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LA COLLEGIALE DU SAINT-ESPRIT D'AURAY

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SAINT-ESPRIT D’AURAY.

Cet établissement situé à proximité du château ducal d'Auray, « en un lieu plaisant pour prier Dieu », a été fondé par les ducs de Bretagne. On en rapporte l’origine à Jean II, mort en 1305, ou à Jean III, mort en 1341.

Eglise du Saint-Esprit d'Auray (Bretagne) devenue caserne.

La chapelle, qui subsiste encore, porte les caractères de l’architecture du commencement du XIVème siècle. C’est un monument déformé rectangulaire, mesurant environ 40 mètres de longueur sur 12 mètres de largeur, divisé intérieurement en cinq travées et muni d’une magnifique charpente ogivale. A l’extérieur, on voit des contreforts simples adhérents à la muraille, et portant des gargouilles en pierre ; il n’y a pas de porte à l’ouest ; c’est au sud, au bas de la nef, que se trouve la porte principale, précédée d’un porche voûté ; plus loin, du même côté, s’élève une tourelle polygonale renfermant un escalier. Les fenêtres sont de vastes baies ogivales de 3 mètres sur 9 environ ; celle du fond du choeur, vers l’est, de 6 mètres 12 sur 12 environ, présente à l’extérieur des retraits et des colonnettes, ainsi que des sculptures en oves des deux côtés de la retombée de l’arc.

« La transformation en caserne de cette belle chapelle, disait M. Rosenzweig en 1860, est tout à la fois une profanation et un acte de vandalisme, que le besoin d’une garnison ne saurait excuser. Il est regrettable qu’on ne puisse rendre ce monument si grandiose à sa destination primitive ». Quelle était sa destination ? - Aussi loin que remontent les renseignements, on y trouve établis les religieux du Saint-Esprit de Montpellier. C’est d’eux que la chapelle a pris le nom du Saint-Esprit. Ces religieux, fondés vers 1190 par un certain Guy, pour desservir l’hôpital établi par lui à Montpellier, furent approuvés par le pape Innocent III le 23 avril 1198, et introduits par lui dans l’hôpital du Saint-Esprit à Rome en 1204.

Les premiers Hospitaliers étaient simples frères laïques et ne faisaient que des voeux simples ; dés 1198, sur le conseil du pape, le fondateur leur adjoignit des clercs, qui firent des voeux solennels. Plus tard, les frères prirent les armes et devinrent militaires et chevaliers, à l’exemple des chevaliers du Temple et de Saint-Jean de Jérusalem ; ils eurent dans leurs hôpitaux le rôle de protecteurs et prirent les titres de commandeurs ou de gouverneurs.

Telle était la situation de l’ordre hospitalier du Saint-Esprit, quand il fut appelé à s’établir à Auray. On y reçut un chevalier commandeur et quatre prêtres, et ce nombre se maintint constamment le même dans la suite. Leur but étant le service des hôpitaux, il est évident que l’établissement d’Auray a commencé par un hôpital. Ce qui le prouve encore c’est l’existence d’un cimetière, situé au nord de la chapelle, et servant au début du XXème siècle de cour à la caserne. Les religieux prêtres, tout en soignant les malades, célébraient l’office canonial dans leur chapelle, et formaient ainsi une sorte de petite collégiale.

Le 30 septembre 1434, le duc de Bretagne Jean V, « à la supplication et humble requeste de Messire Ivon du Val, chevalier et gouverneur de l’église et collège du Saint-Esprit d’Auray, considérant qu’à cette église et collège, au jour de Madame Sainte Elizabeth, par chacun an, il y a une très belle et notable assemblée de peuple », permit d’y tenir une foire le 19 novembre de chaque année, jour de la fête de la sainte. (Montpellier. Arch.).

En 1446, les prêtres hospitaliers du Saint-Esprit ajoutèrent à leur règle celle de Saint-Augustin, et se qualifièrent depuis chanoines réguliers de l’ordre de Saint-Augustin. Ils portèrent « une robe noire et un manteau, avec une croix de toile blanche à douze pointes cousue sur le côté gauche de la robe et du Manteau ; au choeur ils eurent le surplis, l’aumusse et le camail ou la chape, suivant les saisons ».

En 1459, le pape Pie II supprima les chevaliers du Saint-Esprit, et l’ordre n’eut plus que des religieux clercs du des chanoines. Néanmoins la maison d’Auray continua d’avoir à sa tête un chevalier d’un ordre quelconque, qui s’intitulait « Commandeur et gouverneur de l’ordre du Saint-Esprit d’Auray ». C’est ainsi qu’on trouve en 1473 Antoine de Kerriec, rendant aveu au sire de Rieux et de Largoet, pour des terres situées dans la paroisse de Plougoumelen.

On rencontre au Saint-Esprit, en 1499, Fr. Jean le Bourmair, prieur, et Fr. François Le Gouvello, procureur.

On trouve aussi en 1544 le nom de Thomas Baud, « religieux au collège du Sainct-Esprit d’Auray ». C’est une preuve qu’à cette époque il y avait encore des religieux dans la maison. Mais peu à peu l’élément religieux se fit plus rare, et finit par faire place aux prêtres séculiers. C’est ainsi que l’établissement changea de mains. Les chapelains séculiers continuèrent les oeuvres de leurs prédécesseurs, et quand l’établissement de nouveaux hospices à Auray vint réduire ou supprimer leur hôpital, ils conservèrent toujours fidèlement la célébration des offices divins.

Pour avoir une idée des biens temporels du Saint-Esprit d’Auray, il suffit de parcourir l’aveu suivant du 7 mai 1654.

« C’est l’adveu et dénombrement par minu, que religieux seigneur frère François-Alexandre d’Elbenne, chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, commandeur de Colommiers, Castres, Bellecroix, et de la chevalerie du Saint-Esprit d’Auray, diocèse de Vannes, présente et baille au Roy nostre sire, par devant nos seigneurs de ses Comptes, du temporel de la d. chevalerie du Saint-Esprit, qu’il tient prochement de Sa Majesté, à debvoir de serment de fidélité, prières et oraisons, en fief amorty , soubs la juridiction d’Auray :

1° La maison et logis de la d. chevalerie, o leurs courts cernées de murs, joignant l’église du d. Saint-Esprit, contenant soubs fonds un journal et demy ; — le jardin près la d. maison, cerné de murs, contenant soubs fonds un demy journal ; — une pièce de terre labourable, assez près du d. lieu du Saint-Esprit, contenant environ un journal et demy ; — trois parcelles de terre labourable, près du marché aux pourceaux ; et un demy journal de pré.

2° Le manoir et métairie noble du Moustoir-au-Chevalier, situé en la paroisse de Crach, avec logeix, court, jardin, pourpris, fuye, bois de haulte fustaye et taillifs, garennes et moulin à vent ; — Item en Crach, une tenue à Kerleau, une autre à Kermarquer, et une autre à Kerouserh, avec quatorze pièces de terre.

3° En Locmariaquer, une tenue à Kerhano, une autre à Kermoroux, une troisième à Larmor, une quatrième à Keraudran, et quelques rentes sur diverses maisons.

4° En Brech, une tenue à Kerguézec, une autre à Keropert et une autre à Kerouars.

5° En Ploemel, une tenue à Locmaria, une autre à Kergal.

(Lacune de deux ou trois tenues) ; une tenue en Mendon.

Rentes. Sur le domaine du Roy, en sa châtellenie et jurisdiction d’Auray, est deub le nombre de 60 perrées de fourment rouge, mesure d’Auray, par fondation faicte des ducs de ce pays et duché de Bretagne, payables par les mains des recepveurs ou fermiers du Roy en sa d. châtellenie d’Auray, chacun an, aux termes de la Saint-Jean et de Noël, par moitié.

Item sur divers particuliers et diverses maisons d’Auray, il est deub en tout 40 livres, 17 sous, 10 deniers.

Droits. Plus le dit chevalier a accoustumé de faire tenir ses plaids le lendemain du jour de Sainte-Elisabeth , 1é 20e jour de novembre, où ses hommes et subjects sont tenus comparoir et déclarer respectivement les rentes et debvoirs qu’ils lui doivent, par devant un séneschal, procureur et greffier de sa court, quels il est en possession d’instituer, o pouvoir de juger et condamner entre luy et les d. hommes et subjects.

Charges. Et pour tout ce que dessus doibt le d. chevalier la servitude que on doibt faire et qui se fait en l’église du d.  Sainct-Esprit : entretenir quatre chapelains, pour dire tous les jours au matin une messe basse, et une grande messe à haulte voix à neuf heures, et vespres à chant.

Fait à Auray, au tablier de Me Guillaume Geffroy, notaire, le 7 mai 1654. » (Sem. rel. 1887, p. 279).

En additionnant les revenus de tous les biens énumérés dans cet aveu, on arrive à un total d’environ 100 livres en argent, 220 perrées en divers grains, et 80 chapons. I1 faut bien observer que cet aveu ne concerne que les biens situés dans la juridiction d’Auray ; il y avait d’autres biens situés dans la juridiction de Vannes, notamment au Bono et à Kerdeil en Plougoumelen, et dans d’autres paroisses : ils ont dû faire l’objet d’un autre aveu qui ne nous est pas parvenu. Les possessions du Saint-Esprit d’Auray s’étendaient dans une quinzaine de paroisses. Le chiffre total du revenu a monté graduellement, à mesure que la valeur de l’argent a baissé. En 1777, à la veille de la Révolution, il était d’environ 3.400 livres. C’est avec ces ressources qu’il fallait entretenir les immeubles et le personnel.

Cependant la diminution de « l’hospitalité » au Saint-Esprit avait attiré l’attention publique. Dés 1643, les Carmes déchaussés de Vannes avaient demandé l’autorisation de s’établir, en ce lieu et d’y fonder un hospice. Mais la communauté de la ville d’Auray s’y opposa ; il n’y avait pas lieu, suivant elle, de renvoyer les prêtres du Saint-Esprit qui, suivant les clauses de la fondation, « célébraient chaque jour l’office divin très bien, très dévotement et avec édification, vivant en gens de bien, sans reproche ».

Les Carmes ne se tinrent pas néanmoins pour battus, et en 1654 ils prirent clandestinement possession de la chapelle du Saint-Esprit. La communauté renouvela son ancienne opposition...  et les Carmes durent céder. Mais ces tentatives eurent pour résultat de réveiller l’attention des commandeurs et d’ouvrir les portes de la maison à quelques pauvres infirmes.

On voit alors passer comme commandeurs François-Louis Rousselet de Chatourneau, puis M. Eustache d’Avergne, mort en 1693, ensuite l’abbé Charles Mignon, supplanté en 1710 par Fr. Michel de France de Vandeuil, religieux du Saint-Esprit de Montpellier, qui fut définitivement maintenu par le grand Conseil du roi en 1715, à la charge d’y entretenir « l’hospitalité ». Celui-ci ayant abattu quelques arbres dans l’ancien cimetière de l’établissement, la communauté de la ville lui fit un procès, qu’elle perdit et dut payer les frais du procès qui montèrent à 840 livres.

Cependant la maison ne renfermait plus que quelques enfants. Quand M. de Vandeuil mourut en 1747 et fit place à M. Claude Calmelet, la communauté d’Auray s’adressa à l’intendant de la province et à l’évêque de Vannes, demandant le rétablissement d’un véritable hôpital. Il lui fut sans doute répondu que la ville avait assez des trois hôpitaux qu’elle possédait déjà.

« En quelques années, dit M. Rosenzweig, on vit la commanderie d’Auray changer plusieurs fois de destination. En 1759, le commissaire des guerres y installa provisoirement un hôpital militaire. Trois ans plus tard, la chapelle du Saint-Esprit servit de dépôt d’artillerie. En 1773, le roi concéda à l’ordre de Saint-Lazare le bénéfice de la commanderie, tout en confiant l’administration de ses biens à l’évêque de Vannes ; mais ce n’était encore que provisoire.

Un arrêt du Roi, du 11 janvier 1773, autorisa les évêques dans les diocèses desquels se trouvaient des biens appartenant à l’ordre du Saint-Esprit de Montpellier, à en disposer de la manière la plus utile aux intérêts de l’Eglise ou de l’Etat. Sur une nouvelle requête du bureau d’administration de l’hôpital général d’Auray, Mgr Amelot prononça enfin, le 24 juin 1777, le décret d’union de la maison du Saint-Esprit au dit hôpital. Mais en même temps, cédant aux instances du clergé du diocèse, l’évêque se réserva sur les revenus de la commanderie une rente annuelle de 700 livres, destinée à l’entretien de trois jeunes séminaristes à son choix. Le tout fut confirmé .par lettres patentes du 31 octobre de la même année, et le 16 décembre suivant la communauté d’Auray fit prendre possession des biens qui lui avait été concédés » (Annuaire 1872).

Au milieu de tous ces changements, la petite collégiale des quatre chapelains avait été supprimée. L’administration hospitalière transféra les enfants de l’hôpital général au Saint-Esprit, leur donna deux gouvernantes pour la nourriture et le vestiaire, et nomma un chapelain, chargé de l’instruction des enfants et de l’acquit des fondations. En même temps on répara le bâtiment de la commanderie et les maisons qui en dépendaient, et on nomma des magistrats particuliers pour continuer l’exercice de la juridiction féodale. En 1783, par suite d’un traité, approuvé par l’évêque de Vannes, les deux gouvernantes furent remplacées par quatre religieuses de l’ordre de Saint-Thomas de Villeneuve, qui furent logées et nourries dans la maison, à la condition d’élever et de faire travailler les enfants, de soigner le linge et le mobilier, de tenir la comptabilité, et de gouverner le tout, sous la surveillance et le contrôle des administrateurs. Ce nouveau régime ne dura que quatre ans, à cause des difficultés financières qui surgirent alors : voici à quelle occasion.

Ni l’ordre de Saint-Lazare ni celui du Saint-Esprit ne s’étaient opposés à l’union de la commanderie d’Auray à l’hôpital général de cette ville. Malheureusement l’ordre du Saint-Esprit, au moment de sa suppression, avait des dettes ; les créanciers réclamèrent près du roi et les biens furent mis sous séquestre. L’ancienne, commanderie d’Auray subit le sort commun : « Tous les revenus de la d. commanderie, dit Louis XVI, dans ses lettres du 15 décembre 1787, seront et demeureront affectés au paiement des sommes dues aux créanciers, les charges déduites ; dès à présent les revenus de la d. commanderie seront remis par les fermiers, locataires et débiteurs de la d. commanderie ès mains de Gillot, notaire à Auray, … qui sera tenu de rendre compte chaque année au procureur général de notre grand Conseil... ».

L’administration hospitalière d’Auray, privée par ce moyen d’une grande partie de ses ressources, fut obligée de renoncer aux soeurs de Saint-Thomas de Villeneuve, et de revenir à l’emploi d’une seule gouvernante laïque. Celle-ci sut tirer parti d’une situation très obérée, et allait peut-être obtenir des résultats plus satisfaisants, quand la Révolution vint tout bouleverser et commencer une ère nouvelle.

(abbé Le Mené)

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