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Description du Château de Brest

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Nous allons essayer de donner une description du château de Brest et d'assigner aux diverses parties qui le composent actuellement, en nous appuyant sur les documents que nous avons recueillis et sur le système des constructions, des dates à peu près certaines pour les unes, peut-être un peu problématiques pour les autres, de leur âge et de leur origine.  

DESCRIPTION DU CHATEAU DE BREST

Brest (Bretagne) : château de Brest

Le château de Brest, on le sait, a la forme d'un trapèze.

Le plus grand côté de ce trapèze, au milieu duquel se trouve la porte d'entrée principale du château, flanquée de ses deux grosses tours, est tournée vers le Nord-Est, regardant la ville. Il est terminé à l'Est, du côté de la rade, par la belle tour de la Madeleine ; au Nord, sur le port, par le Donjon et le Bastion Sourdéac.

Les deux autres grands côtés s'élèvent l'un sur la rade, l'autre sur la Penfeld.

Le plus petit, défendu au Sud par la tour française, à l'Ouest par la grosse tour de Brest, ayant au centre la tour César, se projetant en avant au Sud-Ouest, domine la rade et l'entrée du port.

Le côté du château, qui regarde la ville, est défendu par un système de fortification avancée qui le couvre tout entier, et un ravelin casematé muni de meurtrières.

Ces divers ouvrages ont des dates de construction très différentes. Nous allons essayer de les faire connaître.

Commençons d'abord par faire le tour des murailles, nous entrerons ensuite dans la forteresse.

Fortification avancée.

Brest (Bretagne) : château de Brest

La fortification avancée, qui défend le côté du château donnant sur la ville, est de deux époques.

La partie qui se trouve à peu près comprise entre la porte d'entrée actuelle de cet ouvrage et Porstrein, est du XVIème siècle. L'autre, qui va de la porte au-devant du bastion Sourdéac, est du XVIIème siècle.

La première partie se voit parfaitement tracée sur un plan du Château, gravé par Tassin en 1631. Elle est donc antérieure à cette date. Elle suivait les mêmes contours que celle qui existe encore maintenant ; mais, au lieu de continuer ainsi qu'elle le fait actuellement, elle s'arrêtait à l'angle rentrant qui se trouve après avoir passé la porte actuelle, et de là partait un mur qui venait rejoindre le fossé devant la pointe du ravelin casemate, formant un angle droit avec la courtine dans laquelle se trouve la porte qui existe aujourd'hui. Toute la façade de l'autre côté était ainsi à découvert et n'était défendue que par le bastion Sourdéac. Il est probable que, lors de la construction du reste de cette fortification, la première partie, qui n'était point ancienne alors, fut conservée, et que seulement on perça la porte dans la grande courtine qui donnait sur la place. C'est d'après cette hypothèse que nous regardons cette muraille comme datant du XVIème siècle. Peut-être reprit-on alors cette construction de l'angle rentrant qui se voit après la courtine où se trouve la porte, du côté de Porstrein, car la partie comprise entre Porstrein et cet angle rentrant parait plus ancienne que l'autre, mais on ne peut l'affirmer.

Il est difficile de dire précisément à qui elle doit être attribuée. On peut pourtant placer son érection entre 1552 et 1556 environ, époque à laquelle de grands travaux furent exécutés à Brest, et l'attribuer au projet du commandeur de Villegagnon ou au duc d'Etampes. En 1552, Nicolas-Durand de Villegagnon, commandeur de Malte, vice-amiral de Bretagne, qui avait longtemps servi sur les galères, et qui avait eu la mission importante d'aller chercher en Ecosse Marie Stuart pour la conduire en France, homme fort distingué du reste, fut envoyé à Brest pour s'occuper des affaires de la marine. Il porta avec lui les fonds nécessaires pour les travaux. Brest était alors commandé par Marc de Carné, lieutenant de roi de cette place, et y commandant en l'absence du gouverneur Chabot. Après avoir fait exécuter des travaux importants pour la marine, Villegagnon, outrepassant ses pouvoirs, voulut aussi s'occuper de la défense de la place du côté de la terre, et proposa un projet de fortifications pour le château, qu'il trouvait mal défendu sur plusieurs points. « Cependant nous ferions, disait-il, dans une lettre adressée au duc d'Etampes, datée de Brest, le 9 décembre 1552, des canonnières couvertes (batteries couvertes) dans la roche, tout à l'entour du parc (le Parc-au-Duc probablement) ; et pour garder les ennemis de venir, ce qu'ils ne pourront faire sans bateaulx, je fais accoustrer les grands bateaulx du Roy en galères, et sur les bords faire une pavaysade de gros câbles pour estre à couverts ». Ceci regardait le côté de la mer. Mais passant ensuite aux fortifications du côté de la terre, comme on pouvait, disait-il, venir à couvert jusque sur le bord du fort près du Donjon (Note : Le bastion Sourdéac n'était point construit alors, et le Donjon se trouvait à découvert) de vers la porte, il proposait de tirer une courtine jusqu'à la mer par devant la porte.

Cette courtine, proposée par Villegagnon, ne serait-elle point la fortification que l'on voit sur le plan de Tassin ? Ce ne fut probablement point Villegagnon qui la fit construire. Marc de Carné qui, avons-nous dit, commandait à Brest en l'absence de Philippe de Chabot, froissé de cet empiètement sur son autorité, s'en plaignit à Paris, et Villegagnon fut obligé de se retirer et même de s'éloigner de la France, pour conjurer l'orage qu'il avait soulevé contre lui, les Carné étant parfaitement bien en cour. Ses projets n'en restèrent pas moins sans doute.

L'année suivante, 1553, le duc d'Etampes se rendit à Brest pour s'occuper des fortifications de la place. Il indiqua ce qu'il y avait à faire. Suivit-il les plans donnés par Villegagnon ? c'est possible ; mais nous n'avons aucun document qui le prouve. Quoi qu'il en soit, ne parait-il pas assez probable, en voyant le plan de Tassin, de 1631, que cette partie de la fortification a dû être élevée vers la fin du XVIème siècle, et ne peut-on, sans hasarder une opinion trop douteuse, en attribuer le projet à Villegagnon, et l'exécution, probablement modifiée, au duc d'Etampes, et placer son érection entre 1552 et 1556. Nous ne donnons point cela comme une chose certaine, bien entendu, nous soumettons seulement cette opinion aux archéologues.

Du reste, pendant la période qui s'écoule entre 1552 et 1556, le château de Brest, sur lequel Villegagnon avait appelé l'attention par deux mémoires, l'un au roi et l'autre au duc d'Estampes, fut l'objet des grandes préoccupations du roi. Des sommes importantes y furent alors dépensées.

La construction de la seconde partie de la fortification avancée à prendre, soit de l'angle rentrant après avoir passé la porte, soit de celui qui le précède du côté de Porstrein, est enfermée entre les années 1631 et 1670 ; car, si sur le plan de Tassin cette partie de la fortification n'est point indiquée, elle se trouve sur un plan de la ville et du château portant la date de 1670.

Cette partie est due à Charles ou à César de Cambout, marquis de Coislin, qui furent gouverneurs de Brest, de 1631 à 1648. Jadis l'angle saillant de cette fortification, qui s'avance sur la place du château en avant du bastion de Sourdéac, portait les armes de ces capitaines : De gueules à trois fasces échiquetées d'argent et d'azur. Ces armoiries étaient surmontées de celles de France. On voit encore les pierres sur lesquelles elles étaient sculptées. Elles ont été martelées à la Révolution.

Toute cette fortification, munie de meurtrières, était jadis entourée d'un profond et large fossé, qui depuis longtemps a été comblé. La porte de cet ouvrage était aussi, il y a peu d'années, fermée par un pont-levis qui a été supprimé pour le nivellement de la place et pour les travaux du port de commerce.

Quand nous parlons de la date de ces fortifications, il est bien entendu que nous ne nous occupons que de la base de la muraille dont le sommet est muni maintenant d'embrasures de canons.

Le faite de toutes les murailles du château et des tours est généralement moderne.

Ravelin.

Presqu'aussitôt après avoir franchi la porte de la fortification avancée, se présente le ravelin destiné à couvrir l'entrée principale du château.

Il est entouré d'un large fossé, qui le sépare entièrement de l'ouvrage avancé, avec lequel il n'a de communication que par une porte jadis ogivale, surmontée des armes de France et munie d'un pont-levis. Le pont-levis n'existe plus et les armoiries de France ont disparu.

Ce ravelin casematé, ayant des meurtrières dont la forme indique qu'elles étaient destinées à recevoir de l'artillerie de petit calibre, peut-être des fauconneaux ou des arquebuses, est très probablement du XVème siècle.

Il se trouve sur le plan de Tassin, qui est le plus ancien que nous possédions, et d'après M. Le Roy de Paulin, officier du génie, qui a laissé un Mémoire manuscrit fort intéressant sur le château de Brest, daté de 1777, il existait en 1559. M. de Fréminville dit, sans l'appuyer d'aucune preuve, qu'il fut construit en 1558. Nous pensons plutôt qu'il pourrait bien avoir été élevé en 1462, sous le gouvernement ou mieux la capitainerie, comme on le disait à cette époque, de Guyon de Quélénec, qui commanda à Brest de 1462 à 1489.

En effet, en 1462, Goulven de la Boixière reçut une somme de 1.800 livres à valoir sur la construction d'un boulevard, qu'il avait à faire devant le château de Brest. Ce boulevard nous semble avoir une telle analogie avec le ravelin, que nous croyons pouvoir les regarder comme faisant une seule et même chose. Nous sommes d'autant plus porté à émettre cette opinion, que nous ne voyons rien dans le château qui pourrait se rapporter au boulevard que La Boixière avait à construire.

Nous placerons donc sa construction vers 1462. D'ailleurs de grands travaux furent exécutés au château de Brest dans tout le XVème siècle et surtout de 1462 à la fin de ce siècle, et des sommes assez élevées y furent dépensées, comme nous le verrons plus loin.

Le Portail.

Brest (Bretagne) : château de Brest

Le portail ou entrée principale du château, avec ses deux grosses tours encore ornées de leurs machicoulis, surmontées de leurs toitures en éteignoirs, est devant vous dès que vous avez franchi la porte du ravelin.

La porte, jadis à plein cintre, de ce portail, ayant un guichet en ogive qui lui est accolé, donne accès sur la place intérieure du château. Le guichet et la porte étaient autrefois fermés par des pont-levis qui n'existent plus, mais dont on voit encore les traces.

Le portail tout entier, ainsi que les bâtiments qui donnent sur la place intérieure, ont été élevés au XVème siècle. Le portail, on le sait, par des documents certains, a été construit en 1464, sous le duc François II, père de la duchesse Anne.

En voici la preuve : Par mandement du 1er Mars 1464, ordre était donné de rabattre à un nommé Olivier Kervéat, fermier de l'impôt en Léon , une somme de 475 livres, qui lui avait été octroyée par le Conseil pour le marché fait avec lui touchant l'édification du portail de Brest ... etc. ....

Cette pièce, due aux savantes recherches de M. de La Borderie, et publiée par lui dans le Bulletin de l'Association Bretonne, ne laisse aucun doute sur la date de la construction du portail du château. Le style architectural de cette construction se rapporte aussi parfaitement bien à cette époque.

Les deux tours contenaient un rez-de-chaussée et un premier étage, dit M. Le Roy de Paulin (1777), des cachots et des prisons. Antérieurement, les tours servaient de logements aux agents d'affaires des ducs de Bretagne. Plus tard, le rez-de-chaussée fut transformé en prison, et les étages supérieurs furent occupés par la garnison. Vers 1865, les deux tours sont encore entièrement consacrées à des prisons militaires.

Courtines.

A droite et à gauche du portail sont deux courtines, qui s'étendent, l'une, vers l'Est, du portail à la tour de la Madeleine, en passant au-dessus de la fausse-braie ; l'autre, au nord, allant du portail au bastion Sourdéac.

Tous les archéologues, nous l'avons dit, sont d'accord pour constater dans ces deux courtines la présence de substructions romaines existant encore.

Le plus grand nombre les fait remonter au IIIème ou au IVème siècle de l'Ere chrétienne. Quelques autres, en très petit nombre il est vrai, prétendent qu'elles ne datent que du IXème ou Xème siècle ; mais ils se hâtent d'ajouter qu'elles ont été construites à cette époque, avec des matériaux romains provenant d'une ancienne forteresse élevée dans ce même lieu sous la domination romaine et tombée en ruines après la chute de l'Empire romain, c'est-à-dire vers la fin du Vème siècle. Ils basent leur opinion sur le peu de régularité des pierres et sur la grossièreté de l'appareil. Cette hypothèse repoussée par le plus grand nombre, qui regarde ces constructions comme parfaitement romaines, est peu probable, il nous semble. Aussi nous rangeant à l'opinion des derniers et nous rapportant à ce que nous avons déjà dit, placerons-nous leur érection au IIIème ou au plus tard au IVème siècle [Note : M. Aymar de Blois dit à ce sujet que : « La régularité de l'appareil tient souvent tellement à la nature des matériaux, qu'il ne faut pas être difficile sur ce point quand on rencontre dans l'ensemble du travail les caractères de l'époque romaine » (Des anciennes cités du pays des Occismiens, page 17)].

Quoi qu'il en soit de ces suppositions plus ou moins fondées, il est bien constant, bien certain, bien positif aujourd'hui que ces deux courtines contiennent des débris visibles de constructions romaines.

Sur celle de gauche, au-dessus de la fausse-braie, on voit très distinctement de la base, à une hauteur de un à deux mètres, sur une longueur de près de soixante mètres, le petit appareil romain, avec ses pierres carrées symétriquement posées, et les cordons composés de deux briques mises à plat, formant de longues zones horizontales, tranchant sur le reste par leur couleur rouge foncé, le tout relié ensemble par un ciment rougeâtre d'une dureté telle que les pierres et les briques sont brisées plus facilement. Deux cordons ou zones de briques sont seuls apparents, le reste est caché par la fausse-braie qui a été bâtie bien postérieurement. Ils sont séparés par six ou sept rangs des petites pierres carrées de l'appareil. L'épaisseur des briques est de quatre centimètres environ, et leur longueur de quarante centimètres, autant qu'il a été possible de les mesurer exactement, en raison des diverses couches de chaux dont on les a recouvertes dans les temps modernes, ainsi que les pierres et le ciment dans lequel elles sont encastrées.

Cette courtine avait trois tourelles dont on peut distinguer la place ; elles existent encore sur un plan de 1670, et ne furent probablement démolies qu'en 1677 ou même plus tard ; mais en 1690 elles n'existaient plus.

Passant à la courtine de droite, placée entre la tour du portail et le bastion Sourdéac, nous constaterons la présence de substructions bien plus importantes encore que celles dont nous venons de parler. Dans celle-ci, toute la base de la muraille étant à découvert d'un bout à l'autre, les substructions atteignent jusqu'à une hauteur de 4 à 5 mètres environ, en partant du rocher sur lequel elles sont appuyées. Les pierres carrées et les cordons de briques s'y voient aussi, et, près de la tour du portail, on peut parfaitement distinguer l'opus spicatum, feuille de fougères, arrête de poisson, si caractéristique des constructions romaines du IIIème au Vème siècle. Il s'y dessine avec sa régularité toute particulière, présentant des espèces de » couchés se suivant horizontalement en s'emboitant l'un dans l'autre.

Cette courtine n'avait que deux petites tourelles qui, comme celle de la courtine de gauche, ne ressortaient du mur que de la moitié de leur diamètre. On les voit sur le plan de Tassin de 1631.

De telles substructions constatées sur une si grande étendue et sur une telle hauteur, par toute la classe archéologique du Congrès breton, donnent à notre château une importance historique et archéologique toute particulière, surtout en raison de la position où il se trouve, au bout du monde, au fond de la vieille Armorique, dans l'ancien pays des Ossismiens, sur les rives de l'Océan, et ne peut laisser aucun doute sur cette question jadis si controversée de la présence des Romains dans notre pays.

Les trois grosses Tours.

Quant aux trois grosses tours, de la Madeleine, Française et de Brest, qui défendent les trois points principaux du château, elles sont très probablement du XVIème siècle. « Leur forte dimension, leur appareil magnifique, dit M. de La Borderie, ne permettent point d'y méconnaître des oeuvres du XVIème siècle, mais antérieures cependant au bastion Sourdéac ». Leur construction peut être placée entre 1553 et 1560 environ, époque pendant laquelle le duc d'Etampes fit exécuter de grands travaux au château de Brest, comme nous le verrons. La tour de la Madeleine, qui termine la courtine au-dessus de la fausse-braie, est peut-être pourtant du XVème siècle.

Nous disons est peut-être du XVème siècle, en voici la raison : on sait, d'après les comptes de Jean Dronyou, trésorier et receveur de Bretagne, qu'en 1424 une somme de 800 livres fut payée à Guillaume Perrier ou du Perrier, pour avoir fait élever une tour dans le château de Brest. En dehors de la tour de la Madeleine, nous ne voyons guère celle dont la construction pourrait être attribuée à du Perrier ; le système de cette construction peut d'ailleurs très bien se rapporter à cette époque.

Cette tour, du reste, dont la dimension est si grande, ne fait qu'en envelopper une autre beaucoup plus petite et infiniment plus ancienne, dont l'intérieur est à pans coupés et qui formait jadis très probablement l'angle de la fortification ancienne. Le mur extérieur que l'on voit n'est qu'un revêtement placé sur la vieille tour, on en distingue encore à peu près le point de jonction. Aussi les murs de cette tour sont-ils d'une épaisseur extrême.

La longue courtine qui relie cette tour à la tour Française est aussi probablement de la même époque, pourtant nous n'osons lui assigner aucune date.

La tour Française était du XVIème siècle. Elle est en partie abattue.

Dans la muraille qui forme le petit côté du trapèze, et qui conduit de la tour Française à la tour de Brest, se trouvent un guichet à plein-cintre, une porte de même, qui donnaient accès sur le Parc-au-Duc, appartenant à la Marine depuis 1785, et la fameuse tour César. Jadis la porte était fermée par un pont-levis, ainsi que le guichet, qui ne sert plus maintenant.

La Tour César.

Cette tour, regardée pendant longtemps comme ayant été construite par les Romains, ne date tout au plus que du XIIème siècle, de l'avis des hommes les plus compétents. Son système de construction, que l'on pouvait étudier jadis avant qu'elle fut recouverte d'une couche de chaux, ne laisse point de doute à cet égard.

Si la tour, dont on mit les restes au jour en 1832, était vraiment romaine, comme on l'a dit, n'est-il pas permis de supposer que la tour actuelle, ayant été construite à l'époque où l'autre tombait en ruines on lui donna le nom de tour César ou autrement des Romains, en souvenir de celle qui venait de disparaître ?

La tour César est ronde à l'extérieur et hexagone à l'intérieur. Elle a deux étages et une plate-forme. Une petite tourelle à toit pointu surbaissé, placée extérieurement, renferme l'escalier qui conduit aux divers étages. Son sommet est encore couronné de ses anciens créneaux et machicoulis. Elle a servi quelquefois de prison d'Etat ; M. de Kersausy y a été enfermé sous le règne de Louis-Philippe ; aussi est-elle percée maintenant de hautes fenêtres modernes qui lui donnent un aspect fort bizarre. Elle n'est plus employée vers 1865 que pour des magasins. Toujours recouverte d'une couche de chaux que l'on fait entretenir avec grand soin, vue du goulet, elle se détache en blanc tranchant sur les vieilles murailles grisâtres du château et peut servir d'amers pour l'entrée de la rade.

Deux petites courtines, ayant encore leurs machicoulis, conduisent à la tour César. Elles font partie du chemin de ronde qui permet de circuler sur les murailles tout à l'entour du château.

La grosse Tour de Brest.

Gagnant maintenant la grosse tour de Brest, par le chemin de ronde, en quittant la tour César, nous arrivons sur cette magnifique plate-forme d'où l'on a une vue si belle, si grandiose de la rade et du port. Cette puissante tour si solidement bâtie, que jadis on ne craignit point d'excaver sa base pour élargir le quai (Note : Ce fut en 1788 que la Marine fit ce travail lorsqu'on construisit les quais. Depuis on l'a reprise en sous-oeuvre par une maçonnerie en pierres de taille. Nous l'avons vue longtemps avec son excavation. On passait dessous, le quai étant très étroit en cet endroit) est sans nul doute du XVIème siècle. Son magnifique appareil est là pour l'attester. Son sommet a été refait par Vauban, dit M. de Fréminville, comme ceux des autres ouvrages, pour y mettre de l'artillerie de gros calibre.

La longue et haute courtine qui la suit et forme un des grands côtés du trapèze, domine l'entrée du port et conduit au Donjon. Cette courtine est en partie probablement de la même époque que la tour. Son système de construction doit le faire supposer, du moins pour la partie qui va de la tour au contrefort carré qui se voit à moitié environ de la longueur de la courtine ; à prendre de ce contrefort, encore garni de ses anciens machicoulis, comme le reste du mur, jusqu'à la tour d'Azénor, la muraille nous parait beaucoup plus ancienne, et pourrait être placée à la même date que la tour d'Azénor, c'est-à-dire vers le XIIIème siècle environ.

Jadis, une poterne percée dans le bas de cette muraille donnait accès à la rivière qui venait alors battre les fondements du château de ce côté. Un ouvrage en fer-à-cheval (Note : Ce fer-à-cheval fut démoli en 1788, lors de la construction des quais par la Marine), dont les traces se voient encore, défendait la poterne qui communiquait avec l'intérieur du château, au-dessous des magasins actuels (c'est-à-dire en 1865) de l'artillerie, qui n'existaient point encore alors. Dans l'emplacement qu'ils occupent, se trouvait un ravin profond avec une fontaine et des lavoirs. On voit encore ce ravin sur un plan de 1767.

Nous arrivons maintenant au Donjon.

Le Donjon.

A l'extrémité de cette courtine se trouve le vrai château, la véritable forteresse ou citadelle, le donjon.

Cette partie du château était jadis séparée du reste de la fortification et de la place par un profond et large fossé ; sa porte à pont-levis en faisait une citadelle indépendante, capable de se défendre seule, même après la reddition des autres murailles de la place, murailles qui formaient anciennement une enceinte quasi-urbaine, dans laquelle s'élevaient non-seulement des casernes, mais aussi des maisons et les bâtiments de dépendances de la forteresse. Une vue de Brest par Tassin, qui fut aussi gravée en 1631, comme le plan du château, ne laisse guère de doute à ce sujet. On y voit dans la grande enceinte des maisons, de grands arbres, etc…

Vers 1865, le donjon se compose de trois tours : le Donjon proprement dit, la tour du Midi ou de la duchesse Anne, et la tour d'Azénor. Sa porte d'entrée qui est placée entre la tour d'Azénor et un contrefort carré est surmontée d'une pierre sur laquelle était jadis sculptée un Lion assis, tenant dans l'une de ses pattes un étendard parsemé d'hermines, armes de la Bretagne. On en voit encore les contours.

Les diverses constructions du donjon, comme les autres parties du château, se rapportent à des époques fort différentes les unes des autres ; nous allons essayer de les indiquer.

La Tour d'Azénor.

Brest (Bretagne) : château de Brest

Nous étudierons d'abord la jolie tour qui porte ce nom, si élégante avec sa couronne de machicoulis, et qui remonte au XIIIème siècle. Le système de sa construction, son petit diamètre « qui la fait ressembler à une de ces longues et sveltes colonnes de la première époque » le font supposer.

Son nom, d'après les légendes, lui vient de la fille d'un Prince de Léon, qui tenait sa cour à Brest, en 537, et que par cette raison, on appelait Roi de Brest, dit la légende de Saint-Budoc d'Albert Le Grand.

Azénor ayant épousé un comte de Goëllo, fut accusée d'adultère par sa belle-mère, épouse en seconde noces du Prince de Léon, et en attendant qu'on lui fit son procès, elle fut enfermée dans une des tours du château de Brest. Des juges, gagnés sans doute, la condamnèrent, quoiqu'elle fut innocente, à être placée dans un tonneau et à être jetée en mer et livrée aux caprices des flots. La tour où fut emprisonnée cette malheureuse princesse conserva son nom et l'a transmis à celle qui l'a remplacée sans doute, car certes ce n'est point la même.

Cette histoire d'Azénor, ou vie de Saint-Budoc, son fils, est une des plus jolies et des plus gracieuses légendes qui se trouvent dans le livre si curieux d'Albert Le Grand.

La Tour du Midi ou de la Duchesse Anne.

La tour du Midi, qui se présente si bien et si imposante avec ses vieux créneaux, date du XVème siècle probablement, peut-être même du XIVème, comme le front du Donjon de ce côté.

On l'appelle aussi Tour de la duchesse Anne, parce que sans doute c'est celle que la belle et tant aimée Duchesse habita lorsqu'elle vint à Brest en 1505, après avoir fait ses dévotions au Folgoët. Anne était alors Reine de France et épouse de Louis XII. Pendant son court séjour à Brest, elle vint voir et revisiter sa belle et grande nef la Cordelière, qu'elle ne pouvait se lasser d'admirer ; mais comme alors ni le Donjon tout entier, demeure habituelle des Ducs lorsqu'ils venaient à Brest, ni le faubourg du château, la ville actuelle, ne se trouvaient assez grands pour contenir et héberger longtemps sa nombreuse et brillante suite, elle fut forcée de se retirer après y avoir passé quelques jours seulement.

Le seul souvenir qui reste de ce voyage à Brest, est rapporté par un chroniqueur du temps : « Lorsque la Reine, dit-il, vint au Folgoat, après ses oblations et oraisons faites, lui print volonté d'aller voir son château de Brest, lequel est situé sur la mer, environ six lieues dudit lieu du Folgoat. Auquel lieu de Brest estoit pour lors la grant nef, nommée la Cordelière, en laquelle fut deux foys pour veoir et revisiter et estoit émerveillée de veoir ung tel vaisseau ; que ladite dame ne tarda pas longuement à Brest, car il n'y avoit pas lieu pour y soutenir un tel train, comme estoient les nobles hommes de sa compagnie ».

La Tour du Donjon.

Cette belle tour, qui domine non-seulement le donjon, mais même le château tout entier et que l'on voit de partout, fut construite au XVIème siècle. Ce fut Sourdéac, René Rieux de Sourdéac, marquis d'Ouessant, lieutenant-général pour le Roi en Bretagne, l'un des capitaines les plus distingués qui aient commandé à Brest, qui la fit construire, vers 1597, à la place d'une vieille tour romaine qui tombait en ruines, ou plus probablement qui ne pouvait entrer dans le nouveau système des fortifications. Comme nous l'avons rapporté dans notre Introduction, ce fut sous cette ancienne tour que l'on trouva la fameuse plaque en cuivre sur laquelle se voyaient l'effigie de César d'un côté, et de l'autre les mots Julii Cœsaris. Sourdéac, fit replacer cette plaque dans les fondements de la nouvelle avec une plaque toute d'argent, portant les noms d'Henri IV et le sien ainsi que le millésime. Ce sera donc sous la tour du donjon qu'un jour à venir, bien éloigné encore sans doute, on trouvera ces deux plaques, l'une en cuivre, l'autre en argent. Cette dernière, pense le chanoine Moreau, offrira un trop grand attrait à cause de sa valeur, aux ouvriers qui la trouveront un jour, pour qu'ils ne la fassent point disparaître, s'ils le peuvent ; voici comment il exprime ses craintes : « Il semble qu'il eût mieux fait de la faire aussi de cuivre, qui est le métal qui se deffend le mieux du temps et se gâte moins en terre, et puis pouvant advenir dans les siècles suivants si elle estoit trouvée entière à cause de son prix, ne seroit pas rendue, si ceux qui la trouvoient la pouvoient cacher ».

Cet historien eût mieux fait certainement d'indiquer la place qu'occupait la tour dont il parle et de ne pas laisser d'incertitude sur un fait aussi important. Heureusement que l'on peut par analogie réparer son omission. La tour qu'il a oublié de désigner ne peut être que celle du donjon, comme nous l'avons dit dans notre Introduction.

Bastion Sourdéac.

Tout à l'entour du donjon s'élève le beau et solide bastion Sourdéac, dont l'époque de construction nous est parfaitement connue par les lettres de Henri II, de Charles IX, du duc d'Etampes, de Carné, commandant de Brest, et de l'ingénieur lui-même, nommé Pietro Frédans, lettres qui se trouvent dans les Preuves de l'Histoire de Bretagne, de Dom Morice et de Dom Taillandier.

Nous savons d'une manière positive, par une lettre adressée au duc d'Etampes par Pietro Frédans, ingénieur italien chargé des fortifications en Bretagne, que les fondements de ce bastion, désigné alors sous le nom de boulevard du donjon, furent posés au mois de Novembre 1560. Nous savons aussi qu'il ne fut terminé, après avoir passé par de nombreuses vicissitudes, qu'en 1597, sous le gouvernement de Sourdéac, qui lui a laissé son nom. Né en 1548, décédé en Anjou en 1628, René de Rieux, seigneur de Sourdéac, marquis d'Oixant (Ouessant), succéda en 1591 à son frère Guy au commandement de la place de Brest.

Brest : seigneur de Sourdéac et château de Brest

Il paraîtrait qu'antérieurement à l'époque où il fut commencé, 1560, malgré les travaux entrepris par le duc d'Etampes en 1553, le château était dans un état peu convenable pour résister à l'ennemi. Jérôme de Carné, lieutenant de roi à Brest, qui, comme son père, Marc de Carné, auquel il avait succédé, y commandait en chef en l'absence du gouverneur, nous a laissé à ce sujet une curieuse lettre, dans laquelle il dépeint l'état de la garnison et de la place au mois d'avril 1560. La pauvreté des mortes payes de la garnison était telle alors que la plupart avaient été contraints de vendre leurs arquebuses et leurs autres armes, pour pouvoir vivre, ne conservant que leurs hallebardes. Il leur était dû, à cette époque, deux ans et quatre mois de leur paie. « Je ne vous veult celler, disait de Carné, qu'il ne m'est possible d'y tenir ordinairement les quatre-vingts qui sont ordonnez pour la garnison, parceque les hostes qui les ont nourris et fait crédit jusques ici, ne leur veulent plus rien bailler. La pluspart me disent ne plus vouloir servir et se retirer chez leurs amis qu'ils ont en ce pays …., etc… Je crois, Monseigneur, ajoute-t-il plus loin, que de ceste heure estes adverti, comme l'armée de la Royne d'Angleterre s'est retirée pour se ravitailler. Si ils estoient bien advertis du mauvaix ordre qu'il y a céans, tant pour n'avoir achevé les ouvrages qui sont commencés que pour les aultres nécessités que vous cognoessez y estre, je ne fais doubte qu'ils n'y entreprinssent plus hardiment qu'ils n'ont fait au passé ».

Ces plaintes furent entendues sans doute, car on envoya des soldats à de Carné, et l'ingénieur Frédans reçut l'ordre de se rendre à Brest pour faire les travaux nécessaires à la défense de la place.

Dès le mois de novembre, cet ingénieur entreprit les travaux et commença le boulevard du donjon. Il en informa le duc d'Etampes, de Saint-Malo, où il s'était rendu ensuite. « Monseigneur, dit-il, incontinent après votre partement de Nantes, suivant le commandement qu'il vous pleut me faire, je me transporté à Brest, et y estant je fis commencer les fondements du donjon, où j'espère que dedans huit jours on commencera à asseoir la pierre de taille…., etc… Et de moy je parts présentement pour m'en retourner à Brest, affin de donner ordre que en meilleur diligence qu'il me soit possible le faire paroistre le dit boullevard en deffense et quoique ce soit jusqu'à la concurrence de l'argent qui a esté fourni par vostre ordre …., etc …. Saint-Malo 29 Novembre 1560 ».

Malgré le vif désir de Pietro Frédans de pousser les travaux avec activité, et, quoique des sommes assez importantes eussent été promises pour la continuation du boulevard du donjon, en 1571, onze ans après il n'était point encore terminé, nonobstant les instances réitérées de Carné pour obtenir son achèvement. Cette année, le 17 Décembre, le roi lui répondait qu'il croyait que le duc d'Etampes « eût ordonné cette année une bonne somme pour les réparations de votre place, même pour la construction du boulevard ». Il lui promettait aussi pour l'année suivante une somme de 3.000 livres « afin de mettre le boulevard en quelque sûreté, et que d'an en an l'on y employe encore pour le rendre parfait le plus tôt qu'il le pourra ». Pourtant, en 1576, les fortifications étaient toujours dans le même état ; mais le roi, loin alors de lui envoyer des fonds, lui faisait connaître qu'il était impossible de lui rien donner vu l'état des finances. Le boulevard resta donc, ainsi que les autres travaux, sans être terminé. Cet état continua jusqu'en 1597 environ, époque à laquelle Sourdéac, qui était gouverneur de Brest depuis 1591 fit terminer ce boulevard et lui donna le nom de bastion Sourdéac.

Si nous connaissons parfaitement l'époque où ce bastion fut commencé et celle où il fut terminé, nous ne savons au juste à qui en attribuer le projet. Ce bastion si fort, si solide, ne rentrerait-il point dans le système de défense du commandeur de Villegagnon, qui trouvait que la place n'était point bien défendue, surtout du côté du donjon : « Que du moulin l'on nous peut oster » (Note : Peut-être veut-il parler ici du moulin qui se trouvait jadis à l'angle de l'ancienne rue du Petit-Moulin, remplacée aujourd'hui par la rue du Pont. Ce moulin, placé en face de la Fontaine, se trouvait en effet sur une hauteur qui devait dominer le Donjon), dit-il, et qu'il voulait couvrir pour empêcher l'ennemi d'en approcher. Si nous accordons à de Villegagnon l'honneur d'avoir indiqué les points vulnérables de la place et d'avoir engagé à s'occuper de leur défense, nous devons probablement attribuer au duc d'Etampes le projet exécuté par Pietro Frédans.

Ce bel et imposant ouvrage, surmonté aux angles par ses élégantes échauguettes ou guérites, et percé de larges embrasures de casemates, domine majestueusement le quai du port et la machine à mâter elle-même.

La courtine romaine comprise entre le donjon et la porte principale va nous ramener à notre point de départ, le Portail.

Si (vers 1865) nous passons sous le long couloir du portail, sur lequel s'élèvent les deux grosses tours qui servent de prison militaire, nous arrivons sur la place d'armes, ou grande cour intérieure du château. Lorsque la Bretagne formait un duché indépendant, les étages supérieurs des tours et des bâtiments, qui leur sont adossés, servaient de logements aux agents d'affaires des Ducs, qui eux habitaient le donjon. En 1341, Jean de Monfort l'habita après le siége. En 1342, son épouse, Jeanne de Flandre, y porta ses trésors et s'y rendit après que son mari eut été fait prisonnier par les Français. En 1342, Edouard, roi d'Angleterre, l'habita aussi. En 1347, Charles de Blois y fut renfermé. En 1372, Jean IV l'habitait. En 1373, il vint à Brest pour s'embarquer pour l'Angleterre. En 1375, il y vint encore. En 1505, la duchesse Anne habita la tour du donjon qui porte son nom.

Caserne Plougastel.

En entrant dans la cour, le premier édifice qui frappe les regards, à gauche, est la belle caserne de Plougastel, qui doit son nom à la position qu'elle occupe en face de la côte de ce nom. Ce vieux bâtiment, construit sous le règne de Henri IV, est surmonté d'une horloge à marteaux et orné de fenêtres de mansarde fort bien sculptées. Il fut bâti par Sourdéac pour loger les officiers de la place, c'est-à-dire entre 1591 et 1624.

Eglise du Château.

Derrière cette caserne est une cour petite, longue et étroite, où se trouvent les cuisines de la garnison, bâties en 1819, et une fontaine qui a été construite, vers le milieu du XIXème siècle, sur l'emplacement qu'occupait à peu près jadis le choeur de l'Eglise du château, démolie en 1819, et dont l'érection remontait à 1064. Elle fut érigée, à cette époque, par les ordres de Conan II, lorsqu'il fit restaurer le château, ou comme il le dit la cité de Brest ; en 1741 environ, M. l'ingénieur Frézier, chargé des fortifications, la fit réédifier sur un plan tout nouveau et sur une plus grande échelle. Cette église, qui avait ses fonts baptismaux, ses registres de naissances, mariages et décès particuliers et dans laquelle on inhumait, servit d'église paroissiale jusque sous le règne de Henri II, où le prieuré des Sept-Saints, qui appartenait à l'abbaye Saint-Mathieu, fut élevé au titre de paroisse, en raison de l'augmentation des faubourgs. Elle ne servit plus alors qu'aux personnes qui habitaient le Château et à celles qui demeuraient à Porstrein. Les archives de la ville possèdent les registres de l'église de 1608 à 1664 et de 1727 à 1731. Les premiers sont écrits en latin. (Il existe une lacune de 1664 à 1727). Nous y trouvons qu'en 1608, haute et puissante demoiselle Marie de Rieux, fille de Sourdéac, se maria dans cette église à très haut et puissant seigneur messire Sébastien de Ploeuc, marquis du Timeur, baron de Kergorlay, ... , etc.

Des parapets de la petite cour, où s'élevait jadis l'église du château, on a une délicieuse vue de la rade et du nouveau port de commerce.

Caserne Monsieur.

Sur le même côté et en prolongement de la caserne Plougastel, s'élève un beau bâtiment à galerie, appelé Caserne Monsieur, bâtie en 1825, sur l'emplacement d'une autre très ancienne, qui tombait en ruines à cette époque.

Caserne César.

Perpendiculairement à la caserne Monsieur, formant avec elle un angle droit et l'un des côtés de la place, se voit la caserne dite de César, construite en 1766, dit M. Le Roy de Paulin. Entre ces deux bâtiments est le passage qui conduit à la porte du château donnant sur le Parc-au-Duc.

En arrière de la caserne César, qui prend son nom probablement de ce qu'elle se trouve auprès de la tour de ce nom, du même côté et sur une ligne parallèle, sont des magasins adossés à la courtine qui relie la tour César à la tour de Brest.

La Salle d'Armes.

Le bâtiment renfermant la belle salle d'armes du château, forme un des angles rentrants de la place avec la caserne César. Il a été bâti, en 1777. Nous ne décrirons point la salle d'armes car cela ne rentre pas dans notre sujet. Nous dirons seulement qu'elle mérite d'être visitée.

Logements des Lieutenants de Roi et Majors de la Place.

Sur l'emplacement qu'occupe la salle d'armes, un peu plus en avant sur la place, se trouvaient jadis les logements du Lieutenant de Roi et du Major de la Place, ayant deux forts jolis jardins, l'un d'agrément, l'autre potager, s'étendant l'un et l'autre jusqu'à la courtine qui relie la tour de Brest au donjon. De ces jardins on descendait par un chemin en pente douce et en zigzag, jusqu'au bas du ravin où se trouvaient les lavoirs et la fontaine, ainsi que la poterne donnant sur la rivière. Ce ravin fut comblé en 1777, les logements du lieutenant de roi et du major jetés bas, et sur cet emplacement on construisit les magasins et ateliers de l'artillerie et le bâtiment de la salle d'armes.

Les Souterrains.

En dessous du jardin potager des lieutenants de roi, existent deux souterrains fort beaux. Ces souterrains, parallèles entre eux et avec la muraille qui donne sur le quai de la mâture, sont séparés par un mur fort épais dans lequel se trouve une grande porte qui les fait se communiquer. A l'extrémité de chacun d'eux est une vaste cheminée. Leurs voûtes à plein cintre ont sept mètres environ d'élévation. Leur construction est bien postérieure à celle des souterrains du donjon. Ils ont peut-être été percés par les ordres de Vauban ; leur système de construction se rapporte assez bien à cette époque.

En 1745, des prisonniers anglais y furent enfermés. On les boucha en 1777, lorsque le ravin fut comblé pour la construction des bâtiments de l'artillerie.

Quelle fut la raison qui fit fermer ces vastes souterrains, qui pouvaient, si l'on en juge par leur bel état de conservation, parfaitement servir de magasins ? On ne la sait point et on la comprend difficilement.

Sur une pierre de la porte intérieure, on trouve gravée l'inscription suivante : « Ces souterrains ont été fermés lors de la construction de l'arsenal en 1777. Sous les ordres de MM. Miscault et Gourdon capitaines d'artillerie ».

Une ardoise suspendue à la muraille porte écrit en grandes lettres :

CES . SOUTERRAINS . ONT . ÉTÉ . FERMÉS . LORS DE LA CONSTRUCTION . DE L'ARCENAL . EN 1777 .

PAR M. LE LIÈVRE . ENTREPRENEUR .

SOUS . LES . ORDRES . DE MM. MISCAULT .

ET . GOURDON . CAPITAINES . D'ARTILLERIE .

SOUS . LES . SOINS . DES . SIEURS . LA TOUR .

ET . LA JOYE . SERGENTS . DU CORPS .

DES MINEURS.

Sur les murailles sont gravés en grand nombre des noms d'anglais et des dates, dont la plus ancienne, selon M. de Fréminville, remonte à 1744. Sur un plan dressé en 1754 par M. Le Roy de Paulin et signé par lui, il est écrit que ces souterrains servirent de prisons à des anglais en 1745.

Ce fut lorsqu'on les découvrit, en 1832, en déblayant les terres qui les obstruaient, qu'on mit au jour, croyons-nous, les fondements de la tour, dont nous avons parlé dans notre introduction, et qui, dit-on, était de construction romaine.

Ces beaux et vastes souterrains, parfaitement conservés et très secs, servent vers 1865 de magasins. Deux grandes et belles fenêtres percées dans la muraille qui donne sur le quai de la mâture, permettent alors à l'air et à la lumière d'y pénétrer abondamment.

La Tour de Brest.

Presqu'au-dessus de ces souterrains se trouve la magnifique tour de Brest. Une fort jolie porte à fronton donne accès dans cette tour, dont les vastes et hautes chambres voûtées servent de magasins à l'artillerie de terre et dont le sommet est couronné par la superbe plate-forme sur laquelle nous avons passé en faisant le tour des murailles du château.

Le Donjon.

En quittant la tour de Brest, rendons-nous au donjon que nous avons déjà visité extérieurement. Remarquons que tout le front du donjon de ce côté, le dessus de la porte, la tour d'Azénor, le contre-fort et la tour du Midi sont encore garnis de leurs anciens machicoulis. La porte, dont l'architrave a la forme d'un angle obtus très ouvert, est assez basse et surmontée d'une pierre sur laquelle était sculpté jadis, comme nous l'avons déjà dit, un Lion tenant l'étendard de la Bretagne dans une de ses pattes. Aussitôt après avoir passé sous cette porte, se présente un escalier en pierres de plusieurs marches, qui conduit à la petite cour intérieure du donjon, où se trouvent à gauche un puits et à droite un large escalier en pierres qui descend aux fameux souterrains creusés sous le donjon. Sur le côté droit de cette cour s'élèvent la tour du Midi ou de la duchesse Anne et la tour du donjon.

En franchissant encore un escalier de quelques marches, on arrive sur la plate-forme du bastion Sourdéac, d'où l'on peut admirer la belle tour du donjon, percée maintenant, du côté de la ville, de grandes fenêtres modernes. A l'une des extrémités de cette plate-forme, donnant sur le quai de la mâture, est la tour d'Azénor dans un état de délabrement et d'abandon complets que l'on constate avec regret (situation en 1865), mais que l'on s'explique difficilement. Cette tour, ronde à l'extérieur, est octogone à l'intérieur, offrant cette bizarrerie toute particulière de construction, que les pans coupés de l'octogone ne se superposent point exactement les uns sur les autres. L'état de vétusté dans lequel on laisse cette tour, permet de constater facilement cette construction singulière, que l'on peut expliquer peut-être, en supposant que les planchers ayant été placés à chaque étage, avant la construction de l'étage supérieur, on a bâti ensuite, sans avoir de guide certain pour la pose des pans coupés de la maçonnerie supérieure.

Comme nous l'avons dit, cette tour doit son nom à Azénor, fille d'un prince de Léon, qui, d'après Albert Le Grand, tenait sa cour à Brest en 1537. Du reste, les comtes de Léon étaient de temps immémorial possesseurs du château de Brest, lorsque l'un d'eux, Hervé IV de Léon, criblé de dettes par son inconduite, fut forcé de le vendre au duc Jean Ier, en 1239, pour une somme de 100 livres ou 100 écus de rente, et une haquenée blanche, ajoutent quelques historiens.

La Tour du Midi ou de la Duchesse Anne, et la Tour du Donjon.

Ces tours, parfaitement conservées et entretenues avec soin, présentent à leurs divers étages, auxquels on parvient par des escaliers en pierres, de vastes appartements à embrasures de fenêtres d'une grande profondeur, en raison de l'épaisseur des murs.

Nous avons dit pourquoi la tour du Midi portait le nom de la duchesse Anne. Ce fut cette tour ou celle du donjon qui servit de prison à Charles de Blois, en 1347, après qu'il eut été fait prisonnier par Jean IV à la bataille de Saint-Aubin du Cormier, en attendant qu'on l'envoyât en Angleterre.

Dans ces deux tours on voit encore vers 1865 les salles d'honneur, celles des gardes, les chambres d'habitation, les offices, les cuisines et la chapelle, dont il reste quelques sculptures dans la vaste embrasure d'une fenêtre de la tour du Midi. Le dôme de cette chapelle parfaitement intact présente encore ses quatre nervures retombantes, partant d'une élégante clef de voûte, et venant s'appuyer sur des consoles représentant des figures d'animaux fort bien sculptées. D'un côté, se voit un lion, de l'autre, une tête de bélier… etc., etc.  L'ornementation de cette chapelle doit remonter au XVème siècle environ, si on en juge par ce qui reste en 1865. Toutes ces vastes salles sont occupées vers 1865 par les divers services de la guerre : les écoles régimentaires, le tribunal, etc.

D'immenses fenêtres modernes percées dans la muraille de la tour du Midi et du donjon, du côté de la cour, ont remplacé les anciennes croisées à lancettes, qui devaient servir jadis à éclairer, d'un jour douteux, ces vastes salles appropriées à des moeurs et à des usages fort différents de ceux de notre époque.

Les Souterrains.

C'est au-dessous de ces tours, à une grande profondeur, que se trouvent de noirs et longs souterrains, où l'eau suinte toujours à travers les murs, et qui, malgré leur état de conservation, obligent en certains endroits, celui qui les visite, à se courber presque jusqu'à terre, pour arriver au point extrême de ce lugubre séjour, l'oubliette. Après être descendu par une pente assez rapide, armé de torches allumées pour purifier l'air et pour se guider le long de ces sombres galeries, dans lesquelles l'air arrive à peine et la lumière du jour jamais, on parvient à ce cachot ou oubliette, creusé encore au-dessous des souterrains, où la vie du condamné qu'on y descendait était aussi arrivée à son but extrême, à sa fin ; car jamais celui qu'on y avait jeté ne revoyait la lumière. Un trou percé dans la terre de la galerie ouvre sa bouche béante au niveau du sol ; c'est par là que passait le malheureux condamné à une nuit éternelle.

Maintenant on arrive dans ce gouffre par une échelle, qui vous descend dans une excavation de quelques mètres carrés, où l'air ne parvient qu'après s'être chargé de la froide humidité des souterrains. Une large pierre fermait autrefois l'orifice de cet affreux cachot sur le malheureux qu'on y enterrait vivant.

M. de Fréminville rapporte, dans ses Antiquités du Finistère, que lorsque M. Le Gentil de Quélern, colonel du génie, directeur des fortifications de Brest, fit déblayer et nettoyer toutes les parties souterraines du château, en 1824, on trouva dans cette oubliette des cheveux et les ossements blanchis de deux squelettes humains.

Ces noirs souterrains et l'oubliette datent sans doute du moyen-âge, et ont été percés lorsque le donjon entier fut construit au temps de la féodalité. D'après le traité qui rendit au duc de Bretagne, en 1397, le château de Brest, après l'occupation anglaise, acte qui se trouve dans les preuves de Dom Morice, sous le titre de : La ville et le château de Brest rendus au Duc de Bretagne, M. de Courcy pense que le donjon primitif fut construit, vers la fin du XIVème siècle, par les Anglais, pendant qu'ils occupaient la forteresse de Brest. Voici la partie de ce long traité sur laquelle il base son opinion : « Rex … cum nuper per quemdam tractactum … castrum et villa de Brest in Britannia, ac quidam locus super quem quamdam bastidam nuper erigi et fieri fecimus per nomen castri de Brest …. etc. » (D. Morice, T. II, col. 677).

Ce qu'il y a de bien positif et de bien certain, c'est que les murailles qui forment les galeries des souterrains ne présentent en aucun endroit les caractères des constructions romaines.

Du donjon et de ses noirs souterrains, nous nous dirigeons vers la porte du château, par laquelle nous sommes entrés, en longeant un édifice relativement neuf, bâti en 1822, par la Ville, pour servir de prison civile, à la condition de le laisser à la Guerre après un certain nombre d'années de jouissance. Le terme étant expiré, et une vaste et belle prison civile ayant été élevée près de la porte du Fort-Bouguen, en 1859, ce bâtiment a été remis à la Guerre. Au rez-de-chaussée se trouvait le corps-de-garde du château, le reste était occupé par les prisons et le logement du geôlier.

Toute cette partie de la fortification, dans laquelle sont placées la porte principale du château et une lourde porte à plein cintre qui conduit dans les prisons et sur la fausse-braie, où se voient les substructions romaines, forme le quatrième côté de la place d'armes intérieure. A droite de la porte sont de larges escaliers en pierres, à rampes superposées, menant sur les remparts des deux courtines regardant la ville et munies d'embrasures destinées à mettre de l'artillerie.

Tel est actuellement le château de Brest dont nous venons d'essayer d'esquisser une description succincte, en assignant des dates, les unes exactes, les autres douteuses, peut-être, à chacune de ses constructions.

Si nous plaçons ces dates dans leur ordre chronologique, nous aurons :

IVème siècle : Les deux Courtines avec les Substructions romaines.

XIIème siècle : La Tour d'Azénor.

XIIIème siècle : La Tour César. La Courtine qui relie la Tour de Brest à la Tour d'Azénor, du contrefort à la Tour d'Azénor.

XIVème siècle : La Tour du Midi ou de la Duchesse Anne.

XVème siècle : La Tour de la Madeleine (1424). Le Ravelin casematé qui couvre la porte principale (1462). Le Portail (1464).

XVIème siècle : La Tour de Brest. La Tour française. La Tour du Donjon. Le Bastion Sourdéac (1560-1597). La Caserne Plougastel.

XVIème et XVIIème siècles : Les Fortifications avancées.

XVIIème siècle : Les Souterrains sous les magasins d'artillerie.

XVIIIème siècle : La Salle d'Armes (1777). Les Magasins de l'Artillerie (1777).

XIXème siècle : Les Cuisines. La Caserne Monsieur (1825).

Nous rappellerons encore, car nous ne saurions trop le dire, que nous ne donnons quelques-unes de ces dates que comme des probabilités, et que nous ne prétendons point les regarder comme incontestables.

E. Fleury - 1865

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