Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

CAHIER DE DOLÉANCES DE BÉDÉE EN 1789

  Retour page d'accueil       Retour Ville de Bédée 

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Subdélégation de Montfort. — Dép. d'Ille-et-Vilaine, arrondissement et canton de Montfort.
POPULATION. — En 1793, 2.667 hab. (Arch. Nat., D IV bis 51) ou 2.507 hab. (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série L).
CAPITATION. — Total en 1770, 2.111 l. 1 s., se décomposant ainsi : capitation, 1.414 l. 13 s. 6 d. ; 21 d. p. l. de la capitation, 123 l. 15 s. 8 d. ; milice, 188 l. 10 s. 9 d. ; casernement, 345 l. (Ibid., C 3981). — En 1778, 697 articles (Ibid., C 3982).
VINGTIÈMES. — En 1787, 4.767 l. 15 s.
FOUAGES. — 57 feux 2/3 1/16. — Fouages extraordinaires, 1.099 l. 17 s. 2 d.

OGÉE. — Sur la route de Rennes à Saint-Brieuc ; à 10 lieues 3/4 au S. de Saint-Malo; à 4 lieues 1/3 de Rennes et à 1 lieue 1/8 de Montfort. — 2.400 communiants. — Il s'y tient une foire par an. Son territoire forme un pays plat, dont les terres sont excellentes ; elles sont surtout fertiles en froment et en pâturages. Les fruits, qu'on y cueille en abondance, servent à faire du cidre. En outre, il y a des landes et deux petits bois taillis, dont le plus grand peut contenir environ 60 arpents.

PROCÈS-VERBAL. — Assemblée électorale, le 30 mars, au lieu ordinaire des délibérations, sous la présidence de Jean-Thérèse Juguet, sr. de la Bretonnière (voir cahier de doléances de Montfort-sur-Meu), avocat au Parlement, sénéchal et seul juge de la juridiction du prieuré de Saint-Pierre de Bédée, exerçant en cette qualité et faisant fonction de juge des juridictions de la prévôté de Bédée et annexes, assisté de Gilles Robiquet (voir cahier de doléances de Montfort-sur-Meu), avocat et procureur fiscal desdites juridictions, ayant pour adjoint Louis- Marie Touppé, l'un des notaires et procureurs, en l'absence du greffier. — Comparants : Charles-Marie-René Bufferan, avocat ; Jean-François Alliou, procureur fiscal de plusieurs juridictions et sénéchal de Cohan et le Vaurouël ; Joseph Cochery, trésorier en charge ; Pierre Auvé, trésorier en charge ; Gilles Poulnais ; Pierre Berthelot ; Julien Marquer ; Jean Daugan ; Olivier Royer ; Joseph Even ; Pierre Demay ; François Desbois ; Julien Mahé [fermier, syndic de la corvée] (voir la note qui suit) ; Thomas Iger ; François Rabinniaux ; François Jouanin ; François Denieul ; Jean Saiget ; François Boullier ; Julien Carissan ; Joseph-Augustin Denoual ; Joseph Houée ; Pierre Houée ; Pierre Pichon ; Louis Roullé ; Pierre Briand ; Jean Lohat ; Jean Letort ; Mathurin Guerrier ; Mathurin Guillard ; Clément Paves ; Pierre Muret ; François Deshais ; François Touppé fils ; Julien Genaitay ; Jean Desbois ; Jean Perschais ; Geffroy Thébault ; Augustin Queslavoinne ; Julien Deffains ; Pierre Bethuel ; Pierre Quily ; François Brille ; Julien Ruault ; François Jouaire ; Guy Verger ; René Yger ; François Mahé ; Mathurin Lohat ; Geffroy Mary ; G. Cochery ; Joseph Maudet ; Guillaume Auvé ; Joseph Colly ; Jean Nouyon ; Pierre Betuel ; Mathurin Renoult ; Jean Maudet ; P. Grigoire ; Robert Deffains ; Louvel ; G. Reimont ; Pierre Lebreton ; J. Roset. — Députés : Julien Mahé, de la Bariais, et Julien Carissan, du Margat.

Note : La 15 juillet 1783, il avait demandé à être déchargé de ses fonctions de syndic, comme étant éloigné du bourg de trois quarts de lieue ; mais il fut débouté de sa demande (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 4888).

Cahier des remontrances, plaintes et doléances des habitants de la paroisse de Bédée, évêché de Saint-Malo [Note : Les passages imprimés en italiques sont empruntés aux Charges d’un bon citoyen de campagne].

SIRE,
Appelés, comme vos autres fidèles sujets de l'ordre du Tiers Etat, pour vous faire part de nos doléances et aviser aux moyens de réformer les abus en tous genres qui nous écrasent depuis si longtemps, nous n'avons garde de redouter ces terribles impôts, tels que la gabelle ou impôt sur le sel, pour une province où cette denrée est si nécessaire, surtout pour féconder nos terres : les vues de sagesse qui animent Votre Majesté nous rassurent entièrement de ce côté là ; rien n'égale aussi notre sensibilité sur votre bonté paternelle ; nous allons y répondre avec la fidélité que nous lui devons par le récit de nos principaux griefs relativement aux deux autres ordres.

— On nous enlève annuellement une douzième partie de tous nos grains et filasses pour les dîmes (voir la note qui suit).

Note : Neuf traits de dîme, dans la paroisse de Bédée, appartenaient en commun au prieuré de Bédée et au prieuré de Saint-Nicolas de Montfort, dépendant tous deux de l'abbaye de Saint-Melaine (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série Q, déclarations des biens du clergé du district de Montfort). En 1762, Jean Chemin a affermé, outre le prieuré de Bédée, « les grosses et menues dîmes de toutes espèces de grains et filasses qui se lèvent et cueillent à la douzième gerbe dans les traits appelés le trait du Coudray et le trait de Blavon, s'étendant en ladite paroisse de Bedée, et qui dépendent des prieurés de Saint-Pierre de Bedée et de Saint-Nicolas de Montfort » (Arch. d'Ille-et-Vilaine, H 22, prieuré de Bedée, bail du 22 mai 1782). Le prieuré de Saint-Samson de Thélouet, dépendant de l'abbaye de Saint-Sulpice-la-Forêt, possédait deux dîmereaux à Bédée (Abbé ANGER, Cartulaire de l'abbaye de Saint-Sulpice-la-Forêt, dans les Mémoires de la Société archéologique d'Ille-et-Vilaine, 1909, t. XXXIX, 1ère partie. pp. 185-186).

Des ecclésiastiques, surtout les moines bénédictins, tirent annuellement des sommes considérables de notre paroisse (voir la note 1 qui suit) et n'en entretiennent pas même le clocher, la nef, ni le cimetière et jamais ne fournissent aucun ornement (voir la note 2 qui suit).

Note 1 : Dans la paroisse de Bédée se trouvait, en effet, le prieuré de St-Pierre de Bédée « consistant en la maison priorale et annexes, jardins, pourpris, terres arables et non arables, prés, prairies, communs, landes, gallois, qui composent une métairie, droits de foire et coutume à Bedée, un fief et rôle entier avec haute, moyenne et basse juridiction, un petit bois taillis, la moitié de neuf traits de dîmes dans la paroisse de Bedée, indivis et alternatifs avec le prieuré de Saint-Nicolas de Montfort, le Moulin-aux-Moines et les deux tiers d'un trait de dîmes dans la paroisse de Pleumeleuc » ; le tout était affermé 4.662 l. 6 s. 4 d. en 1790. Mais les charges étaient considérables : décimes, suppléments et droits synodaux. 830 l. 18 s. 11 d. ; redevance à l'abbaye de Saint-Melaine, 7 l. 10 s. ; novales rapportables au curé de Bédée, 83 l. 11 s. ; réparations annuelles de la maison priorale, du Moulin-aux-Moines, des chœurs et chanceaux des paroisses de Bédée et Pleumeleuc, 300 l. ; frais de régie, 350 l. ; 6 messes par semaine, 187 l. 4 s. ; un supplément de gros au curé de Bédée de 8 mines de seigle et de 8 mines d'avoine ; une rétribution de 15 l. au prédicateur de carême. Au total, le prieur estimait ses charges à 1.571 l. 19 s. 10 d., ce qui réduisait son revenu net à 3.070 l. 6 s. 6 d. (Arch. d’Ille-et-Vilaine, série Q, déclarations des biens ecclésiastiques du district de Montfort). Cf. GUILLOTIN DE CORSON, Pouillé, t. IV, p. 148.

Note 2 : Dans la tour du clocher de Bédée se trouvait un « mauvais escalier de bois ». La question se posait, en 1776, de savoir à qui incombaient les réparations de cet escalier ; le général prétendait que c'était aux gros décimateurs, parce que les marches étaient « attachées en partie au mur du chancel » ; ces derniers déclaraient, au contraire, que l'escalier n'était « nuement que pour le service du clocher, et non du chancel, qui est même séparé par un mur de haute élévation ». Poullain-Duparc, Drouin et Boylesve, dans la consultation qu'on leur demanda, et qui est datée du 16 novembre 1776, déclarèrent : « Si l'escalier pour monter dans le clocher est en dedans de la clôture du chanceau du côté de la nef, comme le mémoire le fait croire, les réparations manquantes à cet escalier sont dues par les décimateurs, c'est une partie de l'édifice, et ils sont tenus de réparer toutes celles qui sont dans l'étendue du chanceau ; il en est autrement de la charpente qui porte les cloches au dedans du clocher ; son entretien, comme celui des cloches, est dû par les bientenants de la paroisse pour toutes réparations ». Au même moment, un différend s'était élevé aussi pour la réparation de la chapelle prohibitive des seigneurs du Plessis-Cojalu ; et les mêmes avocats donnèrent également une consultation à ce sujet (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 1197).

Ces messieurs, dont l'esprit de charité est si refroidi depuis si longtemps, ne contribuent presque pour rien à la nourriture de nos pauvres (voir la note qui suit).

Note : Le prieur de Bédée donnait chaque année pour les pauvres 96 boisseaux de solide (GUILLOTIN DE CORSON, Pouillé, t. III, p. 377).

On ne nous consulte plus, comme on le faisait autrefois, lorsqu’il était question de nous donner des pasteurs et même des évêques (voir la note qui suit).

Note : Le recteur de Bédée fut présenté, jusqu'en 1770, par l'abbé de Saint-Melaine, et depuis l'extinction du titre abbatial, par l'évêque de Rennes (Ibid., t. IV, p. 148).

L’abus des bancs prohibitifs s'est multiplié dans notre église (3).

Note : Il y avait dans l'église de Bédée plusieurs chapelles prohibitives ; celle de Notre-Dame, dépendant du manoir de Launay-Hay ; la chapelle des seigneurs du Plessix-Joubin ; la chapelle Sainte-Anne, dépendant du manoir du Plessix-Cojalu. Ces derniers, lisons-nous dans la consultation de Poullain-Duparc, Drouin et Boylesve, citée ci-dessus, « ont une chapelle prohibitive en l'église de Bedée, avec écussons de leurs armes dans les vitres de ladite chapelle, qui est close par un balustre, et qui a porte pour sortir dans le cimetière, dont lesdits seigneurs ont la clef ; ils y ont aussi banc à queue, pierre tombale, enfeu où ils se font inhumer, et une fondation de deux messes par semaine ». Sur toute cette question, voy. GUILLOTIN DE CORSON, op. cit., t. IV, p. 150.

L'éducation des pauvres enfants est presque totalement négligée (voir la note qui suit).

Note : D’après la déclaration de la baronnie de Montfort, de 1682, le maître d’école de Montfort devait recevoir et instruire gratuitement les enfants de la paroisse de Bédée (Ibid., t. III, p 398). Mais nous ne trouvons aucune mention d’école à Bédée au XVIIIème siècle.

— Respectivement à la Noblesse, nous n'avons plus à proprement parler, Sire, aucune liberté ni existence civile.

Si un gentilhomme et un roturier commettent le même crime, ils sont punis bien différemment, ou plutôt le roturier très sévèrement, le gentilhomme presque jamais ; ou, si on ne peut pas se dispenser de le faire, c'est toujours très légèrement.

Si nous avons le malheur de nous plaindre à un gentilhomme qui cassera nos blés avec ses chiens de chasse, le moment du repentir est bientôt venu pour nous, ou, s'il est différé, il n'en sera trop souvent que plus cruel.

Nul avancement, nulle dignité, quelque mérite, quelque émulation qu'on puisse avoir dans notre infortuné ordre ; il semble qu'un gentilhomme serait déshonoré, s'il concourait avec un roturier au bien de votre Etat.

[3] Sire, nous sommes seuls assujettis à la corvée des grandes routes (voir la note qui suit).

Note : La tâche de cette paroisse, sur la route de Rennes à Montauban, était de 2.381 toises, sans compter 100 toises pour la « traversée de Bedée » ; la pierre dont on se servait était « très médiocre » ; le centre de la tâche se trouvait à une demi-lieue du clocher (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 4883). En 1782, l'intendant condamna 10 corvoyeurs de Bédée à recevoir des garnisons (Ibid., C 2411).

[4] Le sort de la milice nous enlève des enfants utiles et souvent nécessaires [Note : Ici l'écriture change] (voir la note qui suit) ; nous n'avons eu jusqu'ici aucun représentant aux Etats de la province, d'où vient sans doute que toutes les charges excessives de l'Etat nous abîment et nous dépouillent, à proprement parler, de tous nos biens, qui ne sont pas moins avilis que nos personnes.

Note : Dans la période 1781-1786, Bédée a fourni 7 miliciens : 2 en 1781 et 1785, 1 en 1782, 1783 et 1784. En 1781, sur 150 jeunes gens appelés au tirage, 125 ont été exemptés ou réformés ; en 1784, sur 130, 86 (Ibid., C 4704).

[5] Des corvées, des servitudes féodales, multipliées à l'infini (voir la note qui suit), telles que l'assujettissement à la suite des moulins, qui souvent manquent d'eau une moitié de l'année, et cependant défendu d'avoir chez soi des meules à bras, le curement des biefs, l'obligation aux charroiments.

Note : L'acte d'association de 1715 entre les seigneurs qui ont acheté la baronnie de Montfort dit qu'appartiendront « au seigneur de Bedée toutes les mouvances proches que pouvait avoir M. de la Trémoille dans la paroisse de Bedée et tous les droits utiles que pouvait avoir mondit seigneur le duc dans ladite paroisse » (ORESVE, op. cit., p. 237). — Le prieuré de Bédée percevait aussi dans la paroisse des rentes en argent et en froment. L'inventaire du prieuré de Bédée, de 1759, mentionne un grand nombre d'aveux : on peut y relever un aveu du 30 juin 1740 : pour une tenure de 6 sillons, il est dû trois quarts de boisseau de froment à Noël ; un aveu du 7 octobre 1740 : pour 15 sillons, le tenancier paie une rente d'un demi-quart de boisseau de froment ; un aveu du 7 septembre 1740 : pour 18 sillons, le tenancier doit le tiers de 20 deniers monnaie ; un aveu du 5 septembre 1743 ; pour 1 journal et demi, on paie 3 sous 6 den. monnaie de rente. Certaines tenures sont indiquées comme franches de rentes ou astreintes seulement au devoir de recette. Le prieuré de Bédée avait aussi (Ibid., pp. 57-58) un droit de foire, à la Nativité de la Vierge, le 8 septembre (Arch. d’Ille-et-Vilaine, H 22, fonds du prieuré de Bedée). Le prieuré de Saint-Samson de Thélouet possédait, en Bédée et Irodouër, un bailliage qui, en 1772, rapportait 1 écu 19 s. 3 d., 34 boisseaux 1/2 de froment, 124 boisseaux 1/8 de seigle (ANGER, op. cit., p. 187).

L'obligation à la servitude, gratuite et si pénible, des rôles rentiers et souvent non réformés depuis longues années, etc.

N'est-il pas de la plus grande injustice encore que le seigneur, qui hérite des bâtards, ne soit pas chargé de leur nourriture, qu'il faut que nous supportions ?

Des rentes et droits accablants et si odieux par la manière vexatoire avec laquelle on les exerce, tels que les rachats, les devoirs chéants et levants qui se multiplient autant de fois que le malheureux vassal laisse d'enfants, de façon que, s'il en a enrichi l'Etat, sa récompense, c'est qu'ils seront ruinés après sa mort, si l'héritage est d'un prix modique, ou s'ils ne sont pas forcés de le vendre ou de le liciter à grands frais.

Quant à la vexation sur la perception des rentes, les seigneurs ou leurs gens d'affaires sont rarement satisfaits ; celle par exemple par grains, au lieu de le prendre tel que la terre servant le produit ou la valeur à l'apprécis fixé, il faut en aller acheter au marché souvent fort loin, tout le plus net et le plus beau qu'il soit possible ; encore fort heureux si, malgré toutes ces précautions, le procureur fiscal ou receveur du seigneur a la complaisance de le recevoir d'abord, car souvent c'est la couleur qu'on prendra prétexte de blâmer : si c'est du froment, on trouvera qu'il ne sera pas assez rouge ; dans un autre moment, ce sera la qualité : on ne le trouvera pas assez gros ; il faut souvent aller jusqu'à trois fois, ou bien finir par payer le surhaussement ; mais ce n'est pas tout.

Nous nous plaignons de l'établissement de garennes, fuies et colombiers, garnis d'une peuplade immense de lapins et de pigeons qui dévorent souvent avant la maturité les fruits si spécieux (sic) de nos sueurs, et souvent même les semences dès l'instant qu'on les répand dans le sein de la terre, sans qu'il nous soit permis de détruire aucun de ces voleurs privilégiés ; il ne nous est même pas permis de prendre des armes contre les corneilles, ni d’en avoir dans nos maisons pour la garde de notre propre personne.

[6] Nous nous plaignons de l'inégalité de la répartition des impôts, de l’injustice de ceux qui sont particuliers à notre ordre, tels que les fouages ordinaires et extraordinaires, les milices, les francs-fiefs, les droits, si exorbitants pour nous, sur les eaux-de-vie, lorsque, dans nos besoins les plus urgents nous nous trouvons dans la nésessité d’en acheter.

[7] Enfin un nouveau tarif a raugmenté les magistrats très considérablement, aunque nous sommes sujets de supporter ce pesant fardeau, ce qui écrase fout le peuple par la raison seule qu'on a presque toujours besoin d'avoir recours à la justice pour se la procurer ou faire procurer.

[8] Il nous reste, Sire, à vous faire connaître nos vœux.

[9] Nous souhaitons que les dîmes grosses et menues soient abolies, ou, en tous cas, qu'elles soient réduites au trente-six ou au moins au vingt-quatrième ; que les réparations et entretien de l'église pour la nef, le clocher, les ornements, le cimetière soient désormais à la seule charge des décimateurs, ainsi que le presbytère.

[10] Qu'ils soient tenus à l'entretien et desservice tous les dimanches et fêtes d'un nombre de messes relatif à l'étendue et à la population de chaque paroisse et, conséquemment, d'une seconde messe pour la nôtre, qui est fort grande.

[11] Que tous les bénéficiers, notamment des bénéfices simples, soient tenus à contribuer à la nourriture des pauvres jusqu'à concurrence d'un sixième du revenu qu'ils tirent des paroisses dans les années ordinaires, et pour un tiers dans les années de disette.

[12] Que les peuples soient consultés à l'avenir lorsqu'il sera question de leur donner des pasteurs et même des évêques.

[13] Qu'il soit interdit à toute personne de prétendre aucun droit de banc ni autre prééminence dans les églises paroissiales, s'il n'a la qualité de fondateur ou de patron.

[14] Qu'il soit pourvu à l'exécution des lois relatives à l'établissement des petites écoles.

[15] En second lieu, nous souhaitons, Sire, conserver les droits de citoyen, être admis à l'avenir à nous faire représenter à toute assemblée nationale, et que les voix soient toujours comptées par tête.

[16-17] §§ 13 et 14 des Charges…

[18] Que nos propriétés ne soient pas moins respectées que celles des autres citoyens ; que tous impôts soient à l'avenir supportés d'une manière égale et par chacun en proportion de sa fortune, sans distinction d'ordre et eu égard, pour les deux premiers ordres, à leurs maisons, châteaux, jardins, pourpris, avenues, bois, étangs, ainsi que pour les personnes du Tiers Etat qui auraient de pareils biens, et qu’il n’y ait qu’un seul et même rôle pour tous, tant pour les impositions réelles que pour les personnelles.

[19] Que chaque paroisse fasse ses rôles de répartition par des commissaires des trois ordres, dont ceux du Tiers seront en nombre égal aux deux autres ordres.

[20] Qu'il n'y ait plus qu'un seul ou au plus deux receveurs généraux pour toute la province, auxquels les collecteurs les plus à portée verseront leur argent et les plus éloignés l'enverront par les voies de messageries, pour éviter les frais et les fatigues et les risques des voyages.

[21] Qu'on supprime tous impôts particuliers, sauf à les remplacer, s'il est besoin, par des impositions générales.

[22] Que l'entretien des grands chemins ne soit plus à notre charge, mais à celle des trois ordres sans distinction.

[23] § 17 des Charges..., ainsi modifié à la fin : « comme le seul moyen de nous arracher aux suites ruineuses de la fiscalité des seigneurs ».

[24] Que la majorité légale soit établie à l’âge de vingt ans pour tous citoyens.

[25] Que toutes les moyennes et basses justices soient abolies ; qu’il n’y ait plus, pour toutes affaires civiles et criminelles, que deux degrés ; il serait même à desirer que la justice ne fût plus rendue qu’au nom de Votre Majesté, que toutes affaires fussent jugées dans le premier tribunal en dernier ressort jusqu’à une somme de cent livres (voir la note qui suit).

Note : En 1766, le seigneurie de Bédée et le prieuré de Bédée exerçaient la haute justice à Bédée ; l’état signale encore les juridictions du Lou-du-Lac, de la Pinelais-Monjardin et de la Ville-au-Sénéchal (ces deux dernières appartenant au marquis de Saint-Gilles), qui exerçaient dans cette paroisse la moyenne et base justice (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C. 1818).

[26] § 19 des Charges..., avec intercalation, après « jurés », de la phrase « dont six feront alternativement le service » ; et la fin ainsi modifiée : « la somme de quinze livres payant toutefois la partie condamnée une somme de dix sols au notaire qui sera appelé pour écrire la sentence et pareille somme au sergent qui la mettra à exécution sur papier libre ».

[27] Nous demandons que les droits exorbitants, et presque arbitraires aujourd'hui, dans la partie du contrôle soient supprimés, et qu'il ne soit établi qu'un seul modique et seul droit, uniforme pour tous les actes, et que tous les citoyens indistinctement puissent rapporter des transactions et autres actes entre tierces personnes sur papier libre.

[28] Que, dans le cas que Votre Majesté ne se porterait pas à réaliser dès à présent notre voeu pour l'affranchissement des rentes féodales fixées et déterminées, cette faculté nous soit au moins accordée pour les autres, telles que les rachats et surtout les devoirs chéants et levants.

[29] Que la prescription soit établie contre toute demande d'arrérages des rentes des seigneurs passé de cinq ans, comme pour les rentes constituées.

[30] Que les garennes, fuies et colombiers soient incessamment détruits, et que les fruits du cultivateur soient tellement mis sous la sauvegarde publique qu'il soit autorisé non seulement à avoir chez lui des armes, mais aussi à s'en servir contre les corneilles, pigeons, lapins et autres bêtes et gibier destructeur.

[31] Que les seigneurs soient seuls tenus à l'avenir de la nourriture et entretien des bâtards.

[32] Qu'on soit libre de porter les grains à tel moulin que bon semblera et au meunier qu'on croira le moins infidèle ; qu'en conséquence, la liberté des meules, à bras soit adsolument permise, ainsi que l'exception du charroi des meules, etc... (voir la note qui suit),

Note : Il y avait eu, vers le milieu du XVIIIème siècle, des procès entre Charles Botherel, seigneur de Bédée, et ses tenanciers au sujet de la banalité des moulins et de la question des meules à bras. Un arrêt du Parlement de Rennes, du 21 août 1751, en appel de sentences de la prévôté de Bédée et d'une sentence du présidial de Rennes, défend à tous les vassaux et étagers de la province « de se servir de meules à bras, à peine de 10 l. d’amende…… ; ordonne à tous les seigneurs de la province de tenir leurs moulins en état de moudre toutes sortes de grains, si mieux n'aiment les seigneurs et les vassaux faire un abonnement sur le produit des moutes du blé noir, lequel abonnement ne pourra excéder la somme de 3 sous par chaque, depuis l’âge de 10 ans…. défend à ceux qui n’auront point de meules à bras d’aller moudre à celles de leurs voisins, à moins qu’ils n’aient accepté l’abonnement ci-dessus par leur enrôlement, et à ceux qui auront des meules à bras de les faire servir à l’usage de quelques personnes que ce soit, autres que celles qui ont ou auront accepté ledit abonnement, à peine de 10 l. d'amende.... ». L’arrêt du 21 août disait encore que les vassaux et étagers qui voudraient avoir des meules à bras, du consentement des seigneurs, seraient obligés « d'en faire déclaration au greffe de la juridiction, de même que du nombre de personnes qu’ils auront chez eux, sujettes à l’abonnement ». Le seigneur de Bédée ayant demandé un arrêt interprétatif de l'arrêt de règlement du 21 août 1751, le Parlement par arrêt du 9 mars 1752, « ordonne que, pour parvenir à l'abonnement, porté dans ledit arrêt, les seigneurs seront tenus d'assigner leurs vassaux par une seule bannie, à l’issue des grand'messes des paroisses où les fiefs sont situés, à comparaître devant le juge, à la première audience, pour y faire les déclarations portées dans ledit arrêt, desquelles déclarations sera dressé un rôle sans frais dans la forme de ceux qui sont faits en vertu de l’art. 74 de la Coutume…. ». Voy. POULLAIN-DUPARC, Journal du Parlement, t. IV, chap. LXXVII, pp. 321-325.

[33] Que la corvée de la collecte de rôles rentiers des seigneurs soit ôtée et que les seigneurs soient obligés à l'avenir de payer ceux qui la feront.

[34] Que les seigneurs et gentilshommes ne puissent chasser à l'avenir que sur les terres seulement de leurs domaines.

[35] Qu'il soit incessamment pourvu à un autre tarif pour les magistrats, et qu'il soit diminué d'au moins la moitié dans leurs vacations.

[36] Enfin Sire, nous adhérons aux autres plaints et remontrances déjà consignées dans les arrêtés de notre ordre du Tiers Etat à Rennes, des mois de décembre et février dernier, et au surplus adoptons tous et chacun les articles de doléances et demandes qui seront contenues dans le cahier de la même ville de Rennes et qui n'auraient pas été prévus ou suffisamment développés dans le présent.

Telles sont, Sire, les remontrances, plaintes et doléances de vos fidèles sujets, propriétaires et principaux habitants de la paroisse de Bédée, ce trente mars 1789.

[42 signatures, dont celle du président Juguet].

(H. E. Sée).

© Copyright - Tous droits réservés.