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L'OCCUPATION ET LES FOURNITURES AUX PRUSSIENS EN BRETAGNE EN 1815

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L'OCCUPATION ET LA QUESTION DES FOURNITURES DANS L'ARRONDISSEMENT DE RENNES.

 

Pendant que du Petit-Thouars et les maires de son arrondissement se débattaient au milieu des embarras créés par la question des approvisionnements et s'efforçaient de satisfaire à toutes les exigences prussiennes, le préfet et la municipalité de Rennes luttaient contre des difficultés semblables et devaient obéir à des injonctions plus rigoureuses encore.

Le 8 septembre, la préfecture transmettait au maire cet avis : « D'après les ordres de M. le Préfet et de la commission le service des vivres par réquisition doit commencer le 10 de ce mois. Les denrées de réquisition seront versées dans les magasins militaires et distribuées par les agents de la commission » [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaine, 10 R 1].

Mais les soldats prussiens étaient peu disposés à se contenter de leur ration quotidienne, pourtant bien suffisante : des vols journaliers se commettaient au magasin des vivres et menaçaient de se transformer en un pillage général. D'Allonville représente au général Tauentzien la nécessité d' « envoyer sur-le-champ un officier supérieur à la tête d'une force imposante pour arrêter les désordres et maintenir les magasins fermés ;... que chaque jour une garde nombreuse soit spécialement chargée de veiller à ce qu'aucun militaire prussien ne puisse entrer dans les magasins occupés par les préposés français » que les distributions de vivres soient faites par un garde-magasin prussien [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaiine, 10 R 1 ; lettre du 11 septembre].

Rien n'indique qu'il ait été fait droit à cette demande du préfet. Par contre, le lendemain même du jour auquel M. d'Allonville signalait à Tauentzien les pillages de ses soldats, il recevait la note que voici « M. le sous-préfet de Rennes. Il résulte des rapports qui viennent d'être faits à la commission des subsistances des troupes prussiennes que les magasins manquent de viande, de cidre, de beurre et de légumes. La ville de Rennes est exposée à une exécution militaire s'il n'est pas pourvu sur-le-champ aux distributions » [Note : Arch. d’Ille-et-Vilaine, 10 R 1 ; lettre du 12 septembre, non signée].

De plus, les Prussiens trouvaient que le pain n'était pas de qualité supérieure et que sa blancheur laissait à désirer. D'Allonville s'en excuse en alléguant la nature des grains de la dernière récolte, et il ajoute que « des ordres sont donnés pour compenser cela par un blutage plus parfait » [Note : Arch. d’Ille-et-Vilaine, 10 R 1 ; lettre du 13 septembre] ; qu'en attendant l'envoi, par les autres départements bretons, de pommes de terre et de légumes secs, on les remplacera par des farines [Note : Arch. d’Ille-et-Vilaine, 10 R 1 ; lettre du 13 septembre]. En conséquence il requiert Sollier, préposé à la distribution des vivres de « donner des ordres pour qu'il soit fait, dans l'un des quatre moulins mis à votre disposition, une quantité de gruau suffisante pour être distribué à la garnison de Rennes et aux autres cantonnements voisins, » (Bruz, Mordelles, Montfort, etc.) [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaine, 10 R 1, 13 septembre].

Pour alléger la tâche de la commission des subsistances, le préfet écrit à Vatar, négociant de la ville : « La commission désire que vous vous chargiez de garder les fonds mis à sa disposition et d'acquitter, sur les mandats qu'elle délivrera, les dépenses qui seront faites pour le service qui la concerne ». Vous êtes si bien versé dans la tenue des comptes et deniers que vous n'aurez pas trop de dérangement, je l'espère [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaine, 10 R 1, 15 septembre].

De son côté la commission départementale fit appel aux sentiments de solidarité de celle du Finistère, dans une des lettres les plus intéressantes que nous ayons à transcrire : « C'est avec peine que nous vous voyons persister dans la résolution... de ne faire contribuer votre département... à la nourriture des troupes prussiennes stationnées dans le département d'Ille-et-Vilaine que dans la proportion de 6,000 rations et 1,200 chevaux au lieu de 8,000 rations et 1,200 chevaux qui avaient été fixés par le général en chef prussien... Nous pourrions nous borner à vous répondre que les ordres qui émanent de l'autorité prussienne sont absolus et ne souffrent pas de discussion ; nous l'éprouvons tous les jours. Il ne nous appartient donc pas plus de diminuer le nombre des rations qui vous a été assigné qu'il ne nous appartient de l'augmenter. Mais cette manière de trancher la question ne peut pas plus nous convenir qu'à vous.

Animés des mêmes sentiments de justice, nous devons faire nos efforts pour alléger en le partageant un fardeau qui écraserait certainement chacun de nos départements s'il était abandonné à ses propres ressources. Dans les circonstances actuelles, votre intérêt devient le nôtre.

Vous fondez principalement votre demande [de réduction] sur le nombre de troupes que vous supposez stationnées dans le département. Lors même que ce nombre serait tel que vous supposez — ce que nous n'avons ni les uns ni les autres le moyen de vérifier — vous remarquerez qu'il faut plus de 8,000 rations... à cause de l'exagération du nombre des bons, que nous n'avons pu faire réduire malgré toutes les conférences tenues à ce sujet, à cause de cette multitude de valets, de parties prenantes qui ne sont pas comprises dans l'effectif des hommes sous les armes.

Ajoutez… que nous avons une multitude d'autres charges qui nous accablent… Le département est obligé de fournir à l'entretien des troupes qui traversent le département, sans y séjourner. Cette seule dépense s'est élevée pour la ville de Fougères à 51,000 rations en un jour. La ville de Rennes nourrit tous les officiers ; elle dépense 2,000 francs par jour pour la table des généraux ; elle fait réparer les voitures, habillements, chaussures ; elle paye la ferrure, les médicaments, les aménagements des casernes, et une multitude d'autres objets... dont la masse s'élève à une somme effrayante.

Nous vous présenterons, Messieurs, une dernière considération » : Si l'armée prussienne ne trouve plus à subsister dans notre département — ce qui ne tardera pas, si vous nous refusez le secours demandé — elle ira « chez vous chercher un pays encore intact, où elle saura trouver en abondance tout ce qui est nécessaire à ses besoins » [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaine, 10 R 1, lettre du 18 septembre. — Voir dans Vaulabelle, ouvrage cité, note 2 des pages 385-386, l'énumération des objets exigés par les Bavarois dans le département des Vosges ; on y trouve jusqu'à 45,000 aunes de galons de laine, 115,000 douzaines de boutons, etc.].

Enfin des denrées furent expédiées pour l'Ille-et-Vilaine, par les Côtes-du-Nord, la Loire-Inférieure [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaine, 10 R 1], et sans doute aussi par le Morbihan et le Finistère.

Quel fut le coût total de l'occupation dans notre département, du moins quant aux dépenses régulières ? Il nous est impossible de répondre à cette question, dont la solution s'imposait naturellement à la fin de cette partie de notre travail; nous n'avons pas non plus de chiffre approximatif, même pour le chef-lieu : au mois de mars 1816, le préfet ayant demandé au maire le compte de la dépense totale pour Rennes, le maire lui rappela que M. Bugniard, chargé de ce compte, l'avait remis jadis à la préfecture, avec de nombreuses pièces à l'appui ; que de plus, M. Louis, receveur de la ville de Rennes « avait confié au comité de liquidation de l'arrondissement ses registres de comptabilité » [Note : Arch. de Rennes, D 4/6 reg., f° 151, v°]. Mais, ni aux archives départementales ni dans celles de la ville nous n'avons retrouvé ces pièces si intéressantes. Elles durent être, dès cette époque, détruites ou complètement égarées par des bureaucrates ; cela ne témoigne ni de l'esprit d'ordre ni de l'intelligence, mais l'historien a trop souvent à constater des faits de ce genre pour en être bien surpris.

A défaut d'un total, voici le détail de deux séries de dépenses importantes :

1° Réquisition à Rennes, du 9 au 22 septembre [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaine, Z 350]. Vendeurs : MM. Gaultier, Poret, Salmon, Cauvin, Dupuy le Bonhomme, Després, Dupuy-Fromy, Mme Billot. Plus quelques réquisitions à Pleurtuit et à Saint-Briac.

19 futailles et 2 pièces eau-de-vie à 19 degrés, contenant 844 veltes et demie [Note : La velte étant de 4 pots ou 8 pintes mesure de Paris et la pinte de Paris valant en mesure décimale 0 lit. 931, les 844 veltes 1/2 valaient 6,289 litres 83 centilitres].

11 bœufs, 127 vaches, 7 barils de lard salé pesant net 630 kilog.

76 sacs pois verts, poids net 7,948 kilog.

10 sacs gourganes [fèves des marais], poids net 1,120 kilog.

80 sacs avoine, pesant net 6,400 kilog.

2° Bordereau des sommes dues pour dépenses régulières et par marché, faites pour nourriture des troupes prussiennes dans l'arrondissement [de Saint-Malo]… [Note : Arch. d'Ille-et-Vilaine, Z 350].

Entrepreneurs ; Lieu de fournitures ; Somme due à l'entrepreneur.
- Salmon ; Dol ; 57,744 f.
- Pasquier, maire, représentant les entrepreneurs avant le marché Salmon ; Dol ; 21,755 f. 05
- Le Corvaisier, maire, représentant la commune ; Combourg ; 16,148 f.
- 6 Yvon, maire, représentant les fournisseurs de Pleine-Fougères, Vieux-Viel, Trans et Sougéal ; Pleine-Fougères ; 8,675 f. 60 [Note : « Observation : Il n'y a point eu de marché passé à Pleine-Fougères ni dans les communes voisines, les fournitures ayant été faites au moment du débordement des troupes de la ligne de résidence. Mais les maires sont convenus de faire ces fournitures au prix de la ration de Dol, ce qui est avantageux. »].
TOTAL ....... 104,322f. 65.

(Léon Vignols).

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