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LES ORIGINES DE LA VILLE-ÈS-NONAIS

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La partie de l'ancienne paroisse de Saint-Suliac, formant un promontoire baigné par les eaux de la Rance et terminé par le petit hâvre de Port-Saint-Jean, portait au XIIème siècle le nom de Stablon ; on y voyait, en 1160, deux établissements religieux, l'Aumônerie ou hôpital de Saint-Jean-de-Stablon, « eleemosyna de Stablon » appartenant aux chevaliers Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem , et l'église de Sainte-Marie de Stablon « ecclesia sanctœ Mariae de Stablon » entre les mains des religieuses et des frères de l'abbaye de Saint-Sulpice-des-Bois, près Rennes (D. Morice, Preuv. de Bret. I. 638 — Arch. départ. d'Ille-et-Vilaine, 27. H. 1).

Aujourd'hui le Port-Saint-Jean occupe l'emplacement de l'ancien hôpital de Stablon et l'église paroissiale de la Ville-ès-Nonais s'élève sur les fondations du prieuré de Notre-Dame-de-Stablon.

Mais ce dernier nom a complètement disparu du pays. Lorsqu'en 1161, le pape Alexandre III prit sous sa protection spéciale l'église que les religieuses de Saint-Sulpice possédaient en Saint-Suliac, celles-ci s'établirent si bien ans ce canton qu'elles donnèrent leur nom au village qu'elles habitaient : on appela ce village la Ville-aux-Nonnes, « Villa Monialium », dans la langue d'alors la Ville-ès-Nonnains, nom ridiculement défiguré de nos jours en celui de la Ville-ès-Nonais ; l'église de Notre-Dame-de-Stablon perdit elle-même sa primitive dénomination et devint simplement la chapelle priorale de la Ville-ès-Nonnains ; et lorsque plus tard, en 1646, l'archidiacre Jean de Taillefer y fit une fondation en l'honneur de sainte Anne, cette chapelle ne fut plus connue que sous le nom de Sainte-Anne.

Mais retournons aux origines de la Ville-ès-Nonnains.

Quand, au commencement du XIIème siècle, le bienheureux Raoul de la Fustaye fonda dans les profondeurs de la forêt de Rennes l'abbaye de Saint-Sulpice-des-Bois, il donna à ce nouveau monastère la règle qu'il avait apprise de son vénérable maître Robert d'Arbrissel ; c'est-à-dire qu'il fit construire deux monastères voisins l'un de l'autre : l'un de femmes, gouverné par une abbesse supérieure de tout l'établissement, et l'autre d'hommes, soumis aux religieuses il voulait par là perpétuer le souvenir des sentiments d'obéissance manifestés par S. Jean l'Evangéliste à l'égard de la Très-Sainte Vierge retirée chez lui.

« La règle qu'il donna aux femmes fut celle de S. Benoît. Il y ajouta des règlements qui portaient, entre autres choses, qu'elles ne rompraient le silence que dans le chapitre pour s'y accuser de leurs fautes, et dans le chœur pour chanter les louanges de Dieu ; qu'elles s'abstiendraient même de parler par signes, à moins que la nécessité ne les y obligeât ; qu'elles feraient elles-mêmes la cuisine ; qu'elles ne verraient personne de dehors, sans la permission de l'abbesse et sans témoins ; qu'elles ne sortiraient jamais du cloître ; que les prêtres n'entreraient jamais dans leur maison, non pas même pour administrer les derniers sacrements aux malades, mais que l'on apporterait les religieuses infirmes dans l'église pour les y recevoir ; qu'elles ne mangeraient point de viande , même dans leurs maladies ; qu'elles entreraient à l'église et en sortiraient toutes ensemble ; et qu'elles ne se plaindraient ni de la couleur ni de la qualité des étoffes dont on les habillerait » (D. Lobineau, Hist. de Bret.).

Quant aux hommes, ils devaient réciter l'office canonial, n'avoir rien en propre, se contenter de ce que les religieuses leur donneraient et ne point se mêler des affaires du siècle. Ils étaient les directeurs spirituels des religieuses qui restaient seules maîtresses du temporel. L'abbesse recevait la profession de foi des moines et ceux-ci faisaient vœu de lui obéir ; ils étaient obligés d'assister au chapitre général qu'elle tenait tous les ans, au mois d'août, et d'observer les règlements qu'elle y faisait ; ceux d'entre eux qui avaient des bénéfices rendaient compte des revenus à l'abbesse et lui remettaient, à la fin de l'année, ce qui leur restait, déduction faite de leur subsistance, pour être employé aux besoins de la communauté (Notice manuscr. sur S.-Sulpice-des-Bois. Archiv. dép. 27. H. 2).

Cette règle, quelque sévère qu'elle fût, attira de nombreux disciples jaloux de la mettre en pratique ; nos forêts se peuplèrent de monastères de ce genre ; dans les forêts de Brécilien, de Rennes et de Teillay, dans les solitudes de Lohéac et des bords de la Rance s'établirent des religieuses et des frères ; les prieurés de Thélouët, de Saint-Malo-de-Teillay, de Saint-Germain-des-Prés, de Saint-Grégoire en Miniac-Morvan et de la Ville-ès-Nonnains fleurissaient dès le milieu du XIème siècle, moins de cinquante ans après la fondation de la maison-mère ; et nous ne parlons que de notre diocèse actuel : dans une dizaine d'évêchés voisins des établissements semblables prospéraient en même temps ; Nantes en renfermait huit dans ses bois et dans ses îles, et deux autres s'élevaient au delà des mers, dans les grands ombrages de l'Angleterre.

Nous ignorons malheureusement quels furent les fondateurs du prieuré de la Ville-ès-Nonnains ; mais dès l'origine il s'y trouva des religieuses et des religieux selon la règle de Saint-Sulpice. Nous avons, en effet, un acte de partage fait, en 1294, par Etienne dit Salligot, prieur de la Ville-ès-Nonnains (« Stephanus dictus Salligot, prior prioratus de villa monialium de parrochia Sti Sulini ». Anciens Evêchés de Bretagne, III. 185) ; et l'année suivante, nous trouvons dans une autre charte que « le prior de la Ville-ès-Nonneins y apposa son scel » (« Stephanus dictus Salligot, prior prioratus de villa monialium de parrochia Sti Sulini ». Anciens Evêchés de Bretagne, III. 187).

Il y eut, en outre, des prieures de la Ville-ès-Nonnains jusqu'au siècle dernier ; mais nous croyons que depuis bien longtemps ces bénédictines de Saint-Sulpice n'habitaient plus leur monastère des bords de la Rance ; quant aux frères ou religieux qui les accompagnaient primitivement, ils disparurent tous vers la fin du XIVème siècle. Les déclarations du prieuré de la Ville-ès-Nonnains nous apprennent qu'il y avait une distinction à faire dans les héritages possédés en ce lieu par les religieuses : l'abbesse de Saint-Sulpice en avait une partie et la prieure de la Ville-ès-Nonnains avait l'autre portion. L'abbesse avait dans le village une maison avec cour et jardin, un baillage appelé le Fief de l'Abbesse, quelques terres et quelques dîmes. De son côté la prieure jouissait de la chapelle, de la maison voisine de cette église et appelée le Prieuré, d'un petit pourpris, d'un moulin à vent, du Fief de la Prieure avec une moyenne justice et d'une petite dîme.

Nous sommes portés à croire que ces deux domaines distincts de l'abbesse et de la prieure correspondaient aux deux monastères primitifs d'hommes et de femmes fondés à la Ville-ès-Nonnains. Au reste, même réunis, ces domaines ne formaient pas un grand bénéfice : vers 1730, ils n'étaient affermés que 800 livres.

Voici, à titre de curiosité , les noms de quelques prieures de la Ville-ès-Nonnains que nous avons retrouvés : Sœur Gervaise de la Chapelle (1411), — Sœur Guyonne Rabault (1560-1580), — Sœur Michelle de la Haye (1580), — Sœur Françoise de Froulay (1581-1599), — Sœur Jeanne Bouan (1599-1614), — Sœur Marguerite Le Marchant (1615-1640), — Sœur Marie de Bégaignon (1668-1707), — Sœur Jeanne-Thérèse Freslon de Saint-Aubin (1708-1712), — Sœur Pélagie d'Espinay de Vaucouleurs ; celle-ci prit possession du bénéfice le 5 mai 1712 et fut la dernière prieure titulaire (Archives départ. 27. H. 127 et 128. — Reg. des insinuat. ecclés. de Saint-Malo). En 1729 , la Ville-ès-Nonnains fut, ainsi que tous les autres prieurés non conventuels de Saint-Sulpice, réuni définitivement à la manse abbatiale, et son titre fut éteint : l'abbesse de Saint-Sulpice en administra directement les biens jusqu'à l'époque de la Révolution.

L'ancienne chapelle priorale de la Ville-ès-Nonnains n'existe plus ; elle était fort petite, et, devenue chapelle frairiale de la paroisse de Saint-Suliac, elle se trouvait insuffisante. On entreprit d'en construire une plus grande à côté, en 1846, et l'on choisit pour emplacement le champ du prieuré avoisinant le vieux manoir prioral. Sur les entrefaites, la Ville-ès-Nonnains fut érigée en paroisse, le 19 octobre 1847, et la nouvelle église fut bénite le 11 mai 1854 et placée sous le patronage de sainte Anne. Alors disparurent les derniers vestiges de l'antique sanctuaire de Notre-Dame de Stablon, et l'on perd dans le pays de plus en plus aujourd'hui le souvenir des bonnes religieuses qui donnèrent leur nom à la Ville-ès-Nonnains.

(abbé Guillotin de Corson).

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