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LES COATAULEM ou COËTANLEM ET LA CORDELIÈRE

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Un Corsaire breton au XVème siècle. — Construction de la Caraque LA CORDELIÈRE.

La famille des Coataulem (ou Coëtanlem) était, au XVème siècle, une des plus importantes de l'évêché de Tréguier. Elle a produit deux personnages remarquables, Jean et Nicolas Coataulem, Jean Coataulem était un corsaire qui devint la terreur des Anglais. En 1484, il vendit tous ses biens, et équipa une escadre avec laquelle il captura trois grands navires anglais, chargés de marchandises. Après cet exploit, il jugea prudent de s'expatrier. Il se retira en Portugal , où il fut très bien, et devint amiral du royaume. Il mourut dans sa nouvelle patrie. Mais il n'avait pas été oublié en Bretagne, où la légende embellit bientôt le récit de ses prouesses. Son neveu, Nicolas Coataulem, seigneur de Kéraudy, fut aussi un marin distingué. Il fut chargé en 1503 de la construction de la Cordelière. Il y dépensa 10,000 livres de sa fortune. En 1539, le fisc prétendit soumettre sa postérité au fouage, sous prétexte qu'il s'était occupé de marchandise. Ses descendants, parmi lesquels figurait le seigneur de Goezbriand protestèrent. Il y eut une enquête, où furent entendus dix-sept témoins. Tous s'accordèrent à déclarer que les Coataulem étaient une famille de vieille noblesse, et que Nicolas Coataulem ne s'était jamais occupé de marchandise que pour la construction de la Cordelière.

Les dépositions des témoins sont intéressantes par les détails qu'elles donnent sur la vie des grands seigneurs bretons du XVème siècle, et sur la construction de la Cordelière. Elles présentent une autre particularité curieuse en ce qui concerne Jean de Coataulem. Ce personnage, par son audace aventureuse, ses captures brillantes, et sa fortune extraordinaire en Portugal, avait fortement frappé l'imagination populaire. On voit qu'une légende commençait à se former sur son compte. La déposition de Gille Morice, seigneur de Kerbanec, est nette et précise. Elle donne des dates, des faits exacts et vraisemblables. Les autres dépositions sont vagues et merveilleuses. Le forban heureux y devient un héros sans reproche. Au lieu de s'exiler volontairement, pour mettre son butin en sûreté, il ne part qu'avec l'autorisation du duc de Bretagne, dont il reçoit de riches présents.

Cette pièce intéressante, qui nous a été communiquée par M. le comte de Goesbriand, comprend 66 pages. Nous nous bornons à en extraire les passages les plus importants :

« Hervé Le Curzou, escuyer, seigneur de Kervyquet, aigé de cinquante-neuf ans ou environ, comme il dict tesmoing juré sur les sainctes évangiles dire vérité, purgé de conseil, solicitacion et advertissement, recorde par sondict serment congnoistre damoiselle Margaritte de Coataulem, à présent dame de Kéraudy, fille de feuz Nicolas Coataulem et damoiselle Méaucze Le Borgne, seigneur et dame en leurs temps de Kéraudy, Tryénin Kérantour et Pénanrou. Et à iceulx seigneur et dame de Kéraudy ladicte Margaritte Coataulem, leurdicte fille, a succédé comme leur fille aisnée, principale héritière et noble, et à esdictes successions jouy principalement et noblement, et comme telle, elle a recueilli les biens, quelque soit. François de Goezbriand, son filz, à présent seigneur de Goezbriand, comme son curateur, a receu et recueilly lesdicts biens de sesdicts feuz père et mère. Laquelle Méaucze Le Borgne estoit, fille aisnée de la maison de Kerguydou, quelle maison de Kerguydou dict estre ancienne maison et noble. Et les seigneurs dudict lieu dict à sa congnoissance avoir veu se porter et gouverner comme les aultres nobles gentz, vivantz de leurs rentes et revenus comme les aultres nobles du quartier. Aussi dict que Catherine Calloet estoit mère audict feu Nicolas Coataulem, laquelle estoit fille de la maison de Lannidy, et sœur aisnée de Pezron Calloet, seigneur en son temps dudict lieu de Lannidy. Et aussi dict avoir congnue feu messire Jehan Calloet évesque de l'évesché de Tréguier, qui filz estoit aussi de ladicte maison de Lannidy. Et recorde avoir ouy dire avecques feu Jehan Le Curzou , père de cest parlant , que ledict lieu estoit l'un des ancyens lieux de tout le quartier, et que feu Yvon Coalaulem estoit mary de ladicte Catherine Calloet, père et mère dudict feu Nicolas Coataulem, quel Yvon estoit filz de une damoiselle Catherine Lehouat, quelle damoiselle estoit originelle de l'évesché de Cornouaille....

Dict aussi ce parlant avoir congnoissanze de Chrétien Coataulem , à présent seigneur de Kéravel, nepveu dudict feu seigneur de Kéraudy quel demeure en son lieu de Kéravel, en l'évesché de Léon, et congnoistre aussi le seigneur de Coatleau, de l'évesché de Cornouaille, nepveu filz de son frère dudict feu seigneur de Kéraudy. Queulx chacun en leur temps, eulx et leurs prédécesseurs s'entreportèrent et s'entre aimèrent comme parantz, démonstrantz les ungs aux aultres grant amytié et amour, ainsi que de vrays parantz le doibvent faire.... Oultre dict avoir veu ledict seigneur de Kéraudy et Jehan Coataulem son filz aisné ès monstres, armés, montés et bien acoustrés en ordre, comme les aultres nobles du quartier. Et mesures dict avoir veu ledict feu Jehan Coataulem en son temps faire lancze esdictes monstre par davant Françoys de Bron, chevalier, qui lors estoit cappitaine de la ville de Mourlaix, et commissaire pour recepvoir les monstres des nobles des jurisdictions dudict Mourlaix et de Lanmeur. Dict aussi que lesdicts Coataulem et chacun respectivement en leur temps dempuis la congnoissance de ce parlant, ont esté appellés ès monstres des nobles gentz et ont servy ès guerres et affaires du prince comme les aultres nobles... Et n'avoir jamais veu ne ouy dire que ledict feu Nicolas Coataulem, ne nul de ses prédécesseur eussent esté mis ne esgaillés en fouaige ne en aucun debvoir roturier. Ainz a ouy dire que lesdicts Coataulem estoient nobles, et la source principale d'eulx et leurs prédécesseurs et consanguins estre d'ung lieu noble appelé Keranrun en la juridiction de Lanmeur, quel lieu noble estoit et apartint audict feu Yvon Coataulem et après son deczois apartint audict feu Nicolas Coataulem sondict filz. Et comme filz aisné principal héritier et noble, ledict feu seigneur de Kéraudy recueillit la succession de sondict feu père.

Et que aussi, par raison de leur noblesse, lesdicts Coataulem respectivement et successivement sont et ont esté en possession d'avoir et porter intersignes et escussons d'armes, savoir : d'argent a une fleur de lys de sable, et une chauvette de mesme membrée de gueules, quelles ledict seigneur de Kéraudy en son temps portoit. Luy et lesdicts prédécesseurs sont en possession d'avoir lesdictes armes ès églises paroissiales de Plouézoch et Sainct-Mélaine-Plouéjehan, ès couventz des frères prescheurs, et à Sainct-Françoys, et en l'ospital de Mourlaix, en leurs chapelles y estantz esdictes églises. Ont et sont en possession de porter lesdictes armes tant es vistres que en bocze, de tout temps immérorial ès aultiers, tombes, accoudouers et escabeaulz faictz et construictz par lesdictz Coataulem et leurs prédécesseurs, dont n'est, mémoire du commencement ne du contraire. Et que par suite de sa noblesse, ledict seigneur de Kéraudy eust et recoupvrist grandes et grosses alianczes à ses filles, que aultres que noble homme comme est vroy semblable n'eust peu avoir : Sa fille aisnée à noble homme Guillaume de Goezbriand, seigneur en son temps de Goezbriand et de Rodaluz.... La seconde fille dudict seigneur de Kéraudy, appellée Catherine Coataulem dict ce parlant que fust mariée et espouse de noble homme messire Jehan de Kergariou, chevalier, seigneur en son temps de Kergariou..., et la tiercze et juveigneur fust aussi mariée et espousée avecques messire Guillaume de Trougoff, chevalier, seigneur de Kergadiou, que juveigneur estoit de la maison noble de Kerprigent.

Recorde oultre ledict depposant avoir veu ledict seigneur de Kéraudy à Kéraudy, à Pénanru, à Tryénin. Et en tout et partout, là où ledict seigneur de Kéraudy faisoit sa résidance, qui parle l'avoir veu vivre noblement, comme ung homme noble le doibt aire, vivant de ses rantes et revenus, tenant maison tous jours, maison ample, de bon estat et gouvernement. En en icelle en son temps hantoient et fréquantoient plusieurs gentz et personnages nobles, et y estoient receuz et recueillis, comme en maison de noble homme ; aussi les pouvres estoient bien venus et estoient aulmonés o nom de Dieu.

Dict aussi cedict parlant avoir congnue ledict feu seigneur de Kéraudy ès vingt ans prochains précédentz son deçoix, sans qu'il l'eust veu ne ouy dire qu'il s'en fust esmellé de nul traficque de marchandise, vivant de ses rantes et revenus comme les aultres nobles du quartier. Ne sceit cedict depposant si ledict seigneur de Kéraudy avoit point marchandé auparavant. Bien dict veu édiffier et construire, que disait estre par le commandement exprés du roy, la grande neff et carraque appellée la Cordelière, et faire toutes les mises ; ne sçeit s'il y fust récompensé ou non. Bien dict avoir ouy dire souvent que ledict seigneur de Kéraudy avoit perdu gros bien à cause de la mise que lui faillit faire touchant mectre en ordre ladicte neff. Aussi dict avoir ouy dire ce qu'il croit parfaitement, que ledict feu seigneur de Kéraudy fist ses debvoirs seigneuriaulx, tant au roy que aux seigneurs desqueulx il tenoit ses héritaiges, et avoit esté receu à homme. Et ce que cedict depposant a depposé, dict estre chose toute notoire et manifeste au quartier et mectes. Et est son record.

Guyon Kervet, noble homme, aigé de cinquante neuff ans ou environ, comme il dict, etc.... Dict avoir esté souvent en la maison dudict seigneur de Kéraudy, et avoir veu bon et honneste estat en icelle ; et y estoient receuz et recueillis et bien venus les gentilz hommes en tout et partout où ledict seigneur alloit en ses manoirs de Kéraudy, Tryénin et Pénanru..... Et comme noble homme ledict seigneur de Kéraudy amploya ses biens honnestement baillant leurs droictz à ses filles o leursclicts maris, et les entretenant comme requis estoit. Et après son deçoix lesdicts seigneurs et damoiselles ses filles firent faire comme convenable estoit jehener et ensevelir ledict seigneur de Kéraudy, et faire son obsèque et servicze honorablement, comme l'on est acoustumé faire à tels personnaiges et nobles du quartier.

Messire Yves Hamon, prebstre, aigé de cinquantecinq ans ou environ, etc.... Deppose veid ledict seigneur de Kéraudy construire par le commandement du roy et de la royne une nef et carraque sur le quay et haffvre dudict Mourlaix. A faire laquelle neff ledict seigneur de Kéraudy assembla et recueillit plusieurs sortes de gentz, tant d'esquipaige, pour servir en la mer, que des facteurs pour avoir et recoupvrir pour la construction et victuailler ledict navire, et pour recoupvrir harnois et pouldres et artilleries et aultres municions de guerre requis et ordonnés oudict navire. Et fist ledict seigneur de Kéraudy la mise ; ne sceit au montement de combien, ne sy ledict seigneur de Kéraudy fust récompansé ou non. Et que entour ledict navire ledict seigneur de Kéraudy usa, comme nécessaire luy estoit, et à sesdicts facteurs, trahin et trafficque de marchandise pour avoir et recoupvrir les choses nécessaires et utiles au faict de la construction dudict navire. Et autrement ne veid ne ouyt que ledict seigneur de Kéraudy se fust esmeslé de traffique d'icelle marchandise, fors par sesdicts facteurs, à apareilier les choses nécessaires, et faire et fournir les poyements et debvoirs à ce requis. Et paravant le déçoix dudict feu Nicolas Coataulem, seigneur de Kéraudy, et vingt ans auparavant son déçoix, deppose il lui parle, qu'il avoit délaissé et obmis à porter ledict faict et traficque de ladicte marchandise, usant de sa continuelle noblesse, demeurant hors ville et bourgs, hantant les nobles du quartier, et par iceulx receu, salué, honoré, chassant entre les auttres nobles, ayant toutz jours chiens de chasse, porté et tenu noble homme, vivant noblement de ses rentes et héritaiges... Et est son record.

Noble homme Phelippes Le Lagadec, demeurant à Mourlaix, aigé de cinquante-sept ans ou environ, comme il dict, etc…. Dict avoir veu ledict Çoataulem ayant la charge de la construction de la grande neff et carraque appelée la Cordelière, à faire laquelle il employa plusieurs sortes de gens et facteurs, pour parvenir à recoupvrir et avoir les choses requises et nécessaires pour la construction de ladicte neff, que pour les victuailles et fournissement des vivres, harnois et artillerie, pour l’accomplissement et envoy dudict navire, et pour recoupvrir les municions de ses pouldres et choses à ce requises. Et lors ouyt cedict depposant notoirement et depuis que en la construction de ladicte neff et fournissement des affaires autour icelle, ledict Coataulem avait presté de dix mille francs et plus ; et que incontinent que ledict navire estoit prest, muny et garny de toutes victuailles par le commandement desdicts feux roy Louys douzième et la royne Anne, que Dieu absolve, fut conduict par un cappitaine depputé par lesdicts seigneur et dame en la mer du Levant.

Yvon Le Moal, noble homme, aigé de soixante ans ou environ..., que à faire lesdictes alianczes sesdictes filles ledict seigneur de Kéraudy employa son bien honnestement et par honneste gouvernement. Aussi dict avoir veu lesdicts seigneurs de Goezbriand, de Kergariou et de Kergadiou, ses gendres, faire audict seigneur de Kéraudy après son deczois, les enterrements et obsèques lors estant descents et convenables à noble homme, avecques les intersignes des armes de noblesse dudict seigneur de Kéraudy. Et depuis les a veus continuer et mecire à damoiselle Méaucze Le Borgne, après son déçoix , à ses dictes filles respectivement.

Oultre dict avoir veu ledict seigneur de Kéraudy ayant la charge de faire et construire par le commandement du roy et de la royne Anne, que Dieu absolve, la carraque appellée la Cordelière, et que pour la construction et édifiement d'icelle, et faire les victuailles de ladicte carraque, a ouy dire communément que ledict Coataulem perdit grant bien, et que en la construction de ce, et pour faires victuailles, fournissement de pouldres artilleries et toutes municions de guerre, et aussi de gentz pour l’esquipaige, pour conduire ladicte carraque, et en les propres coustz et despens dudict Coataulem. Et ouyt lors dire qu'il perdit troys à quatre mille francs et plus. Et ce dict savoir par ce que ledict Coataulem fust contrainct par longtemps entretenir autour dudict navire plusieurs gentz, et avoir et amployer facteurs et négociateurs pour parvenir à faire misement de ce que y estoit requis et que après, par le commandement desdicts seigneur et dame, ledict navire fust envoyé et conduict, jusques la mer du Levant.

Aussi dict avoir ouy dire notoirement que feu Jehan Coataulem ; prochain parant dudict seigneur de Kéraudy, qu’il estoit lors en armes en mer, ayant troys navires de guerre bien équippés et en bon ordre, print troys grosses navires angloises bien équippées ; qu’ils avoient faict procession en la ville de Bristo pour prier Dieu, affin de renconstrer ledict Coataulem, ce qu'ilz firent, et eust ledict Coataulem victoire, quelle ville de Bristol estdepuis plus pauvre que alors de ladicte prinse. Aussi dict avoir ouy pareillement que ledict Coataulem décéda admiral de Potugal, et que le roy lui avoit donné maisons et biens abondants pour vivre selon son estat, et avoir veu l’une desdictes maisons, quelle estoit en la ville de Lichebonne, appellée la maison de l’admiral Coataulem.

Guillaume Le Borgne, noble, aigé de quatre-vingtz cinq ans, ou environ, comme il dict, tesmoing juré sur les sainctes évangiles dire vérité, purgé de conseil, solicitation et advertissement, recorde congnoistre damoisselle Margaritte Coataulem, dame de Kéraudy, fille aisnée, principale héritière et noble de deffunctz nobles gentz Nicolas Coataulem et Meaucze Le Borgne, seigneur et dame de Kéraudy ; et à iceulx ladicte Margaritte avoir succédé et succède pricipalement et noblement; et avoir congneu demoiselle Catherine Calloet, sœur aisnée de noble escuyer Pezron Calloet, seigneur de Lannidy en son temps, et maistre d'hostel et gouverneur de la maison et seigneurie de Penhoat, et messire Jehan Calloet, en son vivant évesque de Tréguier : quelz et chacun se sont portés et gouvernés comme nobles gentz, chacun en son temps respectivement, et ainsi estoient et sont leurs héritiers respectivement censés et réputés notoirement et publiquement. Pareillement Yvon Coataulem, père dudict Nicolas, et Jehan Coataulem, son frère aisné auxquelz estoit mère damoiselle Catherine Le Houat de l'évesché de Cornouailles, quelz et chacun estoient et sont censés et réputés estre nobles et de noble extraction, régime et gouvernement noble. Et les a veuz chacun en son temps respectivement comme nobles se porter, régir et gouverner, et ainsi estre censés, tenus et réputés par tant de temps, qu'il n'est mémoire du contraire.

Deppose ledict depposant pour avoir ouy dire notoirement et publiquement que ledict Jehan Coataulem, oncle dudit Nicolas, frère aisné à son dict père, print service faire à son prince et au païs, qui pour le temps avoient guerre contre les Anglois, vendist tout le sien pour faire navires de guerre pour se employer au service de son prince et du païs encontre lesdicts Angloys : avecques lesqueulx navires, par moyen du soulday que sondict prince et son admiral pour lors lui donnèrent, fist grands dommaiges auxdicts Anglois, tant par prendre sur eulx navires et biens, brusler villes et placzes sur les rivaiges de la mer. Quoy voyantz iceulx du party du roy d'Angleterre, entreprindrent de faire armée royalle pour prandre ledict Coataulem ; ce que firent en la ville de Bristo. Et à ung jour entre aultres, ainsi qu'il est chose notoire, firent à toutz ceulx de ladicte ville de Bristô se mectre en oraison que le plaisir de Dieu fust qu'ilz eussent peu rencontrer en mer ledict Coataulem. Estant en veue de terre de ladicte ville de Bristô, visdrent ledict Coataulem et sesdicts navires, quel Coataulem, comme est chose notoire, remonstra à ceulx de son équippaige qu'il y avoit desdicts Anglois plus de cinq contre ung. A ce que aucuns de sondict equippaige lui dirent que myeux luy estoit de se retirer, ledict Coataulem les réconforta par dire que c'estoit à dur pas que victoire se gagnoit, et que moyennant luy tenir bon, eussent faict celuy jour service à leur prince et païs, de sorte que y aura mémoire. Et besoignèrent tellement qu'ilz eurent victoire desdits Anglois et amenèrent o eulx les navires desdicts Anglois, et allèrent contre ladicte ville de Bristô, et de forcze la prindrent, et la bruslèrent et pillèrent, et amenesrent la plus part des riches prisonniers audict païs de Bretaigne. Et peu après ouyt ledict parlant que ledict Coataulem avoit receu lettres d'avecques le roy de Portugal pour lors d'avoir guerre o les barbares, en luy mandant que s'il y vouloit aller luy, il l'eust faict son admiral. Dont ledit Coataulem vint par devers le feu duc François, que Dieu, absolve, et lui monstra ses lettres et à ceulx de son conseil, luy suppliant luy octroyer son congié, et lui bailla, comme l'on disoit lors communément, douze cents pieczes d’or. Et vesquit audict païs de Pourtugal en ladicte charge d'admiral par long temps, et eut grans biens, maisons, palais pour en disposer à son vouloir et plaisir…

Noble homme Richart Henry, seigneur de Ponthuet, aigé de quatre vingtz cinq ans, ou environ, comme il dict, etc., recorde par son serment..... Jehan Coataulem entreprint à faire des navires en l'aide du prince et du païs contre les Anglois ennemis pour lors auxdicts prince et païs, et de faict veid ledict Jehan Coataulem son équipaige en nombre des navires pour subvenir au dommaige que lesdicts ennemis vouloient faire au païs. Et ouyt après peu de temps dire et réputer notoirement que ledict Jehan Coataulem avoit eu victoire sur les ennemis dudict prince, et qu'il avoit prins en bataille, luy et son équipaige, ung grand nombre des navires au roy d'Angleterre, et entre aultres y avoit une navire nommée la Marie de Gracze, laquelle estoit du port de troys à quatre centz tonneaux, et à iceluy navire se dirigea ledict Coataulem avecques le sien navire, et par bataille de longue main continuelle, ledict Coataulem vensquict et eust victoire sur ledict navire, et par le moyen sur les aultres, queulx navires il contraignit s'enfuir et se retirer au port de Bristô en Angleterre. Et dict ce savoir pour l'avoir ouy dire notoirement de plusieurs mariniers de l'équipage dudict Coataulem. Et après avoir (abordé) audict port de Bristô, et avoir prins plusieurs biens dudict lieu, et faict plusieurs dommaiges en ladicte ville de Bristô, peu après obtint lettres du roy de Pourtugal demandant que iceluy Coataulem le vinst secourir contre les barbares, envers lesqueulx pour lors ledict roy de Pourtugal avoit guerre. Et incontinent après, ledict Jehan Coataulem se transporta, devers le duc François, que Dieu absolve, estant pour lors près de Henbont, en un château au seigneur de Guéméné, et lui monstra les missives dudict roy de Pourtugal, ensemble luy demanda congié et obéissance de naturalité, comme raison luy estoit, ce que luy fust lors concédé. Et, lors a ouy dire notoirement et publiquement avec ceulx, qui estoient avec ledict Jehan Coataulem desqueulx n'est à présént souvenant de leurs noms, que ledict seigneur avoit fait de ses propres mains ledict Jehan Coataulem chevalier. Et ordonnance et commandement d’icelluy et de son conseil fust délivré audict messire Jehan Coataulem la somme de douze cents piezes d’or, et o réservacion faicte audict Jehan Coataulem de revenir au service de son prince alors qu’il l’eust mandé. Et que depuis ledict temps, ledict Jehan Coataulem a vescu au royaume de Portugal admiral, et en eust maisons à playsance, et en icelluy país décéda, ce que dict estre tout notoire.

Aussi dict ce parlant que depuis a eu congnoissance dudict Nicola Coataulem, l'a veu se gouverner, régir et tenir noblement, et comme homme de condition noble, et a veu ledict Yvon Coataulem, Nicolas, et Jehan filz dudict et chacun en son temps respectivement servir aux ducs, princes, et roys. Signantement dict avoir veu ledict Nicolas servir de sa personne en ung voyaige et mandée de par le duc au voyaige de Saint-Aulbin, et sur le siége de Nantes, et en aultres plusieurs lieulx en Bretaigne, en garnisons, es monstres, lors et à la foys que les aultres nobles estoient demandés et appellés. Recorde cest parlant que au temps du duc Françoys, il veid ledict Coataulen porter et avoir la charge de plusieurs navires de guerre pour la defiancze du pais de Bretaigne, et que en la conduicte desdict navyres, il fist grands services, et fort agréables au duc et au païs. Et par sa puissance, et de ses navires et équippaiges, ledict Coataulem avictailla par deux foys le chasteau de Nantes, le syeige (sic) y estant. En forme que ledict chasteau et ceulx du païs y están resistèrent victorieusement contre leurs, adversaires et ennemis. Au moyen de quoy, et pour les bons services dudict Coataulem et ses gentz, le duc libérallement, en consideracion de ce, octroya et concéda noblesse asudict Coataulem et ses gentz.

Aussi dict que ledict Nicolas Coataulem fit construite et édiffier la carraque appellée la Cordelière au haffvre. (sic) et cay de Mourlaix, et icelle par le moyen des gentz que trouva et assembla fust mise sur et tout son appareil ; ce que ledict Coataulem fist faire à ses propres coustz et despens. Et après cedict parlant veid ledict Coataulem faire et aprester les victuailles et municions de guerre pour servir audict navire, ce qu'il fist par le commandement exprès de Jacques Guybé, lieutenant et capitaine pour le roy et la royne audict navire, ce que homme du quartier n'osoit entreprendre faire, à raison des grantz biens qu'il convenoit employer et faire avancze pour parvenir à la fin de ce ; et y perdit biens inestimables. Et par son moyen, ledict navire fust appareillé, et mis en la mer, pour entre conduict avecques autres navires de sa conduicte jusques à la mer du Levant. Et par le moyen de ce, ledict Coataulem fust en grande estimacion et en réputacion entre les grantz et nobles du pays.....

Et tout dempuis la congnoissance dud. Parlant, a veu ledict Coataulem se porter, tenir et gouverner en noble homme, sans que aucunement il ayct faict ne mené aucun train ne trafficque de marchandise. Et ce qu'il en a faict en temps fust et a esté en la despesche et fournissement de victuailles pour lesdicts navires et carraque respectivement. A faire quoy convint audict Coataulem se servir de plusieurs facteurs et négociateurs, pour recoupvrir et avoir lesdictes victuailles et choses requises, poier et amployer plusieurs deniers et grantz biens en plusieurs et divers par long temps et jusques à fournissement et entéririance de tout De quoy dict cedict parlant ledict Coataulem n'avoir esté récompensé, ainsi que l'on disoit communémentet notoirement...

Christophle de la Forest, noble homme, aigé de quatre vingtz et six ans ou environ, comme il dict, tesmoing juré dire vérité, purgé de conseil, solicitation et advertissement, examiné et enquis, recordé par son serment..... Dict ce parlant avoir ouy dire et tenir notoirement et publiquement que feu Jehan Coataulem, prochain parent dudict Nicolas, avoit esté en son temps belliqueux en la mer, et avoit esté en artilleries en grand municion de guerre, et qu’il avoit pour le duc faict en son temps plusieurs prouesses et vaillantises, et par raison de ce, estoit ledit Jehan Coataulem en estimacion grande et réputacion de noblesse. Tellement estoit réputé, qu’il estoit dict et censé notoirement roy et gouverneur de la mer, et qu’il n’avoit trouvé oncques en la mer son plus puissant ne son seigneur. Et par ces moyens, et les services desdict Coataulem ; iceulx et chacun d’eulx respectivement et successivement, ont esté demandés et employés par les roys, ducs et princes, et se sont portés en leur service debvement… Oultre dict avoir veu ledict Nicoles Coataulem avoir et porter la charge des avictaillements de la carraque appellée la Cordelière, et que esdits avictaillements, ledict Coataulem eust porté des biens inestimables, et qu'il n'a esté satisfaict ne récompansé à cause de ce à sa congnoissance ne ouye. Et ce dict savoir par entre souvént advertiz par ledit Coataulem de sadicte perte, et par plusieurs aultres grantz personnages.

Giles Moricze, seigneur de Kerbanec, aigé de soixante dix ans ou environ, comme il dict....... recorde avoir cogneu Nicolas Coataulem, seigneur de Keraudy en son temps, pour moult estimé toutz seigneurs, tant de la justicze que aultres seigneurs........ Recorde que environ l’an mil cinq centz ou quatre, le roy Louis douziesme et la royne Anne entreprindrent d'envoyer par la mer du Levant gentz de guerre à un lieu appelé Méthelin, que on dict estre environ Turquie, ne scest ce tesmoin de certain ou est ledict lieu appellé Méthelin, et que entre aultres y alla le cappitaine Jacques Guybé, qui estoit cappitaine des gentilzhommes de la royne, et que pour faire ledict voaige, ledict cappitaine eut la neff de la royne, qui fut appelle la Cordelière, qui etoit navire de six à sept cents tonneaulz. Et que pourtant que on ne trouvoit qui eust entreprins de faire la victuaille dudict navire, ledict Nicolas Coataulem seigneur de Kéraudy, qui estoit estimé homme de grand esprit et de grant conduicte, fust prié tant par ledit capitaine Jacques Guybé, que feu messire Olivier de Coetmen, lors grand maistre de ce païs et duché, de faire et mectre ordre en l'avitaillement dudict navire, ce qu'il fit, et comme on dict notoirement; il y perdit un gros nombre de biens, que le tesmoing ne sauroit à présent déclarer, comme il ouyt alors.

Oultre recorde qu'il a ouy dire comme chose notoire que Jehan Coataulem, prochain parant dudict Nicolas, fust homme moult preux et vaillant en la mer. Et pour ce déclarer, recorde ce tesmoing, que environ cinquante cinq ans y a, poy plus ou moins à ce que les Anglois faisant quelques offenses et pilleries sur ceulx de ce païs et duché, ledict Jehan Coataulem fist à ses propres coutz et despens, sans aide du duc Francoys, qui pour lors regnait, équipper et mectre sur et en ordre des navires, dont l’une estoit appellée la Cueillère, aultre appellée la Signe, avecques aultres dont ce tesmoing ne sceit nommer, et ainsi se mist sur mer, ayant o luy son lieutenant, en qui du tout se fioit, un gentilhomme nommé Alain Plouerras, filz juveigneur de la maison de Plouerras en Tréguier. Et que dedans peu de temps amprès les Anglais furent advertis, et avoient pour lors touz grandz navires prests pour mectre en la mer, troys grands navires prests pour mectre en la mer, troys gands navires, l’une appellée la Trinité, navire de cinq cents tonneaulz, l’aultre appellée Marie de Gracze, navire de deux à troyz centz tonneaulx, et de l’aultre n’est ce tesmoing souvenant de son nom, queulx troys navires angloises estoient équippés de double équippaige munitz et garnitz d’artllerie et de toutes manières de brectz. Aussi avoient marchandises de grandes richesse. Et encore fust bruict en après que les cappitaines desdictes navires angloises avoient faict célébrer une messe devant l’ymaigne de Monseigneur Saint-Georges, pour que Dieu leur eust donné l’eur de renconstrer ledict Jean Coataulem en la mer, ce que Dieu leur donna le lendemain amprès, estre partis de leur hafvre. Et s’entrerenconstrérent environ veue et demye de la terre de Bretaigne, et vindrent lesdicts Anglois sercher et assaillir ledict Jehan Coataulem et ses gentz, quel les combastit pour la première venue par l’espacze de cinq à ssix heures. En après demandèrent les Anglois trefves pour deux heures, ce que leur fust octroyé par ledict Coataulem et la trefve à fin recommencèrent la bataille. Et en fin ledit Jehan Coataulem et ses gens y entrèrent de plein assault, et les prindrent et menérent, et de peur que ce n’eust esté cause de mouvoir la guerre entre le duc et le roy d’Angleterre, ledict Coataulem se disant forbanny de Bretaigne, alla o touts lesdict navires au roy de Portugal, quel les receust à très grand joye, et le fist son admiral. Et en oultre luy bailla en terre ung chasteau, et une demeure pour et contre la fin de sa vie et vieillesse, là où il mourust. Et tout ce cy dict ce tesmoing savoir dés ledict temps de cinquante cinq ans, par avoir parlé et ouy parler les mariniers qui estoient o ledict Coataulem audict faict, et desquels y a ung encore, en vye, nommé Jehan lequel demeure en la paroisse de Plouémilieau, en l’évesché de Tréguier. Et est son record.

(Ant. Dupuy - archives de Keraoulas). 

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