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PEUPLEMENT ET POPULATION DE CONCARNEAU.

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Fixer à l'année 692 la fondation de Conc, ce n'est pas nier l'existence d'une population antérieurement établie sur l'îlot qu'occupe la vieille ville.

Un érudit breton a reconnu et décrit ce qu'il nomme les oppida ou forteresses, ces lieux de refuge, on peut dire ces villages de refuge, contenant quelquefois une centaine de cases appendues en gradins aux rochers les plus abruptes de la baie de Douarnenez [Note : Note sur les oppida gaulois et d'autres forteresses sur le littoral du Pagus Cap Sizun (baie de Douarnenez et baie d'Audierne), dans Etudes historiques sur le Finistère, p. 76-87, par R. Le Men (1875)]. Combien les contemporains de leurs tristes habitants furent heureux de trouver l'îlot de Conc comme lieu de refuge et de défense !

D'autre part, comment, aux temps les plus reculés, des pêcheurs ne se seraient-ils pas établis sur l'îlot de Conc, lieu propice entre tous, situé au fond d'une baie, défendu contre les vents du Sud-Ouest, baigné constamment par la mer sur une de ses rives, enfin pourvu d'eau douce ?

L'acte le plus ancien où il soit question de Conc, sans pourtant que ce nom soit écrit, est du XIème siècle. C'est le Cartulaire de Landevenec. On y lit :

« Ego Gradlonus do sancto Uuingualeo..., locum sancti Uuingualei in Buduc, V villas ». « Moi, Gradlon, je donne à saint Guénolé, le lieu de saint Guénolé, en la paroisse de Beuzec, cinq maisons » [Note : Cartulaire publié par M. de la Borderie, pour la Soc. Arch. du Finistère (1888), p. 151, XIX, in fine].

Ces mots doivent s'entendre en ce sens : Gradlon donna à saint Guénolé, en Beuzec, un lieu qui devint un prieuré portant le nom de Saint-Guénolé et comprenant cinq maisons, au temps où le rédacteur du Cartulaire rédigeait cette notice, c'est-à-dire au XIème siècle.

Les mots « en Beuzec » s'entendent de la paroisse de Beuzec, comprenant l'îlot de Conc ; et le seul prieuré que Landevenec ait eu en cette paroisse est celui de Conc.

Donc, la donation de Gradlon, mort aux premières années du VIème siècle, en 505, se rapporte bien à Conc.

Disons tout de suite que le nom de Beuzec était commun à trois agglomérations de l'évêché de Cornouaille. Pour les distinguer, on ajouta un second nom au nom de Beuzec. Il y eut ainsi : Beuzec-cap-Caval, Beuzec-cap-Sizun, et Beuzec, paroisse de Conc, devint Beuzec-Conc [Note : Beuzec-cap-Caval, autrefois paroisse, aujourd'hui partagé entre les communes de Saint-Jean-Trolimon et Plomeur, canton de Pont-l'Abbé. La chapelle est en Plomeur. — Beuzec-cap-Sizun, commune du canton de Pont-Croix. Cette paroisse avait trois prébendes canoniales, dont l'une appartint, de 1596 à 1617, à Moreau, l'auteur de la Ligue en Bretagne. Bull. Comm. diocésaine, III, p. 109]. — L'annexion du nom de Conc au nom de Beuzec était destinée à prévenir toute confusion avec les autres Beuzec ; elle n'a pas eu cette vertu ; et, pour comble de malheur, elle a donné lieu à une confusion entre Beuzec et Conc. Nous le verrons tout à l'heure.

Si, contrairement à notre pensée, l'îlot de Conc était désert au Vème siècle, c'est-à-dire au temps de la donation de Gradlon, cet état allait être bientôt modifié. A Conc, comme ailleurs, les moines vont être missionnaires, instituteurs, médecins, bienfaiteurs du voisinage, et, comme en beaucoup de lieux, la population va venir à eux.

Peut-être pourtant ce travail d'agglomération fut-il à Conc moins rapide qu'ailleurs, à raison de la situation insulaire du prieuré. Un fait que voici permet de le supposer.

Six siècles après Gradlon, vers la moitié du XIIème siècle, un savant arabe, Edrisi, écrit une géographie résumant les renseignements recueillis par les arabes trafiquant alors par toute l'Europe [Note : J'ai nommé Edrisi, arabe, né à Ceuta (aujourd'hui Maroc), en 1099, il fut favori de Roger II, roi Normand de Sicile (1130-1154). Il avait, dit-on, parcouru le bassin de la Méditerranée jusqu'à Constantinople, et visité les côtes de France et d'Angleterre, quand il écrivit le livre qu'il intitula : Délassements de l'homme désireux de connaître à fond les diverses parties du monde. V. La Borderie, Hist., t. III, p. 148 et suiv., et J. Trévédy, Géographie ancienne de la Bretagne, 1896]. Ce livre est utile surtout aux navigateurs et semble écrit pour eux; il leur signale de proche en proche les villes maritimes. Or, entre Quimperlé et Quimper, il ne nomme pas Conc.

Ce n'est pas à dire que Gonc ne fût pas habité. Du silence d'Edrisi nous pouvons seulement inférer que Conc offrait peu d'intérêt aux commerçants ; qu'il n'avait pas « l'industrie et les marchés » signalés à Kenberlin (Quimperlé), qu'il n'était pas « très peuplé, très fréquenté, commerçant et abondant en ressources, » comme Sant-Kerenbin (Quimper-Corentin).

Ecrivant cent ans plus tard, Edrisi n'aurait eu garde d'omettre Conc. La population s'est accrue. La chapelle du prieuré est devenue insuffisante : une église a été construite, qui sera fillette de Beuzec. Conc est chef-lieu d'une châtellenie ducale. Il a une cour ducale et cette cour a même un auditoire construit pour elle [Note : Le duc Jean II (1286 à 1305) bâtit un auditoire à Conc. — La Borderie, Hist., III, p. 366. L'auteur cite un compte de Lombard, trésorier, qu'il a publié au Bull. de la Soc. Arch. d'Ille et-Vilaine, XXII, p. 272-273].

Il y a là un sénéchal et les officiers ordinaires d'une justice, procureurs, sergents, notaires, etc. Auprès d'eux habitent des bourgeois, dont les fils parviennent aux dignités de l'église de Cornouaille [Note : Un chanoine en 1289. Morice, Pr., I. 1093. Deux archidiacres de Poher dont un devient chantre de Quimper (1ère dignité du chapitre). Cartulaire de Quimper, Comm. Diocésaine, IV, p. 311 et 514 (Années 1314-1321-1322)], « des gens de négoces » et des pêcheurs.

Tout ce monde vit là en sécurité, derrière des murailles solidement construites sur le rocher, difficiles à escalader, et qui un jour résisteront à un assaut commandé par le connétable du Guesclin (1373) [Note : On voit combien Moreau était mal informé quand, se référant à 1450, il montre Concarneau comme « un village habité de pêcheurs ou matelots »].

A cette époque, Concarneau est ce que dit Froissart contant ce fait d'armes : « ville et forteresse sur mer » [Note : Froissart, Ed. de Simon Luce, t. VII, p. 140 et VIII, p. 139-142. — Il dit « ville et petite forteresse » ; « petite ville et forteresse » serait plus exact. Froissart est mieux informé que Ogée qui mentionne le siège du « château bien fortifié de Beuzec » (V° Beuzec-Conc, I, p. 84).
Au même endroit Ogée écrit que, en 1145, le duc Conan exempta Beuzec-Conc de tailles, etc. Dans la même page, il vient d'écrire la même phrase à propos de Beuzec-cap-Sizun. — L'exemption est en effet accordée à ce dernier lieu. Morice, Pr., I, 596. Toujours la même confusion. — Tailles, impôt réel et personnel, dit aussi fouages, d'ordinaire temporaire].

Mais tout-à-coup, dans la première moitié du XVème siècle, la décadence vient : « Les habitants ont délaissé leurs négoces et affaires, plusieurs sont allés faire leurs demeurances en autres lieux ; et n'y sont demeurés (à Conc) que bien peu des habitants... ».

Qui nous révèle cette décadence de Conc ? Le duc Pierre II dans le mandement cité par ailleurs (Voir les Remparts de Concarneau), du 15 mars 1451 [Note : Je copie ces phrases du mandement et celles qui suivront dans le discours du comte de Palys, à la séance d'ouverture du congrès de Concarneau]. Et la cause de cette émigration des habitants ? Elle est bien simple : Ils ne se sentent plus en sûreté derrière les murs qui protégèrent leurs pères. Ces murs qui résistèrent à du Guesclin ne tiendraient pas contre les canons qui se multiplient en se perfectionnant. Pierre II va donc ordonner la reconstruction de la ceinture murale. Mais à ces murs remis à neuf il faut des défenseurs. Où les trouver ? Pierre II saura y pourvoir.

Au Moyen-Age, les bourgeois des villes étaient exercés au tir de l'arc et plus tard de l'arbalète ; et, en cas d'attaque, se faisant soldats, combattaient avec la garnison. Ainsi firent les habitants de Conc ; et le duc le rappelle à leur grand honneur :

« A l'occasion, dit-il, des guerres qui ont longuement duré et sont encore sur la mer [Note : Cette phrase est une correction apportée par Arthur III au texte du mandement de Pierre II. En 1451, Pierre II n'aurait pas pu dire que les guerres ont cessé sur terre. La victoire de Formigny n'avait délivré que les Normands et il fallut la victoire de Castillon (17 juillet 1453) et la prise de Bordeaux (17 octobre), pour déterminer le départ des Anglais V. ci-dessus, p. 14 et 15. — En 1457, les Anglais menaçaient Bourgneuf (Loire-Inférieure) et Saint-Malo. En 1458 (août), une flotte franco-bretonne de 60 navires, dont 13 à châteaux, c'est-à-dire de guerre, força l'entrée de Sandwich, comté de Kant, et revint chargée de butin et ramenant 24 navires anglais, dont 3 de guerre. Lobineau n'a pas dit cette expédition que conte Morice, II, p. 60-61], souventes fois (les habitants) se sont armez..., pour faire résistance à nos ennemys les Angloys ; et, ont soustenu de grandes charges (dépenses) et pertes de fortune pour lesquelles sont réduits en indigence de biens... ».

« Mais aujourd'hui, continue le duc, ils sont en si petit nombre que bonnement ne suffisent plus à la garde et deffense de la place ; mais très nécessaire seroit que plus grand nombre y en eut pour le bien, seureté et augmentation d'icelle place ».

Pour obtenir ce résultat, que va faire le duc ? Il va d'abord reconstruire les murs, et les rendre, comme nous avons vu, capables de résister au canon. En second lieu, pour indemniser les habitants des dépenses qu'ils ont faites et des pertes qu'ils ont subies à cause des guerres, le duc « les exempte, et perpétuellement, du devoir d'impôt des vins et boissons qu'ils vendront [Note : C'est le billot], des tailles, aides [Note : Aides. Impôt dû en trois occasions : 1° quand le fils aîné du seigneur est armé chevalier ; — 2° quand le seigneur marie sa fille aînée ; — 3° quand le seigneur est fait prisonnier. On ne voit pas nos ducs réclamer les aides], et autres subsides avec tout devoir de sécheries appartenant au duc, voulant qu'ils soient et demeurent quictes, francs et exempts, sans aucune chose à payer [Note : Remarquons que « l'impôt sur les pêcheries et sécheries » ne figure pas dans les revenus de la seigneurie]. ».

Cette exemption est confirmée par Arthur III en 1457.

La reconstruction des remparts ramène la sécurité, l'exemption de toute imposition est un privilège enviable. Les habitants qui s'exilèrent vont revenir ; mais ils ne viendront pas seuls. D'autres se joindront à eux, jaloux de cet heureux privilège dont leurs enfants hériteront.

Soixante-dix ans plus tard (en 1520), le portulan [Note : On nomme portulan (de l'italien portoleno, porto), des cartes marines indiquant tous les ports, hâvres, entrées de fleuves où les navires peuvent séjourner. Avant l'invention de la boussole, les navires ne se risquaient guère en haute mer et rasaient timidement les côtes, allant presque de port en port. Ce portulan est, dit-on, de 1520. Desjardins, Gaule Romaine, I, planche VI, p. 272-273], mentionne Concarneo. Me dira-t-on : « Mais le portulan mentionne tous les ports, disons mieux, les hâvres, les entrées de rivières où les navigateurs qui rasent encore timidement les côtes, trouveront abri contre le gros temps [Note : « La navigation était si difficile aux côtes de Bretagne, qu'il était rare qu'un bâtiment naviguât deux ans sans se briser ». Hévin, Questions féodales (à propos du droit de bris), p. 347. Il cite ainsi « une vieille relation historique à la fin d'une Très Ancienne Coutume » (1330 à 1360)]. — C'est uniquement à ce titre que Venodet (Benodet), à l'entrée de la rivière de Quimper, peut être nommé par lui. N'en est-il pas de même de Concarneau ? ».

Voici la réponse à cette objection :

Dix-neuf ans après la date du portulan, en janvier 1539 (1540 n. st.), arrivent à Conc deux conseillers maîtres à la chambre des comptes de Nantes : « la chambre les a nommés commissaires, en exécution de mandat du Roi François Ier, usufruitier du duché de Bretagne, pour la réformation des recettes de Concq-Fouesnant et Rosporden ». [Note : Archives de la Loire-Inférieure, B. 1236. Rôle rentier de la sénéchaussée de Concarneau].

Ils vont faire deux opérations : 1° établir l'état des propriétés données par baillées moyennant rentes censives [Note : Le mot baillées est pris au sens de bail à rente : cession de la propriété à charge de rente perpétuelle, dite foncière ou censive] ; 2° « faire la baillée des maisons, terres vagues, inoccupées, occupées sans titre ou usurpées ».

Ils se mettent à l'ouvrage, le 21 janvier, et ils consacreront deux jours à la ville et autant au faubourg.

Nous donnerons plus loin le compte exact des maisons et jardins ; mais ce qui nous intéresse aussi, c'est l'indication des édifices pris comme points de repère.

Les commissaires signalent l'église avec son cimetière, l'hôpital et sa chapelle, dite de la Trinité, le four à ban, le puits public, le moulin (à vent) banal, la cohue (halle) et le petit château. — Tous ces édifices sont rassemblés dans la partie la plus large de l'îlot.

Au-delà, vers l'Ouest, sont signalées la chapelle dite Notre-Dame du Portail, qui touche la porte, et à côté la prison.

Enfin, l'acte mentionne en deux endroits « échelles ou degrés (escalier) pour monter sur la muraille » [Note : Auprès de l'échelle, « le lieutenant du capitaine représente qu'elle est nécessaire. L'on monte par là pour faire le guet et porter l'artillerie sur le mur lorsqu'il en est besoin ». Ainsi, d'ordinaire, les canons n'étaient pas sur le rempart. — Aucune mention de l'auditoire signalé plus haut, ni du prieuré].

En dehors de l'espace occupé par les édifices mentionnés ci-dessus, tout le terrain que les murs et le chemin de ronde laissent libre est occupé par des maisons, cours et jardins.

La Grande rue, de la porte Ouest à l'Est, comprend 45 maisons à droite et 44 à gauche ; la Petite rue du Sud au Nord en comprend huit. — En tout 97 baillées.

Les conseillers font 10 nouvelles baillées en diverses parties de la ville [Note : Une d'elles concerne « un emplacement de maison joignant d'un côté au puits public, d'un bout au cimetière et d'autre bout vis-à-vis du four à ban ». — Puits et cimetière sont bien voisins].

Il y aura donc en tout 107 baillées. Plusieurs comprennent plus d'une maison. Nous pouvons compter 115 maisons [Note : Je ne compte pas deux maisons appartenant au prieuré, dont je trouve la mention ailleurs].

Voilà pour la ville. Voici pour le faubourg :

Le procès-verbal montre là deux rues, plus exactement deux quartiers, qu'il nomme Pénéroff et l'Aire-l'Evêque.

La rue dite Pénéroff, vis-à-vis de la porte de l'Ouest, près de la chapelle Sainte-Croix et le long du rivage, est au domaine du Roi. Les commissaires y comptent 30 baillées, et ils en ajoutent 13, comprenant 3 maisons et « des applacements de landes au voisinage de la chapelle ». — Voilà donc 33 maisons signalées à Pénéroff. C'est en tout 148 maisons au domaine royal.

La rue dite l'Aire-l'Evêque, au Nord de Pénéroff, est au fief épiscopal, les commissaires n'ont pas à s'en occuper. S'ils mentionnent le four banal, c'est seulement comme point de repère.

Remarquons ici que le plan du XVIIIème siècle, montre le quartier l'Aire-l'Evêque aussi bâti, sinon plus, que Pénéroff. En était-il ainsi en 1539 ? C'est vraisemblable. Si donc les commissaires ont vu 33 maisons à Pénéroff, il y en avait un nombre à peu près égal à l'Aire-l'Evêque.

Remparts de Concarneau (Bretagne).

Nous avons compté 115 maisons dans la ville close : ajoutons-y 66 au faubourg : l'agglomération entière aurait donc compris 181 maisons.

Soixante ans plus tard, au début du XVIIème siècle, le chanoine Moreau constate le progrès de Concarneau :

« Il nous montre dans l'îlot une rue bien bordée de maisons où demeurent nombre d'habitants riches, par rapport à leur commerce de mer. C'est pourquoi elle (la place) est aussi appelée ville (Moreau, p. 61). ».

Il n'avait pas à parler du faubourg ; mais, quelques années plus tard, en 1619, nous sommes renseignés.

Dans la rue Pénéroff les maisons se touchent ou du moins sont assez rapprochées les unes des autres pour servir successivement d'abris à une troupe ennemie qui passe d'une maison à l'autre sous le feu de la place, et dont un seul homme est blessé [Note : Récit publié (en 1621) du siège de Conquerneau, en 1619].

Vingt ans plus tard (1636), Dubuisson-Aubenay écrira :

« Conq ou Conckerneau est une petite place environ de cent maisons, bâtie ou fortifiée pour la nourriture et sûreté des enfants des ducs qui, autrefois, étaient là élevés à cause du bon air (p. 107) ».

C'était apparemment une prétention des habitants que leur ville eût été choisie pour la résidence des enfants des ducs, comme le lieu le plus salubre de la Bretagne.

Notre voyageur dit plus loin : « Il y a bien cent hommes à porter armes, et en un besoin deux cents (p. 108) ».

Remarquez-le, « notre auteur ne parie que de la ville close, qu'il nomme la place, qu'il décrit « ceinte de murailles », située en mer qui l'environne ». Ainsi, ces nombres de « cent maisons », de « cent ou deux cents hommes à porter armes », se rapportent à la ville close.

De ce qui précède, il résulte que le nombre « d'environ cent maisons » indiqué, en 1636, par Dubuisson dans la ville close, est trop réduit, et qu'il y a lieu d'y compter 115 maisons au domaine du Roi, sans parler des autres appartenant au prieuré de Saint-Guénolé.

Au lieu de compter les maisons par à peu près, Dubuisson aurait bien fait de donner (ce qui était facile), le chiffre de la population. Pouvons-nous du moins l'inférer approximativement des renseignements qui précèdent et de ceux qui vont suivre ?

Moreau nous apprend que, à la fin du XVIème siècle, Penmarch avait une troupe de 2.500 arquebusiers ; et il lui attribue une population de 10.000 âmes. La milice est du quart de la population [Note : V. Moreau, p. 274 et 275. Il dit aussi que Quimper pouvait fournir 1.000 à 1.200 arquebusiers (p. 124). Il dit même « 1.200 ou 1.300 bien en ordre, » ce qui porterait la population à 4.000, 4.800 et même 5.200]. A ce compte, les 100 arquebusiers de Concarneau mentionnés par Dubuisson, donneraient à la ville 400 habitants ; les 200, élèveraient la population au chiffre de 800. Prendrons-nous la moyenne : 150 arquebusiers ? et en déduirons-nous approximativement pour Concarneau une population de 600 habitants ? Ce chiffre approximatif paraît acceptable.

Il donne pour chacune des 115 maisons de la ville close, un peu plus de 5 habitants ; mais nous devons tenir compte des 66 maisons du faubourg, si nous leur attribuons le même nombre d'habitants, nous arrivons au chiffre de 943 pour l'agglomération entière : 599 en ville et 343 dans le faubourg [Note : Voici le calcul : 600 habitants pour 115 maisons (ville close) donnent pour chacune 5.21: 5.21 X 115 = 599.15. — Au faubourg : 5.21 X 66 = 343.86. 599.15 + 343.86 = 943.01].

Quoi qu'il en soit, on ne peut douter que, en ces temps troublés, la fortification de l'îlot n'ait contribué au progrès de Concarneau et à l'augmentation de sa population.

Moreau ne semble pas de cet avis. Il nie l'utilité de ces murailles. « Le hâvre, dit-il, n'est guère sûr, et les approches en sont dangereuses... ». Du moins, lui semble-t-il que les inconvénients de la fortification l'emportent sur ses avantages : « C'est une bonne forteresse pour la ruine du pays et inventée cependant pour son bien, une retraite à voleurs, gens de corde, etc. » (Moreau, p. 62-63).

Pardonnez au chanoine ligueur. Il a vu Concarneau ligueur et sauvegarde de Quimper ; il le voit dévoué au Roi et menaçant Quimper ; de là sa méchante humeur. Mais ne donnons pas à ses plaintes un sens général qu'il ne leur a pas donné. Il se plaint seulement des « voleurs et gens de corde » qui vont demander asile à Concarneau. S'il exagère, il y a là une part de vérité.

A cette époque, les chefs militaires n'étaient pas scrupuleux sur le choix de leurs recrues, pas plus que sévères sur la discipline. Mais le chanoine ne confond pas avec les hommes ainsi enrôlés, les honnêtes habitants dont il vient de parler occupés d'un commerce lucratif. Il n'en veut pas à la ville de Concarneau. Et c'est justice.

En effet, que peut une population de quelques centaines d'habitants enfermés dans une étroite enceinte avec une garnison relativement nombreuse ? Si son gouverneur crie : « Vive la Ligue ! », la population ne criera pas : « Vive le Roi ! ». Si le gouverneur se met à crier : « Vive le Roi ! », la population, même ligueuse, ne criera plus : « Vive la Ligue ! ». Telles furent, nous le verrons plus loin, les vicissitudes par lesquelles devait passer Concarneau.

(Julien Trévédy).

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