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Origines du Château de Brest

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Notions succinctes sur l'origine et l'antiquité du château de BrestCe château occupe une superficie de près de deux hectares et sa forme est celle d'un trapèze. Ce château a pour origine un vaste castellum gallo-romain qu'on date du dernier tiers du IIIème siècle (c'est à la base des courtines qu'existent les substructions romaines). 

ORIGINES DU CHATEAU DE BREST

Brest (Bretagne) : château de Brest

Le Château de Brest est regardé par les archéologues comme remontant à une très haute antiquité. Les substructions existant encore dans les deux courtines, qui se trouvent à droite et à gauche de la porte principale, semblent, du reste, ne pouvoir laisser aucun doute à cet égard. Depuis longtemps elles avaient été signalées par le savant et regretté M. De Blois et par M. Pilaye ; mais c'est en 1855 surtout qu'elles ont été étudiées et bien positivement constatées par la classe d'Archéologie tout entière du Congrès breton, lors de la réunion à Brest de l'Association bretonne. La classe d'Archéologie se composait de MM. Bizeul, Aymar de Blois, de la Villemarqué, de la Borderie, de Courcy, … etc.

Ces substructions, encore intactes, occupent, sur les deux courtines, une étendue de 120 à 140 mètres de longueur, sur une hauteur moyenne de 3 à 4 mètres. Elles partent de la base de la muraille, tandis que le sommet est de construction de diverses époques. On les considère comme d'origine romaine ; en effet, elles présentent tous les caractères des constructions de cette époque qui ont résisté à l'action du temps et s'élèvent encore en assez grand nombre sur le sol de la France.

La date que l'on assigne généralement à ces constructions ou substructions est celle du IIIème ou du IVème siècle de l'Ère chrétienne. Nous verrons plus loin les preuves qui militent en faveur de cette opinion.

D'autres constructions romaines existaient-elles dans le château de Brest ?

Peut-être non, du moins jamais on n'y a trouvé d'autres vestiges de constructions de cette époque. En 1832, on mit au jour les restes ou fondements d'une vieille tour, dans lesquels on crut reconnaître, à la vérité, l'appareil romain. Cette tour était située à l'extrémité des bâtiments qui servent vers 1865 à l'artillerie de terre, derrière la Salle d'Armes. Elle ne semblait se relier à aucune des autres constructions du château. Par sa position presque au centre de la forteresse, sur un point d'où l'on domine la rade et le port, elle aurait pu être regardée comme le prétoire de la citadelle, comme la demeure du chef, qui de là pouvait surveiller tout ce qui se passait à l'entour ; mais son origine n'a point été constatée d'une manière positive. Du reste, en dehors de ces substructions, il ne reste aucun indice, aucun vestige de constructions de l'époque romaine ou gallo-romaine, pas plus dans les bâtiments et les murailles qui s'y voient maintenant, que dans les fondements que l'on peut visiter.

Toutes les murailles, toutes les tours sont d'une époque bien postérieure.

De cette absence de vestiges romains, que nous venons de signaler, dans toutes les autres parties du château, de ce que dans aucun temps on n'y a rien trouvé se rapportant à cette époque, pourra-t-on inférer que jamais il n'y en a eu d'autres? Cette conclusion peut être très certainement l'objet d'un doute fort grand ; cependant, ne serait-il pas possible d'admettre que les Romains, se fiant aux difficultés que présentaient les rochers abruptes sur lesquels s'élève le château, n'eussent construit de murailles que du côté de la terre, seul point vraiment vulnérable du triangle formé par l'extrémité du rocher et la construction romaine parvenue jusqu'à nous ? Ou bien encore, ne pourrait-on penser, avec les légendes, que les travaux entrepris par les Romains ne furent point terminés par eux, parce que au moment où cette forteresse tomba au pouvoir des Bretons — nous n'osons point dire de Conan Mériadec, — vers la fin du IVème siècle, on était en train de la reconstruire à la place d'une forteresse celte qui existait antérieurement sur ce rocher, et qu'ainsi les travaux restèrent inachevés ?

L'Histoire de Conan Mériadec par le P. Toussaint de Saint-Luc (p. 74), dit, en effet, que ce chef, après avoir chassé toutes les garnisons romaines du pays de Léon, acheva la construction du château de Brest que les Romains avaient commencée, sous le commandement de Imbault ou Jubault, leur lieutenant. Conan vint en Armorique, avec Maxime, vers 383.

Nous citons seulement, nous ne pouvons, ni ne voulons discuter ici l'existence de Conan Mériadec, rejetée maintenant par quelques historiens.

A cette preuve douteuse peut-être, nous allons en ajouter d'autres du non achèvement, par les Romains, de la construction du château de Brest.

Dans un ordre donné, en 1064, par Conan II du nom, duc de Bretagne, de reconstruire la cité de Brest, pour y élever une église, ordre rapporté par Le Baud (Histoire de Bretagne), comme extrait des chroniques de l'abbaye de Gaël, on lit : « Conan étant au siége de Combourg ordonna à Judichaël, abbé de Saint-Méen, la reconstruction de la cité de Brest, située ès-fin de Legionense, ainsi que le fossé dont elle est environnée la terminant, afin qu'il fit édifier une église … ».

Dans cet ordre, il n'est nullement question de muraille, mais seulement du fossé la terminant (la cité). Il faut s'arrêter sur cette phrase avec attention : Le fossé qui l'environne la terminant. La cité de Brest n'était donc alors terminée que par un fossé. Il est peu probable qu'on eut donné ce nom à une muraille de l'importance et de la solidité de celle dont D'Argentré a dit : « Il (le château) n'était point subjet à la sappe pour la grande force de ses murailles et du ciment, et pour les difficultés de l'approche ». Il faut bien remarquer aussi que, dans cet ordre, on ne parle point du château tout entier, mais seulement de la partie qui le termine. Le château n'était donc point entouré entièrement par le fossé, il restait une partie, dont on ne parle pas, partie qui n'avait point besoin de réparations, et qui doit être bien certainement la muraille romaine qui s'élève encore aussi solide aujourd'hui, après plusieurs siècles d'existence, qu'elle l'était lors de sa construction.

S'il parait par trop improbable, comme nous l'avons dit, que les Romains aient laissé l'enceinte inachevée de leur propre volonté, ne serait-il pas possible d'admettre, ainsi que nous l'avons déjà fait observer, que le vainqueur, qui s'était emparé de la forteresse au moment de sa reconstruction, ne voulant ou ne pouvant pas s'arrêter trop longtemps dans ce point si reculé de l'Armorique, eût simplement fait entourer la partie non encore construite d'un fossé avec palissades suffisant pour défendre, du côté de la rade et de la rivière, l'esplanade sur laquelle s'élevait la forteresse.

D'après M. Violet-le-Duc (Dictionnaire d'Architecture du Moyen-Age), le château de La Roche-Guyon ne fut point non plus entouré d'une muraille sur toutes ses faces : « Les escarpements naturels devaient ôter toute idée d'attaquer la place par ces côtés, dit-il. Nous ne pensons pas que le fossé et l'escarpement, ajoute-t-il encore, aient jamais été protégés par des murailles, mais seulement par une levée de terre avec palissades, car il ne reste sur ces points nulle trace de maçonneries ».

Si le château de La Roche-Guyon, situé dans une position ayant de l'analogie avec celle du château de Brest, ne fut défendu que d'un côté, ne peut-on regarder aussi comme possible qu'il en ait été de même pour notre forteresse.

Cette hypothèse du non achèvement de l'enceinte par les Romains, ne semble-t-elle pas en effet ressortir de la forme de l'ordre de Conan II : de restaurer le fossé qui l'environne la terminant, fossé qui pouvait alors avoir besoin de réparations, tandis que la muraille devait être encore intacte. Les Romains restèrent sans nul doute fort peu à Brest, et probablement n'eurent que le temps de construire une partie des murailles du château ; car il est un fait parlant que nous ne pouvons oublier de signaler ici, c'est l'absence près de Brest de tous restes romains, autres que les deux courtines à droite et à gauche du portail. Non-seulement ni dans le château ni dans la ville même, aucun vestige n'a jamais été trouvé, aucune monnaie, aucun fragment de poterie n'a été recueilli. Il est donc probable qu'ils n'ont fait que passer dans notre château, qu'ils n'y ont séjourné que peu de temps, et que Brest n'a jamais été qu'un point militaire occupé par eux temporairement, d'où l'on peut conclure, contrairement à de nouvelles opinions, que notre château n'a jamais été qu'une station militaire et non une ville. Mais si Brest n'a jamais rien présenté à recueillir, Landerneau, l'extrémité de la Penfeld, la ville immense qui se voit encore sur le plateau de Kerilien près de Lesneven, où tant de débris romains, de poteries, de tuiles, de pierres du petit et du grand appareil, des monnaies, des urnes funéraires, des fragments de colonnes se voient encore, prouvent qu'ils ont séjourné dans le pays et construit des établissements importants et permanents. Les briques romaines, les monnaies si belles et si bien conservées qui ont été découvertes à Camaret sur plusieurs points, attestent sans nul doute aussi leur présence longue et puissante dans notre pays. Mais à Brest même, comment s'expliquerait l'absence de toute espèce de vestiges romains, en dehors des substructions que nous avons signalées, si l'on n'admettait que les Romains n'y ont séjourné que fort peu de temps et qu'ils n'y ont jamais eu qu'un établissement militaire momentané ?

Quoi qu'il en soit de ces suppositions, sur lesquelles nous n'insisterons pas plus longtemps et que nous ne nous permettrons pas de résoudre d'une manière absolue, l'existence de substructions romaines, si bien constatées par des hommes de la valeur de ceux qui composaient la classe d'Archéologie de l'ancienne Association bretonne, ne peut plus être mise en doute ni contestée, pas plus que l'origine romaine de notre château, les substructions étant là pour l'attester.

Les murailles romaines s'étendaient jadis, pensons-nous, de la mer, du côté de la rade, où s'élevait une tour sur l'extrémité du rocher, jusqu'à la Penfeld, où une autre tour se dressait encore pour défendre ce côté du trapèze. Ainsi l'emplacement compris dans la pointe formée par l'extrémité du rocher, se trouvait protégé par une muraille romaine, prenant à la rade, finissant à la rivière, et flanquée d'une tour à chaque extrémité.

Si quelques doutes pouvaient s'élever sur la tour du côté de la rade, dont la tour de la Madeleine occuperait la place, — quoique pourtant cette immense tour en recouvre une autre beaucoup plus ancienne à l'intérieur et à pans coupés, — il n'en serait pas de même pour celle du côté de la Penfeld. Le chanoine Moreau, auteur d'une Histoire de la Ligue en Bretagne, raconte que : « Environ ce temps (1597), le sieur de Sourdéac fit refaire une vieille tour du château de Brest, depuis les fondements, dans lesquels il fut trouvé une platine de cuivre, ronde, grande comme une assiette, en forme de médaille antique en laquelle étoit écrit, d'un côté, Julii Cœsaris, et de l'autre étoit gravée son effigie. Ledit Sieur a de Sourdéac la fit remettre de rechef aux fondements de la nouvelle tour, avec une autre platine toute d'argent, en laquelle il fit graver le nom de Henri IV et le sien avec ses qualités et l'année ».

Cette découverte si intéressante, relatée par un contemporain, ne peut être contestée, il nous semble, bien que nous pensions aussi que les détails en sont rapportés d'une manière inexacte et exagérée. Malheureusement l'auteur, tout en citant ce fait si curieux, a oublié de désigner la tour dans laquelle cette trouvaille a été faite, et a laissé ainsi le champ libre à la discussion. Mais dans tout le château il n'est qu'une tour, croyons-nous, à laquelle en raison de sa construction on puisse attribuer cette découverte, c'est la tour du Donjon. Quelques auteurs ont désigné, par erreur il est vrai, la tour César, qui de là, disent-ils, aurait pris son nom. Cette opinion ne peut être admise, car si l'on compare les édifices bâtis bien positivement par Sourdéac, tels que la caserne de Plougastel, etc., avec la tour César, on se convaincra facilement que cette dernière est d'une construction beaucoup plus ancienne et n'a aucun rapport, aucune analogie avec la manière de bâtir sous Henri IV, tandis que la tour du Donjon est entièrement de l'appareil employé à cette époque.

Si l'existence d'une tour romaine du côté de la Penfeld est parfaitement démontrée, comme nous le croyons, par la citation du chanoine Moreau, on est conduit à penser que bien certainement il devait y en avoir une autre à l'extrémité opposée, à la place de la tour de la Madeleine. On pourra donc dire, sans avoir trop à craindre de se tromper, que tout le front du château, du côté de la ville, de la Penfeld à la mer, devait être jadis de construction romaine et que l'existence d'une muraille de cette époque, flanquée d'une tour à chaque extrémité, ayant une porte seulement au centre, muraille dont il reste encore des substructions importantes, peut être regardée comme un fait sinon certain, au moins très probable.

Nous n'insisterons point longtemps sur les preuves qu'on pourrait tirer de la position du rocher sur lequel s'élève notre château, en faveur de son origine romaine, position si conforme néanmoins aux points choisis généralement, sinon toujours, par les Romains pour élever leurs forteresses. On sait qu'ils recherchaient particulièrement des points escarpés, baignés par une rivière ou un fleuve, pour placer leurs stations militaires. Certes, jamais position ne fut plus belle, plus favorable que la pointe du rocher de Caprel, baignée par la mer d'un côté, de l'autre par une rivière, défendue par des rochers abrupts et rapides s'élevant à une grande hauteur, et n'offrant à découvert qu'un seul côté de son triangle, facile à défendre, contre les moyens d'attaque employés alors, par une bonne et solide muraillé comme ils les construisaient.

Quant à la date si reculée que l'on assigne à la construction de ces murailles, nous dirons que vers la fin du IIIème siècle et le commencement du IVème, les irruptions des barbares étaient devenues si audacieuses et les dangers si imminents dans les Gaules, qu'un très grand nombre d'enceintes murées et de châteaux gallo-romains furent élevés alors. M. de Caumont, Cours d'Antiquité, et M. Batissier, l'Art monumental dans l'Antiquité, disent que l'on doit surtout rapporter les enceintes fortifiées à cette époque. Il est aussi à peu près certain que l'extrémité de l'Armorique ne fut soumise entièrement aux Romains que vers le IIème siècle. César, on le sait, n'y pénétra jamais, et ce ne fut guère que plus d'un siècle après lui que les lieutenants des empereurs se rendirent maîtres de la vieille Armorique, particulièrement de cette partie du pays occupée par les Ossismiens, contrée qui forme à peu près notre département du Finistère. Mais s'ils n'y vinrent que vers le IIème siècle, ils n'y séjournèrent que jusqu'à la fin du IVème ou le commencement du Vème. La construction du château se trouverait donc ainsi presque enfermée entre le IIème et le Vème siècle, et pourrait être placée soit au IIIème soit au IVème (Note : Nous disons presque enfermée entre ces deux siècles, car nous savons parfaitement qu'après la disparition des Romains des Gaules, on construisit encore longtemps comme ils le faisaient).

A ces preuves nous en ajouterons une, prise dans la construction même de la muraille. C'est que si les rangées de briques ont été quelquefois employées avant le IIIème siècle, elles l'ont été beaucoup plus généralement à cette époque qu'elles ne l'étaient antérieurement. Selon quelques archéologues, elles ne datent même que de ce siècle. Leur emploi général est aussi à peu près limité entre le IIIème et le Vème siècle, époque après laquelle on les employa encore, il est vrai, mais beaucoup plus rarement. Ainsi en admettant cette opinion, la construction de ces murailles se trouverait encore enfermée entre le IIIème et le Vème siècle à peu près (M. Caumont, Cours d'Antiquités, t. II, p. 162 à 164).

Nous appuyant sur ces preuves et sur l'opinion des hommes si compétents que nous avons déjà cités, nous placerons donc l'érection des substructions qui se trouvent dans le château de Brest au IIIème ou au plus tard au IVème siècle.

Le Château de Brest était-il jadis un oppidum ? Nous répondrons non ; il ne peut être considéré, pensons-nous, comme ayant été jadis un oppidum, une de ces grandes enceintes fortifiées, ville et place forte tout à la fois. Son étendue ne permet pas de le supposer. Il est probable que ce fut ou un castellum ou un de ces camps fixes, castra stativa, stations militaires permanentes, qui servaient de retraites à des troupes préposées à la garde d'un pays, et qui ont donné naissance, à l'entour, à des bourgades ou à des villes. Cette opinion est celle du savant M. Bizeul (Note : Voir dans la Revue de l'Ouest, année 1856, son article intitulé : Les murailles romaines du château de Brest). Du reste, les noms de castrum, castellum sont souvent donnés au château de Brest dans les anciens actes, et nous ne l'avons trouvé qu'une seule fois désigné sous le nom d'oppidum, dans la Chronique de Nantes, au sujet du meurtre de Salomon : hic Salomon rex religiosissimus, dit-elle, crudeliter ab impiis apud oppidum quod dicitur Bresta, etc., etc.

Ces castra, castella sont fort rares, et avant la découverte du castrum ou castellum de Brest, on n'en connaissait qu'un seul, celui de Jublains, regardé comme ayant une grande analogie avec la forteresse de Brest.

Le nom que le château de Brest portait à cette époque si éloignée de nous, n'est point encore parfaitement déterminé par les archéologues. Ils regardent généralement pourtant le Gesocribate de la table de Peutinger comme occupant le point sur lequel se trouve notre château. M. de la Borderie vient d'ajouter son nom à ceux des savants qui penchent vers cette hypothèse. Il dit, Annuaire archéologique de Bretagne (1861) : « Les érudits ont beaucoup varié sur le lieu où il convient de placer cette ville (Gesocribate) ; mais en 1855, la classe d'Archéologie de l'Association bretonne découvrit dans les deux courtines qui flanquent la porte du château de Brest, de grands pans de murailles dont la construction dénote qu'il y a eu là, sous les Romains, une citadelle importante. Cette construction autorise à mettre Gesocribate à Brest ».

Gesocribate se trouve, en effet, sur la table de Peutinger, table théodosienne dressée selon les uns vers 393, sous Théodose-le-Grand, ou selon les autres en 435, sous Théodose II, à la même distance, à peu de chose près, de Portus Nannetum (Nantes), que cette dernière ville l'est de Brest.

L'époque à laquelle le nom de Gesocribate (Note : Gesocribate voudrait dire, d'après M. Athénas, fortification placée sur une hauteur et défendue par des soldats mercenaires : de Gesate, soldats soudoyés ou mercenaires, et de crib, élévation) fut changé en celui de Brest n'est point encore bien connue non plus. Ce fut probablement dans le quatrième siècle. M. Athénas, qui a publié, sur Brest, une savante dissertation dans le Lycée armoricain, année 1823, pense que ce changement s'effectua entre le IIème et le IVème siècle. « Ptolémée, dit-il, vivait en 138. Depuis cette époque jusqu'en 383, invasion de Maxime et Conan Mériadec, il y a un espace de 245 ans, pendant lequel le château, qui existait à Gesocribate, prit le nom de Brest, car il était appelé ainsi et était gardé par une garnison romaine à l'époque de la conquête de Maxime ». A cette opinion, nous ajouterons que vers la fin du IVème siècle, un grand nombre de villes et de forteresses changèrent les noms qu'elles portaient pour prendre ceux des peuples qui les habitaient. Ainsi, à cette époque, Lutetia occupé par les Parisiis, prit le nom de Paris ; en Bretagne, Condate, occupé par les Redones, prit le nom de Rennes ; Dariorigum, principale ville des Venètes, le nom de Vannes .... etc.

Est-ce une raison semblable qui a fait changer Gesocribate en Brest ? nous n'en savons absolument rien. On a prétendu qu'un roi celte, nommé Bristok ou Brestok, qui gouvernait à Gesocribate en 353, aurait fait de Brestoc Brestois, et qu'ainsi Gesocribate serait devenu Brest. Nous ne faisons que signaler cette opinion, à laquelle nous ne nous arrêterons pas davantage.

L'étymologie du nom de Brest a été le sujet des études de plusieurs historiens. De nombreuses opinions plus ou moins singulières, plus ou moins problématiques, ont été émises à cet égard. Nous allons les rappeler ici :

Le Baud, Histoire de Bretagne, trouve le nom de Brest dans l'anagramme suivant :

« Britannorum Regum Equorea Statio ».

« Station maritime des Rois Bretons ».

Dom Louis Le Pelletier, dans son Dictionnaire breton, dit : « Le nom de Brest, port célèbre, est si ressemblant à Breis (Bretagne), qu'il y a apparence que c'est le même ».

Bullet, Mémoires sur la langue celtique, prétend que : « Brestum ( Brest ), le plus grand, le plus beau, le plus sûr port du royaume sur l'Océan, etc..... viendrait de Bras, en composition Bres, grand, ample, et de Tom, fort, beaucoup, et, sous-entendant le mot port, il trouve Grand et Fort Port ».

Scaliger pense bien que : « Brest dérive de deux mots bretons : Breis (Bretagne) et Vat ou Mat, bonne Bretagne. Mais il le regarde comme occupant la place de Brivates portus ».

M. Athénas, que nous avons déjà cité, croit, comme Dom Le Pelletier, que : « Brest vient de Breis (Bretagne) ».

« Les matelots bretons, dit-il, revenant de lointaines excursions, s'écriaient en revoyant la terre : Breis ! Breis ! Bretagne! Bretagne ! » et de là est dérivé le nom de Brest.

Cette opinion a été combattue, et l'objection qu'on y a faite nous semble très fondée : c'est que Brest n'est pas le premier point de la terre qu'on aperçoit en venant de l'Océan.

Le savant M. de Courcy nous a aussi donné, dans son Itinéraire de Saint-Pol à Brest, une autre étymologie.

« S'il fallait, dit-il, à notre tour, assumer la responsabilité d'une étymologie problématique, nous dirions que le nom de Brest nous paraît formé de la contraction de deux mots bretons Bec-Rest (le bout du bois) et en raison de la position de cette ville à l'extrémité de la forêt de Landerneau, qui s'étendait jusqu'à la mer ».

Il en est une autre encore inédite, qui nous a été donnée par un breton bretonnant : c'est que le mot Brest veut dire en breton golfe, baie. Les dictionnaires bretons ne donnent point ce mot.

Ces étymologies, il faut l'avouer, laissent beaucoup à désirer et sont pour la plupart singulières et fort problématiques.

Si nous osions aussi à notre tour émettre la nôtre, tout aussi peu probable, nous ajouterions : Bristok, Brestok, ou plutôt Breistok, donna son nom à Brest, disent MM. de Kerdanet et de Fréminville.

Breistok veut dire, pensons-nous, chef de la Bretagne, de Breis Bretagne et Toc bonnet, et, par extension, tête, chef. Ce nom de Breistok ne convient-il pas parfaitement, en effet, à Brest, qui est bien la tête, le chef, la chef, le boulevard de la Bretagne, par sa position sur la mer et son importance comme point militaire ? Brest serait le diminutif de Breistok, mot celtique francisé, peut-être même nom donné à un chef de la Bretagne, qui régna à Gesocribate dans les temps anciens. De même que le cap Saint-Mathieu était appelé le cap de Pen-ar-Bed, le cap de la tête du monde ou du bout du monde, la forteresse de Brest ne pourrait-elle pas dans l'antiquité avoir été désignée sous le nom de Breistok, chef, clef, boulevard de la Bretagne, qualification que nous lui avons trouvée donnée quelquefois, en raison de sa position à l'extrémité de l'Armorique dont elle était incontestablement le premier point militaire le plus important et le mieux fortifié sur tout le littoral, d'après nos auteurs anciens.

On le sait, dans le moyen âge, on disait : « Qui n'est sire de Brest n'est duc de Bretagne ».

Cette opinion sur l'étymologie du mot Brest, nous l'abandonnons volontiers à la critique, la laissant pour ce qu'elle vaut, pas grand'chose peut-être, mais ne la croyant pas plus invraisemblable ni plus problématique que les autres.

Avant de donner la description du château, avant d'assigner des dates de construction aux diverses parties qui le composent, nous allons rappeler les faits rapportés par les légendes et par l'histoire, qui s'y sont passés antérieurement au XIIème siècle, époque avant laquelle, ont prétendu quelques historiens, il n'est point fait mention de Brest.

Nous citerons successivement les faits donnés par l'histoire et ceux qui sont transmis par les légendes, quoique nous sachions parfaitement combien on doit être circonspect à l'égard de ces derniers ; mais comme souvent aussi les faits avancés par les légendes ou les légendaires, qu'il ne faut pas trop dédaigner, ainsi que ceux qui sont conservés dans les chants populaires, ont servi à éclairer des points historiques restés obscurs, nous n'avons pas cru devoir les passer sous silence.

Nous indiquerons ces faits succinctement et chronologiquement, en désignant leur provenance des légendes ou de l'histoire, ne voulant prouver qu'une seule chose, c'est que l'antiquité du château de Brest, appuyée non-seulement sur des preuves matérielles, telles que les substructions romaines, mais encore sur les faits qui s'y sont passés, ne peut plus être mise en doute.

Nous les donnons par date, de manière à en former une espèce de chronologie de nos origines brestoises.

IVème siècle. — BRISTOK, BRESTOCK on BREISTOK (Légendaire).

D'après la légende de Saint-Rioc, d'Albert Le Grand, Breistok régnait à Gesocribate ou Brest en 350, — milieu du IVème siècle.

IVème siècle. — (Légendaire, mais extrait d'une légende historique). — Imbault ou Jubault, fils de Jugonus, roi de Tolente, commandait à Brest, pour les Romains, vers la fin du IVème siècle. Il était en train de faire reconstruire la forteresse, lorsque Conan Mériadec s'en empara.

IVème siècle. — (Légendaire, mais extrait d'une légende historique).

Conan Mériadec (Voir ci-dessus) dut achever la construction du château, entre 383, année de l'invasion de Maxime, et 388 ou 421, dates indéterminées de sa mort (Note : Nous l'avons déjà dit, nous ne pouvons ni ne voulons discuter l'existence de Conan Mériadec, rejetée maintenant par quelques historiens, mais acceptée encore par quelques autres, sinon comme fondateur du duché de Bretagne, du moins comme chef breton de l'armée de Maxime).

VIème siècle. 537. — (Légendaire). — Le Prince de Léon, raconte la légende de Saint-Budoc, d'Albert Le Grand, tenait sa cour à Brest en 537 ; c'est pourquoi il était appelé Roi de Brest. Ce prince était le père de la belle Azénor, qui a laissé son nom à une des tours du Château.

VIIème siècle. — (Historique). — Le Prince Mélaire s'enferme dans le château de Brest pour échapper à la barbarie de son oncle Rivod ou Rivoal ; mais sa retraite ayant été découverte, il se sauve au château de Conmor, en Aginense, où il est massacré par les satellites de son oncle.

IXème siècle. 856. — (Historique). — La Chronique de Nantes rapporte qu'en 856, Salomon, roi des Bretons, fut assassiné près du château de Brest : apud oppidum quod dicitur Bresta.

IXème siècle. 875. — (Historique).— D'après les Vies des Evêques de Bretagne, d'Albert Le Grand, en 875, les Romains attaquèrent Brest par mer et par terre, sans pouvoir s'en rendre maîtres. (Il est évident que ce sont les Normands plutôt que les Romains qu'il faut lire).

XIème siècle. 1064. — (Historique). — Conan II du nom fait restaurer la cité de Brest, en 1064, et ériger une chapelle qu'il dédie à la Sainte-Trinité, à la Vierge et à Saint-Mathieu. (Extrait de l'Histoire de Bretagne de Le Baud).

XIIème siècle. 1197. — (Historique). — Enfin, en 1197, André de Dinan se réfugie au château de Brest avec le jeune et malheureux Arthur, pour le dérober aux fureurs de Richard, roi d'Angleterre. A peine ce prince y était-il, qu'il fut saisi d'épouvante et se sauva, avec son gouverneur Guethénoc, évêque de Vannes, près de Philippe-Auguste, roi de France, ennemi de Richard, où il espérait trouver un refuge plus sûr et un protecteur puissant.

Ces faits conservés par l'histoire et les légendes, quoique considérablement éloignés les uns des autres, viennent pourtant siècle par siècle à peu près, pendant 900 ans, attester l'existence d'une forteresse à Brest, à partir du IVème siècle. Nous ferons remarquer que, si nous avons inscrit les légendes, nous aurions bien pu les rejeter, car on trouve dans les faits historiques des preuves qui remontent aussi haut que les légendes.

E. Fleury - 1865

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