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ABBAYE DE RHUYS

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DESTRUCTION DE L'ABBAYE DE RHUYS

Les pirates normands avaient à diverses reprises ravagé la Bretagne, mais en 919 ils la ruinèrent complètement. Cette invasion, la plus épouvantable de toutes celles que l’histoire de Bretagne ait enregistrées, fit table rase dans le pays. Pas un prince, pas un chef de guerre, ne put tenir tête à l’orage : villes, églises, châteaux, monastères, tout fut livré au pillage et aux flammes. Les comtes, les mactyerns, cherchèrent un refuge en France, en Bourgogne, en Aquitaine, et jusqu’en Angleterre. Le pauvre peuple fut décimé et le reste réduit en esclavage.

Dans le diocèse de Vannes en particulier, le fer et le feu se promenèrent depuis la Vilaine jusqu’au Blavet et au delà. La ville épiscopale fut brûlée, l’évêque Bili tomba sous le glaive des barbares, et fut honoré comme martyr le 23 juin.

Dès le commencement de l’invasion, Daoc ou Daioc, abbé de Rhuys, cacha sous l’autel de son église et dans le tombeau du fondateur, huit des principaux ossements de saint Gildas, puis prenant le reste de ses reliques, avec celles de saint Patrice, de saint Alban et de sainte Brigide, et autres, et aussi les vases sacrés, les ornements et les manuscrits du monastère, il s’enfuit à Vannes avec ses religieux. Là, le clergé lui confia les reliques vénérées de saint Patern. Il passa ensuite au monastère de Saint-Sauveur de Locminé, où l’abbé Taneth se joignit à lui avec sa communauté, et tous se dirigèrent vers le centre de la France.

Après de longues pérégrinations ils arrivèrent dans le Berry, et s’arrêtèrent au bourg de Déols, non loin de l’endroit où devait s’élever plus tard la ville de Châteauroux, dont Déols forme aujourd’hui un des faubourgs. Ce lieu de Déols, alors fort important, donnait son nom à une puissante famille qui dominait sur presque tout le bas-Berry. La principauté déoloise appartenait alors à Ebbe le Noble, qui avait succédé en 910 à son père Laune, vers l’époque où son oncle Géronce devenait archevêque de Bourges.

Daoc, pour exciter l’intérêt et la bienveillance d'Ebbe, lui exhiba les précieuses reliques nommées plus haut, et même, paraît-il, la coupe dans laquelle Jésus-Christ, au jour de la Cène, avait changé le vin en son sang. — D’où lui venait ce trésor ? Etait-il authentique ? — On l’ignore. Ceci se passait vers 925.  

Ebbe, qui avait fondé, en 917, au bourg même de Déols, le grand monastère de Notre-Dame, accueillit fort bien les moine s bretons, leur donna de quoi subsister, et leur procura une résidence provisoire, en attendant la construction d’un couvent définitif. Il y avait alors, à l’ouest de Déols, sur les bords de l'Indre, un petit bois, dans lequel avait été fondée jadis une église ou une chapelle en l’honneur de la sainte Vierge, et tout à côté quelques habitations, autrefois occupées par des ermites, mais alors vacantes. Le prince fit promptement réparer l’église et les maisons, et y déposa avec la plus grande vénération possible les saintes reliques venues de Bretagne. (Gallia Christiana, II, 154).

Deux ans après, en 927, Ebbe obtint la confirmation royale pour son grand monastère de Notre-Dame de Déols et commença la construction du couvent des Bretons, dans une île de l'Indre, à l’abri des attaques des brigands. La nouvelle abbaye devait porter les noms de Saint-Sauveur et de Saint-Gildas, pour rappeler la double provenance de ses habitants. Elle n’était pas encore tout à fait terminée quand Ebbe le Noble fut mortellement blessé à Orléans, en 935, en poursuivant les Hongrois.

Son fils Raoul le Large, fidèle à ses recommandations, acheva l’oeuvre, et y plaça les religieux vers 937, avec toutes les reliques déjà mentionnées. Peu-après, il commença, au sud de la nouvelle abbaye, sur la rive gauche de l'Indre, la construction de son château particulier, appelé de son nom Château-Raoul, autour duquel s’est groupée la ville de Château-Raoul, dite aujourd’hui Châteauroux.

En 947, « Laune de Déols, archidiacre de Bourges, voulant favoriser la ville d'Issoudun, pressa son neveu Raoul le Large d’agir auprès de l’abbé Daoc, qui gouvernait encore le monastère de Saint-Sauveur et de Saint-Gildas, et de le déterminer à tirer de cette maison les reliques de saint Patern, pour les transporter à Issoudun. Cette proposition ne pouvait être du goût des Bretons : elle allait leur enlever un des plus précieux joyaux de leur trésor ; et pourquoi ? Pour doter un nouveau monastère, qui serait tout peuplé de moines francks » (La Borderie, Histoire de Bretagne, II. 509). Il y avait une autre raison plus grave : le corps de saint Patern appartenait à l'église de Vannes, et les moines en avaient seulement le dépôt. Pour colorer, et pallier en quelque sorte, le grave préjudice causé aux Bretons, on voulut transférer aussi à Issoudun l'abbé Daoc. Celui-ci, vieux déjà, n’avait rien à refuser à ses bienfaiteurs ; il se laissa faire, quitta non sans peine ses compatriotes, et alla s’établir à Issoudun, à 26 kilomètres de Châteauroux, avec le chef et les autres reliques de saint Patern.

« Il existait, dit M. Chenon, dans un faubourg de cette ville, sur la rive gauche de la Théole, un ancien monastère dédié à saint Martin, mais alors à demi-ruiné et abandonné. Raoul le Large le fit rebâtir, le consacra à Notre-Dame, et y installa l’abbé Daoc, qui déposa avec vénération dans l’église qui en dépendait les reliques de l’évêque de Vannes. Dès lors le faubourg prit le nom de Saint-Patern, qu’il garde encore aujourd’hui ». (Société Archéologique d'Ille-et-Vilaine, XVII. 156).

Très peu de temps après la translation de saint Patern, l’abbé Mocius d'Issoudun obtint les reliques de saint Patrice et de sainte Brigide, en sorte que l’église abbatiale de Saint-Gildas de Châteauroux ne conserva plus guère que les ossements de son saint patron.

« Malgré le départ de l’abbé Daoc pour Issoudun, l'abbaye de Saint-Gildas, où était demeurée sans doute la majeure partie de ses compagnons, continua à prospérer, grâce à la générosité des princes de Déols. Après Raoul le Large, mort en 952, son fils et successeur Raoul II, dit le Chauve, fit en effet de nouvelles donations. Ce prince, qui vécut jusqu’en 1012, et enterra les derniers survivants des réfugiés de Rhuys, put apprendre avant de mourir que Geoffroy I, duc de Bretagne, se disposait à reconstituer, en l’an 1008, l'abbaye de Saint-Gildas de Rhuys au lieu même où pour la première fois elle avait pris naissance. Le fils de Raoul II, Eudes l'Ancien, ne fut pas moins libéral que son père. Ayant été surpris en mer par une violente tempête, probablement à son retour de Jérusalem, où il se trouvait en 1027, il se recommanda à l’intercession de ses saints, et une fois hors de danger et rentré à Châteauraoul (aujourd'hui Châteauroux), il alla rendre grâces à Dieu dans l’abbaye de Saint-Gildas ; puis, pour manifester sa reconnaissance, il donna aux religieux de nouveaux privilèges, et de nouvelles propriétés, affranchit les terres de Saint-Gildas et les personnes qui y demeuraient de toutes redevances à son égard, et voulut même que les habitants du quartier ne reconnussent plus d’autres seigneurs que l’abbé et ses religieux. Grâce à ces privilèges, il ne tarda pas à se former autour de l’abbaye de Saint-Gildas un bourg assez considérable, qui devait plus tard, comme celui de Déols, constituer l’un des faubourgs de la ville de Châteauroux, alors en voie de formation » (Chenon, ibid).

Un siècle après, on reconstruisait l'église abbatiale de Saint-Gildas. Elle fut consacrée le 25 mars 1128, jour de l'Annonciation, par Vulgrin , archevêque de Bourges. « Ce fut l’occasion d’une grande et solennelle cérémonie. D’après frère Jean de la Gogue, prieur de la maison, Gérard, évêque d'Angoulême et légat du pape Honorius II, les évêques de Poitiers, de Saintes et de Clermont, l’archevêque de Tours et ses suffragants, et cinquante-sept abbés assistèrent à cette consécration. Elle fut suivie d’un concile, qui fut présidé par le légat Gérard, et qui se tint dans le monastère même de Saint-Gildas » (lbid.).

L’abbaye était alors en pleine prospérité. Elle avait déjà commencé à essaimer et à fonder çà et là des prieurés. Elle eut ainsi successivement des colonies à Villedieu-sur-Indre, à Taunay, au Pin sur la Creuse, à Saint-Maur-sur-Indre, à Saint-Marcel près Argenton, à Niherne, etc..

Au mois de juin 1590, M. d'Arquian, partisan d'Henri IV, occupait Châteauroux ; le maréchal Claude de la Châtre, zélé ligueur, mit en passant une petite garnison dans l’abbaye de Saint-Gildas. Les huguenots, au nombre de cinq ou six cents hommes, vinrent avec deux canons assiéger le monastère, et s’en emparèrent de vive forcé, y en causant des dégâts considérables.

« Après le rétablissement de la paix, continue M. Chenon, l’abbé commendataire de Saint-Gildas, François de Chènevières, s’occupa de réparer les maux causés par la guerre. Il fit restaurer la grande église, le logis abbatial et aussi la petite chapelle de l’hôtel-Dieu. Mais l’abbé de Chènevières, qui mourut le 26 juillet 1616, ne travaillait ni pour lui, ni même pour ses successeurs. En effet, les richesses de l'abbaye de Notre-Dame de Déols et celles de Saint-Gildas avaient tenté la cupidité d'Henri II de Bourbon, prince de Condé et duc de Châteauroux, et déjà ce prince mettait tout en oeuvre pour en obtenir la sécularisation.

Il y réussit en 1622. Le pape Grégoire XV, par une bulle donnée à Rome dès le 4 des calendes de janvier, agréée par Louis XIII le 24 août suivant, concéda au prince de Condé le droit d’incorporer à son domaine de Châteauroux les biens des deux abbayes, à la condition d’établir une collégiale, avec un abbé et douze chanoines et une dotation de 6.000 livres, et de plus un collège de Jésuites avec une dotation de 4.000 livres.

Ces compensations étaient bien insuffisantes, et de plus Henri de Bourbon se montrait peu disposé à les accorder. Aussi, lorsqu’en 1627, les bulles pontificales et l'ordonnance royale qui les approuvait furent présentées au Grand Conseil, pour être vérifiées et enregistrées, il fallut deux injonctions successives du roi, pour aboutir enfin, le 16 mars 1628, à l’enregistrement pur et simple. A la suite de cet acte, le prince de Condé s’empara définitivement des biens des deux abbayes, tout en n’exécutant que d’une manière très imparfaite les conditions qui lui avaient été imposées. (Il laissa dans la pauvreté les chanoines établis par lui à Châteauroux, et au lieu du collège, il fonda deux chaires de théologie chez les Jésuites de Bourges).

C’est de cette façon lamentable que périt l'oeuvre des moines bretons de Rhuys et des princes de Déols. Une fois le monastère sécularisé et fermé, tout devait disparaître peu à peu avec le temps. Des bâtiments du monastère il reste au début du XXème siècle bien peu de chose. L’abbaye était, comme on l’a vu, située dans une île. Quelques pans du mur d’enceinte, qui bordait la rivière, et plusieurs de ses tours existent encore, ainsi qu’une partie du cloître et des bâtiments y attenant. Ces derniers servent au début du XXème siècle de logement à divers habitants du faubourg. La fuie subsiste presque en entier dans la rue du Colombier, seulement la partie supérieure a été coupée en plan incliné et couverte d’un toit. Enfin de l’église, il ne reste au début du XXème siècle que deux petits chapiteaux romans sans intérêt. Le faubourg de Saint-Gildas lui-même a changé de nom ; il s’appelle aujourd’hui le faubourg de Saint-Christophe, du nom de l’église paroissiale ». (Société Archéologique d'Ille-et-Vilaine, 1884. 147..).

Quant aux reliques de saint Gildas et de saint Alban, on ignore ce qu’elles sont devenues. Si elles ont subsisté jusqu’à la Révolution, elles ont probablement péri pendant la tourmente, car on ne les signale nulle part aujourd’hui.

Les reliques de saint Patern, évêque de Vannes, et celles de saint Patrice et de sainte Brigide d'Irlande avaient été déposées, comme on l’a dit, dans l’église du monastère de Notre-Dame à Issoudun. Cette église, située dans le faubourg de Saint-Patern, se trouvant exposée aux ravages des barbares, les reliques furent transportées, vers 996, dans une maison de la ville close, et peu après dans le château de la cité. Les moines les y suivirent, et leur nouvel établissement, appelé le monastère fortifié, monasterium turritum, conserva le vocable de Notre-Dame, et devint Notre-Dame-du-Château.

C’est là que les reliques de saint Patern et de ses compagnons restèrent pendant plusieurs siècles. Le 12 mars 1186, Gérald La Fuille, abbé de Notre-Dame d'Issoudun, par délégation de Henri de Sully, archevêque de Bourges, retira les reliques de saint Patern de leur vieille châsse, ex veteri capsâ, pour les enfermer dans un tombeau en pierre ; le chef fut placé dans un reliquaire à part, pour être exposé à la vénération des fidèles le 4ème dimanche de Carême. 

C’est alors, ou peu de temps après, que Guéhenoc, évêque de Vannes, recouvra une grande partie des reliques de saint Patern, suivant une note de cette époque, conçue en ces termes : « Une très grande partie des ossements de saint Patern et son bras, qu’un moine originaire du pays de Vannes, fréquemment averti par le bienheureux évêque, pendant son sommeil, nous apporta d'Issoudun, où repose le reste de son corps ». Ces reliques, rapportées à Vannes, furent conservées à la cathédrale, et furent ensuite exposées quatre fois par an à l’église Saint-Patern, pour le pèlerinage du Tour de Bretagne. 

Le 20 mars 1513, à Issoudun, la châsse en pierre de saint Patern fut élevée sur quatre piliers derrière le grand autel de l’abbaye, et un procès-verbal de la cérémonie fut dressé à la requête de F. Pierre Guillemet, prieur claustral.

En 1626, une visite générale des reliques conservées à Notre-Dame fut faite par Mgr Roland Hébert, archevêque de Bourges, en présence de l'abbé François-Jacques Touchet. Le procès-verbal rédigé à cette occasion constata que le chef de saint Patern était toujours conservé dans un reliquaire à part, et que ses autres reliques étaient déposées dans un cercueil en pierre élevé derrière le maître-autel, et renfermées dans une châsse en bois, avec un petit parchemin portant ces mots : Reliquiœ Sancti Paterni episcopi Venetensis, cujus transitus XVIII kal. maii, translatio vero à Britannia Exolduno IX kal. octobris celebratur.

L’archevêque ouvrit aussi un cercueil de pierre, placé derrière l’autel de saint Pierre et de saint Paul, de la même église abbatiale, et qui passait pour contenir les reliques de saint Patrice et de sainte Brigide. Il le trouva rempli de gros et petits os, appartenant à deux corps différents, et sans aucun procès-verbal.

Plus tard, entre 1689 et 1720, une partie des reliques de l’évêque de Vannes fut donnée à l’église prieurale et paroissiale du faubourg de Saint-Patern, qui dépendait de l'abbaye de Notre-Dame. L’église collégiale et paroissiale de Saint-Cyr d'Issoudun en reçut aussi quelques fragments, ainsi que des reliques de sainte Brigide.

A la Révolution, les reliques des saints bretons furent dispersées ou détruites, et si quelques débris de la tête et du bras de saint Patern ont été sauvés alors, ils sont aujourd’hui perdus.

Quant aux sanctuaires, l'abbaye de Notre-Dame, après avoir servi à des usages plus que profanes, fut affectée à l’installation d’un collège, puis démolie en 1856, pour faire place au palais de justice actuel ; l’église et le prieuré du faubourg de Saint-Patern, vendus pendant la Révolution, ont été démolis vers 1858 ; l’église de Saint-Cyr existe toujours et sert d’église paroissiale aux habitants du centre de la ville, mais elle a été bien modifiée vers 1877. Le sépulcre en pierre de saint Patern appartient aujourd’hui à un particulier d'Issoudun. (E. Chenon. XVII. 172). (extrait des notes de J.-M. Le Mené).

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