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LE MANOIR DE KERVAUDU AU CROISIC ET SES ANCIENS PROPRIETAIRES

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D’autant plus remarqué qu'il est unique dans la contrée, composé de deux grandes pièces au rez-de-chaussée, de deux autres au premier étage et de deux chambres éclairées par deux fenêtres dans les combles, le tout desservi par un escalier à pivot, marches en granit, dans une élégante tourelle, tel est le petit manoir de Kervaudu, situé dans la campagne, non loin de la côte N. O. du Croisic d'où la vue s'étend sur les bains de Saint-Goustan et de la Turballe et, en arrière, sur la pointe de Piriac et une partie du coteau de Guérande. Actuellement, ce n'est plus qu'une ferme dont le rez-de-chaussée n'est plus qu'une écurie.

Le manoir de Kervaudu au Croisic.

Il n'est pas impossible qu'il ait été édifié par ses premiers propriétaires connus, les Gentilhommes. On voit un René Timothée Gentilhomme, sieur de Lespine, habitant le Croisic, publier à Liège, en 1606, un petit poëme intitulé La parure des dames, œuvre qui, d'après ses contemporains, n'était pas dépourvue de grâces. Il mourut en 1610. Sa famille avait été reconnue noble à la Réformation de 1429-1455, paroisse de Couëron. Elle portait, d'après P. A. Monnier, Parti, au 1er, d'azur au lion d'argent. Au deuxième, coupé au 1er d'azur à 3 billettes d'argent en bande; au 2ème, fascé d'argent et d'azur.

Après lui, on retrouve un René Gentilhomme, sieur de Lespine et de Kervaudu qui, suivant Caillo, f° 285, était fils du précédent, tandis que selon Ernest de Cornulier et P. A. Monnier, il était fils d'un Jean Gentilhomme, ancien de l'église réformée du Croisic. Né en juillet 1610, il fut baptisé par André Lenoir, ministre protestant. Il eût pour parrain René Marec, Sr de Montbarrot et pour marraine Marie Pineau, femme du sieur de Camsoules, Procureur fiscal de la Sénéchaussée de Guérande. (Extrait des registres de baptêmes, mariages et sépultures des reformés du Croisic déposés à la mairie). S'appuyant sur des données aussi précises, ces derniers semblent être dans le vrai. En tout cas, fils ou parent, il paraît bien appartenir à la même famille.

Ce René Gentilhomme fut admis dans la maison de Gaston d'Orléans à titre de page en 1637. Puis, il devint poëte royal et (nominalement) historiographe du Roi, à la suite d'un impromptu d'une quarantaine de vers à propos d'un coup de tonnerre qui avait abattu une couronne ducale posée sur un pilier de l'escalier de la maison du prince de Condé, l'improvisateur ayant tiré de cet événement l'augure de la prochaine naissance du Dauphin, depuis Louis XIV.

Bien que René Gentilhomme ait produit des poèmes de différents genres, il était surtout poète lyrique. Amateur de livres et de beaux arts, il fréquentait particulièrement des peintres émailleurs. A plusieurs reprises, ses aventures amoureuses faillirent lui faire perdre la vie, sans parler de sa disgrâce auprès de Gaston d'Orléans dont il était devenu le rival près d'une jolie fille de Tours, nommée Louison Roger de la Marbelière, dont le prince était fortement épris. (Bizeul, Bulletin de la Société Académique de Nantes, année 1862). Tombé en disgrâce, il se réfugia en Hollande. Tallemant des Réaux dans ses historiettes et Mlle de Montpentsier dans ses Mémoires, font connaître ses équipées et le dépeignent homme d'épée, brave, vivant à la Cour et après la perte d'un procès ruineux avec un de ses parents, sollicitant des secours de Louis XIV et de la reine Christine de Suède. C'est à propos de la mort de ce parent détesté, qu'il composa l'épitaphe suivante citée par Bizeul :

Icy gist en lieu sur, malgré femme et cousine,
Rongé d'horribles vers, l'espine de Lespine
De terreurs, de remords et de rage estant mort,
Ce fourbe, en chicanant, a fait naufage au port.
J'attendrai, plus heureux, le trépas avec gloire
En décrivant sa vie et ma royale histoire.

René Gentilhomme, d'après P. A. Monnier, fut l'un des plus connus de ces amis des lettres qui, entre 1630 et 1660 formèrent une espèce d'Académie toute protestante dont les réunions avaient lieu tantôt au Croisic, tantôt à Blain, dans la demeure des Rohan. Comme souvenir de cette Académie, il reste un petit volume in 8° de 82 pages dont M. Maugars, avocat à Nantes, possède en 1902 un exemplaire. Il a pour titre: " Poésies rares et nouvelles d'auteurs extraordinaires. Paris, 1662 ".

Il s'y qualifie, dit Caillo, f° 185, de Sr de Lespine et de Kervadoué ou Kervaudu, en français de la Villedieu.

Il mourut à Nantes, le 12 novembre 1671, à l'âge de 60 ans, ainsi que le constate son acte de décès extrait des registres de l'église protestante de Sucé conservés au Greffe du Tribunal. Son portrait, gravé à Paris en 1637 par Daret, le désigne ainsi : René Gentilhomme, Croisiquais, Sr de Lespine, page domestique de Monseigneur frère du Roi ......... [Note : Voici, extrait des archives de Sucé, année 1671, f° 10, V°, dans les actes de l'état civil produits et analysés par le marquis de Granges de Surgères, registres des Protestants de Nantes, Blain, le Ponthus, Sucé et Vieillevigne, son acte de décès : « Aujourd'hui douxième novembre mil six cent soixante et onze est mort René Gentilhomme sieur de Lespine aagé d'environ soixante ans et a esté enterré le treizième dudit mois et an. Signé : Jacques de Brissac, ministre »].

On lit au bas du portrait deux inscriptions : l'une, en latin, de Jean Leochenus, Écossais : l'autre, en vers français, de Jean Meschinot, un Nantais.

Qu'on ne chante plus Mars en Thrace,
Ni dans Amathonte l'amour,
Ni Phœbus sur le Mont Parnasse.
Voici leur unique séjour.

D'après Ernest de Cornulier dans son dictionnaire des terres et juridictions de l'ancien Comté Nantais, et P.-A. Monnier dans ses notes sur la presqu'île guérandaise, la sœur de René Gentilhomme avait épousé Daniel Jollan, Sr des Roches.

En 1762, Joseph de Lespine, prêtre, était titulaire de la Chapellenie de Notre-Dame-du-Murier, à Batz.

On pourrait s'étonner qu'à la suite des aventures, des duels, de la vie mouvementée de son propriétaire, le petit domaine de Kervaudu n'eût pas changé de mains. Il n'en serait rien, à en croire E. de Cornulier ; il l'aurait conservé jusqu'à sa mort, en 1671.

Plus ou moins directement après lui, son manoir passa dans la famille des Le Gruyer, Srs de Kerflice, paroisse d'Herbignac ; de Kerjan, par. de Guérande ; de Kouhourdez et enfin de Kervaudu, par. du Croisic. — Déboutés et déclarés usurpateurs à la réformation du 4 novembre 1670, Ressort de Nantes, les Le Gruyer encoururent une amende de 400 livres. On les voit figurer avec d'autres armes dans l'armorial de 1696.

Voici quelques extraits des registres paroissiaux concernant cette famille :

21 janvier 1527. Inhumation dans l'Église du Croisic d'Olivier Le Gruyer, époux de Françoise Le Bihau.

21 novembre 1563. Baptême de Jacques Le Gruyer, fils de Jacques et de Madeleine Kerallan.

23 novenibre 1599. Baptême de Jacques Le Gruyer, fils de Jen et de Marthe Yviquel.

22 novembre 1619. Baptême de Jacques Le Gruyer, fils de Jean Du Jan et de dame de Brambily.

24 novembre 1675. Pierre Le Gruyer et Marie Fouquer, sa femme font construire la Chapelle Saint-Pierre.

14 septembre 1676. Mariage de Pierre Le Gruyer, Sr de Couhourdez avec Ollive Guilloré.

12 mai 1712. Mariage de Joseph Le Gruyer avec Marie André, fille de Guillaume et de Jeanne Morvan.

22 octobre 1724. Décès de René Le Gruyer, sieur de Kervaudu.

Les Le Gruyer comptent plusieurs Maires du Croisic : Pierre Le Gruyer en 1643 ; Jean en 1653 ; René Le Gruyer en 1675.

En 1775, un Le Gruyer de Kervaudu était doyen-recteur de Loc-Malo-Guémené, ainsi que nous avons pu le lire au bas d'un portrait à vendre, en juin 1900, chez un miroitier, rue des Arts, 12, à Nantes.

Les Le Gruyer portaient de gueules à une épée en pal accostée de deux croissants d'argent. On peut, à la sacristie du Croisic, voir leurs armes au bas d'un vieux tableau représentant saint Jean l'Évangéliste devant la porte Latine. On les trouve reproduites aussi sur une plaque de bronze rappelant la fondation de leur chapelle Saint-Pierre qu'a bien voulu nous communiquer M. l'abbé Clénet, ancien curé du Croisic.

Croisic (Kervaudu) : plaque de bronze rappelant la fondation de la chapelle Saint-Pierre

On accédait à cette chapelle, fondée sous le vocable de Saint-Pierre, par une large ouverture pratiquée dans la muraille de l'Église Notre-Dame-de-Pitié, proche l'autel du Rosaire, un peu au-dessous de l'enfeu des de la Haye. Lorsque cette chapelle, qui empiétait sur l'ancien cimetière, fut démolie, vers 1850, le cimetière ayant été désaffecté, cette ouverture fut close partie par de la maçonnerie, partie par une porte donnant accès dans les dépendances de la cure actuelle.

Parmi diverses autres fondations pieuses de la famille Le Gruyer, il en est une prescrivant, le jour de Pâques, pendant l'exposition du Saint Sacrement, le chant de l' « 0 filii et filiœ » qui s'est traditionnellement perpétuée jusqu'ici.

Il ne nous a pas été possible de savoir qui a possédé Kervaudu depuis la fin du XVIIIème siècle jusqu'en 1825, époque à laquelle il fut acquis par M. Vaillant dont en hérita sa sœur, Mme Amelot. Ses descendants en sont encore détenteurs en 1902.

Nous avons indiqué ci-dessus les sources auxquelles nous avons puisé nos informations. Nous croyons devoir répéter en finissant que c'est dans les notes de M. Caillo sur le Croisic et dans celles de M, Monnier sur la presqu'île guérandaise que nous avons puisé le plus largement.

(A. de Veillechèze, 1902).

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