Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

La paroisse de Aucaleuc durant la Révolution.

  Retour page d'accueil       Retour Ville d'Aucaleuc   

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

ADMINISTRATION. — Afin d'éviter de trop nombreuses redites, nous allons passer en revue toutes les paroisses du doyenné de Saint-Malo. En 1789, elles dépendaient sans exception de la sénéchaussée de Dinan et de la subdélégation d'intendance fixée en cette ville. C'est là du reste que se réunirent leurs députés, le 7 avril 1789, pour collaborer à la rédaction du cahier général de doléances de cette sénéchaussée. On trouvera les noms de tous ces délégués dans B. Robidou : Histoire et Panorama, etc., 2e éd., p. 330.

En 1790, toutes les paroisses du doyenné de Saint-Malo actuel furent comprises dans le district de Dinan. Ce district ayant été divisé en cantons. Aucaleuc fit partie du canton de Corseul. A la suppression des districts, en 1795, par la Constitution de l'an III, cette commune fut rattachée à la municipalité cantonale de Corseul. Bobital fut compris toute la Révolution dans le canton de Saint-Méloir ; Brusvily, ainsi que Le Hinglé, dans celui de Plumaudan ; Calorguen dans celui d'Evran ; Plouër fut chef-lieu de canton de 1790 à 1800 ; Quévert fit partie du canton de Dinan, puis, en 1795, de celui de Dinan-extra-muros ; Taden, ainsi que Saint-Samson, furent toute la Révolution rattachés à Plouër. Durant la même époque, Saint-Carné fut compris dans le canton de Plumaudan, et Trélivan dans celui de Dinan. Trévron fut d'abord rattaché au canton d’Evran, puis, en 1795, à celui de Plumaudan.

Depuis la réforme administrative du Consulat, toutes ces communes font partie de l'arrondissement de Dinan et du canton de Dinan-Ouest.

 

Renseignements Ecclésiastiques. — Aucaleuc, autrefois cure du diocèse de Dol à la présentation de l'ordinaire, relevait de la grande officialité de Dol et du doyenné de Bobital.

En 1701, M. Henri de Briqueville, comte de la Luzerne, était le seigneur fondateur et prééminencier de l'église d'Aucaleuc. En 1778, ces titres appartenaient à M. le président de l'Angle-Beaumanoir, qui possédait, dit Ogée, la Haute-Justice de cette paroisse.

Bien que la paroisse d'Aucaleuc figurât le 14 décembre 1768 parmi les cures du diocèse de Dol à portion congrue, la chose nous paraît difficile à admettre, car dès le 3 juin 1450, à l'occasion de la nomination de Georges Clerici au rectorat d'Aucaleuc, on note que cette paroisse valait alors 12 livres tournois de revenus (cf. Vaucelle : Catalogue des lettres de Nicolas V, etc., p. 150). D'autre part, nous avons retrouvé aux Archives des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), série Q, la déclaration du recteur d'Aucaleuc, en 1790. D'après ce document, les revenus nets de son bénéfice s'élevaient cette année à 959 livres se décomposant comme suit : 22 boisseaux de blé à 8 livres 5 sols le bx (boisseau), soit 185 l. 12 s. ; — 41 bx de méteil à 6 l. 15 s. le bx, soit 276 l. 15 s. ; — 160 bx de blé noir à 3 l. le bx, soit 496 l. ; — 50 bx d'avoine grosse et moyenne à 2 l. 5 s. le bx, soit 137 l, 10 s. ; — Autres grains : 19 l. 7 s. — Pailles blanches et noires évaluées 60 l. — Soit au total général : 1.175 livres 5 sols, sur lesquelles il fallait déduire 216 l. de débours, dont 60 l. pour frais, gages et nourriture du coureur des dîmes ; 120 l. pour le charroi de la dîme ; 6 l. pour faire vanner les grains, et 30 l. pour les faire conduire au marché de Dinan. Mentionnons aussi un trait de dîme qui se levait à Aucaleuc et rapportait plus de 240 livres de rente. Il était affecté à la chapellenie Bertrand du Guesclin, fondée en 1358 par le grand connétable.

L'église d'Aucaleuc avait été commencée à reconstruire en grande partie le 20 mai 1720 par le recteur François Allain (ou Allaire), lequel décéda à Saint-Pern, en mission, le 20 août 1741, On conserve dans cet édifice les statues de bois de Saint Symphorien, de la Sainte Vierge et de Saint Jean-Baptiste.

Les propriétés ecclésiastiques à Aucaleuc en 1700 consistaient en la Grande et la Petite Jaunais, contenant un journal 35 cordes, vendues 910 l. à Pierre Chevalier, de Beausoleil ; la pièce de la Prée, vendue 600 l. à Julien et Marc Chevalier ; celle du Larron, contenant trois quarts de journal, achetée 300 l. par Pierre Guérin ; celle du Ménage, contenant, deux journaux, vendue 950 l. à Pierre Gaultier, de Corseul ; un terrain appelé Sur la Ville, mesurant un journal, acheté 825 l. par Claude Jeunet, d'Aucaleuc, lequel acquit aussi pour la même somme le clos du Rosleu. Toutes ces adjudications se passèrent le 20 septembre 1791.

En 1792, Aucaleuc fut rattaché pour le spirituel, partie à Corseul et partie à Quévert et Vildé-Guingalan.

La vente du mobilier et des ornements de cette église produisit 145 fr. 85 le 4 juin 1794, et son presbytere fut mis en location le 30 de ce même mois. En 1802, le sous-préfet de Dinan indiquait l'église de cette paroisse, comme n'ayant pas été entretenue depuis la Révolution et ne servant à rien.

Le 24 août 1794, on inventoria à Dinan l'argenterie de l'église d'Aucaleuc, que des mesures spoliatrices avaient contraint à déposer dans cette ville avant de l'envoyer fondre à la Monnaie. On trouva une croix, un ostensoir, un pied de calice, une couverture de ciboire, le tout pesant 10 marcs 3 onces 2 gros d'argent blanc. Une coupe de calice, une patène, une coupe de ciboire et un croissant (ou lunule) pesant ensemble 1 marc 4 gros et demi d'argent doré.

Bonaparte ne voulut pas rétablir Aucaleuc comme paroisse en 1803 et le rattacha pour le spirituel à Trélivan ; mais dès 1809 les habitants d'Aucaleuc demandaient l'ouventure de leur église comme chapelle de secours et s'engageaient à verser 350 francs par an au chapelain qu'on leur enverrait dire la messe et catéchiser leurs enfants. Enfin, le gouvernement de la Restauration accorda à Aucaleuc le titre de succursale par décret du 16 mars 1820, sur pétition de la population en date du 30 octobre précédent, et M. l'abbé Pierre Sevestre en fut nommé le premier recteur.

 

CLERGÉ.CHARLES SAINT-PEZ, recteur, naquit à Roz-Landrieux le 19 juin 1749, de Charles, sieur de Langle, et de Françoise Péan. Après avoir étudié au Collège, puis au Séminaire de Dol, il fut ordonné prêtre le 1er avril 1775, à Saint-Malo.

Il devint successivement chapelain de Saint-Julien, en Miniac-Morvan ; curé d'office de Lillemer, puis du Vivier-sur-Mer, et enfin de Sainte-Urielle, près de Trédias. C'est là qu'il fut pourvu, le 29 octobre 1789, du rectorat d'Aucaleuc, alors vacant depuis deux jours par la mort de son titulaire, M. Jean-Baptiste-Pierre Lefort, décédé à l'âge de 39 ans, après avoir gouverné moins d'un an cette localité [Note : M. Lefort avait succédé à l'abbé Pierre Le Bourguignon. décédé le 3 novembre 1788. Celui-ci avait remplacé M. François Bonnier, ancien recteur du Plessis, lequel s'était démis en sa faveur le 2 octobre 1781 et mourut à Dinan chapelain des Trois-Marie, le premier décembre 1784].

M. Saint-Pez prit possession d'Aucaleuc le 17 novembre 1789. S'étant constamment refusé à prêter serment à la Constitution Civile, cet ecclésiastique demeura cependant parmi ses ouailles jusqu'au mois de septembre 1792, époque à laquelle la loi du 26 août précédent l'obligea à s'en éloigner.

Nous nous demandons s'il le fit librement, ou si plutôt il ne fut pas arrêté à la dernière heure comme le recteur de Languédias, et réuni aux prêtres détenus au Château de Dinan, puis avec eux déporté d'office à Jersey. Nous n'en avons malheureusement d'autre preuve qu'une liste des ecclésiastiques prisonniers à Dinan et déportés à l'étranger, que l'on conserve aux Archives Nationales. Le nom de M. Saint-Pez s'y trouve ajouté comme après coup. Nous ne désespérons pas de pouvoir un jour éclaircir ce problème et vérifier la valeur de la tradition qui prétend que le recteur d'Aucaleuc quitta sa paroisse pour se conformer à la loi sur la déportation des prêtres insermentés et s'en alla se réfugier dans son pays natal, où il ne fit qu'un court séjour. On lui refusa de demeurer près de sa mère malade, et il fut obligé de s'embarquer pour Jersey, où il arriva vers la fin de septembre 1792.

Poursuivi dans cette île par la pensée des âmes qui se trouvaient abandonnées en France sans secours religieux, M. Saint-Pez s'embarqua au mois de novembre suivant avec deux autres prêtres sur un bateau français qui les débarqua sur la grève de la Toise, près de l'anse du Guesclin, en la commune de Saint-Coulomb. Là, le meunier du moulin « Tel que Tel » leur fournit les secours dont ils avaient besoin pour gagner sans trop de périls l'intérieur du pays.

D'après ses propres dires, M. Saint-Pez fit à son retour beaucoup de ministère caché, tant à Saint-Coulomb que dans le marais de Dol. II s'en fut même à Dinan, et vraisemblablement à Aucaleuc, bien qu'il ne cite pas cette paroisse parmi celles qui profitèrent de son ministère. Il parut aussi à Pleudihen, à Miniac, à Baguer-Morvan, ainsi qu'à Carfantain, prodiguant partout les consolations de la religion aux fidèles, — et ils étaient nombreux, — qui ne s'étaient pas laissés séduire par le schisme constitutionnel.

Enfin, le 24 avril 1794, comme il se dirigeait dans la nuit vers Baguer-Pican, pour administrer un malade, M. Saint-Pez fut arrêté vers les dix heures du soir dans le cimetière de Carfantain. Emprisonné d'abord à Dol, il fut transféré à Saint-Malo le 12 mai suivant, au grand chagrin des administrateurs du district de Dol, qui eussement vivement désiré voir juger et exécuter « un pareil monstre » dans leur ville.

Traduit presque aussitôt à son arrivée dans la cité malouine, devant la commission militaire O'Brien, « autorisée à juger, révolutionnairement par ordre du citoyen Le Carpentier », l'abbé Saint-Pez subit le 13 mai un interrogatoire dans lequel il fit montre de la plus grande franchise, évitant toutefois avec soin de dévoiler ce qui aurait pu compromettre des tiers. Pas plus alors que devant les administrateurs dolois, il ne nia avoir fait du ministère, et s'il en avait été besoin, il aurait sans aucun doute réitéré devant ses juges militaires la belle réponse qu'il avait faite à Dol le 25 avril précédent : « Je suis prêtre depuis 1775, et j'en ai toujours conservé le caractère » [Note : C'est aussi dans un de ses interrogatoires que nous relevons la réponse suivante, qui marque bien que le motif du retour en France de M. Saint-Pez avait été religieux et non politique, et que seule la malheureuse Constitution Civile avait détaché le clergé du régime instauré par la Révolution : « Je n'ai jamais pris la cause des nobles »].

Le cas de M. Saint-Pez était Clair, et la loi ne laissait aucun doute possible sur son sort. Aussi la commission O'Brien le condamna-t-elle à mort le jour même de sa comparution, comme « prêtre insermenté déporté et rentré sur le territoire de la République ».

Il avait alors 43 ans. Réintégré dans la prison du Château, cet ecclésiastique héroïque en sortit le lendemain, pour être conduit au lieu du supplice.

L'abbé Duine, dans le numéro de novembre 1910 des Annales de Bretagne, a rapporté que M. Saint-Pez, comme on voulait lui aider à gravir les degrés de l'échafaud, aurait remercié en disant : « Je n'ai pas besoin d’aide : je monte seul à l'autel ». Quoiqu'il en soit de l'authenticité de ces paroles, l'exécution de ce saint prêtre revêtit des raffinements de cruauté extraordinaires que nous ne reproduirons pas ici, renvoyant nos lecteurs qui désireraient les connaître au tome III, p. 34 et 35, des Confesseurs de la Foi de l'Eglise gallicane, de l'abbé Canon.

Chose bien rare quand il s'agit des martyrs de la Révolution, l'on garde de M. de Saint-Pez une précieuse relique. Son chef est encore vers 1925 pieusement conservé dans la famille de M. Delamaire, chef de bataillon en retraite, frère de Mgr. Delamaire, naguère archevêque de Cambrai, lequel a détenu jusqu'à sa mort ces restes vénérables.

Voici comment, d'après le récit de M. Delamaire, ils lui sont advenus : « Après sa décollation, le corps de M. Saint-Pez fut inhumé dans le sable de la Grande Grève, non loin de la porte Saint-Thomas, lieu de son supplice. Une pieuse personne, témoin de son exécution s'en fut la nuit suivante recueillir dans le sable la tête du Confesseur de la Foi et la remit quelque temps après à M. Bertrand Delamaire, beau-frère de l'abbé Saint-Pez. Celui-ci, longtemps avant son trépas, la confia à son fils aîné, M. l'abbé Joseph Delamaire, mort en 1876, doyen de Châteauneuf ».

Ce vénérable ecclésiastique la légua à son tour comme un précieux héritage à son neveu, devenu depuis Mgr. Delamaire, archevêque de Cambrai, et au décès de celui-ci, en 1913, elle est devenue la propriété de son frère.

Le chef de M. Saint-Pez porte tracé sur le front, d'une écriture ancienne mais lisible, les derniers mots qu'on lui prête avoir prononcés en quittant ses compagnons de captivité pour aller au supplice : « Hodie mihi, cras tibi ».

Nous savons que la mémoire de ce prêtre admirable est demeurée en grande vénération dans sa paroisse natale, et que bien souvent, dans l'église de Roz-Landrieux, une statue de Saint Charles Borromée y reçoit des hommages qui sont en particulier adressés au martyr Charles Saint-Pez, lequel compte, sans contredit, parmi les plus belles victimes sacerdotales de la Révolution en Bretagne. A ceux qui voudront lire tout au long son admirable histoire, digne des martyrs de la primitive Eglise, nous conseillons Les Actes des Prêtres insermentés du diocèse de Saint-Brieuc guillotinés en 1794, publiés par l'abbé Lemasson, 2 in-8, Saint-Brieuc, 1917-1919. — M. Saint-Pez occupe dans le premier volume les pages 213-241, et l'on y trouvera intégralement reproduites toutes les pièces de son procès, et la bibliographie du sujet. — Consulter en outre : Duine : Traditions populaires relatives à Saint-Pez, in-Annales de Bret., juillet 1899, p. 679, et nov. 1900, p. 75. — Delarue : Le District de Dol, etc., II, p. 259 ; III, p. 177, 183, 187, 347.

SUPPLEMENT. — D'après une pièce conservée aux Archives Nationales, F. 7, 5152, Augustin Delalande, « curé d'Aucaleuc », déporté le 12 septembre 1792 et rentré en France en thermidor an V (août I797), s'établit alors à la Fresnaye, où il vécut jusqu'en l'an VIII (1800). Il est certain qu'il n'y eut jamais de vicariat officiellement créé à Aucaleuc. Il est possible cependant que l'abbé Delalande, qui, suivant Delarue : Le District de Dol, etc., op. cit., VI, p. 170, habitait en 1791 Lillemer, son pays natal, l'ait quitté au cours des premiers mois de 1792 pour se réfugier près de M. Saint-Pez, qu'il connaissait fort bien. Telle serait l'explication du titre de « vicaire d'Aucaleuc » qu'on lui attribue dans le document précité des Archives Nationales. M. Delalande décéda en 1834 recteur de Plerguer. (A. Lemasson).

 © Copyright - Tous droits réservés.