu où nous vivons.  Quand nous lisons sa vie, nous retrouvons à chaque page les noms des villes de la Bretagne : Rennes, Vannes, Guingamp, Rochefort. Nantes garde partout ses vestiges ; elle a vu, enfant, poser la première pierre de notre vieille cathédrale ; elle a prié sous ces voûtes, où nous allons vénérer ses ossements sacrés et honorer son image, couronnée de fleurs et de lumières. L'antique château de nos ducs a été sa demeure ; elle y a connu la joie et les douleurs qui se partagent la vie humaine.

A diverses époques, elle a habité de simples maisons particulières, dans la rue de la Fosse, dans la la Grande-Rue ; elle a passé quelques semaines dans le monastère des pauvres Clarisses, dont on voit les ruines dans le quartier que le peuple appelle toujours celui des saintes Claires ; quelques restes de la collégiale Notre-Dame nous font souvenir qu'elle venait chaque jour prier dans le sanctuaire de Marie, où vivaient les traditions les plus nantaises de la dévotion envers la très sainte Vierge. Dans notre diocèse, le Gâvre a encore quelques pierres du vieux château où elle vit sa mère mourir pieusement entre ses bras ; le village des Couëts est, tout embaumé du parfum de sa mémoire, et ç'a été pour nous une grande joie de bénir, en 1861, la gracieuse chapelle du collége que la Providence a manifestement fondé sur les ruines de l'ancien monastère, pour conserver le culte de la sainte duchesse dans les lieux mêmes d'où elle est montée au Ciel. Ce sera pour nous une joie plus grande encore de rendre quelques-uns des ossements de la Bienheureuse à cette maison qui fut la sienne, et où sa tombe demeura glorieuse pendant trois siècles.

Dieu est admirable en ses saints, dit le Psalmiste [Note : Mirabilis Deus in sanctis suis. Ps. LXVII, 36] ; il a été vraiment admirable en conservant, à travers les orages des révolutions, une partie des dépouilles mortelles de Françoise. Nous sommes assez heureux pour posséder encore aujourd'hui cette tête vénérable, que doit couronner le diadème des saints durant l'éternité ; ce bras qui se leva une dernière fois pour bénir la famille religieuse agenouillée autour de la Sainte à ses derniers moments ; ces ossements sacrés, que nous partagerons, comme un trésor d'un prix inestimable, avec les illustres églises de Tours et de Poitiers, avec les chères églises de notre Bretagne et l'ordre antique des Carmes, représenté par son premier monastère à Rome.

Pourrions-nous oublier ici le chapelet de bois de la Bienheureuse, relique doublement précieuse, parce qu'il fut donné par saint Vincent Ferrier à la pieuse duchesse Jeanne de Bretagne, la mère adoptive de notre sainte, et que Françoise le reçut des mains de Jeanne mourante ? Nous le laisserons entre les mains des Religieuses de la Grande-Providence, qui ont si fidèlement veillé à la garde du trésor des reliques que leur avaient confiées les anciennes Carmélites des Coets.

Votre piété, nos très chers Frères, ne dédaignera point ces détails. Il s'agit pour nous d'un culte de famille ; tout ce qui rappelle une mère charme ses enfants et leur devient une exhortation à la vertu. Elevons, en effet, nos pensées, et sachons comprendre que Dieu, dont la providence dispose toutes choses avec sagesse, a eu ses desseins de miséricorde sur notre Bretagne en glorifiant de nos jours la sainte duchesse. Quand nous avons fait déposer aux pieds de notre bien-aimé Père et Pontife les suppliques de nos Eglises, pour obtenir la confirmation du culte de la bienheureuse Françoise, Pie IX a daigné adresser cette parole à notre fidèle mandataire : Ce sera la récompense accordée par Dieu aux Bretons pour leur dévouement à l'Eglise catholique.

Ah ! écoutons cette parole de notre Père, parole pleine d'espérance pour l'avenir de notre patrie : Dieu veut qu'elle demeure la fille dévouée de la sainte Eglise et que les traditions séculaires de son attachment au siége de Pierre restent inviolables. Il en a confié la garde à notre bienheureuse duchesse, et, au pied du trône de Dieu, elle est l'avocate de ce pauvre pays de Bretagne, qu'elle aime toujours.

A son lit de mort, Françoise adressa à ses filles, réunies autour d'elles, une exhortation que nous pouvons appeler toute bretonne : Soyez loyales à Dieu, leur dit-elle. C'est la parole que notre Bienheureuse nous adresse à tous, aujourd'hui, du haut du Ciel. Nous vivons dans un siècle de grandes défaillances morales : défaillances de la foi qui hésite chez plusieurs et n'ose plus conserver sa noble et franche indépendance ; défaillances de la volonté qui craint d'embrasser les sacrifices du devoir ; défaillances du coeur et des sens que séduisent les jouissances de la vie présente. A côté des défaillances individuelles, il y a les défaillances de la société, qui n'a plus la force d'accepter les lois de l'Eglise, et qui sent la vie diminuer en elle, parce qu'elle s'éloigne de Jésus-Christ qui est la voie, la vérité et la vie [Note : Ego sum via, et veritas, et vita. Joan., XIV, 6]. La bienheureuse Françoise nous enseignera, avec sa maternelle autorité, la loyauté du coeur et de l'intelligence qui est le remède à toutes ces défaillances. Soyez loyales à Dieu, dirons-nous avec notre chère Sainte, à toutes les âmes chrétiennes ; soyez loyales à Dieu, si vous voulez vous sauver vous-mêmes et sauver la société.

Ayez la loyauté de la foi qui accepte avec franchise les enseignements de l'Eglise et du Vicaire de Jésus-Christ; ayez la loyauté des moeurs chrétiennes qui ne sait pas allier les maximes perverses du monde avec les lois de l'Evangile ; ayez la loyauté du sacrifice que nos pères traduisaient par cet adage : Fais ce que dois, advienne que pourra.

Il est une autre parole de notre Bienheureuse, digne d'être écrite en lettres d'or, disaient nos anciens historiens. Cette parole est devenue sa devise, tant elle lui était familière durant sa vie, et ce fut la dernière qui tomba, comme adieu, de ses lèvres mourantes : Faites sur toutes choses que Dieu soit le mieux aimé. Familles chrétiennes et bretonnes, n'oubliez jamais la loi de votre mère, ajouterons-nous avec le Sage de nos saints livres [Note : Ne dimittas legem matris tuae. Prov. I, 8]. Le Seigneur a voulu que sa pieuse servante passât successivement par les divers états de la vie, pour vous être un modèle dans tous les âges, dans toutes les conditions ; enfant angélique et vierge modeste, femme dévouée, princesse heureuse et puissante, veuve persécutée, religieuse sainte, austère et aimable tout à la fois, elle a laissé sortir de son coeur une parole qui résume toute sa vie : Faites sur toutes choses que Dieu soit le mieux aimé. Que la devise de notre Bienheureuse, nos très chers Frères, soit la devise de toutes vos familles. Croyez-en votre évêque : pendant les années déjà longues de son ministère pastoral, vous l'avez fait souvent le dépositaire de vos joies et de vos souffrances les plus intimes ; il vous dit aujourd'hui que nulle joie n'est parfaite, et nulle souffrance bien consolée, si Dieu n'est, par-dessus toutes choses, le mieux aimé. Mères chrétiennes, quand vous donnez avec vos caresses les premières leçons à vos enfants, enseignez-leur la maxime de notre Bienheureuse : Faites sur toutes choses que Dieu soit le mieux aimé. Répétez-la encore à vos fils, quand ils arrivent à cet âge où ils doivent demeurer forts pour vaincre le mal et conserver l'amour de la vérité ; et, quand vous bénirez vos enfants avant de les quitter pour aller au Ciel, laissez-leur, comme dernier adieu de mère, la parole de la bienheureuse Françoise : Faites sur toutes choses, que Dieu soit le mieux aimé ».

L'appel de notre évêque fut entendu. Jamais peut-être Nantes n'avait été témoin d'une fête plus catholique et plus nationale. Une immense population était accourue dans la ville de tous les pays circonvoisins et même des lieux éloignés. Les rues de la cité avaient été décorées avec un élan admirable : « Partout les mêmes emblèmes, dit l'historien de ces fêtes, partout l'hermine bretonne triomphante, partout les armoiries de la Bienheureuse, jointes à celles du duché, partout les mêmes devises, partout les mêmes cris d'amour, partout les mêmes affirmations : Honneur et gloire à la bienheureuse Duchesse ! — Bienheureuse Duchesse, sauvegarde des Bretons ! — Bienheureuse Duchesse, protectrice de Nantes ! — Potius mori quàm fœdari ! — Soyez loyales à Dieu ! — Faites sur toutes choses que Dieu soit le mieux aimé ! ».

La vieille cathédrale était revêtue d'une parure qu'elle n'avait point encore connue : les riches draperies, les guirlandes et les corbeilles de fleurs descendaient des voûtes et ornaient les piliers. De brillantes oriflammes offraient au regard les images des saints apôtres et des 4 saints nantais. La statue de la bienheureuse Françoise apparaissait radieuse au-dessus du grand autel et le chef de la Sainte était exposé à la vénération des fidèles dans un magnifique reliquaire, à l'entrée du choeur.

La solennité dura trois jours ; les cérémonies furent présidées par Mgr Guibert, archevêque de Tours. Sept autres évêques avaient répondu à l'invitation de Mgr Jaquemet. C'étaient Mgr Mermillod, évêque d'Hébron, et auxiliaire de Genève, Mgr de la Hailandière, ancien évêque de Vincennes, dans les Etats-Unis, Mgr Sergent, évêque de Quimper, Mgr Angebault, évêque d'Angers, Mgr Pallu du Parc, évêque de Blois, Mgr Fillion, évêque du Mans, Mgr Colet, évêque de Luçon. Deux abbés de l'ordre de Cîteaux, le très révérend père Antoine, abbé de Melleraie, et le très révérend père Dosithée, abbé de Fongombault, au diocèse de Bourges, le révérend père Gaudaire, supérieur de la Congrégation des Eudistes , assistèrent au Triduum. Tous les chapitres de Bretagne, ceux de Tours, et de Poitiers avaient envoyé leurs représentants. La ville de Thouars, qui a vu naître la Bienheureuse, celle de Guingamp, dont elle posséda la seigneurie avant de monter sur le trône de Bretagne, eurent aussi leurs députés à ces fêtes. Le panégyrique de la Sainte fut prononcé par Mgr l'évêque d'Hébron, et par deux religieux, l'un de l'ordre des Carmes, qui fut la famille spirituelle de la Bienheureuse, et l'autre de l'ordre de saint Dominique, dont la bonne duchesse avait bien mérité durant son règne en procurant la canonisation de saint Vincent Ferrier.

Le premier jour du Triduum, 4ème dimanche après Pâques, 29 avril, une magnifique procession parcourut les rues de la ville qui conservaient le souvenir de quelques faits plus remarquables de la vie de notre Bienheureuse, et alla faire une station dans la cour du vieux château ducal, si longtemps habité par elle. Ce fut un moment véritablement solennel. La statue de la sainte duchesse dominait l'assemblée des évêques et du clergé ; on lui rendait les honneurs des saints dans ces lieux mêmes où elle avait connu, avec les grandeurs fugitives de la terre, les joies et les souffrances de la vie humaine, les grâces et les espérances de la vie chrétienne. Quand les évêques, sortant du vieux château, élevèrent tous ensemble les mains pour bénir la multitude qui formait une couronne immense autour de l'enceinte, l'émotion avait gagné tous les coeurs, des larmes mouillaient les yeux, le peuple de Bretagne retrouvait son amour pour la bonne mère duchesse, qu'il revoyait avec l'auréole des saintes et qu'il invoquait comme sa patronne au Ciel.

Le dernier jour du Triduum réservait à la Bienheureuse une glorification nouvelle. On avait choisi ce jour pour aller déposer dans la chapelle de Notre-Dame-des-Couëts le bras de la sainte duchesse. Les évêques s'y rendirent ; une foule de peuple les accompagna. Depuis la rive de la Loire jusqu'à la chapelle, ce fut une marche triomphale. Le cortège suivait le chemin que les anciennes religieuses des Couëts avaient suivi elles-mêmes lorsqu'en 1800 ou 1801, elles étaient venues chercher dans le village les reliques de leur bienheureuse Mère, longtemps enfouies dans la terre ou cachées dans un pauvre grenier, durant la Révolution. Elles les avaient furtivement enlevées dans une boîte qu'un jeune enfant avait portée jusqu'au bord de la Loire. Cet enfant vivait encore au jour du triomphe de la Sainte. Soixante-cinq ou six années s'étaient écoulées, il était devenu un vieillard ; mais le souvenir de cette journée de son enfance ne s'était point effacé de sa mémoire. Il aimait à rappeler que la pieuse femme qui avait donné asile aux reliques de la Bienheureuse pendant la terreur révolutionnaire lui avait dit en lui confiant le précieux dépôt : « 0 mon enfant, que tu es heureux, tu portes la tête de la bonne mère duchesse ». C'est à ce vieillard qu'on remit la boîte qui contenait la sainte relique pour la porter depuis la Loire jusqu'aux Couët. La solennité fut magnifique, et elle eut en même temps le caractère touchant d'une fête de famille. La maison, les lieux où l'on était réuni, étaient pleins des souvenirs de la sainte duchesse. Là, elle avait passé les sept dernières années de sa vie ; là, elle avait quitté la vallée des larmes pour monter vers l'Epoux céleste ; là, son culte avait été fidèlement gardé, durant trois siècles, par ses filles spirituelles. Aujourd'hui, Dieu la glorifiait dans le lieu même où elle avait achevé son pèlerinage en ce monde. Au moment où se terminaient les fêtes célébrées en l'honneur de la Bienheureuse, chacun comprenait qu'au milieu des vanités et des vicissitudes de la terre, la gloire seule des saints demeure, parce qu'ils vivent de la vie et du bonheur de Dieu dans l'éternité.

Après avoir raconté les principales fêtes que l'Eglise de Nantes a célébrées pour honorer les reliques de ses saints, il nous reste à donner quelques indications sur les sanctuaires où elles sont conservées.

La cathédrale possède un reliquaire d'argent en forme de coupole, qui porte au sommet une parcelle de la vraie croix et renferme les reliques des douze apôtres.

Deux magnifiques reliquaires en bronze doré sont placés de chaque côté de l'autel de la bienheureuse Françoise. Dans l'un est déposé le chef de la sainte duchesse ; l'autre contient des fragments des os de saint Donatien et de saint Rogatien, les reliques de saint Emilien et celles de saint Hermeland.

La cathédrale possède encore un médaillon qui renferme un fragment considérable du bras de sainte Marthe, la soeur de Lazare et de Marie-Magdeleine. C'est un pieux souvenir envoyé de Tarascon à Mgr Jaquemet, qui. comme on sait, avait été vicaire général du diocèse d'Aix.

Un autre médaillon contient des fragments notables des os de saint Lazare, du jeune martyr saint Symphorien et des évêques d'Autun, saint Léger, saint Ragnachaire, saint Euphrone et saint Procule. Ce reliquaire fut offert à Mgr Jaquemet par Mgr de Marguerie, évêque d'Autun, à l'occasion de la translation des reliques de saint Emilien, que nous venons de raconter.

Aux fêtes solennelles, on expose, à l'autel de sainte Anne et à l'autel de saint Donatien et de saint Rogatien, deux reliquaires en forme d'église ogivale qui renferment quelques parcelles des ossements des saints titulaires de ces autels.

L'église paroissiale de Saint-Donatien a conservé plusieurs ossements des saints patrons du diocèse. Ces ossements, tout ce qui nous reste des dépouilles mortelles des deux frères martyrs, et dont on a détaché quelques parcelles pour les distribuer à diverses églises, sont renfermés en deux reliquaires d'argent ayant la forme d'édifices religieux. On les expose, aux fètes solennelles, de chaque côté du grand autel.

La chapelle de la Grande-Providence a une relique de la bienheureuse Françoise d'Amboise, à laquelle sont joints le chapelet, la ceinture et le mouchoir de saint Vincent Ferrier.

Il est peu d'églises dans le diocèse qui ne possèdent quelques parcelles d'ossements, bien minimes, il est vrai, le plus souvent, de ses saints patrons, ou des autres saints qui y sont l'objet d'un culte particulier.

L'église paroissiale de Besné conserve ce qui reste des ossements de saint Friard et de saint Secondel ; et celle de Massérac possède un antique reliquaire d'argent où sont déposés un fragment notable des ossements de saint Benoît et une dent de sa soeur Avénie. Le corps saint Hermeland est déposé dans l'église de Basse-Indre, et des reliques considérables du saint abbé ont été données aux paroisses placées sous son patronage.

Ce sont tous ces pieux souvenirs des saints qui furent nos compatriotes, ou qui sont nos protecteurs à divers titres, que nous rappelle la fête des Saintes Reliques. Elle est bien placée le dimanche qui suit la fête de tous les Saints. Après avoir honoré la multitude des bienheureux qui règnent avec Dieu dans le Ciel, il est juste que nous fassions une fête spéciale, en l'honneur de ceux que la possession de leurs Reliques nous a plus étroitement unis. (extrait d'un ouvrage de Mgr. Richard, 1898).

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