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L'imprimerie Malassis de Brest

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Le nom de Malassis est depuis longtemps associé à l’imprimerie. Ils ont essaimé en Normandie et en Bretagne. Les Malassis sont originaires de Normandie. On connaît par exemple les livres sortis à partir de 1603 des presses des Malassis de Rouen. Au XVIIème siècle siècle, deux membres de cette famille quittaient leur ville natale et l'un des deux, Romain Malassis, passa de Normandie en Bretagne.

A BREST - LES MALASSIS (1685-1813)

Il y avait près de deux siècles que la merveilleuse invention de l'imprimerie — le plus grand événement de l'histoire, a dit Victor Hugo (Notre-Dame de Paris, livre V, chapitre 2) — était implantée sur le sol armoricain, quand elle fit son apparition dans notre ville de Brest. C'est ainsi que les premières presses bretonnes se rencontrent à Bréhand-Loudéac (1484), Rennes et Tréguier (1485), Nantes (1492), Saint Malo (1554), Morlaix (1557), Vannes (1589), Dinan (1593), Quimper (1620).

L'imprimerie ne fut établie à Brest que vers 1680, c'est-à-dire à l'époque où notre cité fut réellement constituée et mérita, tant par l'étendue de son commerce que par le chiffre de sa population, le nom de ville que lui avait donné Henri IV dès 1593.

Brest ne connut donc point les origines de l'art typographique et les savantes monographies qui leur ont été consacrées sont muettes, ou à peu près, sur l'imprimerie brestoise. 

Note : Les principaux ouvrages publiés sur l'imprimerie en Bretagne sont :

- Toussaint Gautier. Histoire de l'imprimerie en Bretagne. Rennes, F. Péalat, 1857 ; in-8°, 62 pp. (Etude qui parut à Rennes en 1857 dans le journal le Progrès ; le tirage à part n'a été que de 50 exemplaires).

- Dom François Plaine. Essai historique sur les origines et les vicissitudes de l'imprimerie en Bretagne. Nantes, A.-L. Morel, 1876 ; in-4°, 43 pp.

- L'imprimerie en Bretagne au XVème siècle. Etude sur les incunables bretons, avec fac-simile contenant la reproduction intégrale de la plus ancienne impression bretonne. Nantes, Société des bibliophiles bretons, 1878 ; in 4°, 154 pp.

- A. de la Borderie. — Archives du bibliophile breton. Notices et documents pour servir à l'histoire littéraire et bibliographique de la Bretagne. Rennes, Plihon, 1880-1885 ; 3 vol. in-12.

Les documents, d'ailleurs, manquent pour cette étude. Nous savons, en effet, que les imprimeurs, libraires et papetiers de Brest formaient, à l'égal des autres corps de métiers, une corporation dont les armes étaient : D'azur à un livre fermé d'or

Brest et ses imprimeurs : la famille Malassis

mais cette compagnie n'a, laissé après elles aucunes archives, aucun registre de ses délibérations (Note : Les archives municipales ne conservent que les registres de cinq Corporations celles des Perruquiers, des Cordonniers, des Menuisiers, des Orfèvres et des Serruriers).

Cette modeste étude nous permettra de rappeler la vie et les travaux de l'une des plus vieilles et des plus honorables familles brestoises : Les Malassis.

Les imprimeurs d'autrefois jouissaient, en effet, auprès de leurs concitoyens, d'une profonde estime et d'une grande considération. Des mesures étaient prises, d'ailleurs, pour que la corporation ne reçut dans son sein que des sujets moraux, instruits et capables. Il fallait « être congru en langue latine et savoir lire le grec » (Règlements de 1649, 1667 et 1777) ; avoir subi des examens et des épreuves sur toutes les parties de la librairie et de l'imprimerie ; enfin, avoir fait quatre années d'apprentissage et, de plus, avoir servi les maîtres en qualité de compagnon pendant trois autres années.

D'après l'ordonnance de 1686, les imprimeurs devaient faire imprimer les livres « en beaux caractères, sur de bons papiers et bien corrects ». Quiconque était empêché de vaquer à la correction de ses ouvrages, devait avoir des correcteurs capables ; et, ajoute le règlement de 1723, « les feuilles mal corrigées par eux seraient réimprimées à leurs frais ».

L'ordonnance de 1723, qui fut rendue commune à toutes les villes du Royaume par arrêt du 2 mai 1744, fut la charte de l'imprimerie et de la librairie pendant soixante-dix ans, c'est-à-dire jusqu'à l'époque où la Révolution, en abolissant les maîtrises et les corporations, proclama la liberté entière de l'industrie.

Ces anciens règlements, à l'ombre desquels l'imprimerie resta si longtemps prospère et respectée, entretenaient la dignité du corps ; ils avaient surtout pour effet d'inspirer à chacun, de l'estime et de l'attachement pour sa profession. Aussi, voyait-on le titre d'imprimeur se perpétuer dans les familles et nous en trouvons en Bretagne de véritables dynasties.

Tels : les Vatar à Rennes, les Mareschal à Nantes, les Galles et les Moricet à Vannes, les Hovius à Saint-Malo, les Doublet et les Prudhomme à Saint-Brieuc, les Ploesquellec à Morlaix, les Malassis à Brest.

Les Malassis sont originaires de Normandie. Dès 1642, Clément Malassis imprimait à Rouen les Décades historiques de Jean-Pierre Camvs evesque de Belley, « dans l'Estre Nostre Dame, près les Changes ». Au XVIIème siècle siècle, deux membres de cette famille quittaient leur ville natale.

Le premier : Jean Malassis, né à Rouen vers 1630, s'établit à Alençon en 1660 et y fit souche d'une famille d'imprimeurs dont le dernier représentant fut Auguste Poulet-Malassis, mort le 11 février 1878, un des noms les plus illustres dans l'art de la typographie. C'est en parlant de ce distingué bibliophile que M le comte Gérard de Contades écrivait dans le Livre (mars 1884) : « Depuis trois siècles les Malassis imprimaient à Alençon, à Brest et à Rouen des livres de religion, de philosophie et d'amour. Pas plus que bon sang, bonne encre ne peut mentir, et quand, le 16 mars 1825, Auguste Poulet-Malassis vint au monde à Alençon, il naquit imprimeur comme l'on naît poète ».

Le second : Romain, passa de Normandie en Bretagne.

I — ROMAIN MALASSIS naquit à Rouen en 1639 ; il fut reçu imprimeur dans cette ville, à l'âge de 30 ans et, en 1673, il y imprimait une édition d'Horace « à l'enseigne du Grand Livre près du Portail des Libraires ». Quelques années plus tard, il vint s'établir à Quimper, où il fit paraître en 1679 :

DICTIONNAIRE
ET
COLLOQUES
FRANÇOIS-BRETON

Traduit de François en Breton par
G. QUIQUER, natif de Rofcof;
Livre tres-neceffaire pour l'intelli
gence des deux Langues.
Reveu, corrigé et augmenté en
cette dernière Edition.

A QUIMPER-CORENTIN

chez ROMAIN MALASSIS, imprimeur

et libraire du Diocèse. 1679.

D'après Dom François Plaine, Romain Malassis n'aurait fait qu'un court séjour à Quimper et serait venu se fixer dans notre ville de Brest vers 1680. A cette époque, l'imprimeur du Roi à Brest était : OLIVIER DRILLET [Note : La famille Drillet appartenait tout entière à cette profession et formait des alliances avec les autres imprimeurs du pays, car un nommé Nicolas du Brayet, imprimeur à Morlaix en 1647, avait pour épouse Roberte Drillet, probablement sa soeur, ou parente au moins du Drillet de Brest (Fleury : Notes historiques). Anne Drillet était mariée au sieur De la Frégère, imprimeur à Morlaix en 1675. Olivier Drillet épousa Catherine Malassis, à Quimper, le 10 février 1681] dont nous connaissons les Lettres patentes de Louis XIV, données à Versailles au mois de juillet 1681 [Note : Ce document conservé aux Archives municipales (AA2) est imprimé sur papier grand format in f° avec en tête. On lit au bas : A Brest, de l'imprimerie, d'Olivier Drillet, imprimeur du Roi, 1681], qui réunirent Brest et Recouvrance en une seule communauté. De plus, Romain Malassis est porté en 1686 « demeurant ordinairement à Quimper », dans l'acte de son second mariage avec Fiacre Puel, que nous reproduisons ci-dessous in-extenso : « L'an mil six cent quatre-vingt six, le dix-huitiesme d'aoust, se sont présentés devant moy soussigné, prêtre de la communauté ecclésiastique de Recouvrance, nobles personnes Romain Malassis, imprimeur de Monseigneur l'illustrissime et révérendissime evesque de Cornouaille et du Roy, demeurant ordinairement à Quimper, et damoiselle Fiacre Puel, fille de feu François Puel et damoiselle Marie Le Menguy, sa veuve ; résidante depuis longtemps en cette paroisse de Quilbignon, pour contracter le sacrement de mariage par paroles du présent, auxquels j'ai donné la bénédiction nuptiale, en présence de nobles personnes Bernard Puel sieur du Rocher et de laditte damoiselle Marie Le Menguy, Guillaume Arno, maître peintre, ayant en mains la permission. dudit Monseigneur Evesque et le consentement de Monsieur le Recteur de Quibignon, avec les certificats des bannies ».

Romain Malassis ne vint donc qu'en 1686, s'établir définitivement à Brest dans une Maison de la rue de Seuil (au n° 65 de la Grand'Rue). Son imprimerie, toutefois, existait dès 1685, car cette année-là, il sortait des presses de Romain Malassis un ouvrage ayant pour titre :

Brest et ses imprimeurs : la famille Malassis

Les armes royales représentées dans le fac-similé ci-dessus sont, avec les emblèmes maritimes et, le plus souvent, de simples fleurons, les signes typographiques que l'on rencontre presque toujours sur les impressions des Malassis ; rarement, on y voit la marque de l'imprimeur que nous reproduisons ci-dessous :

Brest et ses imprimeurs : la famille Malassis

Vers la même époque, un autre typographe : GUILLAUME CAMAREC, attiré par l'Intendant de la Marine et aussi par le développement que prenait notre nouvelle cité, ne tarda guère à venir s'y installer [Note : Guillaume Camarec vint s'établir à Brest vers 1689, « pendant la guerre qui précéda la paix de Ryswick » (Archives d'Ille-et-Vilaine C 1462). Epoux de Faustine Robert? il eût entr'autres enfants : Antoine, né à Brest le 26 Janvier 1701, imprimeur de la Compagnie des Indes, lors de son mariage, le 10 septembre 1724, avec Jeanne Sevaux. Il mourut à Brest, le 8 décembre 1727. Anne Camarec était mariée à François de la Croix, marchand libraire à Brest, qui mourut le 20 janvier 1692] concurremment avec Malassis, et à y fonder un établissement rival du sien, dans la rue du Quai, en face de l'Intendance qui se trouvait autrefois au bas de la Grande Rue (Note : Camarec demeurait sur l'emplacement des maisons qui portaient les numéros 106 et 108 de la Grand'Rue, au moment de leur démolition, en 1866, pour la construction du boulevard de la Marine).

Les archives municipales possèdent de cet imprimeur les Statuts réformés de la corporation des Cordonniers, portant la date de 1699. C'est une belle feuille de parchemin intitulée : CONFIRMATION DE STATUS. — A Brest, de l'imprimerie de Guillaume Camarec, imprimeur et libraire de la Marine, vis-à-vis la maison du Roy. En tête, sont les armes de France soutenues par des anges placés dans des nuages ; une grande lettre ornée, un L, commence la première ligne ; on y voit un personnage nimbé placé sur un fond parsemé de fleurs de lys.

Romain Malassis, avant l'arrivée de Camarec, était le seul imprimeur de la marine. « Il a vendu et gagné ce qu'il a voulu, écrit l'intendant Desclouzeaux à M. de Pontchartrain (Lettre du 31 mai 1694 – Archives de la Marine, fonds Levot), à imprimer et à fournir les registres qui sont nécessaires pour le service de la marine ; ayant reconnu que nous dépendions absolument de lui, j'ai obligé un autre imprimeur à venir s'établir ici et, dès l'année dernière, les ouvrages et fournitures de ces sortes de marchandises ayant été mises au rabais, j'ai réduit et diminué le prix très considérable, de manière que l'on achète présentement le tiers que l'on en faisait quand le sieur Malassis était seul à fournir ; aussi je prends la liberté de dire à Monseigneur qu'il vaut beaucoup mieux pour l'intérêt du Roi qu'il y ait plusieurs qui fournissent qu'un seul ».

Malgré toutes ses tentatives pour rester l'unique adjudicataire des travaux de la marine, Malassis dut accepter la concurrence de Camarec.

Il mourut le 9 septembre 1705, à l'âge de 66 ans, laissant une veuve, Jeanne Boucher, et cinq enfants dont Romain qui lui succéda, fils aîné de son premier mariage avec Catherine Burelly.

En 1704, un arrêt du Conseil du 21 juillet, avait fixé le nombre dés imprimeurs dans toutes les villes du royaume et une seule imprimerie devait fonctionner à Brest.

A la mort de Malassis, et en vertu de ce règlement, Camarec voulut seul exercer sa profession ; mais sur les instances de l'intendant de la marine, Jeanne Boucher fut autorisée par M. de Pontchartrain à continuer le commerce de son mari ; elle l'exerça jusqu'à sa mort, le 28 avril 1711, et fit paraître entr'autres ouvrages :

- An Imitation Jesus-Christ hon Salver Binignet. Lequet e Brezonec a nevez flam, gant Euzen Roparz. — E Brest, e ty intavez Malassis, 1707, in-8°.

- Observations curieuses sur les phénomènes extraordinaires de médecine et de chirurgie, par Joseph Nolet. Brest, Vve Malassis, 1711, in-12.

 

II — ROMAIN MALASSIS, fils aîné de Romain et de Cathe­rine Burelly, succéda à Jeanne Boucher.

De bonne heure, il avait quitté la maison paternelle et, imprimeur des armées navales, il assistait, en 1692, au désastre de la Hougue ; en 1701, il suivait l'escadre du vice-amiral de Châteaurenault et, l'année suivante, perdait son matériel d'imprimerie [Note : Le 19 mars 1710, Malassis adresse un placet à M. de Pontchartrain, dans lequel il sollicite « le paiement d'une somme de 830 livres pour ouvrages d'imprimerie faits à la suite de l'escadre commandée par M. de Châteaurenault en 1701, et le remboursement du prix de son imprimerie qu'il a perdue à Vigo » (Archives de la Marine. Fonds LEVOT)] au combat de Vigo ; en 1704, il servait sous les ordres du comte de Toulouse, à la bataille de Malaga.

Mort à Brest, le 4 mai 1725, la direction de l'imprimerie fut confiée à sa veuve Anne Héraud, dont nous connaissons :

- Liste générale des officiers de la marine suivant leur rang, ancienneté et leur département, du mois d'avril 1729. — A Brest, chez la veuve de R. Malassis, imprimeur de la marine et des armées navales de Sa Majesté, in-8°. 

- Projet de mâture et de voilure. Brest, veuve R. Malassis, 1731, in-4°.

En 1730, le Roi est informé que l'imprimerie et, la librairie en Bretagne sont « dans un grand désordre ; dans quelques endroits le nombre des imprimeurs excède celui qui est fixé par l'arrêté de 1704 ; la plupart exercent sans y être autorisés, malgré la disposition des règlements ». L'intendant prescrit une enquête sérieuse, et voici les renseignements que fournirent les subdélégués de notre région : « A Quimper, il n'y a qu'un seul imprimeur qui est nommé Jean Périer (Note : Jean Périer, sr. du Camoin, s'établit à Quimper en 1694, en qualité d'imprimeur. Son fils, Simon-Marie, échevin de la communauté, lui succéda ; il laissa deux filles, dont l'une épousa Romain-Nicolas Malassis, et l'autre, Marin Blot, nommé « seul imprimeur à Quimper » par arrêt du Conseil du 11 août 1771. Marin Blot mourut en 1777 et sa veuve épousa Yves-Jean-Louis Derrien, libraire à Brest), lequel après avoir été obligé d'essuyer plusieurs procédures à lui intentées de la part du, sieur le Blanc fils qui prétendait seul faire l'imprimerie, obtint un arrêt en sa faveur en date du 24 février 1716. A Landerneau, nous n'avons libraire ni imprimeur ; mais simplement un seul méchant relieur qui n'est assurément pas dans aucun cas de commerce ».

Le subdélégué de Brest explique la présence des deux imprimeries : Veuves Camarec (Note : Guillaume Camarec était mort le 8 décembre 1727) et Malassis et signale « un marchand de livres », nommé Prudhomme [Note : Mathieu Prudhomme, marchand-libraire, était « marchand-mercier, âgé de 30 ans et à Brest depuis quatre ans », quand il épousa Anne Floch, le 17 août 1699 (Registre de la paroisse des Sept Saints). - Un nommé François Bully était libraire à Brest, en 1693 ; il signe comme tel, le 14 octobre, au mariage de Marie-Magdeleine Malassis], installé depuis 1708, dans la Grand'Rue, non loin de l'imprimerie Malassis, « sans qu'il paraisse avoir d'autres titres que la possession » (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 1462).

La veuve Camarec mourut le 31 décembre 1735 et son Imprimerie de la rue du Quai fit place à la librairie de Jérôme Derrien (Note : Jérôme Derrien, né à Brest le 26 mars 1699, était fils de Jean Derrien, menuisier, et de Claudine Le Dréo. Reçu libraire par sentence du 24 mai 1735, il tint boutique, de 1736 à 1789, dans la maison Camarec et, en 1740, il s'installa dans le bas de la Grand'Rue), reçu par le lieutenant général de police maître relieur en 1733, et marchand-libraire l'année suivante. Le règlement de 1704 fut alors appliqué et le privilège unique d'imprimeur à Brest fut accordé à Romain-Nicolas Malassis. 

 

III — ROMAIN-NICOLAS MALASSIS, fils de Romain et d'Anne Héraud, naquit à Brest le 5 septembre 1714. A peine âgé de 20 ans, il se maria le 5 mai 1734 avec Julienne Allain et, devenu veuf, contracta un second mariage le 19 novembre 1743 avec Marguerite Crozian.

Dès cette époque, les Malassis figuraient parmi les premiers notables de Brest. Romain-Nicolas fut nommé garde-scel de la communauté en 1748 ; les élections municipales du 12 décembre 1753 l'élevèrent au rang de premier conseiller ; en 1755, il était directeur de l'hôpital et le 17 décembre 1756, il occupait les fonctions de procureur-syndic, qui, après celles de maire, étaient les plus importantes de nos anciennes municipalités.

Romain-Nicolas exerçait cette charge sous la mairie Martret de Préville, quand éclata la terrible épidémie qui ravagea Brest de novembre 1757 à mars 1758.

Le 21 décembre 1757, il assistait à l'assemblée générale de la communauté réunie pour fixer les mesures sanitaires, et huit jours après, il tombait, l'un des premiers, frappé par le terrible mal.

Le 30 décembre 1757, Romain-Nicolas Malassis était enterré dans le cimetière de la Congrégation [Note : La Congrégation des Artisans de Brest qui réunissait en une seule institution toutes les corporations locales, avait acquis un terrain faisant l'encoignure de la rue du Cimetière (aujourd'hui d'Algésiras) et de la rue Duquesne, sur lequel fut élevé une chapelle, en 1718 ; le cimetière y attenant, servait à enterrer les membres de la Congrégation. Celle-ci disparut à la Révolution ; son dernier préfet fut Romain-Nicolas Malassis, imprimeur-libraire à cette époque], en présence des officiers municipaux et de son gendre Feburiet, qui fut maire de Brest de 1763 à 1765.

Parmi les ouvrages qui sortirent de ses presses, nous citerons :

- Abrégé d'anatomie pour l'instruction des élèves chirurgiens, par M. Chardon de Courcelles. — Brest, R. Malassis, 1752, 2 vol. in-12.

- Indulgences et prières avec quelques instructions pour les confrères et sœurs associés sous l'invocation du Sacré-Cœur de Jésus, établie à Brest dans la chapelle des filles du Sacré-Cœur de Jésus de l'Union chrétienne. — Brest, R. Malassis, 1752, in-18.

- Manuel des opérations les plus ordinaires de la chirurgie pour l'instruction des élèves chirurgiens de la marine de l'Ecole de Brest, par M. de Courcelles, médecin du Roi et de la marine. A Brest, chez Romain Malassis, imprimeur du Roi et de la marine. M. DCC. LVI.

- Description des trois formes du port de Brest, bâties, dessinées et gravées en 1757 par M. Choquet, ingénieur ordinaire de la Marine. — A Brest, de l'imprimerie Romain Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine. M. DCC. LVII, in f°, 10 p. et 8 gr. pl. (titre rouge et noir).

 

IV — ROMAIN-NICOLAS MALASSIS, fils du précédent et de Julienne Allain, se présenta en 1758 au Conseil d'Etat pour succéder à son père et ne fut reçu qu'après quelques difficultés.

En effet, la place d'imprimeur à Brest établie par l'arrêt de 1704, avait été omise dans le règlement de 1739 qui donnait une nouvelle fixation des imprimeurs dans les villes du Royaume.

L'imprimerie de Brest n'était comprise ni dans le nombre de celles qui étaient conservées, ni dans celui des imprimeries que le Roi avait supprimées. Cette omission laissait supposer l'établissement de deux imprimeries et le libraire Derrien sollicitait l'une de ces places.

« La présence d'un imprimeur est nécessaire à Brest, écrit l'intendant de Bretagne au Chancelier, tant pour les signaux, les livres et les cayers que l'on est obligé d'y faire imprimer journellement, concernant différents détails, que pour les ordonnances de police qui, surtout en temps de guerre, demandent à être imprimés du jour au lendemain ; la ville la plus proche de Brest où il y ait une imprimerie en est éloignée de seize lieues » (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 1462).

Derrien conserva ses fonctions de libraire, relieur et doreur, et satisfaction fut donnée à Malassis par l'arrêt du Conseil du 30 avril 1758 que nous reproduisons ci-dessous in-extenso :

Extrait des Registres du Conseil d'Etat (Archives du Finistère, B 1677) :

« Le Roy estant informé que la place d'imprimeur établie dans la ville de Brest par arrest du Conseil du 21 juillet 1704, estoit vaccante par le décès de Romain-Nicolas Mallassis, et que son fils s'étant présenté pour y estre reçu, il pourrait trouver de la difficulté, quoi qu'il eut les qualités requises pour remplir la place de son père, attendu que laditte place ne se trouvait pas nommément conservée par l'arrest de règlement du Conseil du 31 mars 1739, par lequel Sa Majesté aurait déterminé, les villes du royaume où il pourroit estre établi des imprimeurs ; mais comme Sa Majesté auroit reconnu que c'est par erreur qu'il n'est point fait mention dans ledit arrêt de la ditte place d'imprimeur à Brest, qui y a esté établie par l'arrêt de règlement du 21 juillet 1704, et qui y a toujours subsisté depuis, parce qu'elle est nécessaire dans une ville telle que celle de Brest, elle aurait jugé à propos d'expliquer ses intentions sur ce sujet, à quoi désirant pourvoir, ouï le rapport. Le Roy estant en son conseil, de l'avis de M. le Chancelier, interprétant en tant que besoin ledit arrest de règlement du 31 mars 1739, a ordonné et ordonne que la seule place d'imprimeur établie dans la ville de Brest par ledit arrest du 21 juillet 1704, et qui se trouve vaccante par la mort de Romain-Nicolas Mallassis, sera et demeurera conservée à perpétuité comme si elle se trouvait comprise dans ledit règlement du 31 mars 1739, sans néanmoins que le nombre d'imprimeurs de laditte ville puisse être augmenté par la suitte pour quelque prétexte que ce soit. Ordonne en outre que ledit Mallassis sera reçu pour remplir laditte place en prêtant par luy, par devant les officiers de police de laditte ville de Brest, le serment en la manière accoutumée ; enjoint Sa Majesté au sieur Intendant commissaire départi en la province de Bretagne de tenir la main à l'exécution du présent arrest, lequel sera imprimé, publié et affiché partout où besoin sera et inscrit sur les registres de la communauté des libraires et imprimeurs de Brest. Fait au Conseil d'Etat du Roy, Sa Majesté estant, tenu à Versailles le trentième avril mil sept cent cinquante huit ». Signé  Phelipeaux.

Mais, Jérôme Derrien tenait à sa place d'imprimeur et, en 1768, il réitère sa demande, non plus pour lui, car il a 70 ans, mais pour son fils qui « après de bonnes études, a fait un apprentissage de quatre ans, à Paris, chez le sieur Le Breton et en est de retour depuis un an, muni du certificat de M. Le Bel, recteur de l'Université. Il conduit aujourd'hui seul le commerce de son père que le grand âge et une longue maladie retiennent depuis longtemps » (Note : Yves-Jean-Louis Derrien avait été reçu libraire à Brest, en remplacement de son père, par sentence du 21 octobre 1768).

Derrien est appuyé cette fois par la Communauté de Brest, désireuse de posséder deux imprimeurs et par le subdélégué Bergevin qui écrit à l'Intendant « Le sieur Malassis, seul imprimeur de la ville et de la marine, fut obligé dans la dernière guerre de se faire donner un ordre pour prendre des ouvriers dans les imprimeries de Quimper et de Saint Pol de Léon. Aujourd'hui que le sieur Malassis pour se dégager de toutes les charges de la ville, a obtenu un brevet qui l'attache particulièrement à la marine, la ville plus peuplée qu'elle ne le fut jamais, se trouve dans le besoin d'un imprimeur particulier, puisqu'elle en avait deux, il y a trente ans qui faisaient très bien dans la plus profonde paix... » (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 1465).

Malassis, comme bien l'on pense, s'opposa à la création d'une seconde imprimerie, soutenant qu'il était « suffisant pour le port et la ville » et il obtint gain de cause.

Quant à Yves Derrien, il épousa la veuve de Marin Blot [Note : Marin Blot, « seul imprimeur à Quimper », successeur de Simon-Marie Périer, mourut en 1777, laissant une veuve de 27 ans, que Derrien épousa « dans le but d'être reçu imprimeur à la place du sieur Le Blot » (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 1468)], et devint par ce mariage en 1779, l'unique imprimeur du Roi à Quimper.

Le libraire Derrien fut remplacé à Brest par Alain Le Fournier, dont la réception est inscrite au Registre de la communauté des imprimeurs et libraires de Rennes. Ce curieux procès-verbal nous fait connaître, toutes les garanties de capacité et d'honnêteté qu'on exigeait d'un candidat au grade de maître-libraire, au XVIIIème siècle.

C'est ainsi qu'avant d'être reçu par le Conseil d'Etat, Le Fournier dût produire devant la communauté : son extrait baptistaire (Note : Allain Le Fournier naquit à Agon, près de Coutances, le 6 décembre 1750), un certificat de catholicité donné par M. Prudhomme, recteur de Saint-Louis de Brest, un certificat de bonnes vie et mœurs, par M. Bergevin fils, procureur du roi à Brest ; une attestation d'apprentissage, du 1er mars 1779, donnée par M. Hovius, de Saint-Malo ; une attestation de compagnonnage délivrée, par M. Le Roy, libraire à Caen, le 2 mars 1782 ; un certificat d'être congru en latin et en grec, donné par M. de Châteugiron, professeur du collège de Rennes, le 8 février 1782, attesté par M. Cobry, préfet du collège, et vu de M. Fageole, principal.

Le candidat eût ensuite à subir l'examen « de sa capacité en librairie » et dût répondre « avec sagacité » aux huit questions suivantes :

«  Quels sont les livres prohibés et deffendus »?

« A quoy reconnoît-on un livre contrefait de l'édition originale »?

« Quelle est la forme des livres, et combien de pages ont les feuilles suivant les formats »?

« Qu'est-ce que la bibliomanie »?

« Quelle est la connoissance de la bibliographie »?

« Quelles sont les belles éditions connues, en librairie ancienne et moderne »?

« A quoy doit-on s'attacher principalement en librairie, dans la conduite de son commerce »?

« Quelles sont les qualités d'un bon libraire »?

La profession de libraire, comme celle d'imprimeur, exigeait, on le voit, en plus d'une culture intellectuelle et morale, des connaissances sérieuses au point de vue commercial et industriel.

A cette époque, l'imprimerie et la librairie étaient l'objet d'une étroite surveillance ; la censure s'était perfectionnée avec le XVIIIème siècle et s'exerçait surtout contre les écrits philosophiques.

Le 16 mai 1774, le Chancelier était informé par l'évêque de Léon « que l'on distribue à Brest toute sorte de mauvais livres capables de corrompre les jeunes militaires et les citoyens de cette ville. On y débite le Système de la Nature et autres livres de cette espèce ; on assure qu'actuellement on broche chez Derrien un livre qui porte pour titre : l'Homme avec ses facultés que l'on dit n'être autre chose que le Livre de l'esprit mis à la portée de tous les lecteurs ». Des visites minutieuses furent opérées chez Malassis et chez les libraires Derrien et Lhuissier. Le résultat de l'enquête des juges de police nous est fourni par l'extrait de la lettre suivante (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 1467) que l'intendant adressait au Chancelier le 3 juin 1774 : « ...... Vous verrez, Monseigneur, qu'il a été saisi chez ces trois libraires des livres prohibés et d'autres qui ont paru très suspects à mon subdélégué. Cependant ce n'est que chez le nommé Malassis, le moins soupçonné de ces libraires ou plutôt le seul d'entre eux qui jouisse d'une bonne réputation, qu'il a trouvé des exemplaires feuilles d'ouvrages proscrits : celui de l'Homme, de ses facultés intellectuelles et de son éducation ; celui de l'Antiquité dévoilée par ses usages et celui de l'Analyse de Bayle. Ce libraire s'excuse sur une maladie qui le met depuis longtemps hors d'état de vaquer à son commerce (Note : « Le mal de jambe que l'on regarde comme incurable et qui le force à garder le lit ou la chambre, depuis six mois, m'a paru être l'unique cause de sa faute », Lettre de Bergevin à l'Intendant. - Archives d'Ille-et-Vilaine, C 1467) et qui l'oblige d'en laisser le soin à une factrice qui n'a pas les connoissances nécessaires pour discerner un mauvais livre. Il a représenté que les feuilles du livre de l'Homme et de ses facultés lui avaient été envoyées de Lyon avant la proscription de cet ouvrage, et il a affirmé n'avoir jamais demandé les deux autres ouvrages, et qu'il faut que les feuilles qui en ont été trouvées chez lui, y aient été remises à sa factrice pour les faire relier. On rend, en effet, Monseigneur, les meilleurs témoignages de la bonne conduite et des moeurs du nommé Malassis qui a succédé, dans le commerce de la librairie, à ses pères contre lesquels il n'a jamais été fait la moindre plainte. M. l'Evêque de Léon lui-même, le regarde, dans cette occasion, comme un homme plus malheureux que coupable et désire que sa faute n'entraîne pas la perte de son état. D'un autre côté, vous jugerez, sans doute, Monseigneur, qu'il est important de faire des exemples pour arrêter, s'il est possible, le débit de tant de mauvais livres propres à corrompre la jeunesse. Cet homme est en état de payer une amende au moins de 200 livres, et elle pourrait être appliquée au soulagement des pauvres. Mon subdélégué m'observe que l'on voit dans la ville de Brest les livres les plus pernicieux en tout genre, et que ce sont les jeunes officiers de différents corps qui les font venir directement de Paris. Il me propose de lui enjoindre de les saisir, dans quelques mains qu'il les trouve, sans cependant faire des perquisitions chez les particuliers. Je lui donnerai, à cet égard, des ordres conformes à ceux que vous aurez jugé à propos de m'adresser... ».

Nous ignorons quelle suite fut donnée à l'affaire de Malassis ; toujours est-il que notre libraire ne fut point suspendu de ses fonctions, plus heureux, en cette circonstance, que son parent et confrère de Nantes, Augustin-Jean Malassis [Note : Augustin-Jean Malassis, dont nous ignorons l'ascendance, demeurait à Nantes, place du Pilori, et épousa Anne-Antoinette Marie, fille de l'imprimeur Marie. Ses impressions ne paraissent pas remonter avant l'année 1772 ; par contre, elles se continuent jusqu'à la Révolution. A ce moment, Malassis prend le titre de « Imprimeur-libraire de la ville et de la police de Nantes » (Notes sur les imprimeurs nantais, par le M. de Granges de Surgères. Paris, 1898)], qui fut frappé par arrêt du Conseil du 19 février 1788, pour avoir vendu une plaquette intitulée : Lettre à M. le comte de ****, ancien capitaine au régiment de ***, sur l'obéissance que les militaires doivent au commandement du prince.

« Sa Majesté considérant, dit l'arrêt du Conseil, que cet imprimé renferme des maximes également contraires à la saine raison et au bien général de la Société, et que le sieur Malassis est d'autant plus coupable d'en avoir débité des exemplaires, que cet écrit a été imprimé en contravention des règlements... Ordonne que ledit Malassis, imprimeur et syndic de la librairie à Nantes, sera et demeurera interdit de toutes les fonctions de son état ; en conséquence, que les presses de son imprimerie seront démontées et les vis d'icelles déposées en la chambre syndicale » (Archives d'Ille-et-Vilaine. C. 1468. — L'interdiction de Malassis fut relevée le 25 avril suivant).

Avec la Révolution et la liberté de la presse allait surgir un débordement d'écrits beaucoup plus incendiaires, mais auparavant d'aborder cette époque, il nous faut dire quelques mots de l'imprimerie de Romain-Nicolas Malassis, de 1758 à 1789.

Malassis occupait cinq « compagnons » ; son matériel comprenait quatre presses et neuf fontes des caractères suivants : le petit canon, le parangon, le gros romain, le Saint-Augustin, le cicéro, le petit romain, le petit texte, la bâtarde coulée sur le corps de trismégiste et la financière.

Un grand nombre d'ouvrages sortirent de ses presses, parmi lesquels nous citerons :

- Description du bagne pour loger à terre les galériens ou forçats de l'arsenal de Brest, projetté, bâti, dessiné et gravé par M, Choquet, — Brest, Romain Malassis, 1759, 4 p. et II gr. pl. (titre rouge et noir).

- Nouveau Tableau de la mer, où l'on voit en général l'état de ceux qui s'embarquent. Avec un détail très curieux du combat et de la manière dont on s'y dispose. Nouvelle édition, corrigée de nouveau et mise en vers François, augmentée du cantique de Notre-Dame de la Garde pour les mariniers (Armes de Brest). — A Brest, chez Romain Malassis, imprimeur du Roi et de la marine. M. DCC. LXI, in-8°, 23 p.

- Traité d'optique par M. Smith, traduit de l'anglais. — A Brest, chez Romain Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine. M. DCC. LXVII, in-4°, 739 p..

- Caton d'Utique, tragédie de M. Addison, traduit de l'anglais par M. Guillemard, écrivain de la marine et des classes, secrétaire de l'Intendance de Marine en Bretagne. — A Brest, chez Romain Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine. M. DCC. LXVII.

- Nouveau recueil de cantiques spirituels à l'usage des retraites qui se donnent chez les Dames de l'Union chrétienne. — A Brest, chez Romain Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine. 1768, in-8°, 73 p.

- Règlement contenant les Etats-majors et équipages dont les vaisseaux et autres bâtimens du Roi seront armes ; ensemble les appointemens et soldes de ceux qui doivent les composer. — A Brest, de l'imprimerie de R. Malassis. M. DCC. LXVIII, in-4°.

- Formules pharmaceutiques pour la composition des remèdes usités dans l'Hôpital de la Marine. — Brest, R. Malassis, 1769, in-4°.

- Abrégé de matière médicale à l'usage des chirurgiens de la marine, par M. Maistral, médecin. — Brest, R. Malassis, 1770, 2 vol. in-12.

- Mémoires de la campagne des découvertes dans les mers des Indes, par M. le Ch. Grenier. — A Brest, chez R. Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine. M. DCC. LXX., in-4°, 38 p.

- Idem. — M. DCC. LXXII, in-4°, 52 p.

- Idem. — M. DCC. LXXXVII, in-4, 212 p.

- Coutumes de Bretagne, par Michel Sauvageau, célèbre Avocat au Parlement de Bretagne. Nouvelle édition. — A Brest, Romain Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine. M. DCC. LXXI.

- Mémoires de l'Académie royale de Marine (Tome 1) (Note : L'Académie royale de Marine créée à Brest en 1752 par M. Bigot de Morogues et reconstituée, en 1763, par M. de Roquefeuil, commandant de la marine, accomplit d'importants travaux scientifiques jusqu'à sa dissolution en 1790). — Brest, chez R. Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine, 1773, in-4°, 444 p., 8 pl.

- Petit glossaire, ou manuel instructif pour faciliter l'intelligence de quelques termes de la coutume de Bretagne. — A Brest, chez R. Malassis, imprimeur du Roi et de la marine. L'an du retour des parlemens, 1774, in-12, 96 p.

- Le Neptune oriental, dédié au Roi, par M. D'Après de Mannevillette. — A Paris, chez Demonville, et à Brest, chez Malassis, imprimeur libraire de la marine. M. DCC. LXXV , in-f°.

- Traité de la construction des vaisseaux ..., par Frédéric-Henri de Chapman ; traduit du suédois par M. Vial du Clairbois. — A Brest, chez Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine, 1781, in-4°, XXV-219 p., 20 pl..

- Statuts et maîtrises accordés au corps des marchands de drap et de soie, merciers, clincailliers et joailliers de Brest et côté de Recouvrance. — A Brest, chez R. Malassis, M. DCC. LXXXIII, 57 p.

- Ar Boquet spirituel eus ar mission hac eus ar retret ... — Brest, R. Malassis, 1784, in-8°.

- Examen de la doctrine d'Hippocrate sur la nature des êtres animés, sur le principe du mouvement de la vie, sur les périodes de la vie humaine, par M. Elie de la Poterie. — A Brest, chez R. Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine, M. DCC. LXXXV, in-8°, 87 p.

- Tactique et signaux de jour, de nuit et de brume, à l'ancre et à la voile, à l'usage de l'escadre d'évolutions commandée par M. le marquis de Nieuil, chef d'escadre. — Brest, R. Malassis, 1787, in-4°.

- Etats généraux (puis Assemblée nationale). Bulletin de la correspondance de la députation du Tiers-Etat, puis des communes de la Sénéchaussée de Brest. — A Brest, de l'imprimerie de R. Malassis, imprimeur ordinaire du Roi et de la marine, in-8°. (Recueil trihebdomadaire de 8 à 16 pages, — du 12 mai 1789 à février 1791).

Romain-Nicolas Malassis avait 26 ans quand il fut nommé, en 1763, conseiller de ville et capitaine de la milice bourgeoise ; mais trois ans plus tard, il se démettait de ces fonctions, « le brevet d'imprimeur de la marine qu'il a plu à Sa Majesté lui délivrer, pouvant lui imposer des obligations qui ne lui permettent plus d'user de son temps pour le service de la Communauté ». Il épousa vers 1770 Jeanne Périer, fille de l'imprimeur de Quimper, et entra, une seconde fois, en 1790, dans l'administration municipale de Brest. Le 23 septembre 1791, il fut élu député du Finistère à l'Assemblée législative et participa spécialement aux travaux du comité de marine. Son mandat expiré, il fut élu maire de Brest le 25 décembre 1792, par 704 voix sur 1053 votants et il occupait cette charge au mois de juin et de juillet 1793, à l'époque de la crise aiguë des luttes contre la Montagne et de l'envoi des fédérés brestois à l'armée du Calvados. Malassis s'était prononcé en faveur des Girondins ; aussi fut-il mandé à la barre de la Convention, par décret du 9 août, puis placé à Paris, sous la surveillance du comité de Salut public, qui ne lui rendit sa liberté qu'un an plus tard, le 26 vendémiaire an III, mais lui épargnait le tribunal révolutionnaire.

En février 1795, Malassis fut nommé par les représentants Faure et Tréhouart, membre de la commission administrative du district de Brest, instituée pour panser les plaies de la Terreur, et ses compatriotes lui en furent reconnaissants, car, au mois de septembre 1795, ils l'élurent en tête de liste par 442 voix aux nouvelles élections municipales : mais Malassis refusa d'accepter, prétextant « qu'il était dans les administrations depuis le commencement de la Révolution » (R. Kerviler – Cent ans de représentation bretonne – 1891).

Nous renonçons à détailler toutes les brochures et tous les pamphlets, si recherchés aujourd'hui par les bibliophiles, qui sortirent des presses de Malassis pendant la période révolutionnaire.

La Révolution française fut, on le sait, le vrai berceau de la liberté de la presse qui, insérée dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, fut reproduite, en ces termes, dans l'article 11 de la constitution de 1791 : « La libre communication des pensées et des opinions, est un des droits les plus précieux de l'homme. Tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas prévus par la loi ». En abolissant les privilèges, les maîtrises et les corporations, la Révolution permettait à chacun de venir à sa volonté prendre place dans le champ de l'industrie : tout individu, pourvu qu'il payât patente (Note : La patente décrétée le 2 mars 1791 fut supprimée le 22 mars 1793, puis rétablie le 22 juillet suivant ; elle a toujours été maintenue depuis cette époque), eût la liberté de se faire imprimeur et libraire.

Et c'est alors que nous voyons s'installer à Brest :

Le citoyen TEURNIER, au Petit-Couvent, dont l'imprimerie fut de courte durée.

Nicolas AUDRAN, un arrière-petit-fils de typographes établis à Rennes depuis plus d'un siècle qui, jeté en prison en 1793, pour avoir publié quelques brochures en faveur de la comtesse de Lamballe, n'avait recouvré sa liberté qu'à la condition de transporter son imprimerie à Brest.

Audran arriva dans notre ville au commencement de 1794 et, quelques mois après son installation (rue de la Rampe, n° 11), il éditait le premier journal quotidien de Brest : le Moniteur de Brest et du Finistère. — Brest, chez Audran, imprimeur de la représentation nationale. [Note : Ce journal, fruit de la réaction thermidorienne, n'eût que 19 numéros (1er au 19 brumaire an III — 22 octobre à 10 novembre 1794). Il fut remplacé par l'Ami des principes (imprimerie Gauchlet) dont nous parlerons plus loin].

Trois ans plus tard, il fonde un bureau de placement et de renseignements : c'est l'Indicateur général ou Sallon du commerce, des arts et des étrangers, dont le but et l'organisation nous sont fournis par un curieux prospectus conservé aux archives municipales :

Il y aura, rue de la Rampe, n° 11, sous le nom d'Indicateur général, un bureau d'indications. Affiches, Demandes, Offres et Propositions quelconques.

L'insertion d'un article, quelle que soit son étendue coûtera 1 livre 4 sous.

Cet article restera pendant 10 jours affiché dans le sallon dont nous parlerons plus bas.

Pendant les dix jours de l'insertion, on recevra autant d'avis qu'il se sera présenté d'offres analogues à la demande, soit à notre bureau, soit dans les papiers-affiches.

Un Sallon de commerce, des arts et des étrangers, qui sera comme le répertoire de toutes les demandes et propositions quelconques de tout ce qui se trouve d'objets à vendre ou à acheter, de maisons ou d'appartemens à louer, de places et d’emplois demandés et offerts. On y trouvera la bourse exacte et sûre, les lois, arrêtés et reglemens de police qui intéresseront le commerce et les étrangers, le mouvement des ports, l'état et l'annonce des marchandises importées ou exportées, etc.

Les étrangers qui l'adresseront à notre bureau, y recevront tous les renseignements dont ils pourront avoir besoin.

Nous consacrons une partie de notre sallon à l'annonce et quelquefois à l'analyse des nouveautés littéraires.

Le Salon du Commerce, des Arts et des Etrangers sera ouvert au premier floréal, an 5.

Le citoyen Audran, homme d'initiative comme on le voit, cherchait tous les moyens possibles pour développer son industrie. En 1797, il forme le projet d'un établissement d'imprimerie, de fonderie de caractères et de reliure pour le service du port et de l'armée navale (Note : Malassis n'était plus fournisseur de la marine. L'imprimerie maritime et de l'armée navale avait été établie dans le port par le préfet Caffarelly ; elle occupait quatre ouvriers et un prote, nommé Forestier, qui la dirigea jusqu'au 1er octobre 1813, date de sa disparition) ; il devait employer des forçats et « économiser à la République au moins 40.000 livres sur le prix annuel des frais d'impression ». Mais sa demande fut rejetée, la Marine ne voulant pas se « charger, seule, des frais d'un imprimeur qui travaillerait également pour la guerre et pour les départements de l'intérieur ». [Note : Lettre du Ministre de la Marine (11 thermidor an V). - Archives de la Marine (Fonds Levot)].

L'imprimeur des Représentants, GAUCHLET, ancien commis chez Malassis, venu d'Alençon à Brest en 1786, s'établit en 1793 au n° 25 de la rue de la République (Grand'Rue) ou place des Fontaines (place Médisance). Il imprima en 1794 et 1795 : l’Ami des principes ou Annales républicaines de Brest (Note : Ce journal, éclos du mouvement thermidorien, comme le Moniteur de Brest et du Finistère qu'il remplaça, portait pour devise « Les hommes sont éternels, les écrits restent »).

Malassis eût à souffrir de la concurrence de ses nombreux confrères et, nous en trouvons la preuve dans une lettre du 27 ventôse an VI (17 mars 1798) qu'il adressait à son correspondant en librairie « .... Je recevrai toujours avec plaisir de bonnes nouveautés ; mais, comme je vous l'ai dit plusieurs fois, ne m'en envoyez que quand vous aurez des fonds à moi. Je suis comme vous brouillé avec les espèces, et je l'ai certainement été plus que vous ; je commence cependant un peu à me relever de ma misère ; j'ai quelque espoir d'en sortir tout à fait ... ».

Romain Malassis avait accepté, en 1797, les fonctions d'assesseur du juge de paix, et ne tarda pas à confier la direction de l'imprimerie à son fils Romain-Guy-Marie ; il se retira à Guipavas, dans une propriété donnant sur l'anse de Kerhuon, et mourut à Brest le 13 avril 1813, à l'âge de 76 ans.

 

V — ROMAIN-GUY-MARIE MALASSIS, fils de Romain-Nicolas et de Jeanne. Périer, succéda à son père vers l'année 1800 et quelque temps après, le 6 floréal an X (26 avril 1802), il épousait Marie-Anne Schérer, âgée de 16 ans, fille d'un premier commis des bureaux de la marine.

A cette époque, deux nouveaux imprimeurs vinrent s'établir à Brest : MM. Pierre Anner (rue Royale, 54) et Michel (rue de la Rampe, 30). A son arrivée à Brest, l'imprimeur Michel édita le Courrier de Brest et du Finistère, journal commercial, politique, littéraire et d'indications.

Mais la liberté de la presse, proclamée au lendemain de la prise de la Bastille, sur l'intervention de Mirabeau, avait déjà subi quelques atteintes par les restrictions que lui avaient apporté le Directoire et surtout le premier Consul, en réduisant le nombre des journaux, sous prétexte qu'ils étaient « des instruments dans les mains des ennemis de la République ». L'Empire l'éteignit complètement. C'est ainsi qu'un décret du 5 février 1810 limita le nombre des imprimeurs, de crainte que plusieurs, faute de travail, ne consentissent à composer des ouvrages dangereux pour le gouvernement ; l'imprimerie et la librairie furent placés sous l'autorité du ministre de l'intérieur ; la censure fut rétablie ; les imprimeurs et libraires durent désormais être brevetés et assermentés.

A Brest, le nombre des imprimeurs fut fixé à trois ; les imprimeurs conservés et devant avoir des successeurs étaient : MM. Malassis, Michel (Note : Michel, reçu imprimeur du Roi par brevet du 24 septembre 1814, eut pour successeur Rozais) et Binard (Note : Binard, imprimeur, libraire et poète, édita de 1809 à 1811 la Muse bretonne, étrennes dédiées aux dames, composées à l'imitation de l'Almanach des Muses ; déchu de ses fonctions d'imprimeur, le 24 sont 1813, il fut remplacé par P. Anner) ; les imprimeurs tolérés, leur vie durant : MM. P. Anner [Note : Le brevet d'imprimeur fut retiré à Pierre Anner en 1821 pour contravention à l'art. 14 de la loi du 21 octobre 1814 et transmis le 12 décembre de la même année, à son fils Edouard, à condition que les presses et l'imprimerie fussent transportées dans un autre local M. Ed. Anner (rue de la Rampe, 55) fut le fondateur, en 1832, du journal le Brestois qui, l'année suivante, devint l'Armoricain (1833-1869). L'imprimerie Ed. Anner fit place, en 1867, à l'imprimerie Roger fils], Audran (Note : Les scellés furent apposés sur les presses d'Andran, par ordre du Directeur général de la librairie du 17 avril 1812, cet imprimeur n'ayant pas prêté le nouveau serment et retiré son brevet « attendu qu'il n'avait pas 33 francs »), Gauchlet et Guyon (Note : Cet imprimeur Guyon était sans doute le fils de Pierre Guyon, nommé imprimeur du Roi à Morlaix, par arrêt du 18 octobre 1767).

Peu d'ouvrages sortirent de l'imprimerie Malassis pendant cette dernière période. Romain-Guy mourut le 8 novembre 1812, à l'âge de 38 ans ; sa veuve, l'année suivante, cédait ses presses à J.-B. Le Fournier [Note : Jean-Baptiste Le Fournier, puis sa veuve Etiennette Moreau et enfin leur fils aîné Jean-Baptiste dirigèrent, jusqu'en 1877, au n° 86 de la Grand'Rue, une maison de librairie et d'imprimerie. Celle-ci était installée depuis, quelques années au 11, rue Kléber ; quand elle fut vendue, en 1877, à la Société de l'Océan. J.- B. Lefournier fut le fondateur du journal l'Océan (1er juin 1846 - 29 juin 1891), qu'il imprima jusqu'au 27 août 1877], et ainsi disparaissait l'enseigne plus que séculaire des véritables fondateurs de l'imprimerie à Brest : les Malassis.

Brest et ses imprimeurs : la famille Malassis  

A. Delourmel

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