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ABBAYE DE SAINT-RION (ordre de saint Augustin)

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I.

Deux considérations nous déterminent à commencer ce volume par l’étude de St-Rion, enclave de Dol : d’abord, son histoire se lie essentiellement à celle de Reauport ; ensuite, son origine et sa fin sont deux problèmes historiques qu’on ne saurait négliger dans l’histoire monastique de ce pays.

L’île, très-anciennement nommée C’haro-Enez (Ile-aux-Cerfs), et qui, plus tard, prit le nom de Guirwinil qu’elle portait encore au XIIème siècle, avait été depuis une époque très-reculée le siège d’un établissement monacal d’une certaine importance ; une charte de 1189, placée à tort par D. Morice en 1219, ne laisse aucun doute à cet égard [Note : I, 844. - Le savant Bénédictin, n’ayant point établi, ni peut-être même soupçonné, la différence entre les deux abbayes de St-Rion et de Beauport a mis un désordre complet dans les premières chartes qu’il a publiées de l’une et de l’autre. Ainsi, il donne, sous la date d’un vidimus délivré par un évêque de Quimper en 1219, une charte datée de la première année du règne de Richard Cœur-de-Lion. Nous reproduirons, en les corrigeant, les trois chartes publiées par les Bénédictins, relativement à St-Rion, parce que c’est le seul moyen de faire disparaître la confusion qui existe dans l’histoire des commencements de ces deux abbayes]. Avait-il été fondé par une émigration de moines Bretons au Vème ou VIème siècle ? L’île Charo-Enez (par corruption Karoennes) avait-elle été sanctifiée par la présence de saint Rion [Note : La légende de saint Rion est aujourd’hui perdue ; mais le souvenir au moins en était conservé au XIIème siècle. Les moines de Beauport disaient, à la fin du XVIIème s., que saint Rion avait été archevêque de Bourges ; mais nous n’en pouvons découvrir aucune trace dans le catalogue des prélats de cette église. Le sceau de Beauport, qui fut probablement celui de l’abbaye de St-Rion, représente le Saint, décoré de la mitre et de la croix processionnelle, naviguant dans la même nacelle que saint Maudez, en habit monacal avec la crosse. Ceci semble indiquer que ces deux serviteurs de Dieu arrivèrent ensemble de par-delà les mers ; que saint Rion, avec des fonctions plus élevées dans le sacerdoce, doit compter parmi les premiers apôtres de l’Armorique, comme saint Maudez, dont Albert-le-Grand donne la légende. Les titres des XIIème et XIIIème siècles montrent que la dévotion à ces deux saints était grande dans le Moyen-âge, et nos vieux propres placent leur office, à neuf leçons, au 14 des calendes de décembre. De nombreuses églises et chapelles leur étaient consacrées, surtout sur le littoral : leurs reliques furent probablement emportées ensemble à Bourges pour les soustraire à la rage des Normands, car le plus ancien propre de Dol dit, en parlant de saint Maudez : « Venerandœ ejus exuviœ, nono sœculo, ob Danorum metu, Biturices translatœ sunt, et in ecclesia cathœdrali, majori ex parte, quiescunt ». Longtemps, la cellule de ce dernier Saint servit de guide aux pilotes pour se diriger à travers les passes difficiles de l’embouchure du Trieux. Elle était fréquemment visitée par des pélerins, dont les abondantes aumônes permirent, au XIIème siècle, de fonder un prieuré et une belle chapelle dans ce lieu consacré par de nombreux miracles ; le prieuré relevait de Bégard. Les archives des Côtes-du-Nord ont conservé deux baux de cette propriété, l’un de 1587, l’autre de 1634 : nous y voyons que le fermier devait être toujours approvisionné de pain, de vin, d’autres vivres, de fourrages et d’un bateau en bon état, pour passer et nourrir les pélerins et leurs chevaux ; il devait fournir au prieur un « mouton gras » pour l’aider à recevoir les prêtres et autres personnes honorables venant dans l’île le dimanche de la Pentecôte ; il devait continuer les « honnestetés accoutumées » à l’égard du prieur, du capitaine de l’île et de leurs suites, arrivant la veille du pardon de la chapelle ; il devait soigner l’église (le prieur n’y résidant plus), chasser de l’île toute mauvaise personne, et réclamer l’aide du capitaine et des gentilshommes voisins pour en expulser les malfaiteurs qui auraient tenté de s’y établir ; il devait interdire la chasse dans l’île et ses dépendances ; empêcher toute extraction de pierre à moins de dix brasses ; etc. — Aujourd’hui, l’île abandonnée ne présente plus que les restes d’un vieux fort et le chevet d’une belle église détruite, où les paroisses voisines ont continué de se rendre professionnellement, chaque année, jusqu’à la Révolution : nos ancêtres aimaient la poésie grandiose des processions à travers les écueils d’une mer toujours dangereuse], comme les îlots voisins par saint Maudez et saint Budoc ? Cette hypothèse nous semble ressortir assez naturellement de l’étude attentive des légendes du Goëllo et des faits que nous allons rapporter.

Ce qui est certain, c’est que, vers la fin du XIIème siècle, le chef de ce pays, le comte Alain, y bâtit une abbaye qu’il plaça sous le vocable de saint Rion, et dans laquelle il appela des religieux de St-Victor de Paris [Note : L’abbaye de Saint-Victor de Paris avait été fondée, en 1113, par Guillaume de Champeaux, l’adversaire d’Abailard. La règle de saint Augustin, tirée de la 109ème épître du Saint, fut fixée par le concile d’Aix-la-Chapelle en 816, refondue aux conciles de Rome en 1059 et 1063, et rendue obligatoire pour tous les Chanoines Réguliers par le concile de Latran de 1139]. L’acte qu’on peut considérer comme la charte de fondation de St-Rion n’est pas daté ; de sorte que certains historiens, habitués à traiter cavalièrement nos origines, lui ont assigné la date d’une bulle d’Innocent III, confirmant les chartes, privilèges et possessions de cette abbaye, soit 1198. Nous allons prouver que cette date est parfaitement fausse, et déterminer, aussi approximativement que possible, l’époque réelle de cette fondation.

Le comte Alain, avons-nous dit, fonda, sous la règle de saint Augustin, avec l’assentiment de sa femme, de ses frères et de ses barons, une abbaye dans l’île Guirwinil. Il lui donna des terres et des privilèges sur plusieurs points du Goëllo et même de l’autre côté de la Manche.

D’après la charte originale , existant aux Archives des Côtes-du-Nord, les témoins de cette fondation étaient G., évêque de St-Brieuc ; G., évêque de Tréguier ; R., abbé de Bégard ; M. , abbé de St-Aubin ; Jean , abbé de Coatmalouen ; L., abbé de Ste-Croix de Guingamp. Nous avons établi que l’évêque de St-Brieuc, Geoffroy, a vécu de 1163 à 1202 ; et Moyse, abbé de St-Aubin, de 1162 à 1212.

Quant aux trois autres abbés, il n’est pas possible actuellement de préciser l’époque de leur existence.

Mais cette fondation étant faite pour le repos de l’âme du comte Henri, père du fondateur, lequel Henri mourut vers 1184, comme nous le prouverons dans la généalogie des seigneurs de Goëllo, la charte d’Alain est postérieure à cette date. Elle est nécessairement antérieure à celle qui confirmait toutes ces libéralités et qui est de « la première année du règne de Richard » (Cœur-de-Lion); on peut donc placer avec certitude la fondation de St-Rion entre 1184 et 1189.

Dix ou quinze ans après, le nouveau moutier était riche et florissant, comme le prouve la bulle d’Innocent III, en date du 4 des calendes de mai 1198. Cette bulle, que dom Morice s’obstine à nommer la confirmation de la fondation de Beauport, ce qui n’a cessé d’être répété depuis, bien que Beauport n’ait été fondé que quatre ans plus tard, cette bulle, disons-nous, contient les nombreuses faveurs accordées aux « moines de l’île de Guirwinil » ; elle énumère de plus les églises et les biens venus ou à venir en ce monastère par « la concession des pontifes, par la munificence des rois et des princes, par les oblations des fidèles et de toute autre manière équitable ».

Déjà St-Rion possédait les églises de l’Ile-aux-Cerfs, de Bréhat, de Biniguet, de Perros, de Lanvignec, de Lannevez [Note : Toutes ces paroisses ont disparu ou ne sont plus que de simples chapelles, sauf Bréhat : la population de cette côte et des îles du Goëllo a beaucoup diminué], de Kérity au diocèse de Dol [Note : D. Morice prétend à tort corriger la bulle, et place fautivement ces églises au diocèse de St-Brieuc] ; les chapelles de Sti Predpreali, de St-Rion en Plourivo [Note : Ceci prouve que la dévotion à saint Rion n’était pas nouvelle en Bretagne], « domum Ste Machairi cum pertinentiis suis » ; en Angleterre, toutes les églises de la socca [Note : Nous avons précédemment expliqué ce qu’il faut entendre par cette circonscription féodale] de Waltam, au diocèse de Lincoln, c'est-à-dire les églises de Toussaint, de Berneloby, de Belesby, de Hautecleve, de Briscaleya, de Hanardebi, de Besleby, de Waldebi, de Ravendal avec leurs dépendances. L’île de Biniwit, probablement Biniguet, lui avait été donnée avec des droits sur le blé, le sel et le poisson à Paimpol, sur les salines et les foins à Kérity, des dîmes sur les fourrages, sur les laines et les troupeaux, une part dans les dîmes générales de plusieurs paroisses, des villa, des bois, des moulins à blé et à fouler, des rentes en froment, etc. Les moines de St-Rion ne pouvaient voir leurs biens frappés des novales ; ils pouvaient continuer leurs offices, portes closes, en cas d’interdit général sur le pays ; leur monastère était déclaré droit d’asile, et plusieurs autres faveurs spirituelles leur étaient accordées par le St-Siége.

Cette abbaye était donc déjà très-considérable et très-considérée. En effet, l’abbé Guillaume, auquel la charte d’Innocent III était adressée, signait, cette même année, et le premier entre les dignitaires ecclésiastiques, une transaction entre les églises de Plouagat et de Bocqueho.

Mais, à partir de ce moment, le silence le plus complet se fait sur St-Rion, et l’on semble éviter avec soin même d’en prononcer le nom. Ses biens ont fait retour au fondateur, qui les donne à une abbaye d’un autre ordre, établie sur la côte, en face de l’île abandonnée.

Plus d’une fois, à la vérité, nous avons signalé la trace à demi-effacée d’abbayes inconnues ; plus d’une fois, la légende a perdu le souvenir de nos premiers missionnaires. Les ronces à travers lesquelles ces pionniers de la civilisation se frayaient un chemin se sont refermées derrière eux ; le vent du désert a effacé jusqu’à l’empreinte de leurs pas ; Dieu seul se souvient du bien qu’ils ont fait. En pouvait-il être autrement sur un sol si souvent bouleversé par les invasions et les discordes civiles ?

Mais, en plein XIIème siècle, à cette époque splendide où les sciences et les lettres florissaient de nouveau sur cette terre rajeunie, qu’une abbaye régulièrement constituée, richement dotée, accueillie avec sympathie par le haut clergé des environs [Note : Deux évêques et quatre abbés avaient signé la charte de fondation] et honorée de la protection du grand pape qui dominait de si haut tous les trônes de l’Europe ; qu’une telle abbaye ait tout-à-coup disparu, sans que son nom même se trouve reproduit nulle part, c’est un fait probablement unique dans l’histoire et qui doit cacher un mystère.

Ce mystère, que plus de six siècles et demi couvrent déjà, ne sera jamais complètement dévoilé sans doute ; les historiens bretons, non plus que ceux de l’ordre de St-Victor, ne semblent même pas l’avoir soupçonné. Toutes nos recherches à nous-mêmes pour retrouver quelque acte authentique, ou du moins quelque souvenir précis de la fin prématurée de St-Rion, sont restées sans résultat positif.

Toutefois, parmi les chants bretons qui achèvent de s’effacer de la mémoire du peuple, il en est un qui a été recueilli au pays de Goëllo et qui nous a été communiqué par notre bien regrettable ami, de Penguern. Nous avons été tout d’abord frappés de la scène qu’il raconte, du lieu où elle se passe et du pays qui en a conservé la mémoire. Le lecteur trouvera cette pièce inédite et, à coup sûr, fort curieuse, à la suite des seuls actes que nous ayons pu réunir sur St-Rion.

Un jeune homme pleure la mort de sa sœur, tuée par l’abbé des moines de l’Ile-Verte : l’archevêque de Dol maudit solennellement les indignes habitants de ce monastère, « jadis fondé par les Saints » [Note : On se souvient que là fut le premier foyer de la propagande chrétienne en Armorique : là, nous avons montré saint Budoc lançant ses pieuses phalanges de missionnaires sur toutes les côtes de la Petite-Bretagne. L’Ile-Verte, à l’embouchure du Trieux, est très-proche de St-Maudez et de St-Rion ; le poëte breton a pu les confondre et attribuer le crime de l’une à la plus célèbre de toutes. — Lorsque, avec le gracieux concours de M. Dujardin, ingénieur en chef des Côtes-du-Nord, nous avons visité, en 1858, ces premières stations des apôtres de l’Armorique, nous avons abordé particulièrement l’Ile-Verte avec un sentiment de pieux respect. Cet îlot est couvert des débris du couvent de Cordeliers qui s’y établit, dit le registre de paroisse de Bréhat, en 1434, qui vit dans ses murs un chapitre général de l’ordre en 1437, et envoya une colonie fonder le couvent de Morlaix en 1456. On aperçoit sur le sol les traces des cellules de ce pénitencier qui reçut plusieurs coupables fameux, tant ecclésiastiques que laïques ; tout près, un énorme rocher porte encore le nom de la Prison. Le port et la pêcherie, établis par les religieux de St-François, n’ont pas tout-a-fait disparu, non plus que les vastes jardins, le belvédère et les traces du calvaire qui, du sommet d’un roc élevé, planait sur ces mers fécondes en naufrages. — Les bâtiments du XVème siècle reposent sur une épaisse couche de briques et d’ardoises qui atteste l’importance des bâtiments des Vème et VIème siècles. Ce sont les seules reliques qui subsistent de ce premier berceau de la civilisation dans ces contrées, placé au milieu d’inextricables écueils, sans doute pour le mettre à l’abri de la violence qui régnait alors en souveraine et sur terre et sur mer. Du lierre, quelques figuiers sauvages et une excellente moutarde qui se renouvelle d’elle-même, c’est tout ce qui reste de la verdure qui valut son nom à ce coin de terre jadis si riche en végétation, et où l’on ne vient plus chercher que quelques misérables pommes de terre. Nous ajouterons, pour les archéologues, que pas une des nombreuses tuiles que nous avons extraites des décombres ne portait de crochets ; quelques-unes étaient vernies en couleur verte, et beaucoup faites de vase grise, mais fort dures] ; ces moines qui n'étudient plus, et qui vivent dans le pays comme les loups dans les bois. Le fils du roi ou du chef lève une armée et jure de les exterminer jusqu’au dernier. Le châtiment ne se fait pas attendre, et, du haut de la potence, l’abbé impie se vante de ses forfaits et appelle tous les fléaux sur la Basse-Bretagne.

Ce chant, d’une sombre énergie, d’un caractère presque sauvage, est-il le récit plus ou moins altéré de la subite disparition de la première abbaye du comte Alain ? St-Rion, que le poëte populaire a pu confondre avec une île très-voisine et beaucoup plus célèbre, a-t-elle été réellement témoin des crimes et du châtiment racontés dans le gwerz de ces contrées ? Cette fois encore, la mémoire du peuple vient-elle combler une lacune historique ?

Ce qui nous paraît certain, c’est que l’indignation du poëte est trop vraie, et trop précis sont les noms et les faits qu’il invoque, pour qu’il n’y ait là qu’une simple fiction : or, aucune trace d’une autre catastrophe semblable ne se découvre dans l’histoire du Goëllo. Celle de la ballade est très-voisine de la fin de St-Rion , puisqu’il s’agit encore de « l’archevêque » de Dol. Enfin, les aveux de Beauport nous apprennent que longtemps personne ne voulut habiter cette île : n’était-ce pas par suite de cette « malédiction de Dieu, des hommes et des animaux », invoquée par l’archevêque du haut de son trône pontifical ? Ce « fils du chef supérieur ou du roi » (mab er roué), qui vient venger la société et la religion outragées, ne ressemble-t-il pas étrangement à ce « fils du comte » qui reprend, sans en expliquer les motifs, tous les biens concédés à St-Rion, mais pour les remettre aussitôt à une abbaye nouvelle, placée en face des ruines de l’ancienne, comme l’expiation devant le crime ?…

II.

I. Fondation dans l’Ile St-Rion.

Charte entre 1184 et 1189 : " In nomine sancte et individue Trinitatis utile est scribi quod non convenit oblivisci. Notum sit omnibus veritatis testibus tam presentibus quam futuris, quod ego Alanus Henrici comitis filius, assensu P. uxoris mee, Ste. et Con. fratrum meorum, baronumque meorum consilio, edificavi abaciam juxta regulam S. Augustini in insula quam vocant Guirvinil, ad honorem S. Rionis, pro salute animarum patris ac matris mee et predecessorum meorum , et pro salute anime mee ; canonicis ibidem servientibus Deo liberam concedens electionem, meo meorumque tamen successorum sano proveniente consilio. Predicte vero abacie sustinende concessi in Plohozec-Goilou villam Buron et molendinum et campum Marie, et decimas meas, et avenam meam totam, et lanam arietum meorum, et nemus Durant, et salagium, et jura mea siccarum de Plohozec et de Keriti ; et in Plohozec homagium Morvani filii Guehenec, et ecclesiam de Keriti cum pertinenciis suis, et ecclesiam de Lanneez cum pertinenciis suis, et in Penpol minagium frugum et consuetudinem salis et piscium ; et in Castro Audreni decimas molendinorum meorum ; et in Plevara molendinum canum, et totum feodum Oreguen de Mazeriis. Et, tactis sacrosanctis Euvangeliis dedi eis ad protectionem et tutelam tantum terre quantum mare desiccat circa predictam insulam. Et insuper concessi eis ecclesiam Omnium Sanctorum de Waltem cum pertinenciis suis in puram elemosinam. Testibus his G. Briocensi episcopo ; G. Trecorensi episcopo ; et R. abbate de Begar ; et M. abbate Sancti Albini ; et Johe abbate de Coatmoloen ; et L. abbate Sancte Crucis ; et domino Willelmo de Fulgeriis, et Herveo clerico, et pluribus aliis clericis et laicis. Quod ut ratum sit et cognitum scripto meo sigilli mei munimine roboravi " (Arch. des C.-du-N., aujourd'hui Côtes-d'Armor — D. M., I, 732).

 

II. Confirmation des privilèges de St-Rion.

Note : Cette charte fut présentée, en 1219, par les moines, comme un objet curieux, à Rainulf , qui venait d’être élu évêque de Cornouailles, et qui visitait l’abbaye par lui qualifiée « dilectam nobis valde ». Le religieux qui la tenait la laissa tomber et le sceau se brisa. L’évêque atteste ce fait : le chambellan du duc de Bretagne, qui était aussi sénéchal du pays de Tréguier, en fut témoin et apposa son sceau à la charte mutilée ; il en fut de même du scholastique de Quimper qui accompagnait l’évêque.

1189 : " Notum sit omnibus tam presentibus quam futuris, quod ego, Alanus Henrici comitis filius, recepi in protectione mea omnia que ad S. Rionem spectare noscuntur, terram, homines, alia jura sua, et dona que ab antecessoribus meis et ab aliis hominibus in elemosinam predicto S. Rioni et fratribus illius loci data sunt et danda ; et concessi eis homines quos aliunde adduxerint. Preterea donavi S. Rioni et concessi, amore Dei et caritatis intuitu, quantum terre remanet post maris retractionem circa insulam S. Rionis pro territorio, prestito Dei ad Ewangelia saeramento, quod pro posse meo insulam et totum territorium defenderem, et hoc primus juravi. Alanus filius Urvoy Rufi, Herveus clericus, Willelmus de Filgeriis, Boserus filius Johannis, Henricus filius Alani, Teren, prepositus de Lanwollon, Glemarec filius Walteri , Dimanac, et Oliverius filius Radulfi, Gaufridus filius Walteri, Dimanac, et Oliverius filius Radulfi, Gaufridus filius Alfredi, domina Petronilla uxor domini Alani, Alienor sponsa domini Conani, et alii multi juraverunt. Et ut hoc donum ratum permaneat, illud nostri sigilli munimine roboravimus et nostro scripto confirmavimus. Carta ista facta fuit opido eo anno quo rex Ricardus promotus fuit in regem ". (D. Mor., I, 844).

 

III. Bulle d’Innocent III confirmant les biens et les privilèges de St-Rion.

Note : Le titre original n’existe plus ; mais une copie authentique de 1415, que possèdent les Archives des Côtes-du-Nord, nous a permis de corriger la leçon de D. Morice, dont les noms de lieux surtout sont pour la plupart défigurés. Cette copie fut délivrée par l’official de Tréguier à Jean, abbé de Beauport, « propter guerrarum et viarum pericula », en présence de Nicolas Etienne, d’Alain Etienne (de Morlaix) et de Guillaume Henri, tous chanoines de Tréguier.

1198 : " Innocencius, episcopus servus servorum Dei, dilectis filiis Guillelmo, Abbati Sancti Rionis in insula Karoennes, suisque fratribus tam presentibus quam futuris regularem vitam processis, in perpetuam rei memoriam religiosam vitam eligentibus apostolicum convenit adesse presidium, ne forte cujuslibet temeritatis incursus aut eos a proposito revocet, aut robur (quod absit) sacre religionis infringat. Qua propter, dilecti in Domino filii, vestris justis postulationibus clementer annuimus et prefatam ecclesiam Sancti Rionis de insula in qua divino mancipati estis obsequio, sub beati Petri et nostra protectione suscepimus, et presentis scripti privilegio communimus, in primis siquidem statuentes ut ordo canonicus qui secundum Deum et beati Augustini regulam atque institutionem fratrum Sancti Victoris in eodem loco institutus esse dignoscitur, perpetuis ibidem temporibus involabiliter observetur. Preterea quascumque bona eadem in presenciarum juste et canonice possidet, aut in futurum concessione pontificum, largicione regum vel principum, oblatione fidelium, seu aliis justis modis, instante domino, poterit adipisci, firma vobis vestrisque successoribus et illibata permaneant, in quibus hec propriis duximus exprimenda vocalibus, locum ipsum in quo ecclesia ipsa fundata est cum omnibus pertinentiis suis, ecclesiam de Brehat, ecclesiam Binivet, ecclesiam de Lannevet, ecclesiam de Penros, ecclesiam de Languinech, ecclesiam de Queriti cum earum pertinentiis, que omnia sunt in diocesi Dolensi, capellam Sancti Predpreali, capellam Sancti Rionis in Plerivou, domum Sancti Machairi [Note : En Mohon, diocèse de Dol] cum omnibus pertinentiis suis ; in Anglia vero universe ecclesie de Socca de Waltam, videlicet ecclesiam Omnium Sanctorum cum pertinentiis suis, ecclesiam Bernoloby cum pertinenciis suis, ecclesiam de Bellespi cum pertinentiis suis, ecclesiam de Hautecleve cum pertinentiis suis, ecclesiam de Briscaleya cum pertinentiis suis, ecclesiam de Hanardebbi cum pertinentiis suis, ecclesiam de Besleby cum pertinentiis suis, ecclesiam de Hautecleve cum pertinentiis suis, ecclesiam de Ravandala cum pertinentiis suis [Note : Ces paroisses étaient situées dans le diocèse de Lincoln : on les voit toutes autour du manoir de Ravendale, qui appartenait aux seigneurs de Goëllo par suite de donations de Guillaume-le-Conquérant : les cartes de Cambden mentionnent Waltram, Briggeflay, Belesbi, Ravendale, Hawardby, Bosbye, Hakecliff et Barnaby. (V. les chartes de Beauport, N° I, II, III, IV)] ; insulam de Biniwit ; minagium costumam salis et piscium de Penpul, in Queriti salagium et fenagium, villam Alei cum pertinentiis suis, decimas ferragii, et plateam cum suo orto, in Plohedec terciam partem decimarum, villam Buron, molendinum comitisse, molendinum novum, campum Marie, terram que vocatur Corveia, avenagium, lana arietum comitis, nemus Durandi, fenagium in Ploeaza , plateam cum suo orto, in Tremeven terram Morini , in Tremele Gozolin tertiam partem decimarum, in Tremezar Porzic minam frumenti, decimas molendinorum de Castro Audronei fullonicorum videlicet et aliorum, in Ploevara molendinum Canum. Sane novalium vestrorum que propriis manibus aut sumptibus colitis, sive de nutrimentis animalium vestrorum, nullus a vobis decimas exigere vel extorquere praesumat. Liceat quoque vobis clericos vel laicos e seculo fugientes liberos et absolutos ad consionem vestram recipere, et eos absque contradicione aliqua retinere. Prohibemus insuper ut nulli fratrum vestrorum, post factam in ecclesiam vestram professionem, fas sit absque abbatis sui licencia de eodem loco dicedere, dicedentem vero absque communium litterarum caucione nullus audeat retinere. Cum autem generale interdictum terre fuerit, liceat vobis in ecclesiam vestram, clausis januis, exclusis excommunicatis et interdictis, non pulsatis campanis, subpressa voce divina officia celebrare. Crisma vero, oleum sanctum, consecrationes altarium seu basilicarum, ordinationes canonicarum seu clericorum vestrorum qui ad sacros ordines fuerint promovendi, a diocesano episcopo gratis vobis et fine pravitate aliqua precipimus exhiberi. Sepulturam præterea ipsius loci liberam esse decernimus, ut eorum devocioni extreme voluntati qui se illic sepeleri deliberaverint, nisi forte excommunicati vel interdictisint, nullus obsistat, salva tamen justitia illarum ecclesiarum a quibus mortuorum corpora assumuntur. Obeunte vero te nunc ejusdem loci abbate, vel tuorum quolibet successore, nullus ibi qualibet surrepcionis astucia seu violencia preponatur, nisi quem fratres communi consensu, vel fratrum major pars consilii sanioris, secundum Dei timorem beati Augustini regulam providerint eligendum. Decernimus ergo ut nulli omnino hominum liceat prefatam ecclesiam temere perturbare, aut ejus possessiones auferre, vel abblatas retinere, minuere, seu quibuslibet vexationibus fatigare, sed omnia integra observentur eorum pro quorum gubernacione ac sustentacione concessa sunt usibus omnimodis profutura, salva Sedis Apostolice autoritate et diocesani episcopi canonica justicia. Si qua igitur in futurum ecclesiastica secularis ve persona hanc nostre constitucionis paginam sciens, contra eam temere venire temptaverit, secundo tertiove commonita, nisi reatum suum congrua satisfactione correxerit, potestatis honorisque sui dignitate careat, reamque se divino judicio existere de perpetrata iniquitate cognoscat, et a sacratissimo corpore ac sanguine Dei et Domini Redemptoris Jesus Christi aliena fiat, atque in extremo examine districte ultioni subjaceat. Cunctis autem eidem loco sua jura servantibus sit pax Domini nostri, quatenus et hic fructum bonœ actionis percipiant, et apud districte…. premia eterne pacis inveniant. Amen, amen. Datum Rome apud Sancti Petrum per manum Reinaldi, Domini Pape Notarii vicem agentis cancellarii, IV kal. maii, indictione primo, Incarn. Dom. anno M° C° XC° VIII°, pontificatus vero D. Innocentii pape. . . anno primo ". (Arch. des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor. — D. Mor., I, 732).

 

IV. Jugement de trois abbés relativement à Bocqueho.

1198 : " Omnibus in Christo fidelibus presentibus et futuris presentes litteras visuris et audituris, G. de Begar, et I. Sancte Crucis de Guengampo et I. de Cotmaloan, abbates, salutem in Domino : cum controversia, que inter Nicolaum, sacerdotem de Ploeadgat, et Inisen, sacerdotem de Botgadou, vertebatur super capella de Botgadou [Note : Puisque la paroisse actuelle de Bocqueho n’était encore qu’une chapelle dépendant de Plouagat, il semblerait que le centre de population groupé autour d’elle n’était pas très-considérable. Nous avons constaté que, vers le même temps, le littoral avait plus d’habitants que de nos jours ; le rapport entre la population du littoral et celle de l’intérieur existait donc dès-lors à peu près comme aujourd’hui, ce qui s’explique facilement, puisque la Petite-Bretagne s’était repeuplée surtout par des colonies venues de par-delà la Manche], nobis a domino papa fuisset commissa, post diuturnam contentionem inter dictos sacerdotes pacem formavimus et fecimus in hunc modum : videlicet quod memoratus I. pro capella predicta memorato N., tanquam speciali persone de Ploadgat, XX denarios ad Pasca, XX ad festum Omnium Sanctorum, XX ad Natale Domini persolvat annuatim ; et insuper sinodum et procuracionem, tali pacto quod dictus I. de decimis et aliis proventibus que adquiri potuerint, eciam partem obtineat et de universis calumpniis si forte emerserint ponat terciam partem expensione ; Nicolaus vero duas partes habeat et ponat duas partes expense prenotate : pacis tenorem juraverunt se imperpetuum observaturos apud ecclesiam Sancti Brioci, et ut hoc firmiter et inconcusse observetur in posterum, sigillorum nostrorum imposuimus testimonium et munimen, omnes illos auctoritate domini pape vinculo anatematis innodantes qui hanc pacem presumpserint perturbare ; testibus his, Willelmo abbate Sancti Rionis, Willelmo cantore, 0. archidiacono, E. Harlam [Note : Le mot Harlam n'est peut-être autre que Herlant, qui devrait être suivi du mot canonico] Briocense, A. filio Males, G. filio Camiou, I. presbitero de Lannidic, M. presbitero de Plestan ; factum est hoc anno ab Incarnatione Domini M° C° nonagesimo VIII° " (Arch. des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor).

 

V. Confirmation de la bulle d’Innocent III.

1198 : " Innocentius, episcopus, servus servorum Dei, dilectis filiis abbati et canonicis Sancti Rionis de insula, salutem et apastolicam benedictionem : justis petentium desideriis dignum ....... facilem prebemus consensum et vota que orationis tramite non discordant effectu prosequente complere. Espropter, dilecti in domino filii, vestris precibus inclinati villam Buron cum pertinenciis suis, decimas molendinorum de Castro Audronii fullonicorum videlicet et aliorum et ..... sicut ea juste ac pacifice possidetis vobis et per ......... nostre auctoritatis apostolice confirmamus et presentis scripti patrocinio communimus ; nulli autem omnino hominum liceat hanc paginam nostre confirmacionis infringere vel ei ausu temerario contraire. Si quis autem hoc attemptare presumpserit, indignationem omnipotentis Dei et beatarum Petri et Pauli apostolorum et nostram se noverit incursurum. Datum Romæ apud S. Petrum, kalendas junii, pontificatus nostri anno primo " (Arch. des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor).

 

VI.

Saint-Rion : les moines de l'île verte (Bretagne). Partie 1.

 

Saint-Rion : les moines de l'île verte (Bretagne). Partie 2.

(J. Geslin de Bourgogne et A. de Barthélemy).

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