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LE DOYENNÉ DE CHATELAUDREN

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BOQUEHO.

En tête vient Boqueho, dont l’histoire à la susdite époque est fort intéressante. Cette paroisse avait pour recteur, en 1789, un prêtre éminent, bien connu par ses mémoires et la traduction imprimée de l’exposition de la doctrine chrétienne, M. l’abbé Julien-Hervé Le Sage, né à Uzel, le 27 avril 1754. Il fut nommé à Boqueho en 1783 par Mgr. Le Mintier, évêque de Tréguier.

« Le savant Prémontré, dit Jollivet, ne s’était point laissé éblouir par les grandeurs fugitives de ce monde. Il préféra ses modestes fonctions de curé à Boqueho, à la dignité si enviée alors de Prieur de Beauport, et le silence de ce pays si frais et si doux en été, au bruit importun qui se fait autour des puissances de la terre. Mais Dieu qui tient en ses mains les destinées de l’univers, vient souvent déranger les calculs toujours empreint d’un peu d’égoïsme qu’enfante la prévoyance humaine ».

La Révolution française éclata et M. Le Sage aima mieux souffrir que de forfaire à son honneur de religieux et de pasteur des âmes, en acceptant le serment criminel. Pendant la tourmente révolutionnaire, est-il consigné au cahier de paroisse de Boqueho, à l’occasion du serment exigé, M. Le Sage publia une lettre d’un curé qui ne jure pas à un curé qui jure, à M. de Launay, prieur-curé de Plouagat-Châtelaudren, membre de l'Assemblée Constituante et appartenant aussi à l’ordre des Prémontrés. Ce document nous donne la mesure de la fermeté de son auteur.

Qu’il me soit permis, bien que je me perde en longueurs, de vous citer quelques réflexions extraites de ses mémoires et qui sont une nouvelle preuve de son courage et en même temps un bel éloge de la loi des habitants de Boqueho.

« Il m’est impossible que je quitte la Bretagne sans faire une visite à mes fidèles paroissiens, dont l’attachement invincible à la loi de leurs pères fut pour tout le pays un modèle de constance chrétienne, comme pour leur pasteur, sa gloire et sa consolation. Quoique livrée au plus violent et au plus astucieux des intrus qui mit tout en oeuvre pour les séduire, à peine en vit-on cinq passer des autels du catholicisme à ceux de la Constitution. On les persécuta, on les tourmenta, on les emprisonna, toutes ces violences furent en pures pertes pour ceux qui n’eurent pas honte d’y recourir. Et pourtant, elles furent supportées dans l’esprit de l'Evangile, sans plaintes et sans murmures. Me serait-il permis d’oublier ces braves gens-là ? ».

« Mon successeur constitutionnel me dénonça comme un prédicant fanatique, dont la seule présence annonçait un invincible obstacle au succès de son nouveau ministère. Plainte fut rendue au Tribunal qui, du premier mot, me décréta de prise de corps et envoya des gendarmes pour s’emparer de ma personne ».

Pour éviter une mort plus que certaine, M. Le Sage prit le chemin de l’exil. « Un nommé François Durand, nous dit-il m'offrit 100 écus à lui rendre quand je pourrai. M. Corre m’envoya de ses habits pour me changer et me déguiser ; sa soeur me donna des marques du plus noble dévouement, de la plus haute charité ». Les bois de Saint-Bihy et de Beauchamps, en Plélo, lui servirent de refuge pendant sa fuite. Après avoir erré pendant six semaines sur la côte, et devant les sages remontrances d’un ami prudent, il se laissa conduire à Jersey par un marin de Binic. Il y trouva Mgr. Le Mintier, le 24 juillet 1791. Il passa huit jours seulement dans cette île ; de là, il fit voile pour l'Angleterre où son séjour ne fut que de six mois. Il partit ensuite pour la Belgique, où il trouva un refuge pendant quatre ans dans l'abbaye de Cangerloo. Obligé de fuir devant l’invasion des armées françaises, il termina son exil en Allemagne dans un monastère de son ordre. Ce fut là qu’il fil son ouvrage traduit de l’allemand : l'Exposition de la doctrine chrétienne.

Rentré en France, après l’amnistie, il redevint recteur de Boqueho. A cette époque, deux prêtres insermentés et valides, MM. Jean-Pierre-Julien Robin, né à Quintin, et Julien Le Guilcher, né à Lanrodec, y exercèrent aussi le saint ministère.

M. Le Sage, nommé chanoine titulaire de la cathédral le Saint-Brieuc, est mort à Paris en 1832…

L’attitude de son vicaire, M. Hervé, devant les exigences de l'Assemblée nationale, fut loin d’être aussi édifiante. Voici d’ailleurs ce que nous en dit M. Le Sage lui-même : « J’eus pour successeur Pierre Hervé des Trois Fontaines, qui l'année précédente avait été mon vicaire et mon tourment par l’exaltation de ses idées révolutionnaires et son gros orgueil de prétendu savant. Ayant réussi à l’éloigner, il passa à Plourhan dont le recteur but le calice que j’avais évité. Ce malheureux, d’une audace sans exemple, après avoir affligé un vieillard qui n’avait contre lui pour défense que ses larmes, demanda ma paroisse de Boqueho, promettant d'y détruire le mauvais esprit dont j’avais imbu les habitants. Il y fut nommé et s’annonça comme devant en prendre possession le dimanche de la Pentecôte. Il y vint, en effet, sous bonne escorte, mais les fidèles ne lui témoignèrent que de l’horreur ». Ce pauvre prêtre passa ensuite à Plouvara où nous finirons sa déplorable histoire.

D’après un document que je ne puis compléter, un prêtre le Boqueho. M. l’abbé Henri, préféra l'exil à la prestation du serment.

De nombreux actes de vandalisme se sont produits dans cette paroisse à l’époque en question. L’église fut fermée ; elle contenait les armoiries des Prémontrés et les tombeaux des Liscouet : ces antiquités furent détruites.

La chapelle de Notre-Dame de Pitié, sanctuaire d’une assez grande réputation, fondé par Marguerite Dupont du Quellinec, fut vendue révolutionnairement. Achetée 800 assignats par un nommé Le Mehauté, elle fut rendue à la famille Le Gonidec de Kerhalic. La chapelle de Saint-Briac et de Saint-Ambroise, à La Boulais, seigneurie de la famille de Robien, les chapelles de Saint-Sauveur, de Saint-Jus, de Saint-Sébastien, de Saint-Yves, de Saint-Jacques (cette dernière actuellement rebâtie en Plouagat), furent l’objet de la fureur des patriotes. Les chapelles de Saint-Blaise et de Saint-Hervé, actuellement existantes, ont été rendues par leurs acquéreurs à l’affection et à la piété des paroissiens de Boqueho.

La chapelle de Notre-Dame du Linadec, démolie il y a vers le milieu du XIXème siècle, est restée tristement célèbre par un horrible massacre qui s’y produisit pendant qu’on y célébrait l’office divin.

 

CHATELAUDREN.

La paroisse de Châtelaudren avait pour pasteur, lors de la promulgation des décrets néfastes, un prêtre à l’âme droite et ferme dont la foi ne se démentit jamais, M. l’abbé, Gilles Le Corvaisier, né à Plélo en 1736. Son dévouement à la cause catholique faillit lui coûter la liberté et la vie. Il célébrait, en effet, la sainte messe à Trémargat, en Plélo, lorsqu’un de ces hommes courageux et restés fidèles à la religion chrétienne, vint en toute hâte, pieds nus, le prévenir de l’arrivée des Bleus venus de Saint-Brieuc pour s’emparer de lui. Il n’eut que le temps de se dérober à leurs poursuites. Comme la plupart de ses confrères du canton, il se réfugia aux îles anglaises, d’où il ne revint qu’après l’amnistie.

Un document nous fait connaître que M. Le Corvaisier exerçait le saint ministère dans la paroisse qu’il avait dû abandonner, deux ans avant la nomination de son successeur, M. l’abbé Richard. J’ignore la date de sa mort et le lieu de sa sépulture.

L’abbé René-Guillaume Keruze de Goastino l’imita dans sa généreuse attitude et son refus de prestation de serment. Ce dernier prit aussi la route des îles anglaises.

Il paraît avéré que Châtelaudren eut à sa tête, pendant six années, un prêtre assermenté, M. Jouan, René-Marie.

Les faits concernant la paroisse de Châtelaudren pendant la Terreur et les années suivantes sont et méritent d’être ensevelis dans l’oubli. Ceux dont les ancêtres avaient insulté saint Vincent Ferrier leur annonçant la parole de Dieu, ne pouvaient rester neutres pendant la Révolution. Cette ville fut le repaire de fanatiques qui semèrent le désordre dans le voisinage. « Evitons, dit M. Le Sage à la personne qui l’accompagne dans sa dernière visite à Boqueho avant son exil, évitons cette petite ville fertile en patriotes purs qui ont fait plus d’une campagne dans mon village pour mener, la baïonnette dans les reins, mes paroissiens à la messe constitutionnelle et les empêcher de réciter tranquillement leur Rosaire dans la chapelle de Notre-Dame de Pitié. Un prêtre et une religieuse, voilà les adversaires qu’il faut à leur courage ».

La tradition, malveillante peut-être, rapporte qu’une femme de Châtelaudren osa la première prendre une hache pour démolir la toiture de la chapelle Saint-Gilles, située en Plélo, mais près de cette ville.

Le vandalisme porta ses mains sacrilèges spécialement sur l’antique et remarquable chapelle historique de Notre-Dame du Tertre, sanctuaire bien restauré que la piété des fidèles et même la curiosité des touristes aiment à visiter.

Ses statues furent mutilées ; elles en gardent encore aujourd’hui les marques ineffaçables.

 

COHINIAC.

Deux appréciations diverses existent relativement à M. Lapersonne, recteur de Cohiniac. L’une, revêtue du manteau de la charité et qui est la nôtre à tous, dit qu’il ne prêta pas le serment à la Constitution civile du clergé ; l’autre, qui semble non moins bien informée, déclare qu’il fut prêtre assermenté. Ce qu’il y a de certain, c’est que l’on ne trouve aucun document relatant le lieu et le temps de son exil. M. Lapersonne est mort à Bringolo....

La foi de cette paroisse fut mise à la plus douloureuse des épreuves pendant la Révolution. Deux prêtres assermentés y ont exercé le saint ministère, M. Robert Cadet, prêtre de la Cathédrale de Saint-Brieuc, et un nommé Clerivet, qui devint plus tard curé intrus de Lamballe. Ce dernier est mort à Erquy. Un prêtre de Saint-Donan, M. François Robin, y exerçait le saint ministère depuis 17 mois, lorsque se fit l’entente entre les représentants du Gouvernement français et Mgr. Caffarelli. M. Robin était alors âgé de 43 ans. L’évêché de Saint-Brieuc y nomma comme recteur, en l’an 1803, M. l’abbé Louis Rémond.

Voici les faits religieux de Cohiniac, à la dite époque. Une chapelle, sous le vocable de Notre-Dame de Recouvrance, fut vendue comme bien national et achetée par une famille de la localité. L’acquéreur la fit démolir et en vendit les pierres. Les piliers de cette chapelle ont servi à la restauration de l’église de Saint-Donan, ce qui nous montre qu’elle devait être d’une assez grande dimension. Un auteur, digne de foi et fidèle chroniqueur (il s'agit de l'abbé Le Gal), rapporte un fait singulier et relatif à la démolition de cette chapelle.

L’acquéreur, pendant sa sinistre besogne, commit un horrible scandale qui ne resta pas impuni. Il fit ses enfants s’armer de genêts et fouetter la statue de la Très Sainte-Vierge. Le châtiment ne se fit pas longtemps attendre : ces enfants parjures devinrent infirmes, l’un du côté droit et l’autre du côté gauche, selon qu’ils avaient frappé Notre-Dame de Recouvrance. Tous deux sont morts misérablement.

Un reliquaire de ce sanctuaire, contenant des reliques de sainte Fauste, de saint Boniface et de saint Victor, fut conservé par une dame Pacôme, habitant le château du Rumen ; après la Révolution, elle donna à l’église paroissiale ces précieuses reliques.

La chapelle du Rumen fut convertie en écurie. Elle a été rendue au culte par M. Garnier Bodéléac, en 1877. Elle fut vendue comme bien de la nation avec le château ; achetée par Robin Morhéry, député à la Convention, elle fut conservée par ses descendants jusqu’en 1858.

La chapelle de Notre-Dame de Toutesjoies, située au village de Grimolet, dépendait du manoir de la Ville-au-Vé. Ce manoir, vendu par les spoliateurs de 1793, fut acheté par la famille Fraval qui a donné la chapelle à la paroisse de Cohiniac.

 

PLÉLO.

Plélo est sans contredit celle de toutes les paroisses du canton dont l’histoire s’établit le plus difficilement au moment de la Révolution. Le clergé y était nombreux à cette époque, surtout à cause de ses chapelles et maisons seigneuriales. D’autre part, cette paroisse a donné l’hospitalité pendant ces jours de sang à plusieurs ecclésiastiques persécutés, les uns ses enfants, les autres étrangers, qui venaient chercher refuge dans ses bois profonds et ses maisons charitables, entr’autres à MM. Drillet, Le Sage, Morin, Petibon, Le Corvaisier, etc. Il est conséquemment difficile d’établir des faits précis.

M. l’abbé Richard, recteur-prieur, religieux Prémontré de Beauport ; MM. Vincent-Toussaint Lecoqu et C. Hidrio, vicaires ; MM. Vincent Corbel, chapelain de Saint-Quay, Huet, qui signe aux registres prêtre commis, Marc Jean ou Jéhan, Pierre-Thomas Hillion, Pendezec et Olivier Quettier, prêtres de Plélo, se montrèrent inébranlables devant les menaces des Assemblées nationale et constituante et les mensonges séditieux des intrus. Tous préférèrent la souffrance à la souillure.

En 1792 ou 1793 ils passèrent aux îles anglaises, excepté MM. Huet et Quettier. Le premier est mort en France. Serait-ce lui la victime du sanguinaire Chambas jetée dans le puits, dit de Cornuan, ancienne mine de plomb exploitée entre le village de Kerbui et le moulin de ce nom ? — La tradition semblerait le faire croire. Quant à M. Quettier, né au village de la Guerche, tous nous connaissons les atrocités auxquelles il fut soumis, pendant sa détention à Guingamp, dans le couvent des Carmélites, converti en prison, pendant son triste voyage à Rennes et à Rochefort. Il est mort plein de foi et de courage sur les pontons, des suites des mauvais traitements qu’on lui infligea sur le vaisseau La Cigogne. M. Célestin Hidrio est mort à Jersey en 1793.

Les autres victimes précitées eurent le bonheur de revoir le pays natal. M. Richard fut nommé recteur-prieur de Châtelaudren. M. Lecoqu, fils de Laurent et de Anne Corbel, exerça le saint ministère avant et après le rectorat de M. l’abbé Antoine-Jacques Mottay, nommé desservant de Plélo en 1803. M. Lecoqu aîné est mort à Plélo en 1815, à l'âge de 63 ans.

M. Vincent Lecoqu, fils de Yves et de Michelle Corbel, que certaines notes téméraires placent parmi les prêtres assermentés, ne prêta pas le serment civique. D’après des documents puisés à bonne source, il a été simplement soumissionnaire, qualification qu’il ne faut pas confondre avec la première. Ce saint prêtre est mort à Plélo le 5 juillet 1810, à l’âge de 53 ans.

M. Jéhan eut à supporter pendant son exil toutes les horreurs de la souffrance. Comme il le dit lui-même dans des écrits conservés par sa famille, il se fit casseur de bois, et la charité de M. Drillet, son confrère, qui donnait des leçons de français, dut lui venir en aide dans bien des circonstances.

M. Pendezec, après sou retour de Jersey, a été prêtre habitué de la chapelle Saint-Blaise. Il y a laissé d’excellents souvenirs. M. Célestin Lecoqu, des Norois, a possédé un verre ayant appartenu à ce vénérable ecclésiastique. Il est mort à Saint-Jean Kerdaniel.

La tradition, féconde en souvenirs, rapporte que M. Hillion, né à la Noë, près de Trégomeur, fut victime d’un accident qui aurait pu lui coûter la vie : il se cassa une jambe pendant sa fuite. Il fut recueilli par une famille charitable de Binic, qui lui donna l’hospitalité et lui procura un moyen de salut. M. Hillion est mort après la révolution en cette dernière localité.

Les archives départementales signalent à Plélo, pendant une grande partie de la Révolution, la présence de deux ecclésiastiques, M. Jacques Le Folch, moine, originaire de ce même lieu, et M. Dufou, né à Guérec et chanoine de Dol. Tout détail explicatif me fait défaut.

Plélo, en 1789, possédait, comme je l’ai déjà dit, beaucoup de chapelles qui devinrent pendant les jours de la Terreur l’objet du vandalisme des sectaires, témoin la destruction de la chapelle Saint-Gilles. L’église paroissiale possède actuellement une magnifique croix et un encensoir en argent, objets d’une grande valeur, provenus de ce sanctuaire, grâce au dévouement d’une personne charitable. Les autres chapelles de Saint-Blaise, de Saint-Nicolas, de Saint-Avis, de Saint-Quay, de Saint-Jean du Temple, de Trémargat, de la Ville-Colvez, de la Ville-Geffroy, de Saint-Bihy, de Beauchamps, de Château-Gouello furent pillées. Quantité de croix, entr’autres celle du village de Saint-Jean, furent renversées ; cette dernière, assez remarquable, a été restaurée et rendue à la vénération des fidèles.

Il n’est guère de maisons notables où le saint sacrifice de la messe n’ait été célébré en ces temps mauvais. On montre encore à la Ville-Hue une antique armoire servant d’autel à M. Vincent-Toussaint Lecoqu. Des recherches ont été faites par les Bleus contre M. Morin, à la rue Neuve ; contre M. Quettier, à la Guerche ; contre MM. Le Corvaisier et Petibon, à Trémargat. On m’a cité le nom d’une enfant, Jeanne Garel, baptisée à Créaquin, et une foule d’autres faits que je ne puis énumérer.

Les ancêtres Le Rouillé ont failli payer cher un acte de dévouement en faveur de MM. Petibon et Le Corvaisier. Ils furent traînés devant le district de Saint-Brieuc, où ils durent subir l’interrogatoire le plus compliqué.

Qui ne connaît, outre cela, les actes sanguinaires de l’armée de la République et les crimes multiples de la horde Chambas.

 

PLERNEUF.

M. Botrel occupait une chaire de professeur à Saint-Brieuc quand il fut nommé recteur de Plerneuf en l’an 1779 ou 1780. Il exerçait le ministère dans cette paroisse jusqu’au moment de sa détention. Son zèle pastoral ne se démentit jamais et il refusa de prêter le serment. En 1790, il faisait partie de l’administration du district de Saint-Brieuc. Il en fut nommé le président lors de la démission de M. Cormeaux. Il y figura pour la dernière fois le 27 septembre 1790. Son attitude loyale le fit soupçonner et conduire en prison à Guingamp. Sa mémoire resta en vénération à Plerneuf ; aussi le prêtre assermenté, un M. Gourio, né à Cesson, ne put le faire oublier. Voici, en effet, une note extraite du cahier de paroisse de Plerneuf. Ce M. Gourio avait le surnom de Brico. Il passa environ 2 mois dans cette paroisse, où il ne fut suivi que de quelques personnes qui n’allaient pas à la messe. Le reste de la population s’assemblait dans le bourg, mais refusait d’assister aux offices du constitutionnel. Ce malheureux tomba bientôt dans le mépris public. Pour voir ce qui se passait dans l’église et bien connaître les personnes qui s’y trouvaient, on pratiqua un trou de tarière dans le portail, chose encore visible à la fin du XIXème siècle.

Un nommé Jean Morvan, faisant les fonctions de maire à cette époque, avait demandé au district ce pauvre prêtre. Mais l’officier civil qui avec un esprit révolutionnaire, avait néanmoins conservé la foi, ayant vu M. Gourio célébrer la messe n’étant pas à jeûn, en fut scandalisé. « Je vous ai vu boire après minuit, lui dit-il, déshabillez-vous, vous n’êtes pas digne de monter à l’autel, restez à la sacristie, demain nous irons ensemble à Saint-Brieuc ». Il tint promesse et dit aux représentants du Gouvernement ces paroles : « Nous ne voulons plus de ce Monsieur que vous nous avez donné. Nous vous prions de nous rendre M. Botrel, détenu à Guingamp ». Cette fois on ne l’écouta point ; il revint à la charge, et à force d’instances, on le lui rendit lors de l’amnistie. Nommé desservant de Plerneuf en 1803, M. Botrel y exerça le saint ministère jusqu’au 26 décembre 1809, jour de sa mort, il était âgé de 62 ans ; il y fut inhumé. Il avait pour vicaire ou curé, lors de la trop fameuse promulgation, M. Boqueho, Pierre, fils de Marc et de Françoise Le Glatin, frère du recteur de Tréméloir, qui prit avec lui le chemin de l’exil, plutôt que de souiller sa conscience. Il partit pour Jersey, d’où il revint malade. Il est mort au Château-Gouello. Il a été enterré à Plerneuf.

Comme partout, la révolution laissa des vestiges de sa fureur sur les croix et monuments religieux. La chapelle du Pré de l’Aulne, dédiée à la sainte Vierge, fut vendue comme bien national et profanée, mais la cloche qui est d’une grande antiquité, fut respectée afin d’appeler les patriotes en cas de besoin.

 

PLOUVARA.

Laissons parler l’auteur de quelques notes insérées au cahier de paroisse.

« M. l’abbé Garel, nommé en 1781, fut le dernier recteur avant la Révolution ; il mourut en 1790 et fut remplacé par des prêtres assermentés qui contribuèrent beaucoup à la démoralisation des habitants de Plouvara. Je crois devoir laisser leurs noms à la postérité, afin que leur mémoire soit en exécration dans tous les siècles. Le premier intrus fut Pierre-Marie Poënce qui signe curé de Plouvara, parce que à cette époque cette paroisse fut le chef-lieu de canton. Il eut pour vicaire, en remplacement de M. Laurent Morin, dont l’attitude est si ferme devant les décrets de la Constitution, M. Collet, aîné, prêtre de Cesson et assermenté.

Le deuxième intrus fut le trop fameux Hervé, ancien vicaire de M. Le Sage, dont nous avons déjà parlé ci-dessus. Il fut tout à la fois curé et maire de Plouvara. Il poussa le déshonneur et l’impiété au point de se marier à sa domestique. Il paya cher sa folie ; car des hommes qui ne valaient guère mieux que lui, des faux chouans, le prirent et le fusillèrent après lui avoir fait souffrir des tortures honteuses que l’on ne saurait décrire. Il y a diversité d'opinions sur le lieu de sa mort. Toujours est-il qu’il fut enterré le V Messidor à 10 heures. Témoins : Joseph Garel, Thomas Hillion et Morin, agents. Le premier recteur de Plouvara après le Concordat fut François-Marie-Rodolphe Bouétard, ancien recteur assermenté de Pordic. Après sa rétractation, il fut nommé et installé à Plouvara le 1er avril 1804. Il a desservi cette paroisse jusqu’en 1817, époque où il se retira pour aller mourir à La Méaugon.

Quant à M. Morin, né à Plouvara, il n’a ni émigré, ni prêté serment, ces documents sont sûrs. Donc il a dû passer ces jours d’horrible souvenir caché tantôt dans une maison, tantôt dans une autre. D’ailleurs son souvenir est bien vivace à Plélo, où on lui prête d’avoir exercé le saint ministère dans maintes circonstances. Il est mort recteur de Plourhan.

Inutile de parler de M. Penneuc, prêtre de Plouvara, assermenté, devenu curé intrus de Trémuson.

Les croix et monuments religieux n’eurent pas meilleur sort que dans les autres paroisses du canton. Cinq chapelles existaient à Plouvara à la dite époque, Saint-Ignace, dans le village de ce nom, appelé aussi Saint-Inouan ; Saint-Laurent, dans le village de Crimpelet, Sainte-Madeleine, actuellement remplacée par des arbres ; la chapelle du château de Kernier, devenue appartement de décharge, et enfin la chapelle Saint-Jean de Seigneaux, plus connue aujourd’hui sous le nom de Notre-Dame de Clarté. Ce dernier sanctuaire, rebâti en 1862, est devenu pour tout le pays un lieu de pèlerinage assez fréquenté ».

 

TRÉGOMEUR.

Trégomeur est peut-être la paroisse du canton qui eut le plus à souffrir pendant la Révolution. Sa foi, soutenue par celle du pasteur, ne se démentit jamais. — M. Haméon, Jean-Baptiste, né à Gausson, était de ces caractères qui ne connurent point la défaillance. D’ailleurs sa réfutation contre le novateur Le Coz ne nous dit-elle point tout à la fois son énergie et sa science. Son écrit avait pour titre : Exposition de la doctrine catholique sur les matières agitées en ce temps, avec un abrégé des preuves sur lesquelles elle est fondée : par les ecclésiastiques du diocèse de Saint-Brieuc. M. Haméon quitta la France pendant la période révolutionnaire. Il émigra très probablement à Jersey. A l’époque du Concordat, malgré les oppositions qui lui étaient faites, il eut le bonheur de rejoindre son cher troupeau. Il fut renommé recteur de Trégomeur par Mgr. Caffarelli. Sa mémoire y est encore en vénération.

M. Drillet, prêtre, né au bourg de Trégomeur, prit aussi la route de l’exil plutôt que de souiller sa conscience en acceptant le serment. Il se réfugia à Jersey. Une collection de manuscrits, trouvés dans une maison de Trégomeur, révèlent l’âme ardente de ce prêtre érudit. Lors de l’entente entre l’administration civile et épiscopale, il fut nommé recteur de Trégomar. Il est mort recteur de Plélo.

Un document, extrait des archives officielles, atteste qu’un M. Tocqué, né à Plédran, non déporté, fut nommé vicaire de Trégomeur à l’époque du Concordat.

Trégomeur vit le sang des siens couler en abondance, tantôt sous les coups des Bleus, tantôt sous les coups des faux chouans. Qui ne sait que le trop célèbre Le Picard, dit Chambas, était originaire de cette paroisse. Il y établit son quartier général et il y jeta la terreur et la désolation. Croix et monuments, tout fut saccagé, entr’autres la croix et la chapelle de Saint-Mathurin, la première restaurée et la seconde rebâtie. De nombreux faits religieux s’y sont accomplis : baptêmes faits en cachette à Coquentin, au Goulet, entr’autre celui de M. l’abbé Demoy ; messes célébrées par des prêtres fidèles à la Ville-Gilard ou Fossé-Raffray, à Richard où un appartement a conservé le nom et les indices de chapelle.

 

TRÉMÉLOIR.

Tréméloir terminera dignement les actes de bravoure accomplis pendant les jours de la Terreur, dans le canton de Châtelaudren. Elle avait pour recteur M. Marc Boqueho, né à Belle-Issue en Plerneuf. Ce prêtre préféra l’abandon des siens et d’une population qui lui était bien chère, à la honte du serment, à la constitution civile du clergé. Comme je l’ai déjà dit, il partit pour les îles anglaises avec son frère, au mois de janvier 1792. Il mourut à Jersey en l’an 1796.

Hommages soient rendus à la mémoire de M. l’abbé Lescand, Jean-Gabriel, né à Tréméloir en 1756. Plus inquiet du salut des âmes que de sa propre sécurité, il évangélisa le pays, se cachant dans les champs de genêts, dans les étables, célébrant la sainte messe dans des maisons amies, jusqu’au commencement de l’année 1794, époque où il fut saisi et emmené en prison à Guingamp. Il quitta cette ville en compagnie de M. Quettier et de 37 autres confrères sous une pluie torrentielle. M. l’abbé Berthier, professeur de rhétorique à Dinan, a fait le lamentable récit de leur voyage et de leurs souffrances, tant sur la route que sur les pontons. Il fut déporté sur le vaisseau les Deux Associés. A la fin de la tourmente révolutionnaire, il fut libéré à Saintes et rendu à sa chère paroisse. A l’époque du Concordat, il fut transféré à Etables ; il est mort à Tréméloir en 1809.

L’église et les croix et autres monuments n’eurent pas meilleure fortune que les autres édifices religieux du canton. La foi de cette paroisse fut cruellement mise à l’épreuve par les visites multipliées des envoyés du district et le brigandage du sus-nommé Chambas.

(le diocèse de Saint-Brieuc durant la période révolutionnaire).

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