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CATHERINE DE LUXEMBOURG, duchesse de Bretagne

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Catherine de Luxembourg était fille de Pierre Ier de Luxembourg, comte de Saint-Pol et de Brienne, et de Marguerite des Baux. Pierre Ier de Luxembourg (1390, † 1433) était fils de Jean de Luxembourg (1370, † 1397) et de Marguerite d'Enghien, et petit-fils de Guy de Luxembourg (1340, † 1371). Elle épousa, en juillet 1445 (2 juillet 1446 ?), Arthur de Bretagne, comte de Richemont, connétable de France, depuis notre duc Arthur III.

Arthur III de Bretagne, dit le Connétable de Richemont, fils de Jean IV et de Jeanne de Navarre, est né le 24 août 1393 au château de Suscinio (près de Vannes). Il est Connétable de France à partir de 1425 et duc de Bretagne de 1457 à 1458. Il décède le 26 décembre 1458 à Nantes. Marié à trois reprises, il n'a pas de postérité : 1° le 10 octobre 1423 à Dijon, avec Marguerite de Bourgogne, fille de Jean Sans Peur ; 2° le 29 août 1442 à Nérac, avec Jeanne II d'Albret (1425-1444), comtesse de Dreux, fille de Charles II d'Albret et d'Anne d'Armagnac ; 3° le 2 juillet 1446 avec Catherine, fille de Pierre Ier de Luxembourg.   Connétable de Richemont, Arthur III Voir Les trois femmes d'Arthur III, connétable de Richemont.

Catherine de Luxembourg épousa, en juillet 1445 (1446 ?), Arthur de Bretagne, comte de Richemont, connétable de France, depuis notre duc Arthur III. Catherine était fille de Pierre, comte de Saint-Pol ; elle avait trois frères : l’aîné, Louis, comte de Saint-Pol après son père (1433), devint connétable après Richemont. Le plus jeune, Jacques, s’attacha à Richemont, servit avec lui dans les campagnes de Normandie, et Richemont devenu duc le créa gouverneur de Rennes. Catherine eut deux soeurs. Jacqueline, l’aînée, fut femme du duc de Bedfort, régent de France après la mort de son frère, Henri V ; et la cadette, Isabelle, fut mariée en 1444 à Charles d'Anjou, comte du Maine, beau-frère de Charles VII et très aimé du roi et du connétable.

C’est le comte du Maine qui allait faire le mariage du connétable avec sa belle-soeur Catherine. Les négociations s’engagèrent avec l’agrément du roi et du duc de Bourgogne : cette union leur semblant utile à la cause française.

La maison de Luxembourg, vassale de Bourgogne, avait été toute dévouée à l'Angleterre. Louis de Luxembourg s’était obstiné, pendant quatre années, à ne pas reconnaître le traité d'Arras (1436) ; et c’est seulement en 1441, que le connétable l’amena faire hommage au roi. De ce jour, le passé fut pardonné, et le comte de Saint-Pol allait très utilement servir Charles VII.

Le contrat de mariage fut signé à Châlons le 30 juin 1445 ; et le mariage fut célébré quelques jours après. Richemont entrait dans sa cinquante-deuxième année. Catherine devait être bien plus jeune [Note : Sur la date de la naissance, voici ce que nous pouvons dire : Catherine était la plus jeune des trois soeurs et selon quelque apparence la dernière des six enfants de Pierre de Luxembourg. Jacques, le troisième fils, était, en 1469, lieutenant du connétable, c’est-à-dire homme fait. Jacqueline, l’aînée des soeurs, se maria en 1433, 12 ans avant Catherine. Quand Isabelle épousa le comte du Maine, en 1445, il avait trente ans ; Isabelle était selon toute apparence plus jeune que son mari. Quand Catherine se mariait l’année suivante, elle n’avait sans doute pas la trentaine].

Quelques mois après son mariage, le connétable vint en Bretagne ; il parvint à ménager une réconciliation (malheureusement passagère) entre François Ier et Gilles ; et appela Catherine à Nantes, où se tenait la cour. La comtesse arriva en décembre 1445 ; elle fut reçue avec un amical empressement ; le duc donna des fêtes en son honneur ; et, au 1er janvier, lui offrit de riches étrennes [Note : Même à l’époque où l’année commençait à Pâques, les étrennes se donnaient, selon l’usage romain, au 1er janvier. Voici les étrennes que reçurent le comte et la comtesse de Richemont : Le connétable : « une coupe et une esguière d’or pesant 4 marcs, 6 onces, 5 gros ». — La comtesse : « un bracelet d’or garni de 5 gros rubis et 6 grosses perles ; un escusson de dyamant assis en un annel d’or esmaillé ». Morice, Preuves, II, 1395].

Mais, après cette visite de noces, nous ne voyons pas la comtesse de Richemont en Bretagne, avant 1457. Elle demeurait au château de Parthenay, la résidence préférée du connétable. C’est là qu’il avait passé son long exil ; c’est là qu’il revenait quand les affaires lui laissaient quelque liberté.

Lorsqu’il eut achevé (en 1450) la conquête de la Normandie, le connétable devenu gouverneur de la province, s’y tenait le plus ordinairement. Il semble que Catherine gardait sa résidence de Parthenay. Du moins y était-elle pendant un séjour de trois mois (janvier-mars 1457) que le connétable fit à Paris, et elle y tomba malade.

Aux premiers jours d’avril, le duc Pierre, pris de la maladie dont il devait mourir, appela le connétable à Nantes. Celui-i partit aussitôt. Le 9 avril, il était à Orléans, le 11 à Tours. Là il apprit la maladie de la comtesse ; et, contre l’avis de son conseil [Note : « L’amour conjugal l’emporta sur toutes les autres considérations ». Lobineau. Histoire de Bretagne, p. 663-664], il courut à Parthenay, où il était le 15 avril [Note : C’était le vendredi-saint, Pâques étant, cette année, le 17 avril]. Il y resta jusqu’au rétablissement de sa femme. Après quoi, tous les deux partirent ensemble pour Nantes, près de Pierre, qu’ils ne quittèrent pas jusqu’à sa mort, le 22 septembre.

Il semblerait que, depuis ce temps, Catherine de Luxembourg n’a pas quitté la Bretagne. Elle allait voir son mari duc seulement quinze mois, du 22 septembre 1457 au 26 décembre 1458.

Ce jour, Arthur III mourait, et, le surlendemain, il était inhumé dans l’église des Chartreux. Il avait obtenu de François Ier la fondation de cette maison (1445) ; devenu duc, il y installa les religieux, bien que les constructions ne fussent pas achevées (1457) (Voir Lobineau. Histoire de Bretagne, p. 625-666), et il y ordonna sa sépulture.

Catherine allait finir les édifices du couvent, et faire élever à son mari un somptueux mausolée de marbre blanc où elle-même devait un jour prendre sa place.

Est-ce Catherine qui fit peindre et poser dans l’église des Chartreux le grand portrait du connétable armé en guerre dont Lobineau a publié la gravure (Histoire de Bretagne, en regard de la page 665) ? C’est ce que nous ne pouvons dire.

Mais on ne peut douter que ce ne soit la duchesse veuve du connétable qui ait fait faire la tapisserie dite de Formigny, qui représentait en neuf ou dix pièces les différents épisodes de la bataille. Quelques dessins en ont été conservés : ils sont précieux surtout parce qu’ils nous donnent l’image du duc Arthur, peut-être plus ressemblante que le portrait des Chartreux [Note : C’est la tapisserie connue sous le nom de tapisserie de Fontainebleau, parce qu’elle y a été longtemps, avant d’être perdue. La tapisserie ne fut pas donnée aux Chartreux : elle se retrouva dans les meubles de Catherine à sa mort. On avait cru qu’elle avait passé en succession à la reine Anne. J’ai pu établir qu’elle passa de Catherine « à Madame de Vendôme », Marie de Luxembourg, fille de Pierre, comte de Saint-Pol, mort en 1485, lui-même fils de Louis, le connétable décapité en 1475. C’est de Marie de Luxembourg devenue comtesse de Vendôme, que la reine Anne l’acquit pour 1.400 écus d’or, soit 1941 livres, que la reine devait encore au mois de mai 1502. Lobineau, Preuves, 1590, Morice, Preuves, III, 855].

Duc de Bretagne Arthur III, comte de Richemont et épouse de Catherine de Luxembourg

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Catherine allait ainsi vivre dans la retraite, rendant une sorte de culte à la mémoire du duc Arthur. Depuis 1475, elle portait un autre deuil : celui de son frère aîné, Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol.

Mais quel contraste entre son époux et son frère, connétables l’un après l’autre ! Le premier, fidèle au roi et à la France, le second, pardonné par Charles VII, s’alliant aux ennemis de Louis XI, appelant les Anglais, justement condamné comme traître et tombant sous la hache du bourreau ! (19 décembre 1475).

La duchesse vécut ainsi depuis son veuvage, quinze, trente-et-un ou même trente-cinq ans, car les trois dates qui suivent sont assignées à son décès : 1475, 1489, 1493.

J’ai proposé une quatrième date, 1492, comme on verra plus loin.

Il faut étudier ces dates dans leur ordre chronologique : Moréri (voir Luxembourg) indique 1475 ; date erronée, puisque, le 13 avril 1484, Catherine fit une donation aux Chartreux de Nantes [Note : La Borderie. Revue de Bretagne, II, p. 16-17. « Donné à Nantes, le dix-neufviesme jour d’apvrill, l'an mil IIIIc IIIIxx quatre, le lendemain de Pasques. Katerine ». La date, 1475, a été répétée souvent, notamment par Kerviler, Bio-Bibliographie, voir Arthur III].

Le P. Anselme, que Moréri copie d’ordinaire, et qu’ici il corrige, avait donné la date 1489 (1ère éd. T. I, p. 209).

J’ai réédité cette date, sans y avoir une entière confiance ; et avec l’intention de tenter de nouvelles recherches [Note : Dans mon mémoire : Le Douaire des Duchesses de Bretagne (1907), p. 47, note 2, j’ai cité un acte duquel résulte la preuve de l’existence de Catherine, après le 1er octobre 1489 ; et p. 51, note 1, en communiquant l’acte authentique qu’on va lire, j’indiquais la date 1492].

Le Dictionnaire d'Ogée (Abrégé Chronologique, I, p. 169), donne une indication nouvelle : Il cite un fait d’octobre 1492, dont la date est certaine, puis il ajoute aussitôt : « L’année suivante, la duchesse Catherine de Luxembourg, veuve du duc Arthur III, mourut au mois de mars 1493. (Voy. Nantes) »

Comme Ogée nous y convie, voyons à son article Nantes. Nous y lisons, t. II, p. 155 : « 1493. La duchesse Catherine de Luxembourg mourut au mois de mars, dans un appartement de l’avant-cour des chartreux. Cette dame, qui était veuve depuis 35 ans, s’était retirée après la mort de son mari [Note : Les 5 ans étaient révolus depuis le 26 décembre 1492. — Il semble qu’il faut lire « s’y était retirée » ou « s’était retirée là »]. Elle voulut être inhumée avec lui dans le même tombeau. Les chartreux regardaient cette excellente princesse comme leur mère et lui permettaient l’entrée de leur église et de leur monastère...  Cette princesse fonda pour elle et son mari un libera qui doit être chanté devant leur tombeau commun par le chapitre de la cathédrale, lorsqu’il y a procession aux chartreux ».

J’ai copié seulement quatre lignes de ce second alinéa ; les dix-neuf qui suivent contiennent une sorte d’inventaire d’une dizaine d’objets donnés aux chartreux par la duchesse et pieusement gardés par eux [Note : A remarquer que dans cette sorte d’inventaire, il n’est pas question du portrait d'Arthur. D’où l’on peut induire peut-être qu’il fut donné aux chartreux par Arthur lui-même].

Voilà trois affirmations pleines d’intérêt : 1° Catherine mourut en 1493, au mois de mars. 2° Catherine « s’était retirée après la mort de son mari ». Est-ce à dire que c’est au moment de son veuvage qu’elle s’enferma chez les chartreux ? En ce cas, veuve elle n’aurait pas habité Vannes. 3° Elle fonda un libera à chanter par le chapitre de la cathédrale, quand il vient en procession aux chartreux. Quelle est la date de l’acte de fondation ? Cette date authentique aurait un grand intérêt ; elle nous donnerait peut-être la preuve de l’existence de la duchesse après 1489 et jusqu’à 1493.

Ogée ou son rédacteur écrit ici avec tant de précision, qu’on peut présumer qu’il avait vu l’acte de fondation, comme les objets précieux qu’il décrit. Je fus ainsi encouragé à demander quelques recherches aux archives de Nantes.

Deux heureuses surprises m’étaient réservées. Après avoir lu Ogée, mon obligeant correspondant consulte l’abbé Travers, auteur de l'Histoire de Nantes, et il reconnaît qu'Ogée a vu par les yeux du savant abbé. Il aura eu communication de son manuscrit, imprimé seulement dans la première moitié du XIXème siècle (Voir Histoire de Nantes, Forest, 1836-1841, 3 vol., t. II, p. 219) ; et il l’a copié, sans en changer un mot, ce qui est pour le mieux ; mais sans le citer, ce qu’il aurait dû faire... et ce qui aurait donné autorité à ses renseignements. Mon avisé correspondant ne s’en est pas tenu là. Il a recouru à l'Histoire de la Collégiale de Notre-Dame, du regretté de la Nicollière [Bulletin, Archives de la Loire-Inférieure, 1864-65 ; puis à part en un volume, 1865]. Heureuse inspiration ! 

Outre les donations faites aux chartreux, M. de la Nicollière mentionne une libéralité faite par Catherine à Notre-Dame. Il écrit (p. 98) : « Catherine... fonda par son testament daté de 1491, un libera... que le chapitre de Notre-Dame devait chaque année aller chanter sur sa tombe... En conséquence, par délibération du chapitre, en date du 14 mai de cette année, la fondation fut acceptée ».

Nous ferons remarquer que l’auteur emploie ici le nouveau style. L’année 1491, vieux style, n’a commencé que le jour de Pâques (3 avril). Si la duchesse est décédée en mars, comme l’indique l’abbé Travers, son testament n’a pu être fait qu’en l’année 1490 (vieux style).

Il est à remarquer que, à la fin de son livre, M. de la Nicolière récapitule les fondations faites à Notre-Dame ; et là, il imprime : « 1490, Catherine de Luxembourg, libera aux chartreux ». Ici il parle le vieux style. Ce testament fait en mars 1490 et approuvé le 14 mai suivant, a été fait et approuvé dans notre année 1491.

La date de la mort de la duchesse se placerait ainsi entre mars et le 14 mai 1491, au lieu de 1493. Par malheur, l’érudit auteur ne dit pas où il a pris la date du testament.

Cette absence de date a invité mon correspondant à d’autres recherches. L’original de la délibération du 14 mai est conservé à la bibliothèque municipale de Nantes (Voir Bibliothèque de Nantes. Livre des Anniversaires de Notre-Dame, f° CVI) ; et sa lecture attentive a permis de faire cette double observation :

1° Si la délibération cite le testament, elle n’en donne pas la date, en sorte que la preuve de cette date 1491 nous manque définitivement.

2° (Ce qui a plus d’intérêt), la délibération n’est pas du 14 mai 1491, mais 1492.

L’acte est écrit en latin. J’en donnerai tout à l’heure la traduction littérale.

Mais, avant de le lire et pour le mieux entendre, il faut savoir que le couvent des chartreux occupait l’emplacement de la Visitation et du grand Séminaire actuels [Note : Dans quelques années, cette indication ne sera pas comprise. Les chartreux ont disparu. Visitation et Séminaire vont disparaître !], et se trouvait ainsi sur le chemin de la cathédrale à l’église des saints Donatien et Rogatien.

« Fondation d’un Libera me, le lundi des Rogations, dans l’église des chartreux, pour l’âme de Catherine, jadis duchesse de Bretagne, par M. Raoul Tual » (Note : Pour plus de clarté, je marque des alinéas qui n’existent pas dans l’original].

« 1° Nous, chapitre de l’église collégiale de Notre-Dame de Nantes, pour traiter de l’affaire qui suit et autres affaires de notre église, assemblés en chapitre au lieu ordinaire en notre salle capitulaire, à la demande et requête de notre vénérable frère Maitre Raoul Tual, exécuteur du testament ou dernière volonté de très haute et très puissante dame, Madame Catherine, autrefois duchesse de Bretagne,

2° Nous avons délibéré, voulu et consenti qu’à l’avenir, chaque lundi des Rogations, jour où la procession générale de Nantes doit se rendre à l’église paroissiale des saints Donatien et Rogatien, nous irions processionnellement, avec la procession de l’église cathédrale, à l’église des Pères Chartreux, près Nantes, et là, pour le remède et salut de l’âme de la dite dame Catherine, ensemble avec Messieurs de la cathédrale, nous chanterions le répons Libera me, avec les versets et oraisons d’usage.

3° Et pour cette procession à faire par nous comme est dit, à nous et autres choristes de notre dite église au même lieu et à la dite procession personnellement assistants, — en mains propres par le trésorier (Note : Au texte « prœpositum ») de notre église, à la manière accoutumée de notre église, sera distribuée la somme de soixante sous de monnaie de Bretagne ayant présentement cours (Note : 60 sous ou trois livres).

4° Pour partie de cette fondation, le dit maître Raoul exécuteur et à ce titre nous a remis en mains et réellement livré la somme de 24 écus d’or, appréciés en or à la somme de 33 livres de bonne et ancienne monnaie de Bretagne (Note : Voilà l'écu d’or évalué 27 sous et demi).

5° Du reste, nous avons réglé et voulons qu’une somme de vingt-sept livres de la dite monnaie (bonne et ancienne de Bretagne), prise sur la somme de soixante livres monnaie de Tours, à nous antérieurement donnée par la dame Catherine avec la prédite somme de vingt-quatre écus (faisant trente-trois livres), lesquelles deux sommes montant à la somme de soixante livres de bonne monnaie bretonne soit convertie et employée à l’achat de soixante sous de rente ou cens annuelle et perpétuelle, pour la fondation et continuation de la procession susdite que nous avons promis de faire.

6° En outre, pour la distribution à raison de la procession à faire cette présente année, ledit maître Raoul nous a livré et mis en mains la somme de 30 sous de ladite monnaie (Note : Il y a dans le texte trigenta, trente. Il semble qu’il aurait dû être écrit sexaginta, soixante). C’est pourquoi nous avons promis et promettons audit maître Raoul, au titre d’exécuteur, de faire et continuer la procession comme dit est, à l’avenir chaque année au jour dit ; et à cela nous avons obligé et obligeons nous et nos successeurs chanoines de ladite église sous hypothèque et obligation des biens de ladite église.

Donné et fait en notre salle capitulaire, le matin à l’heure capitulaire ordinaire, les chanoines ayant été selon la coutume assemblés capitulairement faisant et représentant le chapitre. — Quatorzième jour du mois de mai, an du Seigneur quatre cent quatre-vingt douze. Par mandement dudit chapitre. Geffroy MOREL ».

Voilà un texte très clair et qui nous semble décisif. Nous allons l’examiner en détail ; mais auparavant une observation. L’abbé Travers nous a montré le clergé de la cathédrale chantant un Libera ordonné par Catherine, quand il va en procession aux chartreux. Notre acte parle de la procession générale à laquelle se joindra le chapitre de Notre-Dame : c’est justement la procession de la cathédrale. — Il est clair que le chapitre de Notre-Dame ayant à chanter un Libera aux chartreux, ne va pas y entraîner la procession, ou même, si elle y allait spontanément, l’y retenir pendant le chant de ce Libera particulier. De toute nécessité, il fallait une double fondation à la cathédrale et à Notre-Dame pour établir un accord nécessaire. L’abbé Travers a mentionné la première fondation et notre acte nous donne la seconde.

Chaque année, le lundi des Rogations, la cathédrale de Nantes se rend en procession solennelle à l’église des saints Donatien et Rogatien (c’est la procession générale de Nantes).

En route, la procession s’arrête à l’église des chartreux pour que le clergé de la cathédrale chante sur la tombe du duc Arthur et de sa veuve, le Libera fondé par celle-ci (abbé Travers).

Mais la duchesse a demandé au chapitre de Notre-Dame qui se joindra à la procession générale, un Libera chanté au même lieu et au même temps ; les deux chapitres chanteront ensemble le Libera.

Pour ce service annuel, la duchesse a assigné une somme de 60 sous (ou trois livres) à partager entre les chanoines de Notre-Dame et « gens du choeur » qui assisteront à la procession.

En conséquence, l’exécuteur testamentaire remet au chapitre 24 écus d’or évalués 33 livres.

En outre, il paie d’avance 30 sous à raison de l’assistance à la procession au cours de laquelle le chapitre de Notre-Dame va pour la première fois et tout prochainement chanter le Libera qu’il a promis.

Ce premier Libera consenti le 14 mai sera chanté le 27 de ce mois.

En effet, en cette année 1492, Pâques tombait le 22 avril. L’Ascension venait le 30 mai. Les Rogations qui précèdent cette fête étaient les 27, 28 et 29. Le lundi, jour du Libera, était donc le 27.

Si on chante le Libera le 27 mai 1492, c’est que la duchesse Catherine est dans sa tombe.

L’acte du 14 mai précédent est une autre preuve du décès, puisque Raoul y prend le titre d’exécuteur testamentaire. Bien plus il paie, à part, les honoraires du Libera à chanter le 27 mai. Donc, avant le 14 mai, la duchesse avait rejoint son mari aux chartreux. Mais depuis combien de temps ?

L’abbé Travers dit que la duchesse est morte en mars 1493 ; il se trompe sur la date de l’année ; mais nous pouvons bien admettre l’indication du mois.

L’abbé a sans doute suivi plus d’une fois la procession générale des Rogations aux chartreux, et assisté au Libera chanté, comme il dit, par le chapitre de la cathédrale, et, en même temps, par le chapitre de Notre-Dame ; mais le savant abbé n’a pas lu l’acte du 14 mai 1492, qui lui aurait donné l’année de la mort de la duchesse Catherine.

Il a trouvé ailleurs l’indication du mois du décès. — Où donc ? Probablement sur la tombe même du duc Arthur et de sa veuve. A l’époque où il vivait (1674-1750), la tombe respectée de tous était pieusement gardée aux chartreux. Elle portait sans aucun doute les dates du double décès d'Arthur III et de sa veuve. Mais elle comptait déjà plus de deux siècles, et peut-être les caractères des épitaphes avaient-ils subi quelque altération, surtout, comme il arrive souvent, au bout des lignes. Si la duchesse est morte en mars 1492, la date de la mort, à la fin de l’épitaphe, a dû être figurée à peu près ainsi : « ... Mars, l’an M IIIIc IIIIxx I (1491). L’abbé aura-t-il lu IIIIxx II (92) ? ».

Le mois de mars 1491 (vieux style) est mars 1492 de notre nouveau style : et l’abbé, lisant 1492 et employant le nouveau style a écrit 1493. — Je donne cette hypothèse pour ce qu’elle vaut. Ainsi la date du mois du décès, mars, signalée par l’abbé Travers, est très vraisemblable, on peut dire certaine ; mais la date de l’année 1492 me semblait prouvée authentiquement par l’acte qu’on a lu plus haut. Aujourd’hui. je serai plus affirmatif et j’oserai dire que la date 1492 est authentique : M. Pocquet, le savant continuateur de La Borderie, l’a admise et publiée [Note : J’avais reçu communication de l’acte du 14 mai 1492, dès le mois de septembre 1906. A ce moment, M. Pocquet faisait imprimer le 4ème volume de l'Histoire de Bretagne. P. 414, M. Pocquet avait imprimé la date donnée par le P. Anselme (1489). Je m’empressai de lui communiquer l’acte de 1492; et, p. 653 (Table généalogique), à la date 1489 il a substitué la date 1492, qu’il a rendue définitive].

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J’ai dit plus haut qu’il ne paraît pas que la duchesse Catherine ait quitté la Bretagne depuis son arrivée pendant la maladie de Pierre II, dans l’été de 1457. Il est probable qu’elle n’a pas résidé à Vannes ; nous nous demandons même si jamais elle a vu cette ville. Nous ne voyons pas Arthur III aller à Vannes pendant son règne si court. Après son couronnement à Rennes (30 octobre 1457), il revient à Nantes ; il y est en novembre et décembre. A l’appel du roi, il se rend à Tours après le 1er janvier ; le 4 février, il est à Rennes. Il revient à Nantes, où il reçoit la convocation du roi à la cour des Pairs, devant laquelle son neveu le duc d'Alençon est accusé de trahison. Le duc repousse le titre de pair ; mais il part pour intercéder en faveur de son neveu ; et il sauvera sa tête après la condamnation capitale, prononcée le 12 octobre. Le duc rentre à Nantes le 22 de ce mois ; mais, malade, il n’en sortira plus [Note : Voir aux Preuves de D. Morice, t. III, les dates de six pièces signées du duc Arthur : Nantes 22 novembre et 6 décembre 1457 (1721-1722). Rennes 4 février 1457 (v. st.) (1736). Nantes 11 mai-14 juin 1458 (1729-1736). Touffou près de Nantes, 3 juillet 1458 (1732). Les copies d’actes du XVème siècle sont datées selon le vieux style. D’après cela dans l’acte de Rennes, on lit février 1457 (v. st.), c’est-à-dire février 1458 (n. st.). En février 1458 (v st.) (1459 n. st.) le duc Arthur ne vivait plus].

Après la mort du duc, quand la duchesse eut fixé sa résidence au couvent des chartreux, il est peu probable qu’elle en soit jamais sortie pour aller à Vannes (extraits des notes de J. Trévédy).

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