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COUVENT DES CARMES DU GUILDO

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HISTORIQUE. — Au moyen âge, époque de décentralisation par excellence, la création et l'entretien des ponts et des bacs disposés là où les cours d'eau coupaient les grandes voies de communication, étaient habituellement laissés à l'initiative privée. Le plus souvent en ces points, la charité chrétienne s'ingéniait à créer ce que l'on appelait des « ports d'aumônes », desservis par de petits hospices où les voyageurs pauvres trouvaient assistance, en même temps qu'elle établissait de passeurs qui, suivant la hauteur de l'eau, faisaient traverser la rivière, soit sur leurs épaules, soit en bateau.

Le dangereux passage de Poudouvre en Penthièvre et de Penthièvre en Poudouvre, au péril de l'Arguenon, suscita de bonne heure en ce lieu si bien nommé « Guédum dolosum », l'établissement d'un « port d'aumônes ». C'est ainsi que dès l'an 1249, Haissia, épouse de Bertrand Pagnol de Pleherel, léguait par testament 4 deniers aux ports du « Guelidou, de Establehon, de Jovence et de Dinart » (Anciens Evêchés de Bretagne, III, p. 112). L'an 1256, Geoffroi de la Sonde en Quintenic, bailla à son tour par testament 6 deniers « apud Le Guelido » (Anciens Evêchés de Bretagne, III, p. 127). L'an 1304, Rolland de Dinan-Montafilant, léguait par testament 5 sols aux ports du « Guélidou et de Jovente d'Establehon » (Anciens Evêchés de Bretagne, III, p. 212). Enfin en 1497, Olivier de Saint-Denoual ordonnait qu'il fût payé 5 deniers à chacun des « ports de aulmone, scavoir le Guildeho, Juvante, Mordreuc et Establehon » (Anciens Evêchés de Bretagne, III, p. 105, 106).

Ces donations ne permettent pas de mettre en doute l'existence au Guildo d'une organisation très ancienne permettant de franchir l'Arguenon et d'hospitaliser les voyageurs. Charles de Dinan, seigneur du Guildo, devait y mettre la dernière main. Nous emprunterons une partie du récit de cet acte de haute piété à une Histoire manuscrite des Carmes, rédigée au XVIIème siècle. sur des documents aujourd'hui perdus, laquelle MM. de la Borderie et L. de Villers ont publiée autrefois au t, XXVI, p. 227 du Bulletin de la Société Archéologique d'Ille-et-Vilaine).

« La première fondation de deus hopitaulx, écrit l'auteur anonyme, l'un du costé qu'ils appeloint de Poudouvre en l'evesché de Saint-Malo et l'autre du costé de Peintheuvre, evesché de Saint-Brieuc, par Charles de Dinan (Note : Charles, fils de Rolland de Dinan, fut seigneur de Montafilant, la Roche-Suhart, les Huguetières, le Bodister, Châteaubriant et le Guildo. Il combattit à Auray en 1364 où il sauva la vie à Du Guesclin. Il se montra par ailleurs un des principaux champions de l'indépendance de la Bretagne. Cf. sur son rôle, Anciens Evêchés de Bretagne, p. 173 et sq., et 357 et Bio-Bibliographie bretonne de Kerviler, XII, p. 185), barron de Chasteaubriand, de Montafilan, etc., et sieur du Guildo, y donnant des rentes pour quatre chapellenies, pour le service y estre faict par quatre chappelains, y transférant les rentes, qui auparavant avoint esté baillées à certains chappelains pour dire la messe en son chasteau de Montafilant en une chapelle du nom de Saincte Anne ; ce qui fut permis et approuvé et les d. rantes amortyes par la duchesse Janne, l'an 1370, loué, confirmé et ratifié par le R. père Guillaume, pour lors évesque de Saint-Malo, le 13 de mars 1374. - Ainsi ajoute le rentier du Guildo, ces chanoines ou chapelains furent établis non seulement pour célébrer l'office divin, mais encore pour exercer l'hospitalité ainsi que l'indique la patente de leur création.

[Le 21 juin 1387, le pape Clément III apportant son approbation suprême à cette fondation accorda à la chapelle de Saint-Julien l'hospitalier des pauvres du Guildo (capellam hospitalis pauperum S. Juliani du Guilledou) où quatre chapelains sont fondés à perpétuité, plusieurs indulgences plénières, spécialement aux jours de la Nativité, de la Circoncision, de l'Epiphanie, de la Résurrection, de l'Ascension, de la Fête-Dieu, de la Pentecôte, ainsi que de la Nativité, de l'Annonciation et de la Purification de la sainte Vierge, les jours de la fête de saint Pierre et de saint Paul et de saint Julien, le jour anniversaire de la dédicace de la dite chapelle, de la naissance de saint J.-B., de la Toussaint et durant les octaves de ces fêtes] (Note : Nous ajoutons au texte des Carmes les passages entre crochets).

Quelque temps apprès, scavoir l'an 1420, Robert de Dinan [Note : Robert, troisième fils de Charles et de Jeanne de Beaumanoir, avait Jacques, l'un de ses frères, détenu avec le duc Jean V, par les Penthièvre, au siège de Chantoceaux et il craignait que l'on attentât à sa vie. Robert de Dinan trépassa, d'après Du Paz, le 13 mars 1429 sans laisser d'enfants de son épouse, Jeanne de Châtillon, petite-fille de Charles de Blois (cf. Bio-Bibliographie de Kerviler, XII. p. 185)], fils de Charles, héritier de ses biens, succéda aussy à sa piété et scaichant sa dernière volonté d'augmenter le nombre des chapelains et du revenu pour les entretenir, ratifia cette fondation et institua quatre aultres chapelenies, suyvant la volonté de son père, qui n'estoit que verbale, mais la sienne littérale, signée de sa propre main au siège de Chantoceaux le 16 de juin 1420 et se reserva la présentation et droict de patronaige, en y nommant dès lors quatre prêtres, sauf à se pourvoir devant l'évesque pour la collation sur le « visa signatura ». Ce qui fut approuvé par R. père en Dieu, Robert de la Motte, pour lors évesque de Saint-Malo, les lettres expédiées le 24 octobre de la mesme année 1420, indiction 13. — [« La dite patente, nous apprend en outre le rôle rentier du Guildo, en notre possession, reproduit la première fondation de Charles de Dinan en latin, et, vers le milieu, elle rapporte en français que Robert de Dinan, fils de Charles, voulant que la volonté de son père fût exécutée, a supplié le dit seigneur évesque de Saint-Malo de l'approuver »].

Par laps de temps, cette seigneurie estant tombée en la maison de haute et illustre princesse Philippine de Montespédon, épouse de Charles de Bourbon, prince de la Roche-sur-Yon, duc et duchesse de Baupréau, ils feirent bastir un collège de Chanoines (au dit Baupréau en Anjou) et séminaire pour la nourriture et instruction de vingt quatre enfans. Voullut appliquer au colleige de Baupréau ce qui estoit au Guildo, enfin cela fut empesché par les chapelains qui restoint au Guildo. Parmi ces chanoines, ajoute le rentier du Guildo, il y avait une dignité nommée Prevost ; elle était perpétuelle dans la personne de celui qui en était revêtu.

Or depuis le décès de Mme la Princesse, qui décéda sans enfans, la succession de toutes ces terres, Chemilée, le Guilde, Baupréau, vint en la possession de M. de Scepeaux qui vendit le Guildo à M. le Maréchal de Matignon, qui depuis le vendit à Messire Charles d'Avaugour, chevalier, sieur de Sainct Lorent, père de Missire Jean d'Avaugour, son légitime fils unique, sieur et premier marquis du Bois de La Motte, lequel voyant qu'il n'y avoit plus que deux ou trois des anciens chanoines résidentz sur le lieu dans maisons de louaige ou dans les leurs propres (Note : Voici un exemple de ces chanoines non résidants, coureurs de bénéfices, en la personne d'Etienne Guillemer, bachelier in utroque jure, déjà pourvu d'une prébende dans l'église du Guildo qui lui rapportait 24 livres tournois chaque année et auquel le pape Eugène IV avait conféré en plus le rectorat de Pleudihen devenu vacant par la mort extra cariam de Jean Rouxel et valant 120 livres tournois de revenu. Mais là ne s'arrêtaient pas les bénéfices de Guillemer qui possédait en outre la paroisse Saint-Martin de Vertou valant 50 livres, un canonicat et une prébende à Dol valant 50 livres, des expectatives valant 30 livres, une pension de 10 ducats sur la paroisse Saint-Hélier de Rennes et une autre de 16 écus d'or de France sur la paroisse de Saint-André, près de Guérande. Nicolas V lui confirma la paisible jouissance de ces collations, le 19 mars 1447. VAUCELLE, Catalogue des lettres de pape Nicolas, etc., n° 14), car tous les logis estoint ruinés, hors moins celuy du sacriste qui estoit sur le portail du bas de l'église. Le service ne s'y faisoit plus, mais seullement célébroint quelques messes sur la sepmaine.

Ce bon seigneur jugea ne pouvoir mieux remédier à de telles ruisnes spirituelles et matérielles qu'en changeant la qualité des séculiers en réguliers ; ainsi présenta le tout aux Carmes de l'Observance de Rhennes l'an 1618, qui l'acceptèrent souz le bon plaisir du Révérendissisme evesque de Saint-Malo, qui estoit pour lors missire Guillaume Le Gouverneur, originaire de la ville de Saint-Malo, auquel tout estant conféré, fut fort agréable, cédant et remettant tous ses droits aux religieux, aussi bien que le susdit marquis tout ce qui estoit de son patronnaige lay, avec pouvoir de rechercher les rentes aliénées.

Les lettres sont du 23 mars 1619. Le tout fut accepté à Rome par le Reverendissisme père général de l'Ordre, Sébastien Fantonale, le 17 juin 1620. Les lettres du R. évesque cédant touz ses droicts sont du 4 avril 1619. Loys treiziesme, roy de France, surnommé le Juste, a confirmé le tout par lettres du 4 avril 1621, enregistrées en la Chambre des Comptes à Nantes le 13 de janvier 1622, et néanmoins les despesches se faisant encore, un dimanche, vigile de la Conception Notre Dame qui est le 8ème jour de Décembre, l'an 1620, fut posé le Sainct Sacrement au grand autel de l'église par Monsieur l'evesque de Sainct Malo et par conséquent y fut estably famille de religieux qui ont ja fort advancé la réparation des bastiments et led. sieur Marquis, leur fondateur, voulut que le couvent fut appellé Notre-Dame du Bon Port. Au choeur de l'église a faict bastir, un beau sepulchre de marbre noir », où fut enterrée Marguerite d'llliers d'Entragues, marquise du Bois de la Motte, épouse du fondateur, le 9 février 1654 (Note de l'auteur).

Ici s'arrête l'extrait de l'histoire du couvent du Guildo, que nous ont conservée les Carmes. Nous allons reproduire à la suite le texte même de l'ACTE DE FONDATION DE CETTE MAISON, puisé aux Archives de la Loire-Inférieure, B 71, f° 223-224. Cette pièce, encore inédite, pourra intéresser nos lecteurs :

« En présance de nous notaires royaux à Dynan, c'éest représanté en personne hault et puissant messire Jan D'Avaugour, chevallier, seigneur de Saint-Laurans, Bois de la Motte, baron du Guildo, la Grée, etc., résidant pour le présant aud lieu et chastelenye de Bois de la Motte, paroisse de Trigavou, évesché de Saint-Malo, lequel, de son gré et libérable vollonté, à, ce jour, donné et donne pour luy et ses hoirs, à jamais, aux religieux refformez de Bretagne du sacré ordre de N. Dame du Mont Carmel, sçavoir est : l'église collégiale appelée Notre-Dame du Guildo avecq les six chanoyneries depandantes aud. Collège ; ensemble tous les biens faicts, revenus, droitz et esmolumans en despendans en général sans rien réserver, avecq pouvoir exprès que le d. seigneur a eu pareil donné aux d. religieux de poursuivre et rechercher, selon que bon leur semblera, à leurs frais et diligences, les biens quy pourraient avoir esté par cy devant alliénez du d. collège et église de Notre Dame du Guildo.

Et le tout soubz le bon plaisir de monseigneur l'évesque de Saint-Malo, à condition que les d. religieux feront le service en la d. église selon la mitigacion de leur ordre, en laquelle vivent pour le présant, tant pour le repos des âmes des fondateurs et fondatrices et autres qui auroient augmenté en lad. église que pour la prospérité et santé dudit seigneur et repos de son âme, lors que Dieu l'aura appellée ;

Voullant et désirant que les d. religieux diront le jour qu'ils seront advertis de son décès ung service avecq vigille de morts, et oultre durant l'octave, diront chacun jour en la d. églize une messe à basse voix et le jour de l'octave et bout de l'an ung service avecq vespres de mortz.

Ce reservant, le d. seigneur fondateur et à présant donnateur, à luy et aux siens vingt pieds en tous scans, du haut du coeur d'icelle église de Notre Dame du Guildo, pour y estre ensépulturé et les siens.

Et en oultre, le d. seigneur de Saint Laurans donne aus dits religieux trois journaux de terre estans sis et sittuez desur et derrière de la d. église tirant vers le chasteau du Guildo, pour en iceux les d. religieux y faire sy bon leur semble des jardins ou vergers.

Et aussi qu'ils pourront accepter les dons et terres qui pourront cy apprès leur estre presantez pour la d. augmentation, sans néantmoigns qu'il les en puisse empescher de ce faire.

Voullant et désirant le d. seigneur que tous et chacun les lettres, contracts, actes, tiltres et enseignemans concernant le grand et revenu de la d. église, en ce qui en despend, avec l'acte de fondation soient delivrez aus d. religieux pour d'iceulx s'en servir et ayder cy apprès selon que bon leur semblera. Priant le Général du d. ordre avecq le Provincial et autres supérieurs d'avoir le présant acte et don pour agréable. — Et aussy entend le seigneur que, durant sa vye, il soit dict en d. églize, aux festes du Notre Dame la letanie de la Vierge pour y estre participans luy et les siens.

Ce que dessus, le d. seigneur de Saint Laurans l'a ainsy et de la maniere voullu, consenty, promis et juré tenir. A ce faire le y avons, de son consentement par le jugement et authorité de nostre court de Dynan, condampné et condempnons, …… Le gré pris au chateau du Bois de la Motte, avecq le seign du d. seigneur, le samedy après midy vingt troisième jour de Mars mil six cens dix neuf ».

Une longue inscription gravée sur une table de marbre noir placée dans l'église du côté de l'Evangile, en avant du maître-autel, rappelait une partie des faits et des conditions que nous venons d'énumérer. Elle avait été relevée en 1685 par le bénédictin D. Denys qui l'avait consignée dans le manuscrit aujourd'hui classé sous le n° 17092, f° 169, fonds latin à la Bibliothèque Nationale. G. du Mottay, dans sa notice sur Créhen précitée, raconte qu'il avait retrouvé ce marbre mesurant 1 m. 40 de long sur 0 m. 80 de large, gisant en 1858 dans le jardin du château de Galinée. Il en a reproduit le texte aux p. 48-50 de son étude sur Créhen. On le retrouve aussi dans le Guildo de M. le chanoine Tréguy.

Voici maintenant le texte inédit des LETTRES PATENTES DU ROI LOUIS XIII AUTORISANT LA FONDATION DU COUVENT DU GUILD0. Nous l'avons puisé aux Archives de la Loire-Inférieure, B 71, f° 323).

« Louis, par la grâce de Dieu, roy de France et de Navarre, à noz amez et féaux conseillers les Gens tenans nostre court de Parlemant, Chambre des Comptes de Bretagne, salut.

Nous avons favorablement receu la supplication de nostre amé et féal Messire Jan d'Avaugour, chevalier, seigneur de Saint-Laurans, baron du Guildo, lequel nous auroit faict remonstrer comme ses prédécesseurs barons du d. Guildo auroient fondé et dotté en leur église de Notre Dame du Guildo quelques chappelenyes qui avoient acoustumé d'estre servies par six chappelains prestres, mais qu'à cause des désordres des guerres, corruption des moeurs et par négligence, cette fondation n'estoit entretenue, l'église et les édiffices en ruyne et les biens délaissés et usurpez et que pour la restablir du consentement de nostre amé et féal l'évesque de Saint-Malo, au diocèse duquel est la d. église, il auroit recherché d'y accommoder des religieux refformez de l'ordre de N. Dame du Mont Carmel, auxquels il auroit donnée quelques terres pour faire leurs jardins, suivant le contract cy-attaché soubz le contrescel de nostre chancellerie, contenant l'acceptation des d. religieux et l'approbation du d. évesque.

A quoy désirant contribuer de nostre authorité et pour la recommandation en laquelle nous sont les personnes de qui les actions tendent à la gloire de Dieu et l'avancement de son service ;

Inclinant à la supplication du d. sr. baron du Guildo, nous lui avons permis et permettons conformémant au décret, consentemant et approbation du d. evesque de Saint-Malo, de faire exécuter son d. contrat et d'establir les d. religieux en la d. église de N. D. du Guildo.

Et vous mandons par ces présentes que vous ayez à faire jouir les d. religieux du contenu au d. contract et icelluy omologuer, car tel est nostre plaisir.

Donné à Paris le quatrième jour d'apvril l'an de grâce mil six cens vingt ung et de notre règne l'unzième ». Ainsi signé : Louis. Et plus bas par le Roy, Potier, et scellée du gr. sceau de cire jaulne, a simple queue.

M. le Chanoine Tréguy, dans son volume Le Guildo, déjà cité, ayant reproduit p. 155-157 un bail du passage du Guildo, consenti par les Carmes, le 9 juin 1757, nous n'en parlerons pas ici. Du Rentier du couvent, naguère en possession de feu M. le notaire Joseph Dubois, de Plancoët, et aujourd'hui notre propriété, l'auteur précité a retenu quelques articles que l'on trouvera aux pages 162-163 de son ouvrage. Bornons-nous donc à dire qu'en 1739, les religieux du Guildo déclaraient 2.030 livres de revenu et 379 livres de charges à déduire (Archives d'Ille-et-Vilaine, G 71). En 1768, leurs rentes étaient pour ainsi dire demeurées stationnaires (L. Lecestre, Abbayes et prieurés, etc., p. 69). Suivant un aveu rendu le 10 avril 1692, elles s'éparpillaient sur les paroisses de Corseul (restes des fondations de Robert de Dinan), de Ploubalay, de Landébia, de Saint-Pôtan, de Pluduno, de Saint-Cast, de Pléneuf et de Plourhan (Archives Loire-Inférieure, B 810).

D'après des pièces conservées aux Archives des Côtes-d'Armor, série Q, les revenus des Carmes du Guildo s'élevaient en 1790 à 2.420 livres, se décomposant comme suit : Rentes foncières et diverses petites fermes : 269 livres 18 sols ; rentes foncières à Lannion : 370 livres ; rentes foncières payables aux mesures de Dinan, du Plessis-Balisson et de Plancoët : 1040 livres 13 sols ; idem, mesure de Matignon : 120 livres ; passage du Guildo affermé 400 livres ; rente constituée sur les Carmes de Josselin : 120 livres. Le tout grevé d'assez nombreuses charges, tant et si bien que les deniers religieux étaient accablés de dettes lors de la Révolution.

Etat matériel du couvent du Guildo, d'après un inventaire exécuté le 7 décembre 1790 et conservé aux Archives municipales de Saint-Malo, série L.

« L'église de cet établissement a de longueur 85 pieds (28 m. 33) sur 20 de largeur en dedans (6 m. 60), une demie croisée du costé vers midy ayant de longueur 22 pieds sur 18 de large aussi en dedans. Les grands entraits de la charpente de cette église ont été coupés rez les murs, ce qui ôte toute la solidité de cette charpente ; les autres ouvrages de la même église sont en assez mauvais état.

Grand bâtiment ou maison conventuelle, aspectée vers occident, contenant 120 pieds de longueur sur 27 de largeur de dehors en dehors. Lequel bâtiment est adossé contre le rocher sur lequel sont les jardins et partie de l'enclos vers orient. Ce bâtiment est composé de 4 caves, l'une desquelles renferme un pressoir. Deux entresols sont pratiqués sur deux des dites caves. Ces caves et les entresols ont leur deport sur une cour vers occident dont le sol est à la hauteur des dites caves.

Le 1er étage, vers occident, est au rez de chaussée du côté oriental et composé d'un vestibule, une chambre de compagnie, cuisine, office et un refectoire, lesquels appartements sont dégagés par un corridor vers orient.

Le premier étage accessible par un escalier en pierre au bout nord et en dehors du dit bâtiment, suivi d'un dégagement pour l'entrée du choeur de l'église et du dortoir où sont 9 cellules. Un appartement où est la bibliothèque, grenier sur le tout. Tous les gros ouvrages qui composent cette maison sont en bon état ; les croisées, portes, fenêtres, planchers, en mauvais état.

Au bout nord et en retour vers occident, sont des mazures et de vieux bâtiments en ruines.

L'église et le bâtiment principal sont précédés d'une cour en terrasse, dont le bout nord joint le grand chemin ; laquelle cour est suivie d'un parloir qui sert d'entrée à l'église et à la maison conventuelle.

Autre cour en terrasse à l'occident et au-dessous de la précédente, servant d'entrée pour les caves et le déport au-devant de la maison conventuelle.

Les terres autour de cette maison consistent dans environ 4 journaux, y compris les emplacements des église, bâtiments, cours, verger, jardin et arrentement, dont sera parlé cy-après. Terre médiocre, en terrasse et vallées, clos de murs, joignant nord et occident le grand chemin qui conduit au port du Guildo et au marais et des autres bords à M. Picot (propriétaire du château du Guildo).

Dans le terrein cy-dessus describé (sic), est un petit emplacement sur le Rocher vers occident et sur le bord du grand chemin où il a été depuis quelques années bâti une maison par Mathurin Trotel, auquel les religieux l'ont affermé par bail emphytéotique pour 69 ans avec un petit jardin au nord et joignant l'église pour la somme de 10 livres.

Une rente foncière de 15 livres due pour un petit jardin et un emplacement sur lequel on a bâti une maison, pris sur le terrein du dit enclos au côté nord et joignant le grand chemin, par les enfants et héritiers de François Tréguy (Ancêtres de M. le chanoine Tréguy, l'érudit bien connu). — Le côté midi formant environ la moitié de l'enclos affermé à François Le Clerc pour 60 livres par an. Estimé le tout valoir en capital la somme de 10.000 livres. Enfin le droit exclusif du passage du Guildo avec bateaux et la charge de fournir, et d'entretenir les bacs et bateaux nécessaires, estimé valoir de revenu annuel 100 livres, ce qui fait au denier 15, 1.500 livres en capital ».

Voici maintenant pris sur le procès-verbal déposé aux Archives des Côtes-d'Armor, série Q, la DESCRIPTION DU MOBILIER DE L'ÉGLISE DES CARMES DU GUILDO le 3  août 1791, dressé par le peintre Laurent Le Bourguignon-Renaudière (cf. t. I, p.459).

« Entré dans l'église, trouvé le grand autel composé de quatre colonnes, au milieu desquelles un tableau sur toile, haut de 8 pieds sur 7, représentant la Vierge passant le scapulaire à saint Dominique (lire saint Simon Stot). Sur le tabernacle sont trois panneaux, sur lesquels on voit trois bas-reliefs, Celui sculpté sur la porte mesure 1 pied 2 pouces et figure un Sauveur, les deux autres sont la Vierge et un ange représentant l'Annonciation. Aux deux côtés, faisant pendant, deux figures en bois petite nature de la Vierge et de saint Joseph. Au côté droit de l'autel, un tombeau en marbre noir de Laval, élevé de 4 pieds 7 pouces, orné de deux colonnes de 2 pieds 2 pouces dont les bases et les chapitaux sont en marbre de Gênes blanc. Cette pierre tombale a de profondeur 3 pieds, de longueur 6 pieds 4 pouces, sur laquelle est un ordre d'architecture portant 4 pieds et demi d'élévation et deux colonnes dont le fût est de 3 pieds, les chapitaux et les bases de marbre blanc de Gênes de chacun 4 pouces, et les pilastres pareils en leurs bases et chapitaux. Sur l'entablement est écrit « Domine dilexi decorem domus tuœ ». Entre les colonnes est un écusson écartelé : le premier partagé : le premier : d'argent à neuf billettes de sable ; le second : six bandes en pale, dont trois de gueules et trois d'argent. Le second partagé : au premier fond de gueule herminé ; au second de France ; les troisième et quatrième herminé (sont d'Acigné) ; le cinquième de France (ou plutôt de Chateaubriand). Sur le tout, un chef d'argent losangé d'or et le fond de gueules. L'autre partie écartelée, au premier une bande d'or, trois X de sable au-dessous d'argent aux trois X de gueule, deux en chef et une en pointe. Au second d'argent, neuf losanges d'or de trois en trois. Au troisième de même. Au quatrième bande en chef d'or aux trois X de sable, au-dessus d'argent, trois X de gueules. Un tableau sur toile de 6 pieds de large sur 8 de haut, représentant l'apothéose d'une Carmélite (sainte Thérèse) sur un groupe de nuées, environnées d'anges. — Un Christ en os de 4 pouces de haut. — Un petit tableau sur toile d'un pied 8 pouces représentant la Vierge. — Un Christ en bois de 8 pouces. Dans une chapelle à gauche un tableau sur toile de 6 pieds de large sur 9 et demi de haut figurant saint Dominique invoqué par un naufragé, la Vierge du Carmel élevée sur un groupe de nuées, entourée d'anges, dans le fond une perspective de marine où l'on voit plusieurs débris de vaisseaux et des naufragés. Antoine Debraye pinxit. Aux deux côtés de l'autel sont deux figures en terre cuite de 3 pieds et demi dont l'un représente un hermite et l'autre sainte Anne avec la Vierge. Au milieu une Vierge, matière de 3 pieds de haut. Des deux côtés, deux mauvais tableaux sur toile de 2 pieds 4 pouces sur 2 pieds de large, représentant l'un deux dominicains et l'autre une dominicaine qui engage une fille du monde à entrer dans le cloître. Un Christ en os de 7 pouces de haut. — Un tableau d'un pied et demi ayant pour sujet le Christ, la Vierge, saint Jean et la Madeleine. — Un autre tableau de 2 pieds carrés représentant sainte Catherine et un Sauveur dans une gloire. Et c'est là tout ce que nous avons pu trouver dans cette maison », ajoute Le Bourguignon en guise de conclusion.

A ce relevé si sec et si laconique, nous n'ajouterons qu'une observation, c'est que Le Bourguignon s'est trompé toutes les fois qu'il parle de Dominicains ou de saint Dominique dans son procès-verbal. C'est certainement de Carmes qu'il doit s'agir. L'expert a été dérouté par la similitude des costumes.

Location, puis vente des Carmes du Guildo. — F. Leclerc, du Guildo loua pour 9 ans commençant le 27 septembre 1789 les terres, l'enclos et partie du jardin des Carmes pour la somme de 60 livres par an. Le même individu afferma pour la même somme les bâtiments du couvent et le reste du jardin, qu'on avait d'abord réservés pour en faire un presbytère. Son nouveau bail, conclu pour 3 ans, devait prendre fin le 1er avril 1794.

Mme de Chappedelaine, soeur de l'émigré Picot de Galinée qui rachetait un peu partout les biens de son frère mis en adjudication au profit de la République, trouva faire un marché avantageux en payant pour 2.089 livres en monnaie dépréciée le 21 brumaire an V (11 novembre 1796), le couvent des Grands Carmes du Guildo et le moulin de la Basse-Lande en Saint-Pôtan. Et cela d'autant mieux, qu'à cause de la chute des assignats à cette époque, elle ne déboursa en réalité que 568 frs en bon numéraire. Il y avait loin de cette somme minime aux 10.000 livres auxquelles les experts avaient estimé le Guildo en 1790. Une fois de plus « le milliard des Congrégations » s'était volatilisé, sans profit pour le gouvernement spoliateur.

Le 29 octobre 1812, M. Picot se débarrassa avantageusement pour 4.000 frs de ce bien d'église au profit de M. Guillaume Pognant, négociant demeurant à Saint-Cast, veuf de dame Anne Follange de Saint-Briac et déjà acquéreur de l'abbaye de Saint-Jacut.

Personnel du couvent. — D'après un état conservé à la série Lv, aux Archives des Côtes-d'Armor, deux religieux seulement vivaient encore au couvent du Guildo après le 15 août 1790. L'un d'eux, EDOUARD PIEL DE LA BELLANGERIE, originaire de La Flèche, ou des environs, était âgé de 46 ans et profès depuis 1761. Il demandait alors à continuer la vie commune ainsi que PIERRE CLERC, son confrère, âgé de 38 ans et profès depuis 1779. — Un autre religieux, GEORGES-AUGUSTIN QUELLEU ou QUELENEAUD, plus ou moins souffrant, avait quitté son couvent le 10 mai 1790 et vivait depuis cette époque retiré à Paris dans sa famille. Le 12 décembre 1791, Delaizire, député des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), écrivait à son sujet : « M. Le Roux, liquidateur des biens nationaux, vint hier m'engager à vous écrire pour vous engager à accélerer la liquidation de M. Quelenaud, ci-devant prieur ( ?) des Carmes du Guildo. Il m'expliqua que cet ecclésiastique vieux et dans la misère, avait besoin de secours et que la municipalité ne pouvait venir à son aide, faute de la liquidation ou tout au moins d'on certificat de votre part, qui justifierait que ce religieux était prieur des Carmes du Guildo. Le District de Dinan, vous a fait passer les pièces relatives à cette affaire dès le mois de juillet ou aoust dernier. Le recteur de Trégon est chargé de la procuration du cy-devant prieur. Vous devez avoir à ce sujet une lettre de M. Bailly, lors, maire de Paris. Mettez-moi je vous prie en état de répondre à ces MM. qui doivent revenir ». (Extrait de la Correspondance des Députés des C.-du-N. à l'Assemblée Législative publiée par l'archiviste D. Tempier, lettre no 32.)

La situation des Carmes demeurés au Guildo n'était guère plus enviable. Le 13 novembre 1790, ils se déclaraient dans une affreuse indigence, « manquant de chaussures ; de tabac, auquel ils sont accoutumés depuis longtemps ; réduits à boire de la très mauvaise eau qui les incommode, leur donne le « dehors » et les empêche ainsi de dire la messe » ; ils réclament en conséquence avec instance le paiement de leurs pensions et déclarent l'un et l'autre vouloir quitter le Guildo, renoncer à la vie commune et rentrer dans leurs familles. Ce n'était pas du reste la première fois que ces religieux dépeignaient aux autorités révolutionnaires leur pénible situation. Le P. Piel écrivait en effet dès le 4 octobre précédent, « que nommé prieur du Guildo le 22 juin 1780 en remplacement du P. Sauvé, parti « furtivement » sans avoir rendu aucun compte, il ne trouva aucun argent au Guildo lorsqu'il arriva. Aussi, manquons-nous de tout, mande-t-il au Directoire de Dinan, comme de bois, de vin, de pain, que l'on ne nous fournit depuis quatre mois que contre argent comptant, lequel nous fait absolument défaut ». Mais la « sensibilité » des bourgeois révolutionnaires qui encombraient les directoires du département et des districts n'était guère accessible à ces considérations. Aussi le P. Piel, le 24 janvier 1791, renouvelait-il ses plaintes et suppliait qu'on lui accordât le règlement de sa pension : « je suis obligé de porter tous les jours des sabots, n'ayant qu'une mauvaise paire de souliers pour monter à l'autel. Je brule, faute de chandelle, les cierges de l'église pour nous éclairer, et je n'ai de vin de messe que celui que me donne le prieur de Saint-Jacut, et de plus, il y a une quantité de religieux et de passants auxquels nous donnons encore l'hospitalité » (Archives Côtes-d'Armor, série Lv et série Q, Carmes du Guildo).

La vente des ornements et du mobilier des Carmes du Guildo eut lieu le 23 juillet 1791. Elle produisit seulement la maigre somme de 480 livres. Il est certain qu'à cette date les derniers religieux avaient quitté leur couvent, dans lequel privés de leurs revenus accoutumés et ne recevant pas les pensions promises, ils périssaient de misère, mais étant l'un et l'autre étrangers à la Bretagne, nous avons dû renoncer à savoir ce qu'ils ont pu devenir.

Quant à leur église, un état du 4 octobre 1796 prétend qu'elle est affermée pour le culte, quoique étant en mauvais état. Une nouvelle pièce du 10 novembre suivant assure qu'elle n'est seulement que soumissionnée (Archives des Côtes-d'Armor, série Q, églises et chapelles). Aujourd'hui de cet édifice, il ne demeure plus que l'emplacement indiqué par quelques pierres. Sur les légendes qui courent sur les Carmes du Guildo, cf. A. Lemoine, de Matignon, De Saint-Malo au Cap Fréhel, in-12, Dinan, 1884, p. 109-112.. 

(abbé Auguste Lemasson) 

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