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Joseph PONTGÉRARD, prêtre guillotiné à Rennes
en exécution de la loi des 29-30 vendémiaire an II.
 

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45. — Joseph PONTGERARD, fils de Guillaume et d’Anne Cherel, naquit à la Ville-Jagu, en Augan, le 2 février 1747, et fut baptisé le même jour. S’orientant vers l’état ecclésiastique, il fit son séminaire à Saint-Méen et reçut là la tonsure et les mineurs le 24 septembre 1768, le sous-diaconat le 31 mars 1770, le diaconat le 11 mars 1771. Enfin, il fut honoré du sacerdoce le 30 mars 1772. Ses examens au point de vue intellectuel ne méritèrent jamais que la note « passable ».

Après son ordination, l’abbé Pontgérard obtint le poste de prêtre auxiliaire dans sa paroisse natale, où sa signature apparaît pour la première fois le 20 janvier 1774. Le 28 mars 1776, il prend la qualification de vicaire en titre. Il exerçait encore ces fonctions en 1790. Comme tel, il refusa le serment schismatique, ainsi que son recteur, le 21 février 1791, de même que l’immense majorité des prêtres du clergé malouin. Le 31 mai suivant, il déclara « que sa façon de penser ne lui permettait pas d’accepter la cure constitutionnelle d’Augan à laquelle on l’avait élu ». Ce refus catégorique dressa contre lui les passions révolutionnaires. Le recteur d’Augan, M. Trillard, décrété de prise de corps, ayant pris la fuite, M. Pontgérard assuma seul le poids de la paroisse et les responsabilités. Un ancien carme, le P. Fleury, ayant prêché à Augan, sans avoir prêté serment, le district de Ploërmel s’informait, le 14 juillet 1791, si Pontgérard avait assisté à son discours et autorisé pareille contravention (Arch. Morbihan, L 858). — A moitié satisfaits de la réponse de la municipalité qui couvrait son vicaire, les Administrateurs de Ploërmel l’invitaient quatre jours plus tard « à se conduire avec plus de circonspection et à ne pas abuser » (Arch. Morbihan, L 1192). Ces recommandations étaient bien difficiles à observer. Le 3 octobre 1791. les officiers municipaux d’Augan informaient le district que, sur le refus du vicaire Pontgérard de lire en chaire une lettre de l’évêque schismatique Le Masle, ils ont fait l’un d’entre eux donner, après la grand’messe, connaissance de cette pastorale à leurs administrés (Arch. Morbihan, L 855). Pour en finir, on supprima, le 20 juillet 1792, le traitement dont l’abbé Pontgérard jouissait encore à cette époque comme remplissant provisoirement des fonctions curiales (Arch. Morbihan, L 1200).

Cependant la loi du 26 août 1792 vint rendre sa situation plus difficile encore. Après avoir essayé de lutter durant quelques semaines, le vicaire d’Augan prit un passeport près de sa municipalité, le 23 septembre suivant, après avoir ce jour même béni trois mariages.

45 bis. — Durant toute la Révolution, l’île Jersey ne cessa de recevoir des provinces françaises voisines les malheureux, coupables dans leur pays, d’avoir reçu le caractère sacerdotal. Les prêtres fidèles y affluaient et, parce que tous n4avaient pu se munir de ressources suffisantes, il arriva, au bout de peu de temps, que beaucoup se trouvèrent bientôt réduits à la misère. La charité anglaise ne s’était pas encore organisée pour pourvoir à tant de nécessités.

Aussi M. Pontgérard, qui attendait vainement de Bretagne une lettre de change qu’on lui avait promise et dont il avait un urgent besoin, prit-il le parti, six semaines après son arrivée, de revenir à Augan se munir de fonds nécessaires à sa subsistance sur la terre d’exil. Il devait, par la même occasion, rapporter des secours pour un certain nombre de ses confrères déportés. Voilà pourquoi, dès le commencement de novembre 1792, un mois environ après son arrivée dans l’île anglo-normande, le vicaire d’Augan reprenait le chemin de sa paroisse.

Le 2 novembre il était à Saint-Jacut-de-la-Mer ; on le vit après à Concoret, à Augan, à Saint-Méen, à Saint-Maden, à Ploubalay ; puis, sa récolte de capitaux achevée, tant pour lui que pour MM. Bêtaux, Le Bigot, Salmon et Guillotin, sans attendre davantage, M. Pontgérard se rembarqua à Saint-Jacut sur un petit bateau appelé « le Philippe ». La traversée commença mal avec une mer dure et des marins à tout le moins fort douteux ; et l’on était au troisième jour du voyage, lorsque, le 30 novembre, la corvette de guerre, « le Furet », qui croisait au large, intima l’ordre de s’arrêter. M. Pontgérard était prisonnier. Il passa à bord du navire français dans un tel état de souffrance et d’épuisement, résultat du mal de mer, qu’il ne s’aperçut pas davantage de la disparition de son passeport que d’une partie de son argent. Quelques heures après les geôles de Saint-Malo s’ouvraient toutes grandes pour le recevoir ainsi que les matelots qui le passaient à Jersey.

46. — A Saint-Malo, l’abbé Pontgérard subit deux interrogatoires, l’un devant les administrateurs, l’autre devant les juges du district. On insista dans ces deux séances sur l’exportation de numéraire à l’étranger, délit qui venait d’être réprimé par une loi. Pontgérard se défendit en arguant de son ignorance de ces nouveaux règlements. A la suite, le jury d’accusation s’étant prononcé affirmativement sur sa culpabilité de ce chef, on décida, le 27 décembre, de le faire conduire aux prisons de Rennes où, le 6 janvier 1793, on l’écroua dans celle dite de la Porte Saint-Michel, plus tard dénommée Porte Marat.

A Rennes, l’abbé Pontgérard, toujours sous l’inculpation d’avoir exporté du numéraire, comparut le 18 janvier 1793 devant le Tribunal criminel d’Ille-et-Vilaine. Celui-ci décida que l’affaire n’était pas de son ressort, mais relevait du juge de simple police de Saint-Malo. En conséquence, le tribunal lui renvoya l’affaire, l’inculpé devant rester, en attendant la sentence, en état d’arrestation provisoire.

A cette époque, les notables d’Augan, informés de l’arrestation de leur vicaire, lui firent parvenir l’attestation la plus élogieuse qu’ils purent rédiger, le 16 février 1793. Cette pièce ne semble pas du reste avoir pesé d’un grand poids dans les destinées de l’abbé Pontgérard. Deux mois plus tard, le 16 avril 1793, l’ecclésiastique prisonnier subit un nouvel interrogatoire; cette fois de la part d’un des juges de paix de Rennes, délégué à cet effet par son collègue de Saint-Servan. M. Pontgérard y rectifia certaines de ses réponses relativement aux fonds qu’il passait à Jersey et déclara que la plus grosse somme lui était destinée.

46 bis. — Après cette séance, on parut oublier le vicaire d’Augan en prison. Quand on se rappela son existence, ce ne fut plus pour l’inculper d’avoir exporté du numéraire, mais chose beaucoup plus grave « d'avoir émigré sans passeport », accusation du reste absolument erronée, ainsi que s’en explique, le 11 mars 1794, le Tribunal criminel d’Ille-et-Vilaine. Extrait des prisons de Rennes le 19 août 1793, l’abbé Pontgérard comparut le 24 de ce même mois devant Jean-Joseph-Thomas Houitte, juge du tribunal du district de Saint-Malo. Il lui expliqua comment le jour de son arrestation par la corvette le Furet, il avait, accablé qu’il était par le mal de mer, perdu sa veste contenant son passeport et 300 livres d’argent.

La raison de cette inculpation nouvelle, c’était les récentes lois des 18 et 22 mars et des 21 et 23 avril 1793, qui atteignaient spécialement les ecclésiastiques insermentés de la classe de Pontgérard et permettaient de leur infliger des pénalités très rigoureuses. Aussi, bien que le vicaire d’Augan put fournir des duplicata des passeports dont on l’accusait de ne s’être pas muni, le jury d’accusation de Saint-Malo opina le 12 septembre suivant pour sa culpabilité de ce chef, et le 30 de ce même mois, le prévenu réintégrait à Rennes la prison Saint- Michel en attendant sa comparution pour la seconde fois devant le Tribunal criminel d’Ille-et-Vilaine. Le 8 octobre 1793, il subit à cette occasion son cinquième interrogatoire. M. Pontgérard y répéta ce qu’on a déjà dit du but et des conditions dans lesquelles s’était effectué son voyage. A l’époque où l’affaire s’était passée, il n’y avait pas alors matière à une condamnation capitale. Les juges n’en doutèrent pas, et comme les prêtres insermentés, ainsi que Pontgérard, ne pouvaient demeurer en France qu’autant qu’ils étaient incarcérés, on laissa Pontgérard continuer de manger le pain de la République à la Porte Saint-Michel, sans rien décider sur son sort.

47. — L’exécution du prêtre Besnard, incarcéré depuis le 26 mars 1793, décida de son sort. Le servannais Pointel, l'accusateur public, se souvint de son existence. Il prétendit étendre à l’abbé Pontgérard une loi nouvelle, féroce dans ses articles, exterminatrice du clergé réfractaire. Le 24 février 1794, il rédigea sa « plainte » contre cet « ennemi de la patrie » ainsi qu’il le qualifie. Il y réclame l’application rétroactive des lois des 29 et 30 vendémiaire an II et de leur procédure rapide. Pour lui, Pontgérard, déporté à la suite de la loi du 26 août 1792 comme insermenté, est rentré sur le territoire français ; il l’avoue, cela suffit, il mérite la mort.

Les prétentions du sieur Pointel étaient tellement illégales, que les juges du Tribunal criminel mirent un mois avant de mettre l’affaire Pontgérard en délibéré, tant il leur semblait odieux d’appliquer à un prisonnier une loi survenue un an après l’époque à laquelle il avait commis le délit pour lequel on le privait de sa liberté. Le tribunal se réunit seulement le 11 mars 1794 pour juger M. Pontgérard, et là encore, ses membres se divisèrent quand il s’agit de rendre la sentence, deux sur quatre opinèrent pour la déportation. On fit venir un cinquième juge départiteur, le citoyen Kerouanton, lequel sans vergogne, fut d’avis que l’accusé s’était bien déporté avec passeport et conformément à la loi en septembre 1792. Mais il avait enfreint son bannissement au mois de novembre suivant en rentrant sur le territoire français. Ce fait étant constant, et avoué, il méritait la peine de mort, les prêtres déportés étant maintenant assimilés aux émigrés.

Condamné à mort le 11 mars 1794, l’abbé Pontgérard fut exécuté comme prêtre catholique romain, le jour même à Rennes, sur la place du Palais, après avoir subi une dure captivité pendant un an et quatre mois dans les horribles cachots de cette époque. Son acte de décès fut dressé le lendemain de son trépas.

47 bis. — Ainsi, après avoir à Augan soutenu le bon combat durant les pénibles années 1791 et 1792, M. Pontgérard revenu de l’exil en France afin de se procurer des secours pour subsister sur la terre étrangère, tant pour lui que pour ses confrères, après avoir enduré un emprisonnement cruel et prolongé, expia sur l’échafaud sa qualité de prêtre réfractaire capturé dans les eaux territoriales de la République. On ne peut nier qu’il n’ait péri victime des lois exterminatrices du clergé fidèle et rien, dans sa conduite ou dans ses divers interrogatoires, ne permet, de douter qu’il n’ait accepté son supplice avec les sentiments qui font les martyrs. Le souvenir et le nom de M. Pontgérard sont toujours vivants à Augan où trois de ses petites-nièces existent toujours et conservent pieusement quelques objets mobiliers à l’usage du serviteur de Dieu. Aucun des membres de sa famille ne met en doute qu’il n’ait péri en haine de la Foi.

BIBLIOGRAPHIE.Archives départementales du Morbihan, L 253, 855, 859, 860, 861, 862, 1193, 1195, 1199, 1204. — Guillon, Les Martyrs de la Foi, etc., op. cit., IV, p. 355. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne, op. cit., I, p. 522. — Le Mené, Histoire du diocèse de Vannes, t. II, art. Augan. — P. Le Falher, Les prêtres du Morbihan, victimes de la Révolution, Vannes, in-8° 1921, p. 31-40.

(Dossier n° 194 des actes du tribunal criminel d’Ille-et-Vilaine, série B, Parlement, aux archives d’Ille-et-Vilaine).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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